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H1. Le téléphone comme reflet de l’activité sociale en face à face

Chapitre V Présentation des résultats

V.2 ETUDE 1 – Activité téléphonique et activité sociale

V.2.2 H1. Le téléphone comme reflet de l’activité sociale en face à face

Six variables téléphoniques se sont avérées pertinentes pour rendre compte de l’activité sociale en face à face : le volume total d’appel, le volume d’appel avec les proches, le volume des appels entrants efficaces, l’étendue du réseau social téléphonique journalier et le volume des appels sortants à destination du contact le plus fréquent.

V.2.2.1 La variation du volume total d’appels

Avant de vérifier si des liens existent entre l’activité sociale, via l’activité téléphonique d’une personne, et son état de bien-être, nous avons vérifié que les communications téléphoniques permettent bien de refléter une part de l’activité sociale d’une personne. Les relations entre paramètres issus du SI et échanges en face à face décrits par les sujets dans leur calendrier ont donc été testées.

Onze sujets montraient un lien significatif entre le volume de l’ensemble de leurs communications (appels sur RTC+IP+GSM (voix)) et une visite formelle ou informelle ou une sortie sociale contre sept sujets sans lien significatif (p<20% pour 100.12, 100.13, 100.16, 100.18, 200.04 et

p>20% pour 200.02, 200.06). Aucune différence notoire entre les diverses façons de compter le volume d’appels n’a été constatée.

Une relation significative a été identifiée entre le volume d’appels et l’absence de participation sociale chez treize sujets ; seuls quatre sujets avaient des résultats non significatifs (200.04, 200.03, 200.02, 100.05, 100.03). Plus particulièrement, parmi ces personnes, ceux pour qui il a été possible d’identifier les correspondants, la proportion d’appels avec les proches était corrélée avec l’absence de participation sociale de façon encore plus forte pour les données de variation et les données lissées (soit par ébarbage, soit par moyenne mobile).

Comme esquissés précédemment, ces résultats tendent à montrer le caractère social de l’usage du téléphone. L’absence de participation sociale est majoritairement corrélée à l’activité téléphonique de notre échantillon. L’absence de corrélation avec le volume total d’appels de trois sujets sur cinq peut être expliquée par leur type de résidence. L’activité sociale de ces individus, circonscrite aux frontières et aux occupants de la résidence, le téléphone ne constitue pas naturellement le média privilégié pour la recherche de contact social.

V.2.2.2 La proportion brute du volume d’appels avec les proches

La proportion brute du volume d’appels avec les proches (famille et entourage) rapportée au volume total d’appels semble être une variable intéressante pour de nombreux sujets. Un lien significatif a été observé pour huit sujets sur seize. Cette relation était soit positive, c’est à dire qu’une plus grande proportion d’échanges téléphoniques avec les proches indique une plus grande probabilité de contact social en face à face (pour les sujets 100.02, 200.02, 100.04), soit négative, indiquant la relation inverse (pour les sujets 100.06, 100.08, 100.18, 100.11, 100.15). En fonction du sens de la corrélation entre le niveau d’activité sociale et la proportion d’appels avec les proches, il semble possible de distinguer les appels fonctionnels, des communications à vocation plus relationnelles ou routinières.

V.2.2.3 La variation de la proportion du volume d’appels avec les proches

Les données de variation du volume de tickets ont montré moins de liens avec ces échanges en face à face des sujets :

Sur le paramètre « proportion d’appels avec les proches », seuls quatre sujets montraient une relation significative entre les variations de cette proportion et un échange social en face à face. La correspondance entre cette proportion brute et celle lissée par ébarbage était forte (R² varie de

0.84 pour 100.17 à 0.97 pour 200.03), donc les résultats des tests après ébarbage étaient très semblables. En revanche, le lissage par moyennes mobiles de la proportion d’appels avec les proches conduit à une corrélation dans une moindre mesure (R² varie de 0.33 pour 100.11 à 0.55 pour 100.05). Ainsi, des différences ont été observées : neuf sujets ne montraient pas de correspondance entre la proportion lissée par moyenne mobile et les échanges sociaux en face à face ; les sujets 100.02 et 100.12 avaient une probabilité d’échange social augmentée les jours précédant une variation de la proportion d’appels avec les proches, tandis que 100.06 et 100.17 avaient une probabilité d’échange social diminuée après une augmentation de cette proportion.

V.2.2.4 La variation du volume des appels entrants efficaces

Le volume d’appels entrants efficaces était associé à la probabilité d’échange social seulement pour neuf sujets contre neuf, donc cet indicateur ne semble pas meilleur que la proportion d’appels avec les proches. Mais l’utilisation de ce volume d’appels entrants, lissé par ébarbage permettait alors d’expliquer de façon significative la possibilité d’un échange social pour quatorze sujets contre quatre. Pour neuf d’entre eux, un accroissement du nombre d’appels efficaces après lissage multipliait la probabilité d’échange social par un facteur de 1.2 (pour 100.03 le jour même) à 2.6 (pour 200.02, 4 jours plus tard). Ce paramètre semble très intéressant. Toutefois, la proportion des appels avec les proches est un meilleur indicateur pour déceler une diminution des échanges sociaux en face à face.

En restreignant l’analyse plus spécifiquement aux visites de la famille et de l’entourage chez le sujet (exclusion des visites professionnelles, d’aides ou les sorties), des relations significatives ont été observées alors qu’elles ne l’étaient pas dans le cas précédent sur les données brutes (sujets 100.03, 100.12, 100.16). Et inversement d’autres relations qui étaient significatives en prenant en compte les visites formelles et les sorties ne l’étaient plus lorsque l’analyse a été restreinte aux visites des proches au domicile (200.02, 100.15, 100.11, 100.18). Ce dernier point indique que l’activité sociale de ces sujets n’est pas liée majoritairement à des visites de proches à domicile, mais plutôt, soit à des sorties, soit à des visites d’aides. Pour discriminer l’une ou l’autre de ces éventualités, le niveau d’autonomie général du sujet semble être un paramètre pertinent. Ainsi, pour 100.11 et 200.02, la diminution de leur activité téléphonique est liée à des visites d’aide alors que l’on peut aisément penser que lorsque l’activité téléphonique de 100.15 et 100.18 baisse, c’est en raison de leur absence du domicile car toutes deux sont véhiculées et particulièrement actives.

Ces différents résultats montrent qu’il existe bien une relation significative entre l’usage du téléphone et l’activité sociale en face à face des usagers. Par ailleurs, ces variations de

comportements nous indiquent que les usages du téléphone peuvent être différents selon les personnes et selon le fonctionnement de leurs interlocuteurs. Certains vont anticiper une visite, tandis que d’autres utilisent ce média pour pallier une absence. De plus, ces usages peuvent être liés à des visites de proches ou bien à des visites d’aides plus formelles ou encore à des sorties. Enfin, notons que selon le sujet, l’indicateur le plus pertinent peut être le volume de tickets avec les contacts « Entourage », ou bien, les échanges téléphoniques avec le contact le plus fréquent, ou le second contact le plus fréquent, ou encore le volume d’appels efficaces d’une durée d’au moins 3 minutes.

V.2.2.5 Moyenne mobile des appels vers correspondant préférentiel 1

La tendance moyenne des appels avec le contact le plus fréquent pour chaque sujet semble être également un indicateur intéressant : pour quatre sujets (100.17, 100.16, 100.12, 200.06), une augmentation d’une unité de la moyenne mobile correspondait à un risque d’isolement augmenté de 1.7 à plus de 30 fois les jours précédents (de 2 jours à 22 jours). Inversement, pour quatre autres sujets (100.13, 100.02, 200.02, 100.15), une augmentation d’une unité de la moyenne mobile correspondait à un risque d’isolement divisé par un facteur de 3 à 10 les jours précédents (de 4 à 26 jours).

Les correspondants préférentiels peuvent être considérés comme des signaux d’alarme d’isolement ou au contraire le signe que le sujet va bien : dans le premier cas, il est davantage sollicité lorsque le sujet se sent seul alors que dans le second, c’est lorsque le sujet semble aller bien, qu’il multiplie ses contacts.

Si l’on couple le sens de la corrélation à la nature de son identité ainsi qu’à son éloignement géographique, il peut être envisagé de déterminer la nature probable des communications : pour les cas où des contacts soutenus sont le signe d’une participation sociale active, le motif de communication peut probablement être des rencontres régulières entre les correspondants si l'un d’eux vit dans un périmètre géographique proche (nous savons que c’est le cas pour 100.15 et 200.02) ou des appels pour rendre compte des dernières nouvelles , si celui-ci est plus distant, comme dans le cas de 100.02. Concernant les situations où l’augmentation de la moyenne des contacts avec le correspondant 1 est le signe d’un risque d’isolement (d’absence de participation sociale), si ce dernier vit près du sujet, il peut s’agir de solliciter des rencontres : dans le cas de

100.17, quand elle va bien, elle sort avec une amie (qui est le correspondant présentant le 3ème plus

grand volume de communications). Si le sujet ne peut pas sortir ou si cette amie est indisponible, 100.17 reste généralement chez elle et il semblerait qu’elle contacte davantage sa voisine,

probablement pour se voir toutes les deux. D’ordinaire, elles s’appellent chaque jour, sans forcément se rencontrer en face à face. S’agissant de 100.12, sa fille habitant à plus de 500kms, nous pouvons aisément concevoir qu’elle est une confidente appelée un peu plus souvent lors des périodes où la participation sociale diminue. Dans le cas de 100.16 et des communications avec son fils, compte tenu des informations dont nous disposons, il parait difficile de déterminer s’il est davantage appelé pour solliciter une rencontre ou seulement pour discuter.

Risque isolement augmenté Risque isolement diminué

Sujet 100.12 100.16 100.17 200.06 100.02 100.13 100.15 200.02

Corres.

pref. Fille Fils Voisine NC Fille NC Fille Amie

Dist. geo Loin Proche Proche NC Loin NC Proche Proche

motif

d’appel Confident ? Rencontre NC Nouvelles NC Rencontre Rencontre

Tableau 12. Lien entre distance géographique, nature du correspondant et motif d’appel