• Aucun résultat trouvé

l’écologisation des politiques de l’eau ?

1.4 Le contexte angevin pour analyser l’évolution de la gestion de l’eau

1.4.1 La gestion de l’eau en Maine-et-Loire

La Loire : Vecteur de biens et de personnes… contre nature ?

Sous l’Ancien régime et pendant la première moitié du XIXe siècle, le transport fluvial par la Loire joue un rôle majeur (que ce soit au niveau local, que régional, national et même internationale). Elle permet les échanges de diverses marchandises (e.g bois, pierre, quincaillerie, blé, vin, fruits, sucre, poisson, …) et l’acheminement des produits coloniaux vers l’intérieur du pays. Car si la Loire présente l’avantage d’être relativement rectiligne (notamment par rapport à la Seine) et de bénéficier des vents d’ouest (ce qui facilite grandement la remontée du fleuve), son régime hydrologique capricieux est un frein considérable. Au XIXe siècle, l’aménagement du fleuve passe par la protection des rives, la mise en place des levées ainsi que par la réduction du chenal (pour favoriser la navigation aux basses eaux) grâce à l’installation de digues submersibles (Lecoeur 2011). Au début du XXe siècle, d’importants travaux sont réalisés dont le but est de favoriser la navigation entre Nantes et Angers : les « épis » voient alors le jour. Ces structures transversales sont le symbole d’un projet « optimiste » voire « utopique » de faire de la Loire un passage privilégié permettant l’union entre le commerce transatlantique et le marché européen. D’importantes sommes d’argent ont été injectées durant le XXe siècle afin d’entretenir ce projet de Loire navigable. Pourtant ces aménagements sont montrés du doigt depuis qu’il ait été démontré qu’ils participaient activement à l’incision du fleuve et aux perturbations de la dynamique fluviale. Les effets combinés des épis, du déroctage et de l’extraction industrielle de sable ont largement contribué à la déconnection des annexes hydrauliques et au dérèglement du système fleuve en général. Cela s’est traduit

Paysant Guillaume | Trajectoires paysagères des hydrosystèmes secondaires

52

par des changements paysagers et écologiques importants. C’est pourquoi une centaine d’épis ont été raccourcis et/ou arasés en 2009. Le déclin de la navigation et la montée en puissance des préoccupations environnementales se sont concrétisés par la mise en place du plan Loire Grandeur Nature en 1994 (Barraud et al. 2013). Il se veut être un « plan d’aménagement global », aspirant à un développement durable de la Loire en prenant en considération aussi bien les problématiques sécuritaires, de protection de l’environnement et le développement économique18. Aujourd’hui, la Loire est mise en valeur par le biais de

son image (controversée19) de « fleuve sauvage » véhiculée (Montembault 2002) et ancrée

dans l’esprit du « grand public », au profit du tourisme. Celui-ci est orienté vers la découverte des châteaux de la Loire bien sûr, la promotion de la « Loire à vélo » et l’appréciation de ces espaces « naturels » riverains mais également vers le tourisme fluvial. Celui-ci se répartit entre batellerie individuelle (location de pénichettes) ou collective, dans un objectif de promenade à la journée ou de croisière plus longue. On notera également l’activité de location de canoës-kayak (Giret 2015) qui permet de découvrir certains tronçons du fleuve et ce même lorsque la hauteur d’eau est faible en période estivale.

Action de l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne en Anjou

L’Agence de l’eau Loire-Bretagne perçoit son financement essentiellement par le biais des redevances que lui versent les usagers de l’eau, selon le principe de « pollueur- payeur » (le régime des redevances a été fixé par la loi sur l’eau de 2006, 1.3). Elle se charge ensuite de subventionner des actions en faveur de la « reconquête et la préservation de la qualité des eaux et des milieux aquatiques » qu’engagent les collectivités territoriales, les acteurs économiques et les associations. Le programme actuel est le 10ème (2013-2018) et mobilise pas moins de 2,7 milliards d’euros de soutien

d’investissement20. L’emprise d’action de l’agence est présentée par la carte « Le bassin

de la Loire et ses affluents » diffusée par ce même organisme (figure 12).

18 Source : http://www.pays-de-la-loire.developpement-durable.gouv.fr/plan-loire-grandeur-nature-r929.html

[consulté le 25/08/2018]

19 Voir « Quelle naturalité du paysage ligérien ? » (Joliet, Beaujouan et Jacob 2004a) https://journals.openedition.org/norois/921#tocto1n2

20 Source : https://agence.eau-loire-bretagne.fr/home/agence-de-leau/role-de-lagence-de-leau/agence-eau- loire-bretagne-partenaire-technique-et-financier.html [consulté le 04/10/2018]

Paysant Guillaume | Trajectoires paysagères des hydrosystèmes secondaires

53

Figure 12. Le bassin de la Loire et rivières de Bretagne (Source : Agence de l'eau Loire-Bretagne 2015)21

Il est intéressant de se pencher sur les choix de représentation cartographique des rivières du bassin. En effet, il est très surprenant que le Couasnon y figure (seul affluent de l’Authion à apparaitre) en tant que sous-affluent de la Loire, tandis que certains affluents directs plus « connus » (e.g Aubance) et plus importants (en débit et en gabarit, comme le Layon) n’y figurent pas. Difficile de savoir si cela relève d’un véritable choix de la part du cartographe ou d’une certaine part d’aléatoire et/ou de subjectif (révélateur d’un manque de connaissance « terrain », compréhensible dans des services centraux) ?

Le bassin de la Loire comprend le plus grand nombre de démarches de SAGE en France (46 et 9 en cours d’élaboration en 2018, 82% de son territoire est couvert par 55 démarches SAGE, Agence de l’eau Loire-Bretagne 2018). L’état d’avancement des SAGE est présenté ci-dessous (figure 13) :

21 Source : https://agence.eau-loire-bretagne.fr/home/bassin-loire-bretagne/plan-loire-grandeur-nature.html

Paysant Guillaume | Trajectoires paysagères des hydrosystèmes secondaires

54

Figure 13. Etat d'avancement des SAGE - SDAGE 2016-2021 (Source : AE-LB22)

Les SAGE « Layon Aubance Louets » et le SAGE « Authion » (qui concernent respectivement l’Aubance et le Couasnon) sont tous deux mis en œuvre.

L’agence de l’eau Loire-Bretagne s’organise en 6 sous-bassins (ajouter à cela la portion littorale) dont le sous-bassin « Loire aval et côtiers vendéens » qui nous intéresse.

22 Source : https://sdage-sage.eau-loire-bretagne.fr/home/les-sage/quest-ce-quun-sage/les-sage-du- bassin.html [consulté le 16/10/2018]

Paysant Guillaume | Trajectoires paysagères des hydrosystèmes secondaires

55

Figure 14. Le sous-bassin Loire aval et côtiers vendéens (Source : AE LB23)

Les chiffres clés de ce territoire diffusés par l’AE-LB parlent de 2,858 millions d’habitants (2009), d’un secteur de 23 300 km², d’un coût des actions estimé à 787 millions d’euros sur les 6 années (28% du programme de mesure du bassin) et de 1 800 mesures (Agence de l’eau Loire-Bretagne 2016). Il faut savoir que ce sous-bassin est concerné par le plus gros investissement financier de la part de l’AE-LB avec le « sous- bassin Vilaine et côtiers bretons ». Les plus gros postes de dépenses concernent : l’assainissement (37%) ; les milieux aquatiques (29%) puis l’agriculture (16%) et la quantité d’eau (13%) (figure 15, à gauche). En nombre d’actions, les interventions orientées sur les milieux aquatiques sont majoritaires (47%) quand les postes « Agriculture » et « Assainissement » sont équivalents (19 et 21%) (figure 15, à droite).

23 Source : https://sdage-sage.eau-loire-bretagne.fr/home/le-sdage-2016-2021/programme-de-mesures-dans- les-te/sous-bassin-loire-aval-et-cotier.html [consulté le 16/10/2018]

Paysant Guillaume | Trajectoires paysagères des hydrosystèmes secondaires

56

Figure 15. Répartition des mesures par domaine - sous bassin Loire aval et côtiers vendéens (Source : AE LB 2016)

La prédominance de l’assainissement en termes de fonds engagés s’explique notamment par l’échéance 2017 de la directive eaux résiduaires urbaines qui concerne ici les systèmes d’assainissement littoraux. Le reste de la dépense concerne le traitement des eaux usées et la création ou l’entretien de réseaux d’assainissement des eaux usées. Pour les milieux aquatiques, les mesures portent principalement sur la restauration hydromorphologique des cours d’eau (47%) quand la restauration écologique concerne 19% du budget « milieux aquatiques ». Les mesures dans le domaine de l’agriculture se concentrent quant à elles sur les bassins de l’Erdre, de la Sèvre Nantaise, de l’Evre et de l’Aubance24 et financent des

actions œuvrant dans la réduction des transferts de nitrates et de l’érosion (plus de 70%) (Agence de l’eau Loire-Bretagne 2016).