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IGHMBP2

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Chapitre III. Les hélicases UPF1-like

III.1. IGHMBP2

Rôle cellulaire

IGHMBP2 (Immunoglobulin µ binding protein 2) est une protéine dont le rôle reste à ce jour débattu. Depuis sa découverte, diverses publications ont proposé des rôles pour IGHMBP2 dans la commutation de classes des immunoglobulines (Fukita et al., 1993), la transcription (Molnar et al., 1997), la régulation de la réplication de l’ADN (Mizuta et al., 1993), et la traduction (Guenther et al., 2009; de Planell-Saguer et al., 2009). Les données les plus récentes proposent une association d’IGHMBP2 avec les polysomes, et une dissociation à l’étape d’élongation de la traduction (Guenther et al., 2009). L’homologue d’IGHMBP2 chez S. cerevisiae, nommé HCS1 (ou DNA polymerase alpha-

associated DNA helicase A) a initialement été identifié comme un composant du

complexe multi-protéique formant la polymérase α de levure (Biswas et al., 1997). L’intérêt pour IGHMBP2 s’est accru avec la découverte de la maladie neurodégénérative DSMA1 ou amyotrophie spinale distale de type 1 (Distal Spinal

Muscular Atrophy Type 1). Cette maladie est caractérisée le plus souvent par une atrophie

musculaire distale, des déformations du pied et une insuffisance respiratoire aiguë liée à une paralysie du diaphragme nécessitant souvent une intubation en urgence. Cette maladie est souvent létale à un jeune âge ; elle est fréquemment due à des mutations dans le gène IGHMBP2 (Grohmann et al., 2001; Guenther et al., 2007; Jędrzejowska et al., 2014; Porro et al., 2014). De plus, certaines mutations affectant le taux d’expression de la protéine IGHMBP2 conduisent à la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 2 (CMT), pathologie neuromusculaire évolutive atteignant les nerfs périphériques (Cottenie et al., 2014).

Propriétés enzymatiques

La protéine IGHMBP2 humaine et ses homologues chez les mammifères sont formés de trois domaines principaux. Le domaine N-terminal formant les 2/3 de la protéine correspond à un domaine hélicase UPF1-like. Il est suivi d’un domaine dit « R3H » (arginine-X-X-X-histidine), et d’un domaine de type doigt de zinc « ZnF » (Zinc

finger) du côté C-terminal. Une grande partie des mutations d’IGHMBP2 engendrant la

maladie DSMA1 sont localisées dans le domaine hélicase. Guenther et ses coll. ont montré qu’une protéine recombinante englobant la totalité d’IGHMBP2 humaine est capable d’hydrolyser l’ATP, et que cette activité est stimulée par la présence de substrats d’ADN ou d’homopolymères d’ARN, montrant ainsi qu’IGHMBP2 est capable de séparer des substrats ARN/ARN et ADN/ADN avec une polarité 5’-3’. De plus, ils ont testé l’impact d’une partie des mutations causant la maladie DSMA1 sur l’activité enzymatique, montrant que certaines de ces mutations impactent l’activité ATPase, hélicase, ou les deux à la fois. Ces mutations n’impactent pas l’association d’IGHMBP2 au ribosome, suggérant que la maladie DSMA1 est due à un défaut enzymatique d’IGHMBP2, et non à un problème de localisation.

Le domaine ZnF d’IGHMBP2 n’a pas encore été caractérisé. Quant à R3H, ce domaine est un module retrouvé dans plus de 700 protéines, en général en combinaison avec d’autres domaines, dont des hélicases. Ce domaine aurait un rôle de liaison aux

acides nucléiques. Son rôle n’a pas été étudié dans le contexte de la protéine entière IGHMBP2 humaine. Cependant, une étude comparant l’activité du domaine hélicase d’IGHMBP2 humaine seule à celle d’IGHMBP2-R3H de souris propose que le domaine R3H augmenterait l’affinité d’IGHMBP2 a son substrat (Lim et al., 2012).

De façon intéressante, l’homologue de levure HCS1 d’IGHMBP2 comporte uniquement le domaine hélicase. Les domaines R3H et ZnF ont donc probablement étaient acquis durant l’évolution pour accomplir des fonctions spécifiques chez les eucaryotes supérieurs.

Structures

IGHMBP2 fut la deuxième protéine de la famille UPF1-like à être cristallisée. Les structures disponibles pour IGHMBP2 sont celles du domaine hélicase seul, lié ou non à un ARN (Lim et al., 2012). La structure du domaine R3H est aussi connue grâce aux techniques de RMN (Jaudzems et al., 2012). Le domaine R3H (PDB 2LRR) est caractérisé par un résidu arginine invariable et un résidu histidine hautement conservé, séparés par 3 résidus (Grishin, 1998). Il est organisé en 3 brins β antiparallèles et 2 hélices α (Figure

15), formant une surface chargée positivement (Liepinsh et al., 2003). Le domaine

hélicase d’IGHMBP2 (PDB 4B3F) ressemble globalement à celui d’UPF1. Il est formé de deux domaines RecA-like 1 et 2, et de 2 protrusions 1B et 1C émergeant de RecA1 à des positions équivalentes à celles d’UPF1. La protrusion 1B est soutenue par 2 hélices similaires à UPF1 (stalks). Cependant l’une de ces hélices est plus longue chez IGHMBP2 et impacte l’orientation de la protrusion 1B, qui est inclinée vers la protrusion 1C en

Figure 15 : structure des différents domaines d’IGHMBP2.

La superposition de structures à gauche correspond à un alignement de la structure cristallographique du cœur hélicase d’IGHMBP2 (PDB 4B3F) avec celle d’UPF1 (2GK6). Les deux protéines recombinantes ont été cristallisées sans acides nucléiques. L’alignement de structures est effectué selon la position du domaine RecA1. UPF1 est en gris clair. Les domaines RecA1, RecA2, 1B et 1C de l’hélicase IGHMBP2 sont représentés avec le même code couleur qu’UPF1. L’encadré à droite comporte la structure du domaine R3H d’IGHMBP2 obtenue par RMN (2LRR).

absence d’acides nucléiques (Lim et al., 2012).

La structure d’IGHMBP2 liée à un substrat d’ARN est aussi disponible (PDB 4B3G), mais uniquement avec un phosphate lié au site de liaison de l’ATP (Figure 16). Les éléments clés à tirer de cette structure sont les suivants :

• Le canal de liaison à l’ARN est situé entre les domaines RecA1, RecA2, 1B et 1C ; • Le squelette phosphate est principalement en contact avec la surface de RecA1 et

RecA2, alors que les bases azotées sont orientées vers le solvant ou la protrusion 1B ;

• Les protrusions 1B et 1C interagissent avec l’extrémité 3’ de l’ARN ;

• Suite à la liaison à l’ARN, la protrusion 1B s’écarte de 30ᵒ de sa position initiale, s’éloignant ainsi de la protrusion 1C mais se rapprochant de RecA1. La protrusion 1C s’écarte aussi de 10ᵒ vers l’extérieur. Ces changements sont remarquablement différents des changements ayant lieu suite à la liaison d’UPF1 à l’ARN ;

• Le site de liaison à l’ARN d’IGHMBP2 (9 nucléotides) est plus long que celui d’UPF1 ;

• La liaison à l’ARN induit aussi un changement conformationnel marqué au niveau d’une boucle à l’entrée de la protrusion 1C (résidus 264-273). Cette boucle se réorganise et réoriente un résidu arginine (R270) de la poche de liaison à l’ATP vers le site de liaison à l’ARN.

Figure 16 : superposition des structures du cœur hélicase IGHMBP2 avec et sans ARN.

L’alignement entre le cœur hélicase d’IGHMBP2 sans ARN (PDB 4B3F) et avec ARN (PDB 4B3G) est effectué selon la position du domaine RecA1. L’encadré montre le changement de conformation de la boucle 264-273 suite à la liaison à l’ARN, et en particulier le changement d’orientation de l’arginine 270 (R270) de la poche de liaison à l’ATP vers le site de liaison aux acides nucléiques.

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