• Aucun résultat trouvé

Une autre caractéristique de l’internationalisation du conflit interne réside dans la

conduite matérielle de celui-ci. En effet, la poursuite des hostilités peut révéler la

participation ouverte ou discrète d’acteurs étrangers étatiques ou non. Si la participation

127 En témoigne la quatrième session extraordinaire tenue le 12 décembre 2006

128

67 d’acteurs non étatiques conserve un caractère originellement illicite en ce qu’elle constitue

soit une activité de mercenariat129 soit une activité de nature mafieuse prohibée de

sociétés multinationales, celle des Etats ne l’est qu’en l’absence de supports textuels

avérés.

Par ailleurs, la participation d’acteurs non étatiques est en tout point illicite qu’elle

soit en faveur du régime légal ou des mouvements rebelles. Quant à celle de l’Etat, il

convient de ne retenir, a priori, une telle appréciation que dans la mesure où elle est faite

au profit des insurgés. L’internationalisation du conflit armé interne en considération des

acteurs impliqués dans la conduite des hostilités repose sur des appréciations diverses mettant en exergue la nature des participants, la licéité de la participation ainsi que le

degré d’intervention. Toute chose qui démontre la complexité de la qualification.

Toutefois, la jurisprudence et la doctrine permettent de déterminer les contours du

degré d’intervention d’un Etat tiers. On admet généralement que, pour qu’un Etat tiers

devienne une partie au conflit, il faut que ses agents participent directement aux hostilités.

Il peut s’agir d’un contrôle effectif sur certaines opérations ou d’un contrôle global. Suivant

la jurisprudence du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) dans l’affaire

TADIC130, on considérera le rôle de l’Etat tiers dans l’organisation, la coordination ou la

planification d’opérations militaires de groupes armés, de même que son financement, son

équipement, son entraînement, et ses soutiens opérationnels.

Au regard de ce qui précède, deux crises africaines, semblent faire l’unanimité

pour leur qualification en tant que conflits armés internes internationalisés eu égard aux

nombreuses interventions indubitables de pays tiers dans lesdits conflits. Ce sont, d’une

part la guerre civile en Angola et d’autre part la crise en République Démocratique du

Congo (RDC).

En effet, le conflit angolais, l’un des plus vieux du continent (depuis 1975 date de l’indépendance), opposant le Mouvement Populaire de Libération de l’Angola (MPLA),

parti au pouvoir et l’Unité Nationale pour la Libération de l’Angola (UNITA), a vu la

participation significative de puissances tierces telles l’URSS et le Cuba soutenant le

129

Sur la définition et le statut des mercenaires en droit international. Cf. Eric DAVID, Mercenaires et volontaires internationaux en droit des gens, Centre de droit international de l’Institut de Sociologie de l’Université Libre de Bruxelles (Centre Henri Rolin), éd. de l’université Libre de Bruxelles, 1978, 459 p.

130

68

MPLA ainsi que les Etats-Unis d’Amérique et l’Afrique du Sud au côté de l’UNITA. Le

soutien soviéto-cubain au MPLA est essentiellement caractérisé par l’envoi de contingents

cubains, d’armes et de devises. De même, les alliés de l’UNITA ont assuré les mêmes

apports de par l’envoi d’éléments de Contras Nicaraguayens "en stage" auprès de Jonas

SAVIMBI, leader de l’UNITA, et d’importantes sommes d’argent estimées à environ 250

milliards de dollars entre 1986 et 1991.

Quant à la crise en RDC, son internationalisation provient de l’intervention armée

directe du Rwanda, du Burundi et de l’Ouganda auprès du Rassemblement Congolais

pour la Démocratie (RCD) puis de l’occupation effective de certaines portions du territoire

congolais et dont le retrait fera l’objet d’accords revêtant la nature d’un véritable traité. De

plus,, les alliés du régime de Laurent-Désiré KABILA, au pouvoir à l’époque, notamment

l’Angola, le Zimbabwe et la Namibie, ont joué un rôle important dans ce conflit.

Une telle analyse reste, pour le moins, critiquable. Elle prend, principalement, en

compte l’intervention militaire de contingents étrangers sur le territoire national d’un Etat donné au profit d’une partie au conflit limitant ainsi le degré d’implication à la participation physique de troupes étrangères au conflit. Une telle position comporte, à la vérité des insuffisances réelles.

En effet, le degré d’implication d’une partie tierce peut consister dans l’appui

essentiellement logistique apporté à un des belligérants ou dans la fourniture de

renseignements déterminants devant permettre à l’un des protagonistes d’accroître ses capacités et stratégies militaires ou encore dans un soutien diplomatique d’envergure

susceptible de légitimer politiquement la cause des belligérants. L’internationalisation du

conflit interne, du fait des acteurs impliqués dans ledit conflit, provient de toutes actions

d’Etat tiers entretenant le conflit c'est-à-dire allant de la naissance de la rébellion à la

victoire militaire d’un des belligérants en passant par le maintien et la survie de celle-ci. De ce point de vue, il apparaît difficile de retenir le caractère purement interne des

conflits en Afrique d’autant plus que l’apparition de mouvements insurgés et la longévité

qui les caractérise confortent l’idée selon laquelle le continent africain ne connaît que des

conflits exclusivement internationalisés. Une lecture minutieuse entrecroisée des conflits africains laisse transparaître une ingérence déterminante de puissances africaines ou étrangères dans la survenance, la conduite et la longévité de ceux-là. Il appert, dès lors,

69

dans la qualification des conflits internes, de ne pas se limiter aux combattants visibles sur le théâtre des hostilités. Il convient de prendre en compte impérieusement les combattants discrets et invisibles dont les causes sont officiellement et parfois maladroitement défendues par les premiers en y greffant des mobiles réels dont la revendication peut se

faire dans le cadre de la gestion courante des affaires de l’Etat et non par la voie des

armes.

Les revendications qui sous-tendent la plupart des conflits internes ne répondent pas toujours aux besoins nationaux se fondant ainsi dans des intérêts extra-nationaux non

officiellement affichés. Comme il est démontré plus haut, l’internationalisation des conflits internes, procède de divers facteurs dont il convient d’en tenir compte dans la recherche

de solution pacifique à travers le cessez-le-feu exprimé de plusieurs manières.

2. Les modes d’expression de l’appel au cessez-le-feu

Il faut entendre par mode d’expression les moyens utilisés pour inviter les

belligérants à arrêter les hostilités et à opter pour un cessez-le feu devant ouvrir la voie à

des négociations plus approfondies. Les modes d’expression de l’appel au cessez-le-feu

sont, essentiellement, de deux ordres : la voie médiatique (a) et la voie diplomatique (b).