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Hypothèse des effets collectifs

Chapitre III : Mesures intégrées

3. PREMIERS RESULTATS : MESURES DANS L AIR 1 Méthodologie

3.3.1 Hypothèse des effets collectifs

Les acquisitions iCCD présentées ci-dessus montrent qu’un pic de courant élémentaire correspond à plusieurs filaments de plasma transportant la même charge. L’amorçage de ces filaments est synchrone sur un temps de 40 ns. Une telle synchronisation a déjà été observée en décharge de surface. Des images de la propagation de streamers engendrés par une décharge pulsée ont été prises par Roupassov

et al [Roupassov 06]. La géométrie est similaire à la nôtre (une DBD en surface avec des électrodes en

ruban). Les images montrent plusieurs filaments se propageant simultanément. Seulement dans ce cas, la synchronisation peut être imputée au front de montée rapide de la tension appliquée, qui atteint son maximum en moins de 10 ns.

nôtre et utilisant le même dispositif expérimental a été menée dans une configuration pointe/plan. Dans ce cas, un espace gazeux de 5 mm sépare le cylindre à haute tension du plan diélectrique. Les images ont montré que pour un pic de courant individuel, plusieurs filaments de plasma traversent simultanément le gaz et s’étalent sur le verre. [Célestin 08].

Dans notre cas, le front de montée de la tension appliquée est trop lent pour être tenu responsable du synchronisme des filaments. De plus, la disposition et l’aspect des filaments ne semblent pas être influencés par les variations de champ dus aux irrégularités de découpe de l’électrode. Le fait que les filaments soient synchronisés et adjacents semble dépendre d’un effet prédominant d’auto déclenchement de la décharge. Pour expliquer un tel comportement, une hypothèse a été développée sous le nom d’ « effets collectifs », ou « auto déclenchement » dans des travaux antérieurs menés par Olivier Guaitella pendant sa thèse [Guaitella 06, Guaitella Thèse].

Les effets collectifs proposent un mécanisme radiatif où les filaments se déclencheraient entre eux. Nous allons appliquer ce scénario à la configuration en surface, et l’expliquer pas par pas.

Figure 7: Schéma symbolisant la configuration de la décharge au début de l’alternance positive.

Au cours de l’alternance négative, la surface du diélectrique s’est chargée négativement. Puis la tension s’inverse, et nous nous retrouvons dans la configuration de la Figure 7.

Ainsi, si lorsque l’une de ces avalanches se transforme en streamer, le rayonnement émis par la tête va permettre de photo désorber les électrons environnants (Figure 9).

Figure 9: Photo désorption d’électrons de la surface par le rayonnement d’un premier streamer.

Ces électrons vont alors enrichir les avalanches voisines et déclencher l’amorçage des streamers voisins (Figure 10).

Figure 10: Streamers adjacents obtenus par effet collectif.

Un tel mécanisme est suffisamment rapide pour déclencher des filaments sur des temps de 40 ns. En effet, la distance typique entre deux filaments est de l’ordre de 1,5 ou 2 mm. Certains paquets de filaments peuvent être éloignés de quelques centimètres. Cela correspondrait à un temps de transit inférieur à la nanoseconde. De plus ce processus d’amorçage « de proche en proche » permet d’expliquer que l’on observe des filaments adjacents.

l’aluminium se couvre d’une fine couche d’oxyde. Cependant, il semble peu probable que les départs simultanés des filaments soient dus à ce phénomène car l’électrode est positive. La source la plus plausible reste les électrons de la surface.

Le photodéclenchement d’un filament par un autre a été observé expérimentalement en décharge de surface par Kashiwagi et al en 2006 [Kashiwagi 06]. La décharge est obtenue par deux électrodes sphériques sur une plaque de diélectrique. Les deux électrodes sont alimentées par le même pulse unique de 50 µs. L’empreinte des charges déposées sur la surfaces est obtenue par dust figure

technique et permet de mesurer la longueur des streamers. Les streamers des deux électrodes sont

considérés comme synchrones lorsque l’intervalle entre les deux pics de courant est inférieur à 100 ns. Ce critère a été posé en utilisant le temps nécessaire à un streamer pour se développer entièrement, à une vitesse de 108 cm/s. Les résultats ont montré que la décharge de la seconde électrode pouvait être déclenchée par le rayonnement UV-VUV (λ < 250 nm) de la première décharge. Ils ont aussi mis en évidence une condition de synchronisation sur la distance : la probabilité de déclenchement devient nulle pour une distance inter électrodes de 120 mm. Pour une telle distance, le rayonnement est absorbé avant d’atteindre la zone couverte par la seconde électrode.

Dans notre cas, la distance inter filaments est bien inférieure. On peut donc supposer que la lumière émise par un premier filament va déclencher ses voisins sans absorption significative. Ces voisins vont déclencher les streamers suivants, et ainsi de suite.

Le rayonnement mis en jeu dans l’étude de Kashiwagi et al met plus d’énergie en jeu que le 1 eV mentionné plus haut. En effet, dans leur expérience, la décharge est produite sur une surface vierge de toute charge. Ainsi, les processus radiatifs incriminés mettent en jeu les électrons du matériau diélectrique lui-même. Pour extraire un photo électron d’une surface de verre, il faut fournir beaucoup d’énergie : 5 eV, c'est-à-dire un rayonnement de λ < 250 nm. Dans notre cas la surface est déjà chargée, et le potentiel d’extraction est réduit. Bien qu’aucune donnée expérimentale ne soit disponible, certains auteurs considèrent une énergie de 1 eV [Golubovskii 02]. Comme les DBDs émettent majoritairement dans la zone 300-400 nm, une telle énergie peut être facilement fournie.

3.3.2 Disposition des charges adsorbées

En considérant des filaments déclenchés par le processus des effets collectifs, on suppose que leurs emplacements sont fortement liés à la disposition des charges adsorbées sur la surface. Les photos montrent des filaments de longueur très régulière (figure 5). Cela suppose donc un dépôt aussi régulier des charges négatives sur la surface.

La dust figure technique permet de cartographier la répartition des charges positives et négatives après le passage d’une décharge sur une surface. En effet, le temps de résidence des charges déposées sur un diélectrique après extinction de la décharge est très long, ce qui permet ce genre de manipulation. En saupoudrant des particules adaptées sur la surface, on obtient l’empreinte des charges déposées. Nous n’avons pas utilisé cette technique, mais elle est couramment utilisée dans la littérature.

Par exemple, Kozlov et al ont proposé un inventaire de l’empreinte de décharges de surface dans une configuration similaire à la monoface [Kozlov 03]. L’alimentation est pulsée, de durée variable (50 ns à 7 µs) et est appliquée sur divers types de surfaces (plexiglas, céramique…). Dans tous les cas, l’application d’un pulse négatif engendre un dépôt régulier et parallèle à l’électrode (Figure 11).

Figure 11: Exemples de répartition des charges présentées par Kozlov et al sur une surface de plexiglas. Image

de gauche : pulse de + 5 kV, image de droite : pulse de – 5 kV.

Cet article ne donne pas de détails sur la polarité des charges déposées. Par contre, Murooka et

al ont étudié la répartition des charges négatives et positives dans une décharge de surface pointe sur

plan [Murooka 73, Murooka 01]. Des particules d’oxyde de plomb colorées en rouge et chargées positivement permettent de tracer les dépôts négatifs. Les charges positives sont repérées grâce à des oxydes de soufre chargés négativement et de couleur presque blanche. Quelques exemples sont reportés sur la Figure 12.

Figure 12: Figures obtenues après application d’un pulse de tension négative de -12 kV. (a) : pulse de 10 ns,

(b) : pulse de 920 ns [Murooka 01].

Là encore, un pulse de tension unique est appliqué sur une surface propre. On peut voir qu’une décharge de polarité négative se caractérise par un dépôt négatif régulier en « tranche de citron » autour de l’électrode (Figure 12(a)). Lorsque le passage de charges est très important, les charges en surface engendrent un champ suffisamment fort pour induire une « décharge retour » lors de la chute de tension appliquée. Cette décharge est à l’origine des traces blanches au centre de la figure négative de la Figure 12(b).

Cette expérience montre l’importance des charges déposées pour la localisation des filaments de plasma. Dans le cas des décharges retour, nous voyons bien qu’elles sont « ancrées » sur le dépôt négatif et vont rejoindre l’électrode au centre. Gardons cette idée en tête pour étudier la longueur des filaments.

Il y a donc un « effet mémoire » important dû aux charges déposées en surface. Cet effet mémoire est illustré par l’expérience de Zhu et al, où la charge du diélectrique est cartographiée et

unique d’une tension sinusoïdale de 8 kV et 100 ms est résolue par pas de 3 ms (Figure 13). Cette expérience présente l’avantage de porter sur l’effet mémoire de la surface, et non sur une surface propre comme les articles précédents.

Figure 13 : Une période de la tension utilisée pour l’expérience. Les numéros correspondent aux images de la

figure suivante.

La période peut débuter par l’alternance positive ou négative, afin de visualiser l’influence de la polarité du premier dépôt. Cette expérience montre l’influence de la première alternance sur la suivante. Par exemple, si la période commence par la polarité positive, des streamers se développent radialement sur la surface (Figure 14 (1)). Dans ce premier cas, la surface était vierge de charges, et il n’y a pas de point pouvant localement faciliter l’amorçage. Ces premiers canaux laissent des charges positives derrière eux. Lorsque la tension décroît, ces charges renforcent le champ et sont à l’origine de décharges retour entre le dépôt et la pointe métallique. Ces décharges neutralisent le centre de la Figure 14(2). Puis la polarité s’inverse et les décharges négatives continuent jusqu’au minimum de tension (Figure 14(3)). A la fin de la période, le dépôt négatif ainsi obtenu provoque à son tour le départ de streamers. Cette fois, les canaux sont courbes car leur localisation est soumise à celle des dépôts négatifs (Figure 14(4)).

Figure 14: Images des dépôts de charges à la surface du cristal, pour différents instants de la période [Zhu 96]

Les numéros repèrent des instants de la période sur la figure précédente. Les zones rose/rouge

1

2

3

4

1

2

3.4. Longueur des filaments et tension appliquée