• Aucun résultat trouvé

Gains et pertes potentiels résultant des ZLE vus sous une optique théorique

continentale africaine 3

3.1 Gains et pertes potentiels résultant des ZLE vus sous une optique théorique

ou les pertes.

3.1 Gains et pertes potentiels résultant des ZLE vus sous une optique théorique

L’approche traditionnelle de la théorie de l’intégration n’analyse pas complètement les gains et les pertes de bien-être pour les pays qui adhèrent aux principes du libre-échange, et surtout pas pour les pays en développement.

La théorie de l’union douanière de Jacob Viner a été largement utilisée pour analyser les gains et les pertes nets résultant de l’intégration régionale. Selon Viner, les accords d’échanges préférentiels, notamment les ZLE,

apportent des changements importants au bien-être natio-nal et mondial par deux types d’effets distincts : les effets statiques et les effets dynamiques. Les premiers renvoient à l’allocation des ressources résultant de l’évolution des prix relatifs liée à la structure modifiée des tarifs, et les seconds concernent la capacité d’exploiter les économies d’échelle et de réaliser des niveaux d’investissement et une croissance économique dus à l’efficacité et à la taille.

3.1.1 Effets statiques: création de courants commerciaux et réorientation du commerce

Le phénomène de l’intégration régionale – les ZLE en particulier – a posé de sérieux problèmes d’analyse aux théoriciens du commerce parce que les plans d’intégra-tion régionale associent en théorie des éléments tant du libre-échange (au sein de l’union) que du protectionnisme (contre les membres). De toute évidence, si l’aspect libéra-lisation du commerce de l’intégration régionale concorde avec la perception néoclassique d’un régime commercial qui renforce le bien-être, il n’en demeure pas moins que

l’aspect discriminatoire de l’accord peut nuire à la réali-sation du bien-être régional et mondial.

Selon le modèle de Viner, les effets statiques de l’intégra-tion résultent d’une réallocal’intégra-tion unique des facteurs de production économique et des ressources naturelles et entraînent des impacts négatifs et positifs sur le bien-être.

Le modèle fournit un outil permettant d’analyser les effets des ZLE sur le bien-être en introduisant les concepts de création de courants commerciaux et de réorientation du

commerce. La mesure dans laquelle les changements de bien-être se produisent dépend grandement de la prédo-minance de l’un ou de l’autre de ces effets.

La création de courants commerciaux désigne le volume de commerce supplémentaire qui résulte de l’abolition des barrières tarifaires au sein de la ZLE. Selon les hypothèses de création de courants commerciaux, la structure des échanges reflète fortement les différences d’avantages com-paratifs entre les pays membres. On dit qu’il y a création de courants commerciaux lorsque les pays abandonnent la production des biens et services qu’ils produisent de façon moins efficace en échange des biens et services produits de façon plus efficace par un pays partenaire.

De ce fait, on dit que le bien-être régional et mondial a été renforcé lorsque les changements introduits par la ZLE produisent une modification de la consommation, les produits intérieurs de coût élevé étant abandonnés en faveur de produits à plus faible coût d’un pays partenaire.

Ainsi, quelles sont les conditions d’un accord d’intégration régionale créateur de courants commerciaux ? Robson (1984) déclare qu’il y a probabilité de création de courants commerciaux lorsque la zone économique d’intégration et le nombre de pays membres sont grands, que les barrières tarifaires et non tarifaires ont été réduites ou éliminées en raison de la ZLE et que les économies des pays intégrés sont compétitives, ayant des niveaux de développement comparables et une base de ressources complémentaire.

L’effet de réorientation du commerce, par contraste, passe pour être un coût pour la région et le monde en général.

On dit qu’il y a réorientation du commerce lorsque le changement intervenu dans la consommation est davan-tage en faveur de produits et de services plus chers de la région que de produits et de services meilleur marché fournis par des pays extérieurs à la région. C’est pour-quoi la réorientation du commerce pourrait produire un environnement peu compétitif, l’inefficacité et la perte d’excédent de consommation.

Bien que l’on considère en règle générale comme de la théorie le fait que la création de courants commerciaux et la réorientation de commerce sont des résultats potentiels des systèmes commerciaux préférentiels et qu’elles ont tendance à déplacer le bien-être économique dans des directions opposées (Viner, 1950), l’effet net des deux phénomènes est une question empirique (voir section suivante).

Pour l’Afrique, la théorie économique statique centrée sur la réorientation du commerce agissant sur le bien-être mondial peut méconnaître le fait que les objectifs de l’intégration du continent transcendent des considéra-tions économiques étriquées. L’approche de l’intégration appliquée par le continent est axée sur le développement et présente de puissantes justifications liées au dévelop-pement, qui débordent le cadre d’une analyse théorique classique en faveur de son intégration régionale.

3.1.2 Effets dynamiques

C’est dans le long terme que sont réalisés les gains dyna-miques résultant des zones de libre-échange. Ils sont davantage qu’un renforcement unique du bien-être par des effets d’entraînement. Ces effets découlent souvent des économies d’échelle (en raison d’un marché élargi), de gains d’efficacité (en raison de l’environnement concur-rentiel et du transfert de technologie), d’entrées accrues d’investissement direct étranger ; et de l’élimination de la protection contingente et des barrières tarifaires. Les gains économiques les plus importants peuvent découler de la baisse des coûts unitaires provoquée par la coopé-ration économique et la coordination des politiques (De Melo, Panagariya et Rodrik, 1993), y compris ceux pour

les transports et les communications à l’échelle de la région. L’Afrique proprement dite peut obtenir des gains dynamiques de l’intégration régionale dans six domaines principaux.

Les marchés régionaux élargis fournissent des incitations aux IDE ainsi qu’aux investissements transfrontières pri-vés. Les régimes commerciaux et macroéconomiques appropriés peuvent encourager les entreprises à mettre sur pied des projets industriels et de services de taille optimale, dont l’exécution était auparavant entravée par l’exiguïté des marchés nationaux. La plupart des économies africaines sont trop petites pour lancer des

projets sidérurgiques viables, par exemple, pourtant le rôle crucial que joue cette industrie pour que les pays en développement s’industrialisent est largement reconnu.

La combinaison d’un climat des investissements stable, du développement de l’infrastructure des transports et des communications ainsi qu’une politique économique régionale judicieuse pourrait constituer des incitations pour les grands investissements dans les projets dans le secteur manufacturier et celui des services qui nécessitent des économies d’échelle.

L’intégration régionale est susceptible d’améliorer l’efficacité par suite des pressions concurrentielles entre entreprises rivales. Les marchés marqués par des monopoles et des oligopoles sont de grands obstacles à une production efficace dans la plupart des pays africains. Des entre-prises nationales inefficaces (y compris celles à l’ombre des monopoles gouvernementaux) engrangent souvent des bénéfices anormaux soit parce que les lois les protègent soit parce que le secteur concerné n’offre aucun rival crédible.

Adopter et mettre à exécution des règles de concurrence régionale dans toute la zone de libre-échange est suscep-tible de renforcer (ou de provoquer) la libre concurrence requise pour une structure industrielle efficace.

Les effets potentiels résultant d’une éventuelle réorientation du commerce d’une ZLE régionale peuvent entraîner une amélioration du bien-être dans la CER concernée. Cette situation s’explique par le fait qu’une augmentation du prix relatif des produits exportables peut développer le secteur, en stimulant davantage les investissements et en accroissant ainsi la production et l’emploi.

L’expansion du commerce intra-africain est censée engen-drer une croissance plus forte et la convergence des revenus au sein des CER. L’intégration des marchés régionaux au niveau des CER entraînerait probablement l’apparition de pôles de croissance régionaux capables de produire suffisamment d’effets extérieurs positifs pour les États membres les moins développés de la ZLE

À mesure que la composition de la production se diversifie au détriment des produits primaires, la dépendance à long terme des pays africains à l’égard des pays développés à économie de marché pour ce qui est des produits manufac-turés devrait diminuer. La structure actuelle marquée par la spécialisation dans les produits de base en Afrique a placé durablement le continent dans une position désavan-tagée non seulement s’agissant des pertes sur le plan des termes de l’échange mais aussi pour ce qui est de la perte de l’image positive et de la croissance. Un des effets dyna-miques potentiels des ZLE en Afrique est qu’ils peuvent fournir un meilleur environnement pour la diversification industrielle et la complémentarité régionale que lorsque chaque pays fait cavalier seul.

La panoplie des accords régionaux fournit une excellente plate-forme pour le dialogue, le règlement des conflits ainsi que le maintien de la paix et de la sécurité. La stabilité politique et la paix sous-régionales peuvent être certains des effets non économiques de l’intégration régionale, d’autant que l’Afrique a souffert de beaucoup de guerres intestines et de conflits civils. Des décennies durant, l’absence de stabilité et de paix a peut-être constitué un puissant déterminant non économique de la piètre croissance en Afrique. Cette notion particulière de gain dynamique met en lumière l’importance potentielle des effets de l’intégration en Afrique.

Les mesures tendant à éliminer les droits de douane ne garantiront des gains dans ces six domaines que si d’autres mesures les accompagnent, telles que la réduction des barrières non tarifaires résultant de la faiblesse de l’infras-tructure, de la lenteur des procédures aux frontières, du chevauchement des procédures et de la corruption. Des efforts régionaux tendant à mettre à niveau l’infrastruc-ture et à réduire les barrières non tarifaires sont donc essentiels à toute intégration réussie.