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VI.3 Effet du désordre dans Er 3+ ,Sc 3+ :Y

VI.3.4 Impact sur la cohérence optique

Ces mesures ont été réalisées par C.W. Thiel et R.L Cone.

Des études précédentes ont montré que l’ajout d’un co-dopant pour élargir les raies pouvait réduire significativement la diffusion spectrale [48]. Dans cette partie, l’effet du co-dopage par des ions Sc3+ sur la cohérence optique des ions Er3+ est étudié. Pour

cela, le temps de cohérence optique T2 est mesuré par écho de photons en fonction de la

température. Les variations de la largeur homogène, calculée 1/fiT2, sont montrées figure

VI.12. Aux champs magnétiques très faibles (en dessous de 200 mT), la largeur homogène diminue fortement avec le champ magnétique pour arriver à un minimum vers 200 mT. Puis, lorsque le champ magnétique continue à augmenter, la largeur homogène subit une augmentation jusqu’à atteindre 10.7 kHz à 1 T. Aux champs magnétiques supérieurs à 1 T, la largeur homogène diminue progressivement jusqu’à environ 1.8 kHz à 3 T. Ce type de variation de la largeur homogène en fonction du champ magnétique appliqué a déjà été observé dans Er3+:Y

2SiO5 [207] ainsi que dans d’autres terres rares paramagnétiques

a) Explication qualitative des variations de Γh

Les variations de la largeur homogène peuvent s’expliquer de manière qualitative en analysant les différents processus pouvant apporter de la décohérence. Comme nous l’avons déjà vu plusieurs fois dans ce manuscrit, la largeur homogène peut s’écrire ainsi :

Γh = 1

fiT2 =

1

fi2T1 + Γφ (VI.5)

Avec T1 représentant le temps de vie de la transition, et Γφ la contribution des processus

de déphasage à la largeur homogène.

Les processus que nous allons considérer ici sont : • Les relaxations spin-spin entre ions Er3+(flip-flops)

• Les relaxations spin-réseau

Les relaxations des ions Y3+ sont négligées pour des raisons que nous avons déjà évoquées

dans les chapitres IV et V. Les deux processus énumérés sont susceptibles d’intervenir dans les deux termes présents dans l’équation (VI.5). Pour l’instant, nous n’allons pas chercher à savoir quel terme domine, ni quel site des ions Er3+ crée la majeure partie de

la diffusion spectrale.

Le déclin rapide de la largeur homogène à très bas champ magnétique est attribué à la réduction des interactions spin-spin entre les ions Er3+. En effet, si l’on suppose que

la largeur inhomogène de spin est essentiellement due à une distribution en facteur g (c’est-à-dire que Γinh,spinà BΔg), on peut estimer le taux de flip-flop d’après l’équation

(VI.1) [77]: Rff = γBΔgsech 2( ΔE 2kBT)

Où γff représente le paramètre de couplage effectif des spins dans la direction du champ

magnétique, ΔE représente l’énergie de la transition Zeeman (µBgB) pour un champ B

d’intensité B et de direction donnée. On voit ici que la réduction des flip-flops est d’autant plus efficace que Δg est grand.

À partir d’un champ de 0.2 T, la largeur homogène se met à augmenter. Cela corres- pond à une augmentation des processus spin-réseaux, et notamment du processus direct dont le taux s’exprime ainsi (voirI.6.1):

RD = αDg3B5coth(

µBgB

2kBT)

Les autres processus spin-réseau : Orbach et Raman ne dépendent pas du champ magné- tique (voir I.6.2 etI.6.3), et sont très peu présents aux températures en dessous de 3 K. Ici la température est de 1.7 K.

Aux grands champs magnétiques, ici pour B > 1T , les énergies des transitions Zee- man µBgB deviennent plus grandes que 2kBT , les spins commencent donc à peupler l’état

Zeeman de plus basse énergie, et le terme coth(µBgB

2kBT) décroit lorsque B augmente, ce qui

VI.3 Effet du désordre dans Er3+,Sc3+:Y

2SiO5 167

b) Contribution des flip-flops à Γh

Comme nous l’avons vu dans le paragraphe précédent, si l’on veut regarder l’effet des relaxations croisées entre les ions Er3+, il faut regarder aux bas champs magnétiques,

avant que les relaxations spin-réseau soient le processus limitant la cohérence.

Nous pouvons voir sur la figureVI.12que la valeure minimale de Γh mesurée aux bas

champs magnétiques est de 101 kHz pour un champ magnétique de 0.2 T. Cette valeur est légèrement inférieure à celle mesurée dans un cristal de Er3+:Y

2SiO5 dopé également à 30

ppm [207]. Il se pourrait donc qu’il y ait une réduction des processus de flip-flop due au co-dopage, même s’il est difficile de comparer ces deux mesures sachant qu’elles n’ont pas été faites pour une même orientation du champ magnétique. En effet B est proche de D2

dans la mesure présentée ici, alors que B || D1 dans [207]. Des mesures complémentaires

de Γh à bas champ magnétique, pour différentes directions de ce champ simultanément

dans (0.003%)Er3+,(1%)Sc3+:Y

2SiO5 et (0.003%)Er3+: Y2SiO5 apporteraient plus d’in-

formations sur une réduction éventuelle des processus de flip-flop.

Les résultats obtenus par co-dopage avec Eu3+ décrivent une largeur homogène de

Γh ¥ 50 kHz pour un cristal de 0.2% Er3+,1% Eu3+:Y2SiO5 pour un champ de 0.5 T

proche de D2 à 1.6 K. Si l’on considère que la contribution à la diffusion spectrale de

la part des ions Er3+ dépend linéairement de leur concentration [47], on s’attendrait a

7.5 kHz pour une concentration de 0.003%, qui est celle de l’échantillon utilisé pour nos mesures. Cette valeur est proche des 6 kHz mesurés ici. On peut donc supposer que l’ajout de 1% de Sc3+ n’ajoute pas d’effet supplémentaire causant de la décohérence tels que des

modes de désordre appelés TLS (two level systems), que l’on trouve dans certains cris- taux ayant beaucoup de défauts et également dans des matériaux complètement amorphes comme les verres [225,226,227,228].

Une étude des processus apportant de la diffusion spectrale limitant Γh aux champs

magnétiques supérieurs à 200 mT est détaillée dans l’annexe F.2. Cette étude explique les variations de Γh pour ces champs magnétiques. Elle montre également que la diffusion

spectrale due aux Er3+ dans le site 1 est bien plus importante que celle des ions dans le

site 2. Leurs contributions respectives à Γh sont visibles sur la figure VI.12. Cela vient

du fait que pour cette orientation du champ magnétique, le facteur g effectif du site 1 est bien plus grand que celui du site 2 (11 contre 4.1), et que le taux de relaxation du processus direct à un phonon possède une dépendance en g3, voirI.6.1.

VI.3.5 Conclusions

Cette étude montre que l’ajout de 1% de scandium dans un cristal de Y2SiO5 induit

une distribution de contraintes dans le matériau. Les conséquences de ces contraintes sont un élargissement important inhomogène à la fois des raies optiques (X 60) et des raies de spin électroniques visibles en RPE (X 13.5) par rapport à un cristal sans co-dopage. Ce large effet est notamment dû à la grande différence de rayon ionique entre Sc3+ et Y3+,

l’ion substitué par Sc3+. Une étude RPE en fonction de la direction du champ magnétique

électronique, dont une part peut être interprétée comme une distribution de tenseurs g. Ces variations suggèrent également qu’un autre phénomène agit sur cette anisotropie de largeur de raies.

Des mesures de largeur homogène de la transition optique en fonction du champ ma- gnétiques (entre 0 et 3 T) ont également été réalisées par technique d’écho de photons. Leur variations en fonction de l’intensité du champ sont celles attendues pour un ion de terre rare paramagnétique dans ce type de matrice. À bas champs, les processus spin-spin (flip-flops) limitent le temps de cohérence, tandis qu’aux champs plus élevés, la diffusion spectrale est apportée par des relaxations spin-phonons (processus direct). Pour l’orienta- tion de champ magnétique étudiée, un modèle simplifié de diffusion spectrale permet de montrer que ce sont les ions Er3+ présents dans le site 1 qui apportent la majeure partie

de la décohérence entre 200 mT et 2 T.

En outre, ces mesures montrent que l’ajout de Sc3+ n’ajoute pas de processus sup-

plémentaire causant de la décohérence. Des largeurs homogènes telles que 1.5 kHz ont pu être mesurées à bas champ magnétique. Des mesures de la largeur homogène à bas champs magnétiques et selon différentes orientations pourraient permettre de conclure sur un l’effet de l’élargissement inhomogène de spin sur la réduction des flip-flops. Ces résultats montrent que Er3+,Sc3+ :Y

2SiO5 possède un ratio Γinhh 50 fois plus grand

qu’un cristal Er3+:Y

2SiO5. Cette propriété est d’un intérêt certain pour des applications

de mémoire quantique à large bande spectrale ou bien d’analyse hyperfréquence.