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Discussion

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Chapitre I. La prise des hélicases UPF1-like sur leur substrat dicte leur processivité

II.3. Discussion

L’ensemble des résultats et des interprétations présentées dans ce chapitre ne permettent pas à ce stade de tirer des éléments concluants quant à la régulation mécanistique conjointe d’UPF1 par le domaine CH et le domaine 1B. Cependant, de ce chapitre ressort la complexité et la finesse des propriétés de cette hélicase, et bouleverse notre vision d’un rôle universellement inhibiteur du domaine CH.

Figure 38 : influence de la boucle régulatrice sur l’activité catalytique d’UPF1 CH-HD.

L’isoforme 1 d’UPF1 n’est pas inhibé en présence du domaine CH. Il présente des évènements de changement de brin fréquents accompagnés de changements de vitesse. Enregistrement de l’activité sur une tige-boucle d’ADN de 1,2 kb à l’aide de pinces magnétiques en conditions saturantes d’ATP.

Inhibition de l’hélicase UPF1 de S. cerevisiae

Malgré la conservation élevée d’UPF1 entre les eucaryotes, l’une des régions peu conservées est le domaine C-terminal d’UPF1 humaine, riche en sérines et glutamines (domaine SQ). Les travaux de notre équipe ont montré que ce domaine réduit in vitro l’activité ATPase d’UPF1 (Fiorini et al., 2013). Ce domaine n’étant pas conservé chez tous les eucaryotes, il se peut que la régulation de l’activité hélicase d’UPF1 soit moins stricte chez certaines espèces. Ceci pourrait justifier pourquoi nous n’observons pas une inhibition de l’activité hélicase de yUPF1 en présence du domaine CH, qui n’aurait peut- être pas un rôle inhibiteur chez S. cerevisiae. De façon intéressante, l’une des premières caractérisations de l’activité biochimique d’UPF1 fut réalisée sur des purifications d’UPF1 à partir d’extraits de S. cerevisiae (Czaplinski et al., 1995). La protéine purifiée est monomérique, hydrolyse de l’ATP, se lie à des simples brins d’ADN et d’ARN marqués, et sépare des hybrides d’ADN. Ces résultats montrent que la protéine entière, extraite des cellules de levure, est active et capable de séparer des doubles brins. Les conditions des tests étant différentes, nous ne pouvons pas comparer nos résultats à ceux de ce travail pour comparer les seuils d’activité. Mais cette publication réconforte l’idée que l’activité de l’hélicase yUPF1 pourrait ne pas être inhibée in vivo. Cette hypothèse ne remet pas en question le rôle indispensable du domaine CH pour assurer la liaison à UPF2, acteur essentiel de la voie du NMD chez la levure.

D’un point de vue mécanistique, il se peut que le mode de fonctionnement du domaine CH ne soit pas si diffèrent entre hUPF1 et yUPF1. Le retard que nous observons dans nos tests de séparation d’hybrides par yUPF1 CH-HD pourrait être dû à un délai d’activation, durant lequel le domaine CH doit changer de conformation. Ceci pourrait signifier que le domaine CH inhibe naturellement le domaine hélicase, mais que ce blocage serait progressivement levé après la fixation au substrat dans le cas de yUPF1. L’inhibition serait plus difficile à lever chez l’homme, vu la lenteur de la réaction de séparation des hybrides par hUPF1 en présence du domaine CH, et les évènements de blocage dans 50% des cas en molécule unique.

Interactions entre le domaine CH et la protrusion 1B

Vis-à-vis du rôle de la protrusion 1B dans la régulation de l’activité d’UPF1, nous avons vu dans le chapitre I que la protrusion 1B est indispensable à la processivité de l’hélicase. Dans ce deuxième chapitre, nous montrons qu’hormis la processivité, la protrusion 1B influe aussi sur les propriétés catalytiques du cœur hélicase, en particulier par des modifications d’une boucle de cette protrusion. Suite à toutes nos observations, nous proposons que le lien entre le domaine régulateur CH et la protrusion 1B s’étend au-delà d’un encombrement stérique qui place la protrusion 1B dans une position inhibitrice.

 Afin d’expliquer l’activité du mutant UPF1∆loop, nous proposons que l’élimination de la boucle 347-357 de hUPF1 découple la capacité d’UPF1 à séparer des doubles brins de sa capacité à hydrolyser l’ATP, mais aussi l’impact du domaine CH sur chacune de ces activités. En effet, la délétion de la boucle rend l’hélicase capable de séparer des hybrides malgré la présence du domaine CH, et ce même en

présence d’ADPNP, analogue non hydrolysable de l’ATP. Ces observations suggèrent que la capacité de séparation de double brin devient indépendante et non régulée quand la boucle est raccourcie. Le domaine CH reste cependant inhibiteur de l’hydrolyse d’ATP, vu que l’activité ATPase augmente quand le domaine CH est absent. Ces hypothèses nécessiteraient de refaire des tests de séparation d’hybrides par le mutant UPF1∆loop en absence totale d’ATP. Il serait aussi intéressant de tester ce mutant à l’aide des pinces magnétiques.

 Vis-à-vis de l’isoforme 1 d’UPF1, notre travail est le premier à caractériser son activité catalytique. Nous montrons ainsi qu’au sein d’une même espèce (homme), l’hélicase UPF1 pourrait avoir une activité catalytique différente suite à un évènement d’épissage alternatif. Il sera important de rechercher in vivo la spécificité de l'isoforme rare d’UPF1 et son rôle éventuel dans le cadre du NMD, mais aussi dans les autres voies de régulation dans lesquelles UPF1 est impliquée (Imamachi, 2012).

 Enfin, concernant l’influence de la boucle 1B sur le domaine CH, plusieurs pistes sont à exploiter. Du coté des structures, une structure cristallographique de hUPF1 CH-HD aiderait à vérifier le comportement de la protrusion 1B et la position de la boucle 347-357 en présence du domaine CH. Ceci permettrait de faire une comparaison structurale de hUPF1 et de yUPF1 dont la structure est déjà disponible (Chakrabarti et al., 2011).

 L’exploitation de la structure existante de yUPF1 CH-HD nous donne quelques pistes (Figure 31, structure 2XZL) vis-à-vis de l’isoforme longue de hUPF1. Dans cette structure, nous voyons que la présence du domaine CH pousse la protrusion 1B vers l’extrémité 3’ de l’ARN. Une interaction s’établit alors entre les acides aminés GDE 297-299 de la protrusion 1B et l’ARN. Ces 3 résidus sont conservés chez hUPF1 (GDE 359-361), et se situent juste en aval de la boucle 347-357. Nous pouvons imaginer que dans l’isoforme 1 de hUPF1, l’ajout de 11 acides aminés juste avant GDE 359-361 décalerait leur position et altèrerait ou abolirait le contact de ces résidus avec l’ARN sur le côté 3’, impactant ainsi la régulation par le domaine CH. Il est aussi intéressant à noter le basculement de la protrusion 1B du coté 5’ vers le coté 3’ de l’ARN, qui laisse supposer un mouvement régulier de cette protrusion durant la translocation de l’hélicase sur les acides nucléiques.

 Nos résultats apparemment contradictoires pour l’isoforme UPF11 entre les tests d’ensemble et les tests en molécule unique pourraient résulter à la fois d’une différence dans le type de substrat utilisé, et de l’état oligomérique d’UPF1. Malgré plusieurs preuves d’un état monomérique d’UPF1 CH-HD en solution, le comportement de l’isoforme 1 que nous observons en molécule unique (changement de brin et de vitesse) pourrait refléter une multimérisation, d’une certaine façon due à la présence du domaine CH. Par exemple dans nos tests de molécules uniques, l’hélicase traverse une longue distance lentement, ce qui donne le temps à des dimères de se former ; ceci conduirait aux changements brusques de vitesses et au changement de brin. Dans nos tests de séparation d’hybrides, l’hélicase n’a qu’un simple brin court pour se charger, et uniquement 21 nucléotides à séparer, ce qui ne donnerait pas l’occasion d’observer ces divers évènements.

Chapitre III. Caractérisation de nouveaux partenaires d’UPF1 de la

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