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Chapitre I : Etude Bibliographique

IV. Fonctionnalisation d’électrodes

IV.3. Electro-greffage en oxydation

IV.3.1. Le greffage par oxydation des amines

Les premiers travaux mentionnant le greffage par oxydation d’amines ont été publiés par Jean Pinson et coll. en 1990 [231]. Ces études concernaient le greffage d’amines aromatiques sur fibres de carbone et sur carbone vitreux. D'une manière générale, les substrats concernés sont, bien évidemment, uniquement des substrats résistants à l’oxydation comme le carbone vitreux [232], les fibres de carbones [231] ou les métaux inattaquables comme l’or ou le platine [233]. Il faut noter que certaines études montrent qu’il est possible d'obtenir un greffage spontané d’amine en milieu acétonitrile sur des substrats comme le Fe, Ti, Al,… mais aussi dans certaines conditions sur carbone [234].

L’électro-oxydation d’amines permet le greffage non seulement de groupements aryles mais aussi de groupements alkyles, s’il est réalisé à des potentiels plus élevés. Les amines aromatiques et aliphatiques primaires sont plus couramment greffées en milieu organique à des potentiels avoisinant 1V/ECS [234–236], mais il est possible de les greffer aussi en milieu aqueux [237,238] à des potentiels plus anodiques. Parmi les amines aromatiques greffées par électro-oxydation, on retrouve notamment l’acide 4-aminobenzoïque (4-ABA) greffé en milieu aqueux [239,240] comme en milieu organique [241,242]. Pour les amines aliphatiques, on retrouve pour le greffage en milieu aqueux la dopamine [243] et des espèces comme la glycine en milieu organique [244].

La figure I-12 présente le mécanisme de greffage par électro-oxydation des amines couramment admis dans la littérature.

Figure I-12 : Mécanisme de greffage des amines en oxydation d’après Barbier, Pinson et coll.

[231].

Lorsque l’amine est oxydée, il se produit un processus irréversible entre la surface du substrat et le cation radical formé lors de l’oxydation de l’amine [235]. Les amines sont de plus

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en plus difficiles à oxyder quand leurs nombres d’hydrogènes substitués augmentent : c’est pourquoi une amine primaire est plus facile à greffer qu'une amine secondaire et ou encore tertiaire, ce phénomène est attribué à l’encombrement stérique de la fonction amine qui gêne le greffage sur le substrat [232].

Les applications du greffage par oxydation des amines sont nombreuses, on peut citer à titre d’exemple l’immobilisation de nanoparticules, des applications capteurs chimiques ou biocapteurs. Le tableau I-7 rassemble l'ensemble des travaux concernant le greffage par électro-oxydation trouvé dans la littérature :

Fonctions

greffées Formule chimique Milieux de greffage

Poly(1,8-Diaminonaphthalene) HCl CPE 0,52

(SCE)

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carbonate Graphite 0,8 SCE

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Tableau I-7 : Etat de l'art sur le greffage par électro-oxydation d’amines aromatiques et aliphatiques. (Avec GCE : Electrode en carbone vitreux, PPF Pyrolyzed photoresistant film,

Np : Nanoparticules).

L’examen du tableau fait apparaître clairement, que l’oxydation des amines aromatiques, se produisant à des potentiels moins anodiques, est plus souvent réalisée en milieu aqueux contrairement à l’électro-oxydation des amines aliphatiques qui nécessite des potentiels bien plus élevés (1V/SCE pour les plus faibles) et qui est plus généralement effectuée en milieu organique. Il en résulte un nombre restreint d’études en milieu aqueux (2) portant sur le greffage des amines aliphatiques. L’originalité des différentes études portent sur les conditions expérimentales notamment le milieu de greffage, le matériau d’électrode et la structure de l’amine. Il faut mentionner, par ailleurs, que quelques études seulement portent sur la comparaison de l’électrogreffage à partir de sels de diazonium avec celui des amines [236,251].

Ces différents points vont être détaillés dans les paragraphes suivants.

ACN

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IV.3.2.2. Influence des paramètres expérimentaux a) Influence du milieu

D’après la littérature, le taux de greffage semble plus élevé en milieu aqueux qu’en milieu organique. Cela a été montré dans les travaux de Feier et coll. [251] concernant le greffage d’amines aliphatiques sur feutre de graphite en milieu aqueux basique pH 10,3 (tampon carbonate) et en milieu acétonitrile. Cette étude met en avant le greffage de deux amines aliphatiques (une chaîne à 5 carbones pour le milieu aqueux et une chaîne à 6 carbones pour le milieu organique). Ces chaînes sont modifiées par liaison peptidique afin d’avoir un groupement NO2. Les groupements NO2 génèrent un couple réversible caractéristique NHOH/NO en milieux aqueux et organiques. Ce couple est utilisé dans cette étude pour la caractérisation du greffage. Les résultats obtenus montrent que la concentration surfacique est deux fois supérieure dans le cas du greffage en milieu aqueux.

Les groupements carboxylates greffés dans cette étude sont appliqués à la détection du Cu(II) comme nous le verrons par la suite.

b) Nature de l’amine

Les études portant sur le greffage d’amines aliphatiques s’intéressent essentiellement à l’influence de la longueur de la chaîne carbonée, comme dans les travaux de Zhang et coll.

[244,258]. Dans ces études, le greffage de la glycine (chaîne à deux carbones) et la β-alanine (chaîne à trois carbones) est réalisé sur électrode de carbone vitreux en milieu acétonitrile. Les électrodes, ainsi greffées, sont ensuite utilisées pour la détection de l’acide ascorbique et de la dopamine. La mise en évidence du greffage de ces électrodes par des amines aliphatiques ainsi que l’influence du potentiel de greffage est effectuée par XPS. L’étude fait varier le potentiel de greffage en 0,0 V/ECS et 1,3V/ECS et montre que plus le potentiel d’oxydation est élevé, plus le pourcentage d’azote à la surface est élevé : cela prouve une augmentation de la concentration surfacique en amine greffée. Les électrodes greffées par les deux amines permettent d’obtenir des résultats en XPS quasiment similaires. Cette étude montre aussi qu’après les deux premiers jours d’immersion dans une solution tampon de phosphate (PBS à pH 6,0), les intensités des pics de détection diminuent de 12% et après un mois de 25% et ce pour la glycine (acide α-aminé) comme pour la β-alanine (acide β-aminé).

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c) Comparaison entre le greffage des amines et des diazoniums

Certaines études mettent en parallèle le greffage via la réduction de sel de diazonium et le greffage en oxydation d’amine afin de comparer les propriétés des couches greffées.

C’est notamment le cas des travaux de Benjamin et coll. [238] dans lesquels des fonctions benzylphosphoniques sont greffées à la fois par réduction des sels de diazonium et par oxydation de l’amine aromatique correspondante. Cette étude met en avant un comportement similaire des films greffés par les deux méthodes. Il est montré que, dans tous les cas, les groupements benzyl phosphoniques changent de polarité en fonction du pH du milieu. Les applications potentielles proposées sont l’élaboration de membranes ioniques ou encore l’utilisation des électrodes greffées pour la détection de cations métalliques mais ces applications ne sont que citées dans cette étude.

La comparaison du greffage de sels de diazonium et du greffage des amines aliphatiques de surfaces de PPF est appliquée au couplage de nanotubes de carbone [256]. Les surfaces de PPF sont greffées par une diamine aliphatique pour la voie oxydative et par des aminobenzène diazonium pour la voie réductrice. La fonction NH2 greffée permet par couplage peptidique de lier les nanotubes à la surface du PPF fonctionnalisé. Cette étude montre que les nanotubes greffés résistent aux ultrasons en milieux acide, basique et organique aprotique et que les électrodes greffées par voie oxydative ou réductrice présentent des propriétés similaires notamment en termes de résistance aux ultrasons.

Tran et coll. [236] poussent la comparaison plus loin puisqu’ils effectuent trois greffages différents : le greffage par réduction d’un sel de diazonium, le greffage par oxydation d’une amine aromatique et le greffage d’une amine aliphatique. Dans les trois cas, le greffage de groupements phosphines protégés par des boranes est réalisé en milieu acétonitrile. Les phosphines ont des propriétés complexantes des métaux de transition notamment du manganèse et sont utilisées dans cette étude pour complexer Mn(II).

Cette étude montre que le taux de couverture de la surface par les phosphines est deux fois plus élevé dans le cas des électrodes greffées par voie oxydative et que le potentiel d’oxydation de Mn(II) complexé par les groupements phosphines greffés varie de 14 mV en fonction de la voie de greffage choisie.

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Enfin, Feier et coll. [251] comparent des électrodes greffées par des amines aromatiques et aliphatiques en oxydation et par des sels de diazonium en réduction, sur lesquelles ils ont couplé des cyclames, fonction spécifique de Cu(II). Ils démontrent, d’une part, que les groupements NH des électrodes greffées en oxydation, et d’autre part, la flexibilité apportée par les chaînes aliphatiques, favorisent la complexation des cations métalliques. En outre, ils prouvent que, dans le cas où la fonction cyclame est portée par des chaînes longues, la complexation du cuivre est favorisée et les effets des polluants interférents comme le Pb(II) sont alors limités.

IV.3.2.3. Applications capteurs électrochimiques

L’état de l’art effectué sur le greffage en oxydation des amines ne laisse apparaître que quelques travaux traitant d’une application capteur. En plus des travaux de Zhang [244,258,259] et de Feier [251] qui ont été présentés dans le paragraphe précédent, on peut citer les travaux de Kumar et Leech [250] dans lesquels des électrodes en carbone vitreux sont fonctionnalisées par le [Os(2,2_-bipyridine)2(4-aminomethylpyridine)Cl].PF6 qui a la particularité d’oxyder le glucose ce qui permet ainsi de l’analyser.

Les publications de Yang et coll. [240] et de Zhang et coll.[241] traitent du greffage de l’acide 4-aminobenzoique pour réaliser des capteurs chimiques pour des polluants médicamenteux. L’équipe de Yang greffe des électrodes de carbone vitreux qui permet de détecter le paracétamol à des concentrations de 3,6 mg.L-1, tandis que Zhang et coll. greffent des électrodes à pâte de carbone dans lesquelles sont incorporées des nanoparticules d’or, ces électrodes permettent de détecter des concentrations en dopamine de 0,99 µg.L-1.

Nous terminerons par mentionner les études de Majid et coll. [247] qui portent sur le greffage d’électrodes à pâte de carbone par du Poly(1,8-Diaminonaphthalene). La détection passe par la complexation de Pb(II) et permet de descendre à des concentrations limites de l’ordre de 327 µg/L.

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