Chapitre 4 : Etude expérimentale de l'effet de la contrainte sur la microstructure des boucles à
V.1 Présentation du modèle de dynamique d’amas
V.1.1 Hypothèses et équations du modèle
V.2
Identification des paramètres et validation du modèle sur les irradiations aux électrons 178
V.2.1 Démarche adoptée... 178 V.2.2 Identification et validation du modèle sur la base des expériences d’irradiation aux électrons 180
V.3
Application du modèle aux irradiations aux ions ... 196
V.3.1 Modélisation de la microstructure du Zircaloy-4 irradié aux ions sans contrainte ... 196 V.3.2 Modélisation de l’effet de la contrainte sur la microstructure des boucles à composante < " >201
V.4
Application du modèle à la prédiction de la croissance sous irradiation du zirconium .... 210
V.4.1 Calcul de la déformation de croissance sous irradiation dans le modèle de dynamique d’amas210 V.4.2 Simulation de la croissance sous irradiation et confrontation aux données expérimentales de la littérature ... 212
V.5
Conclusions sur la modélisation par la méthode de dynamique d’amas de la
microstructure et de la croissance sous irradiation du zirconium et du Zircaloy-4 ... 220
Chapitre 5 MICROSTRUCTURE ET DE LA CROISSANCE SOUS IRRADIATION DU
ZIRCONIUM ET DU ZIRCALOY-4
V.1 Présentation du modèle de dynamique d’amas
La prédiction de la cinétique de formation et d’évolution d’amas de défauts ponctuels est d’importance majeure pour l’étude de l’endommagement des matériaux métalliques sous irradiation. Vers la fin des années 60, des approches de cinétique chimique, dites de « Rate Theory », [1], [2] ont été mises en place pour décrire l’évolution au cours du temps des défauts ponctuels créés sous irradiation en considérant des forces de puits constantes. Historiquement, ces approches ont été enrichies par l’introduction d’amas formés par agglomération de défauts ponctuels. C’est ainsi que la méthode de dynamique d’amas a vu le jour [3], [4]. Cette méthode s’appuie sur un ensemble d’équations cinétiques basées sur les taux de production, de recombinaison, d’absorption et d’émission d’amas de défauts ponctuels. Les premiers modèles de dynamique d’amas, comme le modèle développé par Hardouin Duparc et al. [5] pour les aciers ferritiques, ont considéré une diffusion purement isotrope des défauts ponctuels. Pour les métaux de structure hexagonale compacte, et plus particulièrement pour le zirconium et ses alliages, la diffusion des auto-interstitiels est anisotrope (§ I.2.2.1). En s’appuyant sur le modèle de DAD (Différence d’Anisotropie de Diffusion) proposé par Woo [6] pour les métaux non cubiques, Christien et Barbu [7] ont étendu le modèle de dynamique d’amas décrit par Hardouin Duparc et al. [5] au cas du zirconium où la diffusion des SIAs est anisotrope.
Pour ce travail de thèse, nous utilisons le code de dynamique d’amas CRESCENDO développé par Jourdan [8]. Dans cette partie, nous présentons tout d’abord les hypothèses et les équations du modèle avant de détailler, plus spécifiquement, les coefficients cinétiques régissant l’absorption et l’émission des défauts par les boucles de dislocation. Un intérêt particulier sera porté à la nouvelle méthode de calcul des énergies de boucles de dislocation, implémentée dans la version récente du code de dynamique d’amas.
V.1.1 Hypothèses et équations du modèle
Le modèle de dynamique d’amas est un modèle physique de champ moyen qui permet de simuler l’évolution au cours du temps d’une population de défauts (boucles de dislocation, cavités). Le milieu réel est assimilé à un milieu homogène équivalent dans lequel les corrélations spatiales entre les défauts ne sont pas prises en compte (Figure V.1.1). Cette approximation en champ moyen permet de réduire les temps de calcul. Dans certains cas, il est nécessaire d’intégrer la dépendance spatiale des distributions d’amas de défauts, le système restant homogène localement. Nous citons, par exemple, le cas de la simulation des lames minces où la distribution spatiale des boucles de dislocation < ! > peut varier à proximité des surfaces libres (§ I.2.3.2.4). Dans une version récente du code de dynamique d’amas CRESCENDO, Jourdan [8] a introduit la dépendance spatiale à une dimension dans les équations différentielles décrivant l’évolution des amas de défauts ponctuels. Dans la suite de ce chapitre, nous considérons une version antérieure dans laquelle la dépendance spatiale n’est pas prise en compte (Figure V.1.1).
Milieu réel Milieu homogène: gaz dilué d’amas de défauts ponctuels
A
>, A
#>, A
$>…
A
;, A
#;, A
$;…
BCD: concentration volumique des amas contenant C défauts ponctuels de type D (D= E pour les SIAs et D = F pour les lacunes)
Dans le modèle, chaque amas formé par agglomération des défauts ponctuels est caractérisé par son type et ses propriétés (amas planaire ou tridimensionnel, plan d’habitat, vecteur de Burgers, etc.), son caractère interstitiel ou lacunaire et le nombre de monomères le constituant. Les amas constitués du même type et nombre de monomères sont considérés identiques et sont regroupés en une classe d’amas. Pour chaque classe d’amas est définie une équation différentielle permettant de suivre l’évolution au cours du temps de sa concentration. L’expression générale de cette équation différentielle est donnée ci-dessous pour une classe$ª d’amas de défauts créés sous irradiation :
Œž— Œµ = y—9 ç ÙL.- ªM$žšr š ç ÙLª- .M$ž—r š Í— Eq. V.1.1
avec ž— la concentration des amas de classe$$ª, y— le terme de production par irradiation des amas de classe ª, ÙL.- ªM le taux de transition par unité de concentration d’un amas de classe . en un amas de classe$ª, ÙLª- .M le taux de transition par unité de concentration d’un amas de classe ª en un amas de classe . et Í— le taux net d’élimination des amas de classe ª sur les puits de la microstructure (dislocations, surfaces libres, joints de grains).
Ce système d’équations couplées (Eq. V.1.1) est résolu numériquement, ce qui permet d’obtenir la distribution des concentrations des classes d’amas. Pour des temps d’irradiation assez longs, nous pouvons être amenés à résoudre un nombre très important d’équations. A titre indicatif, la détermination des concentrations de boucles de dislocation < ! > d’une taille allant jusqu’à 50 nm requiert la résolution d’environ 28000 équations différentielles. Dans le but de réduire ce nombre et d’alléger les simulations, l’équation maîtresse Eq. V.1.1 est approximée par une équation de Fokker-Planck pour les amas de grande taille (§ V.1.1.2). L’évolution de la distribution des classes d’amas est donc décrite par deux types d’équations, des équations discrètes pour les amas de petite taille et des équations continues de Fokker-Planck pour les amas de grande taille.
V.1.1.1 Equations maîtresses (région « discrète », petits amas)
Nous considérons dans la suite que seuls les monomères sont mobiles.
L’évolution de la distribution des amas interstitiels et lacunaires contenant ~ > 2 monomères est régie par le système d’équations différentielles couplées suivant :
Œž~0 Œµ = y~09
ø
õL0~r@M0ž@09
BLù~r@M0ú
žL~r@M09ø
õLù~9@M0ž@ù9 BL0~9@M0ú
žL~9@M0 r£
B~00 9 B~0ù 9 õù~0ž@ù 9 õ~00 ž@0¥
ž~0 Eq. V.1.2 Œž~ù Œµ = y~ù9øõ
Lù~r@Mùž@ù9
BL0~r@Mùú
žL~r@Mù9øõ
L0~9@Mùž@09 BùL~9@Mùú
žL~9@Mù r£B
~ùù 9 B~ù0 9 õ0~ùž@09 õ~ùù ž@ù¥ž
~ù Eq. V.1.3žsû est la concentration volumique des amas contenant ~$défauts ponctuels de type » (» = 0 pour les auto-interstitiels et » = ù pour les lacunes), ysû est le taux de production des amas de classe ~», õsûûüž2ûü est le taux de capture d’un défaut ponctuel de type »ý par un amas de classe$$~» et Bsûûü est le taux d’émission d’un défaut ponctuel de type »ý par un amas de classe$~».
Pour ~ =1 et ~ =$2, les équations discrètes s’écrivent comme suit : Œž6–
Chapitre 5 MICROSTRUCTURE ET DE LA CROISSANCE SOUS IRRADIATION DU
ZIRCONIUM ET DU ZIRCALOY-4
Œž6È Œµ = õ2ÈÈ ž2Èž2Èr B6ÈÈ ž6Èr B6È– ž6Èr õ6ÈÈž2Èž6È9 B7ÈÈž7Èr õ6È– ž2–ž6È9 õ7È– ž2–ž7È Eq. V.1.5 Œž2– Œµ = y2–r i–Èž2–ž2Èr •x–ž2–r •‚–ž2–r Põ2––ž2–ž2–9 PB6–– ž6–9 õ6–Èž2Èž6– r ž2–ç õs–– sþ6 žs–r ž2–ç õsÈ– sþ6 žsÈ9 ç Bs–– sþ7 žs–9 ç BsÈ– sþ7 žsÈ Eq. V.1.6 Œž2È Œµ = y2Èr i–Èž2–ž2Èr •xÈž2Èr •‚Èž2Èr Põ2ÈÈž2Èž2È9 PB6ÈÈž6È9 õ6È– ž2–ž6È r ž2Èç õsÈÈ sþ6 žsÈr ž2Èç õs–È sþ6 žs–9 ç BsÈÈ sþ7 žsÈ9 ç Bs–È sþ7 žs– Eq. V.1.7avec$i–È$le taux de recombinaison d’un auto-interstitiel avec une lacune, •xûž2û$le taux d’élimination d’un défaut ponctuel de type » par les dislocations droites et •‚ûž2û le taux d’annihilation d’un défaut ponctuel de type » sur les surfaces ou les joints de grains.
V.1.1.2 Equations de Fokker-Planck (région « continue », amas de grande taille)
Pour les amas ayant un nombre de défauts supérieur à une valeur critique$•D, l’évolution de leur concentration$žû$est traduite par l’équation suivante de Fokker-Planck avec$$ÿ$$le nombre de monomères les constituant :
žûLÿ- µM
µ = r [QûLÿMž ÿûLÿ- µM]9 ²[ŒûLÿMž ÿ²ûLÿ- µM] Eq. V.1.8 Les fonctions Qûet Œû
$
s’expriment en fonction des termes d’absorption et d’émission :Q–LÿM = õÑ–– ž2–r õÑ–Èž2Èr BÑ–– 9 BÑ–È Eq. V.1.9 QÈLÿM = õÑÈÈ ž2Èr õÑÈ– ž2–r BÑÈÈ 9 BÑÈ– Eq. V.1.10 Œ–LÿM =@P £õÑ–– ž2–9 õÑ–Èž2È9 BÑ–– 9 BÑ–È¥ Eq. V.1.11 ŒÈLÿM =@P [õÑÈÈ ž2È9 õÑÈ– ž2–9 BÑÈÈ 9 BÑÈ– ] Eq. V.1.12
Pour simuler rapidement l’évolution des grandes boucles, la discrétisation de cette équation (Eq. V.1.8) dans l’espace des tailles ÿ se fait avec un pas ¸ÿ$variable. Le premier pas est pris égal à 1 afin d’assurer la continuité entre la région des équations discrètes et celle des équations continues. Puis, ¸ÿ suit une progression géométrique. Avec une telle « construction », le modèle peut traiter avec une durée de calcul raisonnable les échelles de temps explorées expérimentalement, à savoir des journées et des années d’irradiation.
Les principaux défauts d’irradiation rencontrés dans le zirconium et ses alliages sont les boucles de dislocation. Deux populations de boucles sont à distinguer : les boucles prismatiques < ! > de nature interstitielle et lacunaire et les boucles à composante < " > exclusivement lacunaires et situées dans le plan basal de la maille hexagonale compacte du zirconium. Les équations sont dupliquées pour pouvoir simuler ces deux types de boucles de dislocation. A un instant µ donné, la distribution des classes de boucles de dislocation, appartenant à ces deux populations, est représentée dans l’espace
des tailles à deux dimensions, schématisé dans la Figure V.1.2. Les paramètres ÙC$et ÙD$désignent les probabilités d’agglomération des lacunes en boucles de dislocation < ! > lacunaires ou en boucles à composante$< " >, respectivement. Pour l’ensemble des simulations présentées dans le cadre de ce travail, nous considérons par souci de simplicité une équiprobabilité d’agglomération en boucles < ! > lacunaires et en boucles à composante$< " >, ÙC$et $ÙD étant fixés à 0,5.