2. La dynamique des associations tournées vers les innovations sociales
2.2 L’implication de l’association des responsables de copropriété dans la définition des politiques
2.2. L’implication de l’association des responsables de copropriété dans la définition des politiques publiques
Certaines associations n’ont pas de vocation manifeste à promouvoir des innovations sociales ou organisationnelles ni à s’investir de façon privilégiée dans des approches d’écoconstruction. L’association des responsables de copropriété (ARC®) figure parmi ces associations qui, ayant acquis une certaine notoriété dans leur action de défense des intérêts des copropriétaires, ont peu à peu pénétré les instances de concertation et de décision et ont naturellement été sollicitées dans le cadre du Grenelle de l’environnement.
Les problèmes de gouvernance des copropriétés, et notamment leurs difficultés à décider de travaux pour assurer la bonne préservation de leur patrimoine, ont suscité la création de plusieurs associations visant à conseiller les conseils syndicaux dans leurs relations avec les syndics et les autres copropriétaires ou à promouvoir d’autres solutions de syndicats coopératifs ou de syndics bénévoles, dans tous les cas à inciter les copropriétaires à s’impliquer davantage dans la gestion de leurs biens et à acquérir les compétences nécessaires.
De par l’expérience acquise dans ces activités de service aux conseillers syndicaux de copropriétés, elles sont particulièrement aptes à déceler les freins aux décisions de travaux concernant l’amélioration énergétique, alors que celles‐ci représentent un parc immobilier important, fortement consommateur d’énergie. Bien des tentatives d’engager les copropriétés dans de tels travaux ont échoué : les syndics n’ont pas toujours la vocation à se faire les conseillers de maîtres d’ouvrages aussi individualistes et, lorsqu’ils se prennent au jeu, ils peuvent se voir dessaisir de la gestion de la copropriété par des propriétaires mécontents ; les initiatives de sociologues qui tentent de conférer aux présidents de conseils syndicaux un rôle de leader énergétique ne sont pas toujours couronnées de succès ; les dispositions prises pour inciter à l’engagement de travaux d’amélioration énergétique ne sont pas toujours adaptées aux copropriétés et les modalités de gestion des copropriétés représentent aussi des obstacles.
Lors du Grenelle de l’environnement et de ses prolongements, les associations de copropriétaires ont apporté un éclairage utile. Elles ont proposé des solutions dont nous rendons compte en nous appuyant sur une communication mettant en évidence la contribution de l’ARC lors des deuxièmes journées internationales de sociologie de l’énergie (Le Garrec Sylvaine, 2015). Les investigations complémentaires engagées suite à cette communication montrent, qu’en dehors de cette participation active et bénéfique à l’élaboration des politiques publiques, l’ARC n’a pas veillé suffisamment à la diffusion de ses services sur l’ensemble du territoire et est confrontée à la difficulté d’assurer la succession de son président. Elle nous donne ainsi l’occasion d’aborder une question qui se pose à toutes les associations, celle de leur dynamique propre, de l’amélioration constante de leur mode de gouvernance et de l’évolution de leurs missions.
En participant au Grenelle de l’environnement, l’ARC a accru sa notoriété et augmenté le nombre de ses adhérents. Elle a élaboré des outils de mobilisation des copropriétaires et obtenu des infléchissements dans la mise en œuvre des DPE et des audits énergétiques. En Région parisienne, elle a participé à des expérimentations et développé des coopérations avec quelques Espaces Info énergie. Elle a aujourd’hui à faire évoluer une gouvernance interne qui reposait trop exclusivement sur le charisme et l’autorité de son fondateur et à homogénéiser ses prestations sur l’ensemble du territoire national. Elle est bien évidemment concernée par l’évolution qui se profile en matière d’habitat coopératif ou groupé, dont certains pensent qu’ils préfigurent le fonctionnement de futures copropriétés, mais le manque de cohésion de l’association et sa faible implantation en région constituent un handicap.
Processus d’encastrement social, économique et politique (1)
Dates Contexte Evolution de l’association
Avant 1987
M. Dhont, futur fondateur de l’ARC, travaille dans deux associations : l’ARIM puis la CLCV102 ‐
droit des locataires
1987 Création : rendre les copropriétaires acteurs
‐ aider les conseils syndicaux et syndics bénévoles à mieux gérer leur immeuble ;
‐ améliorer le fonctionnement global de la copropriété.
1991 Création d’une coopérative, Arc‐Services :
‐ négocier les prix des fournitures, équipements, produits ;
‐ négocier des contrats ;
‐ référencer des entreprises ou experts.
1997 Création d’un institut de formation, Copropriété et
Formation : formation de copropriétaires, des agents des collectivités locales
Autres prestations : bulletin, guides, sites internet 2000 L’énergie n’est pas encore dans l’agenda
politique
L’ARC s’occupe des copropriétés en difficultés, préoccupation qui est passée politiquement au
second plan après l’ANRU L’ARC fait partie de la commission copropriété
du Ministère de la justice. Elle participe à la négociation du décret comptable de la loi ALUR et aux négociations relatives aux règlements de
mise en conformité des ascenseurs.
L’ARC défend l’idée d’auto‐bilans transversaux dans
une optique de maitrise des charges
102 Extrait de http://www.actioncoproprietaires.org/pages/notre‐histoire‐et‐nos‐valeurs.html
Créée en 1952. En 1977, avec l'affiliation de l'Association nationale des copropriétaires résidents (ANCR), la CLCV, qui s’appelait à l’époque CSCV, organise les copropriétaires afin « qu'ils sortent de leur isolement et de leur situation de dépendance vis‐à‐vis des professionnels ». Cela contribuera à modifier l'image de la copropriété, perçue par certains comme étant composée de « nantis », alors qu’elle s'est fortement développée à partir des années 60 avec la promotion immobilière et l'achat à crédit. Très rapidement, il s’est avéré que ces nouveaux copropriétaires ne connaissaient ni leurs droits, ni leurs obligations et qu’ils n’avaient nullement conscience de la dimension collective que revêt ce type d’habitat.
Processus d’encastrement social, économique et politique (2)
Dates Contexte Evolution de l’association
2007 L’ARC participe avec le CLCV au groupe
« habitat » du comité opérationnel « Rénovation des bâtiments existants ». Le DPE créé en décembre 2004 est un instrument stratégique : il doit être généralisé… et sa qualité être renforcée
L’ARC note que les copropriétés n’ont pas de « bonne gouvernance » en matière de gros entretien :
‐ les syndics n’ont pas toujours une « gestion patrimoniale » ;
‐ les propriétaires bailleurs se moquent du gros entretien ;
‐ les primo‐accédants et les retraités n’ont guère d’épargne personnelle
L’ARC demande la constitution d’un fond travaux
obligatoire ou d’un plan d’épargne énergie copropriété (PEEC)
Cette disposition a été prise mais n’a pas pris son essor du fait de l’obligation d’audit énergétique à
partir de 50 lots.
L’ARC demande l’instauration d’un DPE collectif pour les copropriétés avec chauffage collectif, réalisé par
des bureaux d’études thermiques et non des diagnostiqueurs immobiliers
L’ARC demande le déclassement des fenêtres pour en
faire des « parties privatives à intérêt commun » lorsqu’il y a production collective de chauffage 2008 Des audits énergétiques expérimentaux sont
lancés par l’ADEME et la Ville de Paris à travers le dispositif COC (Copropriété Objectif Climat)
Selon l’ARC, l’audit ne doit pas être seulement
‐ un rapport d’expert ;
‐ un stimulus des calculs rationnels de l’individu ;
‐ une information.
Il faut favoriser la constitution d’un collectif dans des copropriétés dont le droit a surtout veillé à défendre les individus et pas du tout à favoriser l’émergence
de collectifs.
Le Bilan Initial de Copropriété (BIC)
‐ mieux comprendre sa copropriété, ses forces et ses faiblesses, ses dynamiques ;
‐ repérer ce qu’il faut améliorer ou corriger dans la gestion et le fonctionnement ;
‐ mettre en place ces améliorations ou corrections (avant même de se lancer dans un éventuel audit).
Proposition d’une 1ère étape, le Bilan énergétique simplifié (BES), un outil pédagogique qui enseigne aux copropriétaires l’analyse des consommations de leur chauffage collectif. Il a été conçu dans le cadre d’une étude pour l’ANAH
et mis au point par l’ARC et FONCIA.
Il s’agit de faire de l’audit :
‐ un outil de formation des conseils syndicaux
‐ un élément de construction d’un intérêt commun ;
‐ un support de mobilisation préparant un processus de décision.
Processus d’encastrement social, économique et politique (3)
Dates Contexte Evolution de l’association
2009 L’ARC participe au « chantier copropriété » 103 du Plan Bâtiment Grenelle. Il s’agit de mettre en
104 La COPREC (Confédération des Organismes indépendants tierce partie de Prévention, de Contrôle et d’Inspection.) représente
les organismes de contrôle tierce partie indépendante incluant les missions d’évaluation de conformité, de contrôle technique, de conseil prévention dans les domaines comme la qualité, l’hygiène, la sécurité et l’environnement. SOCOTEC en est membre.
105 http://www.audit‐360.fr/Socotec‐et‐PACT : « Audit 360°, Bien comprendre pour mieux décider, une solution innovante proposée par Socotec & PACT »
106 La copropriété et le développement durable en Europe ‐ Planete copropriété.
Processus d’encastrement social, économique et politique (4)
Dates Contexte Evolution de l’association
L’IDEMU107 a la gestion d’un espace Info‐énergie et emploie aussi un conseiller copropriété mais
son action a été supplantée par l’Agence parisienne du climat (APC) qui est une ALEC et
dont l’ARC est adhérente. Devenu un établissement de Croix Rouge insertion en 2013,
elle fermera définitivement fin 2015.
Destinée à suivre les expérimentations et faire du lobbying, Planete copropriété est affaiblie par
le départ de certains membres (les syndics, le PACT). L’association a lancé une procédure de labellisation des entreprises qui interviennent en
amélioration énergétique dans les copropriétés
Vers l’émergence d’un métier de « conseiller copropriété » ?
En Ile de France, l’ADEME a ouvert un groupe mail entre les conseillers copropriété en EIE ou ALEC. FLAME, la fédération des ALEC a un groupe
de travail copropriété qui échange sur les pratiques.
En investissant le champ énergétique et environnemental, l’ARC est davantage rentré dans les
copropriétés et le nombre de ses adhérents s’est accru
Certains conseillers Info‐énergie (CIE) utilisent le BES
2 postes de conseillers énergie‐rénovation ont été créés au sein de l’ARC.
L’ARC se dote d’un responsable de pôle, en plus des deux conseillers techniques énergie
2013 l’ARC fonctionne autour de la personnalité
charismatique de son directeur. Son CA est peu actif.
Un flou entre l’ARC national et l’UNARC (Union des ARC locales). Le territoire de l’ARC, c’est l’Ile de France et les territoires non couverts par les ARC
régionales. Les niveaux de service sont très différents.
2014 L‘ARC quitte l’UNARC en 2014 après avoir déposé les
marques ARC et UNARC
2015 Un audit des comptes demandé par les
administrateurs révèle de possibles irrégularités.
Création en 2015 de l’Association des Adhérents de l’ARC (AAA)108 ayant pour but d’informer les adhérents et copropriétaires des problèmes internes
rencontrés à l’ARC
107 Institut de l’Ecologie en Milieu Urbain.
108 http://arcopro‐adherents.info