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Introduction de la deuxième partie

Chapitre 5. Analyse systémique des trajectoires paysagères des hydrosystèmes secondaires ligériens

5.3 Analyses statistiques multidimentionnelles (approche factorielle) pour la caractérisation des trajectoires paysagères

5.3.1 Analyse en composante principale (ACP) unique 1950-

L’Analyse en Composante Principale, créée en 1901 (Pearson 1901) et introduite en statistique en 1933 (Hotelling 1933) est surtout mobilisée depuis le développement des moyens de calculs (Lebart, Piron et Morineau 2006). L’objectif de cette méthode est de simplifier un jeu de données quantitatives en réduisant leur dimensionnalité tout en préservant au maximum les informations pertinentes (Sewell 2008). La spécificité des statistiques appliquées en géographie est que les données mobilisées intègrent des « individus » statistiques qui sont spatialisés (ont des coordonnées) et cartographiables en tant qu’unités spatiales (Dumolard, Dubus et Charleux 2003). Ils sont généralement eux- mêmes composés de sous-éléments faisant intervenir le jeu d’échelle, notion clé en géographie. L’Analyse en Composante Principale, comme les autres méthodes factorielles, a toute sa place dans les recherches en sciences humaines et sociales comme cela a été démontré dans de nombreux travaux (e.g Guerrien et Marc 2003; Paulus 2004; Germaine 2009a).

L’objectif de notre analyse factorielle est de caractériser les deux hydrosystèmes secondaires aux deux dates afin de les comparer et d’identifier leurs évolutions (saisir et expliquer les trajectoires donc). Pour cela, il est nécessaire de réunir au sein d’une même analyse factorielle les individus statistiques des deux rivières aux deux dates. Dans notre recherche, nous avons retenu 13 variables (figure 78) liées aux unités spatiales des deux plaines alluviales en 1950 et en 2016 (n=177 pour chacune des années). Notre ACP, effectuée sous Rstudio123 avec le package FactoMiner, a été réalisée sur les 354 individus

(Aubance et Couasnon, 1950 et 2016).

La corrélation entre les variables est un prérequis essentiel pour toute ACP. Nous avons choisi d’étudier ces corrélations par date, pour distinguer d’éventuels changements d’inter-relations de nos variables aux deux dates, dans deux périodes aux contextes très différents. Les résultats de cette analyse justifient le bienfondé de l’ACP dans notre cas d’étude, plusieurs corrélations ayant été recensées (représentation graphique des corrélations présentée en annexe 18) :

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Tableau 15. Tableau des corrélations des individus de 1950 pour l'Aubance et le Couasnon (vert = corrélations positives ; rouge = corrélations négatives)

L’étude des corrélations dévoile certaines logiques paysagères en 1950. Le taux de couverture boisée est plutôt corrélé négativement avec la part de plaine alluviale (=-0,38). Cela signifie qu’en 1950, les secteurs où la plaine alluviale est étroite étaient plutôt occupés par des surfaces boisées. La corrélation positive entre la part de plaine alluviale et la densité de parcelles (=0,56) et les indicateurs liés aux haies (densité et connectivité, respectivement 0,71 et 0,65) révèle une présence d’un réseau de haies de qualité (dense et connecté) dans les secteurs de large plaine alluviale (plutôt en aval donc). Une corrélation négative entre la part de cultures et la part de surfaces en herbe (=-0,49) est également à relever et indique une logique d’opposition entre ces deux types d’occupation du sol. Les fortes densités de parcelles ont tendance à accueillir des cultures (=0,59). On peut interpréter ce résultat comme étant le fait que les parcelles en cultures étaient plutôt petites et étroites comparées aux prairies, et que cela joue dans cet indicateur de densité. De même, une forte densité de parcelles était à relever en 1950 dans les secteurs où la plaine alluviale était large (=0,56). Enfin, une relation de corrélation positive entre la présence de haies denses et connectées et une densité de parcelles importantes est également révélée dans cette analyse des corrélations (respectivement, 0,53 et 0,54). Des corrélations « logiques » sont également visibles dans ce tableau. Les fortes corrélations négatives existantes entre le nombre de bras et les longueurs et sinuosités de cours s’expliquent par le fait que ces deux derniers indicateurs sont divisés par le nombre de bras. De même, la densité et la connectivité de haies sont fortement corrélées positivement (=0,83), mais cela s’explique par le fait que la connectivité des haies est un indicateur totalement dépendant de la présence de haies.

L’analyse des corrélations de 2016 permet de constater des nouvelles relations de corrélations (ou non) entre les variables.

pc_pa nb_L L_nb S_nb pc_bois pc_herbe pc_cultslope_

rang pc_pe I_RPC D_Parc D_haie C_haie

pc_pa 1,00 -0,15 0,22 0,18 -0,38 0,08 0,31 0,03 0,02 -0,05 0,56 0,71 0,65 nb_L_ -0,15 1,00 -0,64 -0,61 0,17 0,01 -0,14 -0,12 0,10 0,26 -0,06 -0,01 0,03 L_nb_ 0,22 -0,64 1,00 0,85 -0,06 0,15 0,08 -0,04 -0,15 -0,14 0,08 0,07 0,10 S_nb_ 0,18 -0,61 0,85 1,00 -0,11 0,13 -0,01 0,04 -0,10 -0,12 0,02 0,10 0,11 pc_bois -0,38 0,17 -0,06 -0,11 1,00 -0,29 -0,35 -0,01 0,02 0,07 -0,33 -0,23 -0,17 pc_herbe 0,08 0,01 0,15 0,13 -0,29 1,00 -0,49 0,03 -0,23 0,08 -0,10 0,25 0,24 pc_cult 0,31 -0,14 0,08 -0,01 -0,35 -0,49 1,00 -0,21 -0,08 -0,15 0,59 -0,06 -0,06 slope_rang 0,03 -0,12 -0,04 0,04 -0,01 0,03 -0,21 1,00 0,12 -0,05 -0,05 0,33 0,27 pc_pe 0,02 0,10 -0,15 -0,10 0,02 -0,23 -0,08 0,12 1,00 0,18 -0,05 0,03 0,09 I_RPC -0,05 0,26 -0,14 -0,12 0,07 0,08 -0,15 -0,05 0,18 1,00 0,05 0,07 0,07 D_Parc 0,56 -0,06 0,08 0,02 -0,33 -0,10 0,59 0,05 -0,05 -0,05 1,00 0,53 0,54 D_haie 0,71 -0,01 0,07 0,10 -0,23 0,25 -0,06 0,33 0,03 0,07 0,53 1,00 0,83 C_haie 0,65 0,03 0,10 0,11 -0,17 0,24 -0,06 0,27 0,09 0,07 0,54 0,83 1,00

pc_pa = % de plaine alluviale ; nb_l = nombre de bras ; L_nb = longueur de cours/nb_L ;

Sinuosité/nb_L ; pc_bois = % de bois ; pc_herbe = % de surface en herbe ; pc_cult = % de cultures ; slope_rang = étendue des pentes ; pc_pe = % de plans d'eau ; I_RPC = Indice de Ration

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Tableau 16. Tableau des corrélations des individus de 2016 pour l'Aubance et le Couasnon (vert = corrélations positives ; rouge = corrélation négative)

En 2016, on retrouve une corrélation positive entre la part de plaine alluviale et les deux indicateurs de haies (densité = 0,69 et connectivité = 0,47) même si celle de la connectivité est moins évidente. La densité de parcelles et la part de plaine alluviale sont moins corrélées qu’en 1950 (0,56 contre 0,40) et la même tendance s’observe entre la densité de parcelles et la densité de haies (0,53 contre 0,41). Cela peut signifier d’une part une taille de parcelles globalement plus importante en 2016, qui fait diminuer de fait l’indice de densité (et cette situation a été décrite précédemment, 4.2.2) et d’autre part révéler la présence d’un type d’OCS non concerné par l’indice de densité (comme les formations boisées). La relation entre la densité et la connectivité des haies est elle aussi affaiblie (0,83 contre 0,62), traduisant l’état récent du réseau de haies, bien plus lacunaire qu’en 1950 (arasement important des haies, et haies restantes ne constituent plus un « réseau », constat également fait précédemment, 4.2.2). Une nouvelle relation entre les types d’occupation du sol apparait : les surfaces boisées sont dorénavant corrélées négativement avec les cultures (=-0,58) quand ces deux types d’OCS pouvaient cohabiter en 1950. On retrouve l’opposition entre les prairies et les cultures (=-0,54) déjà présente en 1950. Curieusement, les plans d’eau (absents des relations de corrélations en 1950) semblent plutôt corrélés avec l’indice de sinuosité (=0,47) et rien ne permet d’émettre une hypothèse quant à cette relation à ce stade de l’analyse.

Première ACP – repérage des individus atypiques

Les ACP ont comme objectif d’expliquer l’inertie, elles peuvent être ainsi fortement influencées par des individus au profil atypique. Ainsi dans ces approches, il est conseillé de réaliser une première ACP dont l’objectif sera de repérer ces éventuels profils atypiques, puis une fois ceux-ci écartés (en les intégrant en tant qu’individus illustratifs par exemple),

pc_pa nb_L_ L_nb_ S_nb_ pc_bois pc_herbe pc_cult slope_

rang pc_pe I_RPC D_Parc D_haie C_haie

pc_pa 1,00 -0,06 -0,01 -0,03 -0,33 0,09 0,23 0,03 -0,21 -0,09 0,40 0,69 0,47 nb_L_ -0,06 1,00 -0,64 -0,54 0,16 0,14 -0,26 -0,17 -0,04 -0,02 0,25 0,01 0,24 L_nb_ -0,01 -0,64 1,00 0,71 -0,06 -0,08 0,20 0,07 0,19 0,05 -0,20 -0,03 -0,15 S_nb_ -0,03 -0,54 0,71 1,00 -0,06 -0,06 0,08 0,15 0,47 0,05 -0,22 -0,02 -0,12 pc_bois -0,33 0,16 -0,06 -0,06 1,00 -0,08 -0,58 -0,04 -0,03 0,07 -0,24 -0,23 -0,19 pc_herbe 0,09 0,14 -0,08 -0,06 -0,08 1,00 -0,54 0,22 -0,16 0,19 0,21 0,13 0,04 pc_cult 0,23 -0,26 0,20 0,08 -0,58 -0,54 1,00 -0,27 0,08 -0,16 0,12 0,12 0,15 slope_rang 0,03 -0,17 0,07 0,15 -0,04 0,22 -0,27 1,00 0,09 0,14 -0,17 0,06 -0,23 pc_pe -0,21 -0,04 0,19 0,47 -0,03 -0,16 0,08 0,09 1,00 0,00 -0,10 -0,16 -0,16 I_RPC -0,09 -0,02 0,05 0,05 0,07 0,19 -0,16 0,14 0,00 1,00 0,13 0,00 -0,02 D_Parc 0,40 0,25 -0,20 -0,22 -0,24 0,21 0,12 -0,17 -0,10 0,13 1,00 0,41 0,56 D_haie 0,69 0,01 -0,03 -0,02 -0,23 0,13 0,12 0,06 -0,16 0,00 0,41 1,00 0,62 C_haie 0,47 0,24 -0,15 -0,12 -0,19 0,04 0,15 -0,23 -0,16 -0,02 0,56 0,62 1,00

pc_pa = % de plaine alluviale ; nb_l = nombre de bras ; L_nb = longueur de cours/nb_L ; Sinuosité/nb_L ; pc_bois = % de bois ; pc_herbe = % de surface en herbe ; pc_cult = % de cultures ; slope_rang = étendue des pentes ; pc_pe = % de plans d'eau ; I_RPC = Indice de Ration Prairie/Cultures ; D_Parc = Densité de Parcelle ; D_haie = Densité de haie ; C_haie = Connectivité des haies

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de réaliser une seconde ACP qui permettra de synthétiser l’information du tableau de données. Cette première ACP exploratoire a été réalisée et est présentée en figure 79.

Figure 79. Cercle des corrélations (gauche) et graphe des individus (droite) - Axe 1 et 2

Les résultats de cette première ACP (figure 79) révèlent certains individus isolés. En effet, les individus 6, 343 et surtout 117 sont assez éloignés du nuage constitué des autres individus, sur les deux premiers axes. Nous considérons que la distance des individus 6 et 343 reste raisonnable pour ne pas les écarter de l’analyse. En revanche, l’éloignement de l’individu 117, et ce sur les cinq premiers axes de l’ACP (figure 80), incite à renouveler l’ACP en l’intégrant en tant qu’individu illustratif.

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Figure 80. Profil atypique de l'individu 117 sur les axes 3-4 (gauche) et 4-5 (droite)

Tableau 17. Écarts à la moyenne de l'individu n°117 comparé à l'ensemble des individus

L’individu n°117 présente un profil atypique lié à des valeurs très éloignées de la moyenne pour de nombreux indicateurs. Pour beaucoup, cela s’explique par le fait que la zone tampon qui définit les unités spatiales s’étend au-delà de la plaine alluviale, or de nombreux indicateurs sont justement liés au fond de vallée. Cet individu subit alors un effet de bord. Les valeurs de pourcentage de plaine alluviale (par boite), les variables d’occupation du sol (du fond de vallée) ou les variables liées aux haies sont ainsi particulièrement éloignées de la moyenne. La variable « pourcentage de plans d’eau » présente elle aussi une valeur très différente pour cet individu comparée à la moyenne, alors que la variable ne se restreint pas aux plans d’eau de la plaine alluviale, mais prend en considération les plans d’eau dans l’emprise des boites. Cette valeur exceptionnelle s’explique par la présence d’un ensemble de plans d’eau importants visibles sur la photographie aérienne de 2016 au nord de la plaine alluviale (figure 81).

% de plaine alluviale Nombre de bras Longueur (/ nb bras) Sinuosité (/

nb bras) % bois % herbe % culture Etendue des pentes % plan d'eau (boite) Ration prairie/cultur Densité de parcelles Densité de haies Connectivité des haies Moyennes des individus 33,49 1,62 377,59 1,03 27,68 44,35 18,99 17,36 3,16 74,58 42,77 2,56 23,41 Score de l'individu n°117 4,69 1,00 458,01 2,41 5,62 8,41 76,31 17,42 179,27 0,11 22,67 0,85 0,00 Ecart à la moyenne de l'ind n°117 -28,80 -0,62 80,42 1,38 -22,06 -35,94 57,32 0,06 176,11 -74,47 -20,10 -1,71 -23,41

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Figure 81. Localisation de l'individu 117, écartée de l'ACP (réalisation : GP)

L’analyse de l’inertie des axes de la nouvelle ACP révèle que les deux premiers axes résument 45,45% de l’information. Les cinq premiers axes résument quant à eux 74,8% de l’information et se distinguent des autres axes qui contribuent individuellement très peu, particulièrement les axes 9 à 13 (moins de 3% de variance chacun, figure 82).

Figure 82. Contribution des axes de l'ACP – 74.4% de l'inertie expliquée par les 5 premiers axes

L’analyse du graphe des individus sur les axes 1 et 2 révèle des spécificités liées aux deux rivières. En effet, les concentrations d’individus sont différentes selon les rivières. Les individus du Couasnon sont assez dispersés sur la droite (axe 1) quand ceux de l’Aubance sont regroupés. À l’inverse les individus du Couasnon sont plutôt concentrés en