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Des gouttes dans tous leurs états

5.3 Détachement d’une bulle suivant le mouillage

6.1.3 Des gouttes dans tous leurs états

Nous nous intéressons désormais au comportement d’une goutte de liquide sur un solide infusé. Dans cette situation, de multiples comportements peuvent être observés selon les propriétés du solide, du liquide infusé et du liquide déposé. Smith et al. ont dressé un inventaire exhaustif des différentes situations [129]. Nous nous proposons ici de brièvement discuter les critères des états de mouillage prédominants.

Paramètre d’étalement

Il est alors nécessaire de définir différents paramètres de mouillage. Nous considérons le cas général d’un système triphasique mettant en jeu un liquide (1) s’étalant sur une phase (2) dans une atmosphère (3) (Figure 6.3). On peut définir l’énergie linéique dE créée par un déplacement infinitésimal dx de l’interface 1-3 : dE = ( 13+ 12 23)dx. Cela

retranscrit la création des interfaces 1-2 et 1-3 au détriment de l’interface 2-3. On définit ensuite le paramètre d’étalement de 1 sur 2, dans 3 :

S12(3) = 23 13 12 (6.4)

L’étalement de la phase 1 se produit lorsque dE

dx < 0, i.e. pour S12(3) > 0. Dans le cas

particulier de l’étalement d’un liquide sur un solide, le signe du paramètre Sls(v) = sv sl déterminera donc le mouillage du substrat par le liquide (Sls(v) > 0) ou la préférence

du solide pour rester sec (Sls(v) < 0). Dans la suite, le paramètre d’étalement S12(3) sera

décliné aux différents milieux des substrats infusés. Quatre phases peuvent être combinées : le solide (s), le lubrifiant (o), le liquide déposé (l) et l’atmosphère ambiante (a).

Stabilité de la phase lubrifiée

Dans notre situation, nous cherchons avant tout à garantir une non-adhésion de la goutte sur le substrat. Une condition s’impose de prime abord. Il est, en effet, indispen- sable que le liquide déposé ait moins d’affinité pour le solide que le liquide imprégné dans

Figure6.3 – L’avancée de la ligne de contact se fait à la condition que les énergies des surfaces créées ( 12+ 13) sont plus faibles que celles des interfaces recouvertes par le liquide ( 23). Cela permet de définir

le paramètre d’étalement S12(3).

les textures. Dans le cas contraire, la goutte mouillerait la porosité du substrat au dé- triment du lubrifiant. La forte adhésion en résultant serait tout à fait contre-productive. Une condition suffisante est que les rugosités du solide soient mouillées préférentiellement par le lubrifiant plutôt que par le liquide déposé. Smith et al. proposent un critère sur le paramètre d’étalement Sos(l) [129] :

Sos(l) = sl ol os > ✓ r 1 r ◆ ol (6.5)

Quel liquide au contact du haut des piliers ?

Une fois assuré les critères d’imprégnation (équation 6.1) et de stabilité du liquide infusé (équation 6.5), il reste à définir la conformation d’une goutte sur la surface infusée. Une première question concerne le haut des piliers. Quel liquide mouille le haut des textures ? Il s’agit alors de déterminer le signe du paramètre d’étalement du lubrifiant sur le solide en présence du liquide déposé : Sos(l). S’il est positif, les plots seront recouverts par une

fine couche de lubrifiant (Figure 6.4). A l’opposé, une valeur négative mettra la goutte au contact des textures hydrophobes. Cela aura pour conséquence d’augmenter l’adhésion du liquide sur la surface infusée.

0

Figure 6.4 – Diagramme des conformations possibles d’une goutte de liquide déposée sur un solide infusé. Le solide peut être recouvert par le lubrifiant si Sos(l)> 0. Le lubrifiant peut encapsuler les gouttes

6.1. LES SURFACES INFUSÉES 125 Encapsulation de gouttes

Une seconde question concerne la forme de la goutte sur un solide infusé. Lorsque l’on dépose une goutte sur un solide infusé, on observe la formation d’un ménisque d’huile sur les bords de la goutte. Contrairement au cas du mouillage d’un solide où la ligne triple est le point de jonction entre solide et liquide, ici, le liquide retenu dans les textures est aspiré par le liquide déposé [130]. Il en résulte un ménisque en bord de goutte comme la vue artistique de la figure 6.5 le signale.

Figure6.5 –Vue d’artiste d’une goutte posée sur une surface infusée. Les textures retiennent le lubrifiant qui permet à la goutte de glisser sur son substrat. Image issue de Smith et al. (2013) [129].

Par ailleurs, le lubrifiant peut aussi, sous certaines conditions, recouvrir le liquide dé- posé. La goutte déposée est alors encapsulée par le lubrifiant. Le critère d’encapsulation peut être obtenue en considérant les deux cas d’une goutte libre ou encapsulée (Figure 6.6). Si le lubrifiant gagne à s’étaler sur le liquide déposé, alors la goutte sera encapsulée. Le paramètre critique d’encapsulation est alors :

Sol(a) = l o ol > 0 (6.6)

Figure 6.6 – La goutte sera encapsulée si le paramètre d’étalement Sol(a)= l o olest positif.

En estimant les différents paramètres d’étalement d’un système solide-lubrifiant-liquide, on peut donc sélectionner dans le diagramme de phases de la figure 6.4 la conformation de notre goutte sur son substrat.

6.1.4 Forme des gouttes

Les gouttes ainsi déposées ont des propriétés remarquables tout à fait comparables au comportement de l’eau sur une surface superhydrophobe. Toutefois, la forme des gouttes

est très différente. Outre l’encapsulation par un film d’huile, la nature semi-liquide du substrat induit une forme plus aplatie que les perles liquides caractéristiques des états non-mouillants.

On peut ainsi définir un angle de contact apparent d’une goutte d’eau posée sur un solide infusé à l’aide d’une huile silicone suivant qu’on se place dans un cas encapsulé ou non. La figure 6.7(a) représente le cas d’une goutte libre à la surface de l’huile. L’angle de contact ✓ est alors tel que :

cos ✓ = o ol

l (6.7)

De même, dans le cas encapsulé (Figure 6.7(b)), l’angle de contact s’écrit en fonction des tensions de surface des différents liquide :

cos ✓ = o ol

o+ ol (6.8)

Dans le cas d’une goutte d’eau sur une huile silicone, les énergies de surface sont réper- toriées dans le tableau 6.1. Ces valeurs prédisent des angles de contact de 112 et 107 pour les équations 6.7 et 6.8 respectivement. Toutefois, la définition de cet angle de contact est compliquée par l’existence du ménisque d’huile en bord de goutte [131].

(a) (b)

Figure6.7 – Estimation de l’angle de contact d’une goutte sur une surface infusée suivant qu’elle est libre (a) ou encapsulée (b).

Tensions de surface w o ow

Mesures (mN/m) 72 20 47

Table 6.1 – Mesures des tensions de surface de l’eau (w) et de l’huile silicone V10 (o) exprimées en mN/m