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Forme générale d’une preuve à la Fitch

A.2 Forme générale d’une preuve à la Fitch

Remarque 12 (Sur la forme de toute preuve dans le système symbolique de Fitch).

Tout argument en déduction naturelle à la Fitch se résume au schéma :

a Γ H

..

. ...

n F

I Γ → F → I, a,n

Γ est l’ensemble des hypothèses nécessaires à dérivation de F .

FIGUREA.2 – Forme générale de toute preuve dans le symbolisme de Fitch Le schéma d’un argument à la Fitch permet de percevoir intuitivement ce qu’est une preuve ou un argument logique. On a vu qu’un argument est valide si et seule-ment si on peut à partir de la base des assomptionsΓ parvenir à F en justifiant cha-cune des étapes par l’usage des règles qui permettent de passer deΓ à F . Il n’y a donc pas de différence sémantique entre l’introduction d’un conditionnel à la fin d’une preuve à la Fitch, comme par exemple dans le schéma précédent

Γ → F et l’usage du turnstile qui indique la dérivabilité :

Γ ` F

car la preuve qui permet d’introduire le conditionnelΓ → F atteste du fait que F est dérivable deΓ, ce qu’affirme la formule Γ ` F .

B

Principe de bivalence, principe du tiers

exclu et formules dérivées

Cet appendice a pour fonction de préciser un certain nombre de points qui sont parfois source de confusion.

L’expression formelle de la loi dite du « tiers exclu » est toujours donnée dans le langage du calcul propositionnel :

P ∨ ¬P (B.1)

Si l’on remplace P par n’importe quel énoncé, on comprend assez facilement la raison pour laquelle Aristote (De l’interprétation, IX, 18a34-18b-17-25) met sur le même plan la validité du principe de contradiction et celle du tiers exclu. On peut lire sous la plume d’Aristote traduit par Vuillemin [146, pp. 150] :

En effet si toute affirmation est vraie ou fausse, il est nécessaire aussi pour toute chose d’exister ou de ne pas exister. Car si quelqu’un dit que quelque chose sera, tandis que quelqu’un d’autre dit que cette même chose ne sera pas, il est évident que l’un des deux seulement dit la vé-rité, puisque toute affirmation est vraie ou fausse. En effet, s’appliquant à ce genre de choses [les choses singulières et futures], il n’arrivera pas que les deux disent simultanément la vérité.

On ne reprendra pas ici l’analyse que Vuillemin [146, pp. 149-187] fait de ce texte difficile d’Aristote. Mon propos consiste ici uniquement d’une part à distinguer le plus précisément possible principe de bivalence et théorème du tiers exclu et, d’autre part, à montrer qu’il existe dans le calcul des prédicats du premier ordre des expres-sions différentes du tiers exclu, qui n’ont pas toutes le même signification mais qui sont toutes des formules prouvables en logique classique et non prouvables en lo-gique intuitionniste.

Le principe de bivalence dans le texte d’Aristote est énoncé via l’expression « toute affirmation est vraie ou fausse », en sous-entendant que cette propriété de vérité ou de fausseté d’une affirmation est indépendante des moyens de preuve et donc du temps de son énonciation. Si j’écris maintenant que Gerhard lira avec plaisir ce que je suis en train d’écrire, on peut considérer que cet énoncé a la propriété d’être vrai ou faux maintenant, c’est-à-dire indépendamment du moment futur qui vérifiera ou falsifiera l’énoncé. C’est parce que l’on admet le principe de bivalence que l’on peut admettre en logique classique la légitimité de la méthode des tables de vérité, et c’est précisément parce que l’on refuse d’admettre ce principe en logique intuitionniste que la méthode des tables de vérité apparaît dès lors comme une méthode inadé-quate pour cette logique.

Le principe du tiers exclu, dans le texte d’Aristote cité plus haut, est formulé dans ces termes : « il est nécessaire pour toute chose d’exister ou de ne pas exister ». On peut remarquer que Vuillemin s’éloigne volontairement de la traduction que Tricot [3, p.96] donne : « Si, en effet, toute affirmation ou négation est vraie ou fausse, né-cessairement aussi toute chose est ou n’est pas. »et qu’il tombe au contraire d’ac-cord avec la traduction de Barnes65 : « For if every affirmation or negation is true or false it is necessary for everything either to be the case or not to be the case. » Si on laisse de côté la délicate question du traitement de la modalité du nécessaire, il est clair qu’Aristote voit parfaitement que l’affirmation du principe de bivalence

im-plique une expression dérivée du tiers exclu qu’il exprime ici dans le langage du calcul

des prédicats du premier ordre :

Principe de bivalence → ∀x(E x ∨ ¬E x) (B.2) Mais c’est dans le texte de la Métaphysique,Γ, 7, qu’Aristote affirme de la manière la plus claire possible le lien entre la preuve d’une expression dérivée tiers exclu et l’affirmation du principe de contradiction :

Mais il n’est pas possible non plus qu’il y ait aucun intermédiaire entre des énoncés contradictoires : il faut nécessairement ou affirmer, ou nier un seul prédicat, quel qu’il soit, d’un seul sujet. C’est est évident, d’abord, pour qui définit la nature du vrai et du faux. Dire de l’Être qu’il n’est pas, ou du Être qu’il est, c’est le faux ; dire de l’Être qu’il est, et du Non-Être qu’il n’est pas, c’est le vrai ; de sorte que celui qui dit d’un être qu’il est ou qu’il n’est pas, dira ce qui est vrai ou ce qui est faux ; mais [dire qu’il y a un intermédiaire entre des contradictoires], ce n’est ni dire de l’Être, ni du Non-Être, qu’il est ou qu’il n’est pas66.

65. http://users.ox.ac.uk/~ball0888/salamis/interpretatione.html

66. Note de Tricot : C’est donc ne rien dire du tout. [. . .] entre crochets une phrase explicative qui ne se trouve pas dans le texte.

Comme le précise l’article « Logical Laws » dans Oxford Companion to

Philoso-phy67, l’expression qu’Aristote se formalise par

2∀x(P x ∨ ¬P x) (B.3)

l’opérateur de nécessité 2indiquant que la négation de cette loi logique implique une impossibilité, c’est-à-dire une contradiction. Indépendamment de la réflexion métaphysique d’Aristote, c’est bien ce que montre la preuve classique de la formule ∀x(P x ∨ ¬P x) via l’arbre de réfutation de la négation de cette formule :

Théorème 19. `c ∀x(P x ∨ ¬P x) (B.4) Démonstration. ¬∀x(P x ∨ ¬P x)4 ∃x¬(P x ∨ ¬P x)4 ¬P a ¬¬P a ×

On peut aussi remarquer que l’expression

∀x(P x ∨ ¬P x) (B.5)

est la formule dérivée du tiers exclu qui est la plus ressemblante à celle du principe

de bivalence, puisqu’il suffit de considérer que la variable x prend ses valeurs dans

le domaine des énoncés et que le prédicat P symbolise le prédicat de vérité pour un énoncé x pour que cette formule dise « tout énoncé x est vrai ou ne l’est pas » ; et puisque la négation du vrai est le faux, (B.5) dit « tout énoncé est vrai ou faux », ce qui semble bien être l’expression du principe de bivalence et explique que l’on confonde parfois le tiers exclu avec le principe de bivalence.

Enfin la comparaison de la dérivation du schéma P ∨ ¬P en en logique classique

via la règle de la réduction à l’absurde classique et de la dérivation de (B.5) va per-mettre de comprendre pourquoi il est justifié de considérer (B.5) comme une formule dérivée du tiers exclu plutôt que le tiers exclu lui-même :

1 ¬(P ∨ ¬P ) H 2 P H 3 P ∨ ¬P ∨I 2 4 ⊥ ¬E 1, 3 5 ¬P ¬I, 2, 4 6 ¬P ∨ P ∨I 5 7 ⊥ ¬E 1, 6 8 ¬¬(P ∨ ¬P ) ¬I 1,7 9 P ∨ ¬Pc 8

Remarquons maintenant que la dérivation de (B.5) possède une structure qui

s’appuie sur la démonstration précédente, ce qui justifie que l’on considère qu’elle

en dérive68: 1 ∃x¬(P x ∨ ¬P x) H 2 a ¬(P a ∨ ¬P a) H 3 P a H 4 P a ∨ ¬Pa2I 3 5 ⊥ ¬E 1, 3 6 ¬P a ¬I 3 − 5 7 P a ∨ ¬Pa1I 6 8 ⊥ ¬E 2,7 9 ⊥ ∃E 1, 2-8 10 ¬∃x¬(P x ∨ ¬P x) ¬I, 1-10 11 ∀x(P x ∨ ¬P x)c11

68. Pour la vérification de ces preuves, on a fait usage du vérificateur de preuves en déduction na-turelle (au style Fitch), FLiP écrit par Jonathan Jacky (http://staff.washington.edu/jon/flip/

C

Une méthode de décision pour la

logique temporelle minimale

On résume ici la méthode donnée par Copeland [18].

On adopte dans un premier temps toutes les règles bien connues de la méthode des arbres de réfutation pour la logique classique (celles exposées par Lepage [64] et Bell et alii [6].

Supposons qu’il s’agisse de prouver une formule temporelle F dans Kt, alors on appose sur toutes les sous-formules de F le même indice temporel tn.

On supprime ensuite dans le développement de l’arbre tous les opérateurs tem-porels G, F, H , P en augmentant ou diminuant d’une unité l’indice temporel, selon que la formule est affirmée au sujet du futur ou au sujet du passé. On coche les for-mules temporelles Pα, ou F α pour indiquer la désactivation de l’opérateur temporel

par le passage à une formule avec un nouvel indice. En revanche on ne coche jamais les formules de la forme Gα , ¬F ¬α, Hα ou ¬P¬α pour indiquer que ces formules

peuvent toujours recevoir un nouvel indice temporel (vers le futur ou bien vers le passé, en fonction de ce qu’elles indiquent), ce sont donc les opérateurs temporels que l’on supprime en dernier dans le développement de l’arbre. On lit le test quand l’arbre est totalement développé, c’est-à-dire lorsque tous les connecteurs binaires et tous les opérateurs temporels sont supprimés.

L’exemple que donne Copeland et légèrement modifié, permet de comprendre facilement la méthode :

Exemple 7. Théorème 20.

Démonstration. – 1. ¬((p → ¬p) → ¬F ¬P¬p) /t0 4 2. (p → ¬p) /t0 (1)4 3. ¬¬F ¬P¬p /t0 (1)4 4. F ¬P¬p /t0 (3)4 5. ¬P¬p /t1 (4) 6. H p /t1 (5) 7. ¬p /t0 (2) 8. p /t0 (6) × 9. ¬p /t0 (2) 10. p /t0 (6) ×