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Décharge Déclenchée

3.4. Synchronisme des amorçages

Intéressons nous à présent à l’apparition des streamers au début de la propagation. Sur certaines images, on voit nettement que certaines têtes sont plus loin que les autres. C’est d’ailleurs cette irrégularité de la distance qui nous a conduits à choisir la tête la plus éloignée de l’électrode pour le

important à discuter. L’hypothèse des effets collectifs exposée au chapitre III repose l’amorçage d’un premier streamer qui serait le déclencheur de ses voisins. Nous allons donc étudier le décalage temporel entre le départ des premiers streamers et les suivants. Puis nous allons montrer qu’effectivement, l’amorçage des filaments se fait en plusieurs étapes.

Pour cela nous allons utiliser deux techniques : la différence entre les distances parcourues par les têtes, et le lien entre nombre de filaments et charge transférée.

3.4.1 Par la distance parcourue

Les images obtenues montrent plusieurs têtes adjacentes se propageant de front. On peut cependant remarquer que certaines d’entre elles ont une avance, parfois assez nette, sur les autres. On peut prendre pour exemple les photos ci-dessous :

Figure 16: Images de propagation. (a) : t = 2 ns et 41, 9 nC ; (b) : t = 12 ns et 34,1 nC .

Cela est aussi bien visible sur les photos de l’électrode allongée présentées en 3.2. On obtient ainsi une sorte de sillage qui suit les têtes les plus avancées. On peut alors mesurer l’écart entre la première tête et la suivante. La figure 17 montre la méthode employée sur un zoom de la figue 16(b) :

a

b

a

b

t = 2 ns

t = 12 ns

de la propagation. On peut donc écarter le scénario où un premier filament se propage entièrement avant de déclencher ses voisins. Cette méthode permet d’avoir une première idée des échelles de temps à considérer. On peut néanmoins lui opposer différents arguments : les irrégularités du profil de l’électrode peuvent affecter la propagation des filaments, ne pourrait-on pas leur attribuer les « sillages » de streamers remarqués sur les images ? Afin de trancher sur la question : Y a-t-il bel et bien des streamers qui sont amorcés avant les autres ? Nous proposons d’utiliser un autre paramètre, c'est-à-dire la charge transférée.

3.4.2 Par la charge transférée

Cette méthode permet de pallier le principal défaut de la mesure : avec notre caméra nous ne pouvons pas détailler les images d’un même événement. Lors des acquisitions nous disposons de deux données : l’image, qui correspond à un instant précis de la propagation, et la charge transférée qui résulte du phénomène dans sa globalité. Dans le paragraphe 3.1.1, nous avons établi que chaque filament transfère 1 nC. Nous disposons donc d’une relation permettant de passer de la charge transférée au nombre total de filaments : Pour chaque acquisition nous avons donc les têtes des streamers à l’image, tout en connaissant le nombre de filaments qui sera amorcé en tout. Nous allons montrer l’importance de cette donnée supplémentaire.

La figure 18 (a) montre l’image des streamers à t = 1 ns de la propagation, pour une charge transférée totale de 16,7 nC. Nous savons que 16,7 nC équivalent à environ 16 filaments. Seulement sur l’image 18 (a), nous ne pouvons pas dénombrer plus de 5 tâches, qui assurément ne peuvent donner naissance à 16 filaments. D’autres filaments doivent nécessairement amorcer afin de transférer la quantité de charges mesurée. Cela prouve qu’à t = 1 ns, l’amorçage des filaments n’est pas terminé, d’autres vont apparaître par la suite. A titre de comparaison, l’image 18(b) correspond aux filaments amorcés pour une charge de valeur similaire (16,2 nC). De même, la figure 18 (c) montre la propagation des streamers à t = 6 ns, pour un transfert total de 30,7 nC. Là encore, nous ne pouvons voir qu’une dizaine de tâches. Pour une charges similaire (34,9 nC), les filaments occupent plus de la moitié du périmètre de l’électrode, comme sur la figure 18(d).

Figure 18

a

b

d

c

a

b

d

c

t = 1 ns

16,7 nC

t = 6 ns

30,7 nC

34,9 nC

16,2 nC

propagation est insuffisant par rapport à la charge mesurée. L’image 19(a), qui ne comporte qu’une dizaine de tâches, devrait correspondre à environ 46 filaments. La figure 19(b) quant à elle correspond à un transfert de 53,5 nC, soit environ 54 filaments. Pour un tel transfert la décharge devrait couvrir presque tout le périmètre de l’électrode, et on voit bien que ce n’est pas le cas.

Figure 19: Images où l’amorçage est inachevé. (a) : t = 3 ns, Q = 46,1 nC ; (b) : t = 6 ns, Q = 53,5 nC

Pour finir, revenons à la figure 12, qui montre les images de la décharge à différents instants de la propagation. Là aussi, le nombre de têtes visibles n’est pas constant. En effet, à la première nanoseconde de la propagation, seulement quelques tâches lumineuses apparaissent sur le bord de l’électrode. Sur les images suivantes, les streamers occupent tout le périmètre de l’électrode. Ces images sont comparables car nous avons pris soin de sélectionner des valeurs de charges transférées équivalentes.

La mise en parallèle des images avec la charge transférée montre donc que l’apparition des streamers peut s’étaler sur plusieurs nanosecondes. En effet, on trouve des images où l’amorçage est inachevé jusqu’à 6 ns de propagation.

Grâce à cette technique nous prouvons avec certitude qu’il existe un décalage entre l’apparition des filaments autour de l’électrode. Le fait que les têtes soient adjacentes suggère que l’amorçage se fait de proche en proche. Etant donné la petite dimension de l’électrode, ce point est assez difficile à discuter. Pour cela il aurait fallu pouvoir faire l’expérience avec une électrode plus grande. Mais comme nous l’avons expliqué plus haut, cela pose trop de problèmes techniques, et risquerait d’aggraver les imprécisions dues aux différents jitters.

Nous avons évoqué au chapitre précédent l’étude de Kashiwagi et al qui a prouvé l’auto synchronisation des plasmas issus de deux électrodes à haute tension. Pour poursuivre la discussion sur le synchronisme des filaments, nous allons mener une expérience similaire.