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Identification des protéines oxydées dans une souche sauvage non traitée

B. Identification des protéines oxydées

1. Identification des protéines oxydées dans une souche sauvage non traitée

Les protéines oxydées d’une souche sauvage en phase de croissance exponentielle sont marquées par la Biotine-HPDP puis purifiées selon la méthode décrite auparavant (voir paragraphe A.3.c et figure 12). Le gel bidimensionnel des protéines purifiées, colorées au bleu de Coomassie, et identifiées par analyse en spectrométrie de masse MALDI-TOF est présenté en figure 17A. Lorsque nous comparons ce protéome des protéines oxydées avec celui obtenu après marquage par le NEM C14 (figure 17B), nous observons une distribution très similaire. Cette redondance du marquage prouve la grande spécificité des deux méthodes de détection des thiols oxydés.

Les deux protéomes contiennent environ 200 spots de protéines dont 64 ont été identifiées de façon certaine par une analyse en MALDI-TOF-MS. La majorité de ces protéines est localisée dans le cytoplasme (57/64). Toutefois, quelques protéines appartenant à d’autres compartiments cellulaires sont également identifiées: la Pdi1 du réticulum endoplasmique, Prx1, Mdh1, Por1, Hsp60, Ilv5 localisées dans la mitochondrie et Pep4 contenue dans la vacuole (voir tableau 1). Nous avons pu observer que ces protéines disparaissent du protéome oxydé lorsque la purification est réalisée sur des extraits cytosoliques purs, isolés par centrifugation différentielle à partir d’un lysat de sphéroplastes (non illustré).

Le principal constat est que les protéines oxydées sont nombreuses dans une cellule au repos et appartiennent à plusieurs voies métaboliques: antioxydants, oxydoréductases, chaperons, enzymes du métabolisme énergétique et des carbohydrates, enzymes de la voie de biosynthèse des acides aminés, facteurs

intervenant dans la traduction des protéines (voir tableau 1). La plupart de ces protéines a également été retrouvée sous une forme oxydée dans d’autres organismes, notamment chez E.coli (Leichert and Jakob, 2004) et les mammifères (Cumming et al., 2004), (Brennan et al., 2004), (Fratelli et al., 2002), (Baty et al., 2005), nous confortant ainsi dans la spécificité de détection des protéines oxydées. La présence de protéines oxydées dans le cytoplasme d’une cellule au repos est néanmoins surprenante, de par la présence des voies de réduction des thiols oxydés, assurant un flux continu d’équivalents réducteurs (voir introduction).

Parmi les protéines que nous avons identifiées, le mécanisme d’oxydation de quelques unes est particulièrement bien documenté, mais pour la plupart, il n’existe pas de référence dans la littérature. Les protéines retrouvées sous une forme oxydée dans d’autres analyses sont indiquées dans le tableau 1. Nous avons également répertorié dans le tableau 1 les protéines contenant dans leur site actif catalytique ou de coordination des métaux, un ou plusieurs thiols susceptibles de s’oxyder.

La première catégorie de protéines possédant des thiols oxydés dans une cellule au repos est représentée par les protéines «redox». Par exemple, les peroxydases Tsa1 et Ahp1 sont oxydées en l’absence de tout traitement. Ces enzymes possèdent une cystéine qui catalyse la réduction des peroxydes (voir introduction III.B.1a), comme nous l’avons décrit précédemment pour Tsa1. Leur oxydation partielle reflète donc la présence de leur activité permanente, impliquant l’existence de peroxyde endogène au sein de la cellule. Dans les mêmes conditions de culture, la Trr1 (voir introduction III.A) et la Pdi1 (voir introduction IV.B) (Frand and Kaiser, 1999) sont oxydées, corrélant ainsi avec leur activité respective de thiol- réductase et de thiol-oxydase, y compris en absence de stress. Le mécanisme d’oxydation des thiols est différent pour la Sod1 puisque qu’elle possède un pont disulfure intramoléculaire essentiel à son activité de dismutation de l’anion superoxyde O2- (Furukawa et al., 2004).

Les enzymes du métabolisme des carbohydrates identifiées dans notre analyse représentent la majorité du protéome oxydé, et sont assez systématiquement retrouvées dans ce type d’études. L’oxydation de ces protéines implique probablement, dans leur site catalytique ou de coordination des métaux,

Figure 17. Identification des protéines oxydées purifiées par la Biotine-HPDP et comparaison avec les protéines oxydées marquées par le NEM C14.

(A) Les protéines purifiées de la figure 12A sont identifiées par analyse en spectrométrie de masse MALDI-TOF et répertoriées dans le tableau 1. (B) Les protéines oxydées sont marquées par le NEM C14 comme indiqué dans la figure 4.

PI PM 3 10 15 20 40 140 Cpr1 Ubc4 Tsa1 Ahp1 Tif51a Sod1 Tpi1 Rps5 Ubc1 Sec53 Efb1 Tma19 Tdh3 Ura1 Trr1 Asc1 Gpp1 Ipp1 Ado1 Pep4 Pdi1 Sse1 Ssa2 Ssb1 Hsp60 Ald6 Leu1 Met6 Aco1 Tkl 1 Cdc19 Tef1 Pdc1 Met17 Yhb1/Psa1 Sam1 Sam2 Gdh1 Hxk2 Fba1 Cpr6 Eno2 Pmi40 Adh1 Pgk1 Hom2 Ilv5 Shm2 Por1 Gsp1 Rpl12a Cdc48 Eno1 Cys4 Mdh1 Guk1 Rsp0a Sti1 A .

Par exemple, la glycéraldéhyde-3-phosphate déshydrogénase (GAPDH ou Tdh3) est un enzyme de la glycolyse identifié comme étant oxydé dans notre étude ainsi que par d’autres auteurs (Baty et al., 2005), (Brennan et al., 2004), (Cumming et al., 2004), (Shenton and Grant, 2003), (Leichert and Jakob, 2004). Cette protéine possède dans son centre catalytique un résidu cystéine très réactif, capable de s’oxyder in vivo sous différentes formes: nitrosylée, suroxydée, pont disulfure intermoléculaire avec le GSH (glutathionylation) ou avec elle même. La glutathionylation de la Tdh3 en présence d’agents oxydants permet de réguler la glycolyse en augmentant la production de NADPH par la voie des pentoses- phosphates (Shenton and Grant, 2003). L’absence de GSH peut conduire à la suroxydation de la cystéine, provoquant l’inactivation de Tdh3 (Shenton and Grant, 2003). La suroxydation de la GAPDH a d’ailleurs été décrite chez les mammifères (Woo et al., 2005). La nitrosylation de la GAPDH provoque sa liaison avec l’ubiquitine ligase Siah1, conduisant à sa translocation nucléaire puis à l’apoptose (Hara et al., 2005). La GAPDH peut aussi se complexer avec elle-même et former des agrégats liés entre eux par des ponts disulfures intermoléculaires que l’on retrouve dans la maladie neurodégénérative d’Alzheimer (Cumming and Schubert, 2005). Certaines protéines intervenant dans la traduction ont également été décrites comme étant oxydées in vivo (Cumming et al., 2004) ou glutathionylées (Shenton and Grant, 2003), (Fratelli et al., 2002), ces formes d’oxydation étant éventuellement capables d’inhiber la synthèse protéique. Les chaperons appartenant à la famille des HSP70 sont aussi capables de former des ponts disulfure intra/intermoléculaires (Brennan et al., 2004), (Cumming et al., 2004) ou d’être glutathionylés (Fratelli et al., 2002), (Shenton and Grant, 2003). Les enzymes de conjugaison de l’ubiquitine ont également été détectées sous forme glutathionylée (Fratelli et al., 2002) et peuvent être régulées de façon redox (Obin et al., 1998).

Conclusion

La majorité des protéines oxydées que nous avons identifiées dans cette étude sont également retrouvées dans d’autres analyses similaires effectuées chez différents organismes, indiquant d’une part, la reproductibilité des résultats et d’autre part, la conservation des mécanismes d’oxydation entre les différentes espèces.

appartenant à différentes classes fonctionnelles sont très fortement exprimées à l’échelle du protéome, et nous n’avons aucune information pour les protéines de faible abondance. Ceci justifie pleinement l’étape d’égalisation des protéines avant leur purification.