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1 - DWARF1 / DIMINUTO, intervient dans une voie de biosynthèse régulée par le stress cadmium

CHAPITRE III : VERS UNE RECHERCHE DE CANDIDATS A LA DETOXICATION METALLIQUE

II. 1 - DWARF1 / DIMINUTO, intervient dans une voie de biosynthèse régulée par le stress cadmium

DWARF1 (DWF1) est une protéine membranaire (1 segment transmembranaire prédit) identifiée suite à nos travaux de protéomique vacuolaire (scores MASCOT de 1183) et dont nous avons pu confirmer la localisation. Cette enzyme est impliquée dans la conversion des stérols en brassinostéroïdes, une classe d’hormones végétales intervenant dans les processus de sénescence, d’embryogenèse, de vascularisation, d’élongation cellulaire ou encore dans les réponses aux stress abiotiques (pour revue, voir Asami et al., 2005 ; Kagale et al., 2007). Les brassinostéroides (BR) sont classés en trois familles suivant le nombre d’atomes de carbone qu’ils comptent (27, 28 ou 29 ; Figure 41), la classe principale étant la famille C28, à laquelle appartient notamment le brassinolide, le plus actif des brassinostéroïdes connus (Yokota, 1997). Leur biosynthèse dérive de la voie du mévalonate (Figure 42), à partir de laquelle est synthétisé le 24-méthylénélophénol, précurseur des brassinostéroïdes de type C28 et C29 (les brassinostéroïdes de type C27 dérivent du cycloarténol, un précurseur de synthèse du 24-méthylénélophénol). La protéine DWF1 catalyse la conversion du 24-méthylencholestérol en campesterol ou en 25-methyl, 24-méthylencholestérol, et de

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l’isofucostérol en isostérol (Figure 42). Cette activité est essentielle à la production de la plupart des brassinostéroïdes, et un mutant de cette protéine (dwf1) présente une réduction importante de la quantité de brassinostéroïdes endogènes, associé à un phénotype marqué de nanisme, une fertilité réduite et une croissance lente (Klahre et al., 1998).

Les analyses croisées des données de protéomique et de transcriptomique ont permis de mettre en évidence la répression de l’expression du gène DWF1 lors d’un stress cadmium (Tableau XII). Cette régulation de l’expression intervient uniquement dans les racines (expression stable dans les feuilles) et est précoce (dès 2 h d’exposition). La répression du niveau d’accumulation des transcrits est aussi fonction de l’intensité du stress : une exposition à une concentration modérée de cadmium (5 µM) conduit à une baisse transitoire de la quantité d’ARNm codant DWF1 (2 h : 57 % d’expression ; 30 h : 100 % d’expression), alors qu’une exposition à 50 µM Cd entraîne une réduction prolongée du niveau de transcrit DWF1 (2 h : 59 % d’expression ; 30 h : 60 % d’expression, cf. annexe III, p.196).

Figure 41 : Structure des brassinostéroïdes. Les variations portent sur les cycles A et B, ainsi que sur la

chaine latérale. En particulier, le nombre d’atome de carbone qu’elle contient détermine la classe du brassinostéroïdes correspondant : C27, C28 (méthylation du carbone 24) et C29 (éthylation du carbone 24, méthylation des carbones 24 et 25). La molécule représentée est le brassinolide, le brassinostéroïde le plus actif. D’après Yokota, 1997.

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Dans le cadre des travaux que nous réalisons, qui visent à mieux comprendre la réponse de la plante au stress métallique, la mise en évidence d’un phénomène de régulation par le cadmium de l’expression d’une enzyme impliquée dans la synthèse d’une hormone est particulièrement intéressante. Afin d’évaluer l’implication de cette classe d’hormones dans la réponse au stress cadmium, les enzymes participant à la biosynthèses des stérols et des brassinostéroïdes (classification AraCyc du site de TAIR, www.arabidopsis.org/biocyc/index.jsp) ont été sélectionnées et leur profil d’expression génique (2 h et 30 h d’exposition à 5 et 50 µM) étudiés. La Figure 42-A présente une vue simplifiée de cette voie de biosynthèse, et notamment de la voie métabolique principale qui conduit à la production du brassinolide. Les enzymes connues pour être impliquées sont indiquées ainsi que, lorsque les données sont disponibles, un indice de l’évolution du niveau de transcrits dans les racines lors d’un stress cadmium (données de Herbette et al., 2006). Sur 15 gènes identifiés dans cette voie, 4 ne sont pas représentés sur les puces CATMA (blanc), et 5, sur les 11 restants, présentent une régulation négative de leur expression lors d’un stress cadmium (notés en vert). Cette proportion importante (45 %) de gènes régulés de façon similaire dans une voie métabolique est notable (à titre de comparaison la voie de réduction du sulfate, connue pour être activée par le stress cadmium et essentielle à l’établissement d’une partie de la réponse, comprend 7 enzymes dont 3 (42 %) sont régulées positivement (Herbette et al., 2006 / classification AraCyc). Cette observation suggère une régulation de la voie de biosynthèse dans son ensemble lors d’un stress cadmium, et est particulièrement intéressante puisqu’à ce jour aucune hormone, ou plus généralement processus de signalisation, n’a été identifié pour son rôle dans la réponse de la plante au stress cadmium. La présence d’un seul gène appartenant à cette voie métabolique (At5g16010) et régulé positivement à 30 h d’exposition à 50 µM Cd (cf. annexe III, p. 196), ne remet pas en cause l’hypothèse d’une régulation globale négative de la voie.

Dans le but de confirmer la sous-expression de plusieurs enzymes clé de la voie de biosynthèse, les ARNm des racines de plantes exposées 2 h et 30 h à 0, 5 et 50 µM Cd ont été extraits, et les ADN complémentaires synthétisés afin de réaliser des PCR semi-quantitatives. Les niveaux d’expression de 3 gènes, lors d’un stress cadmium, ont alors été évalués (Figure 42-A) : At1g76090, qui code une protéine (SMT3) intervenant au début de la voie considérée ; At3g19820, dont le produit (DWF1) catalyse les premières étapes de la biosynthèse des brassinostéroïdes et est impliqué dans les trois voies métaboliques conduisant à la synthèse des brassinostéroïdes à partir du 24-méthylénélophénol ; et At3g55360, qui code la première enzyme (CER10) de la voie de synthèse du brassinolide (Figure 42-A). Ces analyses ont confirmé la régulation négative des gènes testés (Figure 42-B). L’expression des 3 gènes considérés (SMT3, DWF1 et CER10) est réduite de façon prononcée dès 2 h d’exposition à 5 µM Cd (respectivement 28 %, 26 % et 14 % du niveau constitutif) et 50 µM Cd (34 %, 38 %, et 21 %), ce qui confirme le caractère précoce de la réponse observée. Après 30 h d’exposition, si les niveaux d’expression des gènes extraits de plantules

Chapitre III : Vers une recherche de candidats à la détoxication métallique vacuolaire - 160 - 2 h 30 h 5 µM 50 µM Induction Répression Stabilité Pas de données

Figure 42 : Régulation transcriptionnelle de la voie de biosynthèse des stérols / brassinostéroïdes lors d’un stress

cadmium, dans des racines de plantules d’Arabidopsis thaliana. (A) : Résultats d’analyse d’expression génique sur puce à ADN CATMA (Complete Arabidopsis transcriptome MicroArray ; Herbette et al., 2006).Vert : régulation négative, jaune : expression stable, orange : régulation positive, blanc : gène non présent sur la puce. Pour les gènes régulés négativement sont précisés le niveau de transcrit à 2 h (carré de gauche) et à 30 h (carré de droite), pour une exposition à 5 µM Cd (triangle du bas) et à 50 µM Cd (triangle du haut). Les niveaux de régulation sont présentés en annexe (p. 196). (B) : Trois gènes ont fait l’objet d’une évaluation plus précise de leur niveau d’expression par PCR semi-quantitative (SMT1 : At1g76090 ; DWF1 : At3g19820 ; CER10 : At3g55360). Le rapport d’expression, déterminé à partir de 3 mesures réalisées sur 3 PCR indépendantes (9 valeurs au total), est indiqué. Le témoin de charge utilisé est le transcrit du gène codant l’actine 2 (ACTIN2).

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soumises à 5 µM Cd ont retrouvé leurs valeurs initiales, ceux des gènes extraits de plantes exposées à 50 µM Cd sont encore réduits à 52 %, 79 % et 67 % de la valeur du contrôle (Figure 42-B).

Cette étude préliminaire consistant à analyser la réponse de la voie de biosynthèse des brassinostéroïdes à un stress cadmium a donc abouti à la mise en évidence de la répression de l’expression génique de plusieurs enzymes, observée à partir d’analyses sur puces à ADN puis confirmée par RT-PCR. Afin de mieux comprendre la relation entre les brassinostéroïdes et le stress cadmium in vivo, une série d’expériences a été mise en place, visant à évaluer l’impact d’une modulation de la concentration endogène en hormone sur la réponse d’Arabidopsis thaliana à un stress cadmium.

II.2 - Modulation du niveau de brassinostéroïdes endogènes et effets sur la