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[4] Inégalités écologiques : analyse spatiale des impacts générés et subis par les ménages belges

4. Impacts subis

Comment étudier l’exposition à certaines nuisances et pollutions (pollution de l’air, bruit, voisinage de certains sites, …) ? L’étude des impacts subis par les ménages est compliquée parce qu’elle relève à la fois de la toxicologie (c’est-à-dire l’impact sur la santé physique) et des qualités (perçues ou non) du lieu de vie. Nous avons choisi deux approches: la première concerne la localisation géographiques des sites d’émission de pollution et la deuxième se base sur la perception subjective de l’environnement telle qu’enregistrée par l’enquête socioéconomique 2001.

Les sites de pollution

Pour identifier certaines sources fixes d’émissions polluantes nous nous sommes référés à la liste des polluants repris dans le système EPER13

qui recouvre une cinquantaine de composés émis par les sites industriels en Europe. Notre choix s’est porté sur les principaux polluants qui constituent une menace avérée pour la santé des habitants.14

Etant donné que leur nombre est relativement élevé et que leurs effets peuvent être très variables (effets directs ou indirects,

13

http://www.eper.cec.eu.int/eper/ 14

voir entre autres WHO (2004), Health aspects of air pollution. Results from the WHO project. “Systematic review of health aspects of air pollution in Europe”, téléchargé de

interactions chimiques ou physiques entre substances, influence des conditions météorologiques, etc.), nous avons ciblé les composés selon les principaux critères suivants : degré relatif de dangerosité, effets connus, niveau de priorité porté par les institutions compétentes et le monde scientifique. Nous avons également décidé de nous limiter aux polluants émis dans l’air puisqu’elles permettent une certaine approximation des impacts à petite échelle, les pollutions dans le sol et dans l’eau ayant des effets trop locaux. Il est évident qu’une étude approfondie de la spatialisation des pollutions nécessiterait un travail à plus grande échelle, tenant compte des conditions météorologiques et des géographies locales.15

Notre approche doit donc être vue comme une démonstration sommaire des possibilités sur base des données EPER.

Dans un premier temps, nous avions dégagé les substances suivantes :

les précurseurs d’ozone troposphérique comme les oxydes d’azote (NOx) et les composés organiques volatils non méthaniques (COVNM) ; les effets de l’ozone sur les fonctions respiratoires étant connues et justifiant entre autres es mesures d’urgence durant les pics de pollutions ;

les matières particulaires de type PM10, qui constituent également une menace pour la santé au niveau du système respiratoire (asthmes, capacités respiratoires, maladies pulmonaires, etc.)16

;

les aromatiques du type benzène, dont les effets sur le système nerveux, mais aussi les effets cancérigènes, sont prouvés ;

les hydrocarbures polycycliques aromatiques (HAP), dont certains ont également des effets cancérigènes avérés (et d’autres pour lesquels des études sont en cours, ou alors ont une toxicité faible).

In fine, nous avons choisi de spatialiser les pollutions uniquement pour les NOx et les PM10. Le benzène n’a pas été retenu pour deux raisons. D’une part, les sources émettrices sont surtout les modes de transports routiers, ainsi que les stations essence ; des sources non reprises dans la base de données EPER. D’autre part, le benzène est une substance fortement volatile, donc peu

15

Tel que cela a été fait dans les modèles GAINS/RAINS (http://www.iiasa.ac.at/rains/gains.html?sb=7) et EMEP (http://projects.dnmi.no/~emep/index_model.html), mais à trop petite échelle pour notre propos ici.

16

persistante dans l’air et rapidement biodégradable. Les HAP par contre sont davantage persistants dans la mesure où certains d’entre eux sont semi volatils, et peuvent se combiner aux matières particulaires (PM).17

Toutefois, d’après la base de données EPER, les sources industrielles émettrices de HAP dépassant le seuil d’obligation de déclaration sont très peu nombreuses en comparaison aux NOx ou aux PM10, ne méritant donc pas de porter une attention particulière à cette catégorie de substances. Notons aussi que nous n’avons pas retenu les COVNM car les zones géographiques d’émissions sont identiques aux NOx. La carte de ces derniers suffit donc à montrer les zones concernées par la contamination en précurseurs d’ozone troposphérique d’origine industrielle.

La figure 2, qui présente ces deux cartes, montre que ces émissions se superposent aux axes industriels indiqués à la figure 1. On observe que les ménages exposés à ces polluants vivent généralement dans des communes plus pauvres. Pour compléter les émissions industrielles, il faudrait ajouter celles dues au transport routier — grand contributeur aux émissions polluantes retenues ici. Malheureusement, nous ne disposons pas des données adéquates pour les désagréger au niveau communal. De même que toute la question de la pollution intérieure dans les habitations est exclue de notre démarche.

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WHO. 2004. Health aspects of air pollution – Results of the WHO project “systematic review of health aspects of air

pollution in Europe”. World Health Organization Regional Office for Europe. Denmark. 30pp.

Cellule État de l’Environnement Wallon. 2007. Rapport analytique sur l’état de l’environnement wallon 2006-2007. MRW-DGRNE. Namur. 736pp.

Fig. 2. Emissions industrielles de certains polluants atmosphériques.

La perception subjective de l’environnement

L’enquête socioéconomique 2001 fournit les indicateurs de perception de l’environnement suivants :

− part des ménages estimant que la qualité de l’air est « peu agréable » (partpollutair).

− part des ménages estimant que la tranquillité est « peu agréable » (partpastranq).

− part des ménages estimant que la propreté est « peu agréable » (partpaspropre).

Sauf pour la propreté, la corrélation à l’échelle de la commune entre ces indicateurs et le revenu médian n’est pas très forte, mais toujours significative et négative. Le niveau d’éducation semble jouer moins, probablement à cause de la forte proportion de jeunes diplômés dans les centres urbains.

La distribution spatiale de ces trois indicateurs est très semblable. On observe des pourcentages élevés de ces indicateurs dans les centres urbains ainsi que dans les zones industrielles (zones relativement pauvres). La qualité de l’air est l’indicateur le plus contrasté, tandis que celui de la tranquillité est le plus diffus. Quoique l’interprétation de ces données est simple, il est nécessaire de rappeler qu’il s’agit d’indicateurs subjectifs, et que leurs contrastes pourraient être plus grands si des données objectives étaient disponibles, car on peut supposer que les personnes aux ressources culturelles élevées se plaignent davantage des nuisances environnementales que celles qui ont moins accès aux informations ou comparaisons.

Fig. 3. Parts des ménages estimant que la qualité de l’air est « peu agréable »

La figure 3 expose la distribution des communes dans lesquelles les gens estiment que l’air est peu agréable. Il est intéressant de constater que l’on retrouve la structure des émissions indiquées aux cartes de la figure 2, auquel s’ajoute un effet urbain attendu. Cela montre que l’indicateur subjectif de perception de la qualité de l’air recoupe dans les grandes lignes de l’indicateur plus objectif des émissions industrielles. Cela s’explique en partie parce que les axes routiers principaux

— qui contribuent à la détérioration de la qualité de l’air — sont distribués le long des axes industriels.

5. Utilisation des ressources et impacts sur l’environnement générés