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CHAPITRE II : ASPECTS QUANTITATIFS ET ORGANISATIONELS DU PROTEOME VACUOLAIRE

II. 2 - Comparaison des protéines majeures du cytosol et de la vacuole

Dans le but de déterminer l’origine des protéines présentes dans notre fraction enrichie en cytosole et identifiées dans la fraction soluble de la vacuole, les cartographies des protéomes solubles de la vacuole (Figure 23) et du cytosol (Figure 25) ont été comparées (Figure 27). Cette analyse montre clairement que les deux profils protéiques sont totalement différents, et la comparaison des spots identifiés montre que les protéines communes aux deux cartographies sont au nombre de 13 seulement. Peu d’entre elles figurent parmi les plus abondantes de la fraction cytosolique. On retrouve toutefois l’Annexine 1 (spot N° 107 de la cartographie du protéome soluble de la vacuole), très représentée dans le cytosol (spots N° 24, 25, 142, 144 à 147), une triosephosphate isomérase, peu présente dans la vacuole (spot N° 80), mais abondante dans la fraction cytosolique (spots N° 17, 18, 57, 97, 101, 102) ou encore une glutathion S-transferase (vacuoles : spot N° 77 ; cytosol : spots N° 19, 20, 102, 107). A l’inverse, la plupart ne correspond pas à des spots majoritaires de la cartographie du cytosol. C’est par exemple le cas de RGP1

Modif. de lipides 1% Trans. de signal / Régulation 7% Glycosyl hydrolase 1% Dégradation de prot. 13% Non classées 12% Autes 18% Synthèse de prot. 4% Metabolisme 29% Transport / Binding 1% Stress / protection 14%

Figure 26 : Catégories fonctionnelles représentées dans la fraction enrichie en cytosol. Toutes les

classes fonctionnelles précédemment mises en évidence dans la fraction soluble de la vacuole ont été retrouvées parmi les protéines identifiées à partir des électrophorèses bidimensionnelles. Les proportions relatives sont toutefois très différentes, certaines catégories principales de la vacuole (transporteurs, glycosidases) étant très minoritaires dans le cytosol.

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(Reversibly Glycosilated Polypeptide), identifiée dans les spots N° 27 et 142 de la cartographie du protéome cytosolique, et dans les spots 109, 116, 117 et 118 de l’analyse de la vacuole par IEF / SDS-PAGE. Une protéine de type 14-3-3 (vacuoles : spot N° 93 ; cytosol : spots N° 16, 76, 84), ou encore d’une aspartyl aminopeptidase (vacuoles : spot N° 190 ; cytosol : spots N° 78, 79) sont également très minoritaires dans le protéome cytosolique. Certaines protéines du cytosol semblent même être enrichies dans la vacuole. C’est tout particulièrement le cas de la subtilase TPPII (At4g20850), identifiée dans le spot N° 198 de la cartographie du cytosol (score MASCOT de 233, 5 peptides identifiés), et dans les spots N° 82, 120, 121, 137, 138, 139, 140 de la cartographie du protéome soluble de la vacuole (score MASCOT allant jusqu’à 661, 12 peptides retrouvés).

De manière générale, la plupart des spots majoritaires du cytosol ne sont pas présents dans la cartographie du protéome vacuolaire. Or si les vacuoles étaient contaminées de manière non spécifique par des protéines cytosoliques, la plupart des protéines majoritaires de la cartographie du cytosol devrait être retrouvée sur celle du protéome soluble de la vacuole. Ces résultats montrent sans équivoque que ce n’est pas le cas. Ils suggèrent à l’inverse d’autres explications quant à la présence de protéines cytosoliques dans les fractions vacuolaires : certaines des protéines communes aux deux cartographies sont connues pour interagir avec les membranes (annexine), quelques fois de façon spécifique par l’intermédiaire d’un récepteur ou d’un transporteur par exemple (protéines de type 14-3-3 ; Roberts, 2003). Certaines protéines pourraient alors être spécifiquement liées au tonoplaste, leur présence correspondant à une fonction physiologique impliquant des aspects cytosoliques et vacuolaires. De façon intéressante, la présence de Glutathion S-Transférases associées au tonoplaste a une réalité physiologique et corespond à une voie métabolique associant la conjugaison de toxiques au glutathion à leur transport dans la vacuole. De la même manière, la présence de la subtilase TPPII et du protéasome dans les extraits protéiques vacuolaires a été discutée précédemment (Figure 20). Mais les cartographies mettent également en évidences quelques protéines qui semblent en cours de dégradation dans la vacuole. Situées à des poids moléculaires plus faibles et des points isoélectriques différents d’une cartographie à l’autre, 2 protéines (cytosol aminopeptidase et dihydrolipoamide déshydrogénase) semblent illustrer les fonctions, connues, de dégradation vacuolaires de certaines protéines.

Afin d’aller plus loin dans la compréhension des mécanismes conduisant à la présence de contaminants cytosoliques dans la vacuole, des travaux supplémentaires visant à identifier les protéines associées à la vacuole du coté cytosolique du tonoplaste ont été initiés. Ceux-ci consistent à réaliser une digestion par la protéinase K de vacuoles intactes afin de dégrader les protéines de la face externe des organites (Expérience de « Shave and Conquer »). Les vacuoles ainsi « rasées » sont alors purifiées une nouvelle fois sur gradient de densité afin d’éliminer les peptides externes protéolysés, puis analysées par spectrométrie de masse. Les résultats sont alors comparés avec ceux obtenus à partir d’échantillons vacuolaires non soumis à l’action de la protéinase K.

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Cytosol Vacuoles

Protéine

►AT1G19570 : Dehydroascorbate reductase

►AT1G19570 : Dehydroascorbate reductase

►AT1G35720 : Annexin 1 (ANN1)

►AT1G47710 : Serpin (serine protease inhibitor) putative

►AT1G48030 : Dihydrolipoamide dehydrogenase 1 ►AT1G77120 : Alcool dehydrogenase ►AT2G24200 : Cytosol aminopeptidase

►AT2G30870 : Glutathione S-transferase

►AT2G36530 : Enolase

►AT3G02230 : Reversibly glycosylated polypeptide-1 (RGP1)

►AT3G55440 : Triosephosphate isomerase

►AT4G20850 : Subtilase ( Tripeptidyl-peptidase II)

►AT5G60160 : Aspartyl aminopeptidase

Cytosol 103 16, 76, 84 24, 25, 142, 144, 145, 146, 147 12 189 155 34, 35 19, 20, 102, 107 177 27, 142 17, 18, 57, 97, 101, 102 198 190 95 93 73 1 2 78 79 80 82/ 82 115 117 118 116 110 109 107 12 1 12 0 77 137/ 137 138/ 138 139/ 139 140 143 14 1 14 2 15 2 12 16 1 7 18 19 20 24 25 27 34 35 57 76 84 97 10 1 102 / 102 103 10 7 142/ 142 144 14 5 146 14 7 15 5 177 189 190 198 Cytosol Vacuoles Vacuole 12 93 107 95 82 115 137, 138, 139, 141, 142 77 143 109, 116, 117, 118 80 82, 120, 121, 152, 137, 138, 139, 140 78, 79

Figure 27 : Comparaison des cartographies des protéomes de la fraction soluble de la vacuole et de la fraction

enrichie en cytosol. Les 13 protéines communes aux deux analyses ont été reportées dans le tableau, et les spots dans lesquels elles ont été identifiées sont précisés dans le tableau et sur la figure.

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Des analyses préliminaires, réalisées avec Nolwenn Jarno (LPCV, CEA-Grenoble), ont conduit à l’établissement d’une liste de protéines présentes dans les fractions solubles et membranaires de chacun des échantillons de vacuoles (traitées ou non à la protéinase K). Cette analyse, moins exhaustive que celle réalisée précédemment, a été faite de manière à favoriser l’identification des protéines majeures, et a mis en évidence la « disparition » ou l’enrichissement de protéines suite à l’incubation des organites intactes avec la protéase. Cette première étude de protection à la protéinase K nécessite d’être confirmée, mais elle permet d’ores et déjà de mettre en évidence quelques aspects de l’organisation des protéines dans, ou associées à, la vacuole. Trois cent sept protéines précédemment identifiées dans la vacuole ont été retrouvées dans chacun des deux échantillons, dont 221 sont communes aux deux analyses. Chaque échantillon comprend donc 86 protéines suffisemment majoritaires pour être identifiées, mais absentes (non identifiées) de la contrepartie. L’identification dans le contrôle de 5 sous-unités de la V-ATPase (VHA-B1, VHA-E, VHA-F, VHA-G1, VHA-G2), « absentes » des vacuoles traitées à la protéinase K, confirme la digestion des protéines tonoplastiques situées du coté cytosolique de la membrane. D’autres transporteurs, présentant des domaines cytosoliques, sont également « absents » des vacuoles soumises à l’action de la protéinase K. C’est particulièrement le cas de 5 transporteurs de type ABC (MRP2, MRP3, MRP4, MRP6, TAP2). A l’inverse, les glycosidases, intravacuolaires, sont légèrement enrichies suite au traitement, et deux nouvelles protéines ont été identifiées. Leur présence dans les vacuoles traitées confirme que la protéinase K ne traverse pas le tonoplaste. L’enrichissement relativement faible de ces protéines suite à la protéolyse suggère que celles-ci sont des protéines majeures de la vacuole, identifiées par spectrométrie de masse même en présence des protéines du tonoplaste. De façon très intéressante, les protéines de type 14-3-3 sont considérablement dégradées par l’action de la protéinase K (7 identifiées dans le témoin ; 2 identifiées dans le traité), ce qui démontre que ces protéines sont liées au tonoplaste du côté cytosolique. De façon identique, 3 sous-unités du protéasome (sur 4 identifiées dans le contrôle) ne sont plus retrouvées après traitement à la protéase. Ces protéines, cytosoliques, semblent donc bien associées à la vacuole sur la face externe du tonoplaste, très probablement de façon spécifique puisqu’elles sont considérablement enrichies lors de la purification des organites. La subtilase TPPII est par contre, de façon surprenante, toujours présente dans les extraits protéiques après exposition des vacuoles intactes à la protéinase K. Cette protéine très majoritaire est probablement digérée partiellement : le score MASCOT associé à son identification étant très inférieur, après traitement à la protéase, à celui du contrôle puisque 41 peptides sont identifiés dans le témoin (score de 2584), et seulement 27 peptides sont identifiés après traitement à la protéase (score de 1742). Cependant nous ne pouvons pas exclure la présence de cette protéine à l’intérieur de la vacuole, sachant que dans les analyses d’électrophorèses bidimensionnelles on observe la présence de produits de dégradation (Figure 27, spots N° 82, 110, 120, 121). Ces processus lytiques sont

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également mis en évidence par un certain nombre de protéines vacuolaires qui semblent être enrichies après le traitement à la protéinase K, et notamment celles de la glycolyse. Si certaines enzymes sont identifiées dans les vacuoles non traitées (glyceraldehyde-3-phosphate deshydrogénase, 1 peptide identifié) et dans les vacuoles traitées (5 peptides identifiés), la plupart est trop peu représentée pour être identifiée sans dégradation protéolytique des protéines tonoplastiques extra-vacuolaires (phosphoglycérate kinase : 3 peptides identifiés après traitement, fructose-bisphosphate aldolase, 1 peptide identifié …). Deux enzymes de la voie de synthèse de la méthionine (AT3G03780 et AT5G17920), et une alanine aminotransférase, dont la localisation cytosolique a pu être confirmée par des expériences de fusion traductionnelles avec la GFP (Ravanel et al., 2004 ; Igarashi et al., 2003), sont également identifiées uniquement dans les échantillons vacuolaires exposés à l’action de la protéinase K. Ces résultats suggèrent que ces protéines « cytosoliques » sont sans doute à l’intérieur de la vacuole, en cours de dégradation.

Suite à l’identification de protéines du cytosol dans la vacuole, la comparaison des cartographies des protéomes solubles cytosoliques et vacuolaires a permis de montrer que la présence de telles protéines n’est pas due principalement à une contamination aspécifique par les protéines majeures du cytosol. Les expériences de protection à la protéinase K suggèrent qu’un certain nombre de protéines cytosoliques sont situées dans le suc vacuolaire, et sont certainement en cours de dégradation. Ces observations, illustrant le caractère protéolytique de la vacuole, ont également été réalisées dans le cas de l’analyse protéomique de la vacuole de Saccharomyces cerevisae (Sarry et al., 2007). Mais ces analyses de « Shave and Conquer » permettent également d’observer l’association de la plupart des protéines de type 14-3-3, du protéasome et de TPPII avec la face extérieure de la vacuole, suggérant que leur forte représentation dans le protéome vacuolaire est très probablement liée à des activités métaboliques impliquant la vacuole. Des expériences supplémentaires sont toutefois nécessaires pour confirmer ces hypothèses.

La mise en évidence de ces interactions entre certaines protéines cytosoliques et le tonoplaste est particulièrement intéressante, et il est probable qu’un certain nombre de fonctions vacuolaires soit assuré par des complexes protéiques. Afin de compléter la caractérisation protéomique des vacuoles végétales, nous avons souhaité évaluer la présence de tels complexes dans les fractions solubles et membranaires des vacuoles.

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III - Evaluation de l’organisation supramoléculaire du

protéome vacuolaire

Dans le but d’approfondir la caractérisation protéomique de la vacuole, nous avons initié un travail visant à identifier les complexes protéiques majeurs des fractions solubles et membranaires de cet organite. Cette étude préliminaire avait également pour objectif de définir des conditions d’analyse des complexes protéiques, en particulier dans l’optique d’observer la dynamique du protéome de la vacuole à l’échelle supramoléculaire lors d’un stress. La Figure 29 résume le travail réalisé.

Publiée pour la première fois en 1991, la technique du Blue-Native PolyAcrylamide Gel Electrophoresis (BN-PAGE) a permis de séparer et de caractériser les différents complexes de la chaîne respiratoire de la mitochondrie sans en dissocier les sous-unités (Schagger & von Jagow, 1991). Depuis, cette technique a été également utilisée pour isoler les complexes du chloroplaste (Neff & Dencher, 1999 ; Heinemeyer et al., 2004) et de la mitochondrie végétale (Jansch et al., 1996 ; Heazlewood et al., 2003), mais n’a jamais été appliquée à l’analyse du protéome vacuolaire, ni de plante ni de levure. Elle exploite la propriété de liaison aux protéines du bleu de Coomassie qui, chargé négativement, leur permet ensuite de migrer dans un champ électrique. Dans une matrice constituée d’un gradient d’acrylamide, les complexes se séparent en fonction de leur masse moléculaire. La piste de migration peut alors être placée au sommet d’un second gel, de type SDS-PAGE afin de séparer les protéines associées dans une seconde dimension.