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En France

Dans le document L'écrit électronique (Page 105-109)

Section 1 – Au plan probatoire

E) La Convention des Nations Unies sur l’utilisation des communications

2) En France

La reconnaissance de l’écrit électronique en France s’est opérée en deux temps. Le droit de la preuve a d’abord fait l’objet de modifications en 2000, et le droit des contrats, en 2004. Suite aux modifications de 2000, il devenait alors possible de prouver devant les tribunaux qu’un contrat avait été conclu par voie électronique.

C’est par la transposition de la Directive 1999/93/CE sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques368 que le législateur français a reconnu l’aspect probatoire de l’écrit électronique. La directive répond à l’impératif « de veiller à ce que les signatures électroniques puissent avoir force probante en justice dans tous les États membres »369. Elle impose ainsi aux États membres – dont la France – de s’assurer de la reconnaissance des signatures électroniques. L’article premier de la directive exclut expressément du champ d’application « les aspects liés à la conclusion et à la validité des contrats ou d’autres obligations légales lorsque des exigences d’ordre formel sont prescrites par la législation nationale ou communautaire »370. Les États membres ne sont donc pas tenus de

reconnaître les écrits électroniques lorsque l’écrit est requis ad validitatem. Cette première étape de la reconnaissance de l’écrit électronique ne vise que la fonction probatoire : seuls les actes librement constatés par écrit ou ceux pour lesquels l’écrit n’est exigé qu’à des fins probatoires peuvent valablement être conclus sur support électronique.

L’article 5(1) de la directive impose aux États membres de reconnaître l’utilisation des signatures électroniques avancées. Ils doivent ainsi

« [veiller] à ce que les signatures électroniques avancées […]

a) répondent aux exigences légales d'une signature à l'égard de données électroniques de la même manière qu'une signature manuscrite répond à ces exigences à l'égard de données manuscrites ou imprimées sur papier et

b) soient recevables comme preuves en justice. »

Les signatures électroniques qui ne sont pas « avancées », c'est-à-dire celles qui « ne repose[nt] pas sur un certificat qualifié » ou qui ne sont « pas créée[s] par un dispositif sécurisé de création de signature », se voient tout de même garantir leur efficacité juridique et leur recevabilité comme moyen de preuve371.

368 Directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 1999, sur un cadre

communautaire pour les signatures électroniques, J.O. L.13 du 19.1.2000, p. 12 à 20(ci-après « Directive 1999/93/CE »).

369 Id., considérant n° 21. 370 Id., art. 1(2).

371 Id., art. 5(2). La distinction entre les deux types de signature figure aux définitions qu’en fait l’article 2 : « 1) "signature électronique", une donnée sous forme électronique, qui est jointe ou liée logiquement à d'autres données électroniques et qui sert de méthode d'authentification;

Or, reconnaître la valeur juridique des signatures électroniques revient à reconnaître les écrits auxquels ils sont apposés. En effet, l’écrit tire sa force probatoire de ce qu’il permet d’opposer un acte à une partie du fait de sa signature372, d’où le principe de l’effet relatif des contrats, selon lequel ceux-ci n’ont d’effet qu’entre les parties373. En conséquence, c’est dans la section portant sur la preuve littérale que figurent les articles du Code civil français résultant de la transposition de la Directive 1999/93/CE, soit les articles 1316 C.c.Fr. et suivants.

L’approche du législateur français a consisté à redéfinir l’écrit de façon à englober l’écrit sur support électronique. Ainsi, la Loi du 13 mars 2000374, transposant la Directive

1999/93/CE, insère des dispositions de portée générale dans la section du Code civil traitant de la preuve littérale. Le nouvel article 1316 C.c.Fr. redéfinit l’écrit comme « une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d'une signification intelligible, quels que soient leur support et leurs modalités de transmission ». L’article 1316-1 C.c.Fr.375 pose les conditions d’admissibilité en preuve d’un écrit électronique : la personne dont il émane doit être identifiable et son intégrité, garantie. L’article 1316-2376 prévoit le règlement des conflits de preuves littérales.

2) "signature électronique avancée" une signature électronique qui satisfait aux exigences suivantes: a) être liée uniquement au signataire;

b) permettre d'identifier le signataire;

c) être créée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif

et d) être liée aux données auxquelles elle se rapporte de telle sorte que toute modification ultérieure des données soit détectable ».

372 L’article 1322 C.c.Fr. pose ainsi que « L'acte sous seing privé, reconnu par celui auquel on l'oppose, ou légalement tenu pour reconnu, a, entre ceux qui l'ont souscrit et entre leurs héritiers et ayants cause, la même foi que l'acte authentique. »

373 C.c.Fr., art. 1165 et C.c.Q., art. 1440. À titre d’exemple du principe, l’article 1328 C.c.Fr. et l’article 2830 C.c.Q., tous deux figurant aux sections traitant de la preuve, posent que l’acte sous seing privé n’a pas de date contre les tiers ; elle n’est opposable qu’aux parties.

374 Loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de

l’information et relative à la signature électronique, J.O. 14 mars 2000, p. 3968 (ci-après « Loi du 13 mars 2000 »).

375 « 1316-1. L'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité. »

376 « 1316-2. Lorsque la loi n'a pas fixé d'autres principes, et à défaut de convention valable entre les parties, le juge règle les conflits de preuve littérale en déterminant par tous moyens le titre le plus vraisemblable, quel qu'en soit le support. »

L’article 1316-3377 pose l’équivalence probatoire des écrits électronique et papier, et enfin l’article 1316-4378 définit ce qu’est une signature et lui attache les fonctions d’identification et de manifestation du consentement.

Ces dispositions consacrent donc l’existence de l’écrit électronique en droit français. Il est dès lors possible de conclure valablement un contrat par voie électronique. Toutefois, le fait que la preuve d’un tel contrat soit possible n’emporte pas qu’un écrit requis ad validitatem puisse être constaté sur support électronique. Dans son rapport sur le projet de loi qui allait devenir la Loi du 13 mars 2000, la Commission des Lois est claire à cet effet : « [elle] souhaite réserver la reconnaissance de l’écrit électronique aux écrits ad probationem »379. Elle préférait ainsi que « l’adaptation [des prescriptions quant aux écrits

ad validitatem] aux technologies de l’information ne résulte pas d’une disposition générale dont les implications n’auraient pas été mesurées, mais qu’elle donne lieu à un débat et un examen approfondis. »380

C’est d’abord quant à son aspect probatoire que l’écrit électronique a été reconnu par le législateur français. Celui-ci transposait alors la Directive 1999/93/CE, établissant la validité des signatures électroniques – donc de la preuve des contrats électroniques. La Loi du 13 mars 2000 a procédé à une redéfinition de l’écrit lui permettant de se décliner tant sur support papier que sur support électronique. Cette approche contraste avec celle utilisée par le législateur québécois.

377 « 1316-3. L'écrit sur support électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier. » 378 « 1316-4. La signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie celui qui l’appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l'acte.

Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

379 COMMISSION DES LOIS, Rapport au Sénat n° 203, session ordinaire de 1999-2000, annexe au procès verbal de la séance du 2 février 2000, p. 28, en ligne : <http://www.senat.fr/rap/l99-203/l99-203.html> (accédé le 31 août 2009).

Dans le document L'écrit électronique (Page 105-109)