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3.1 Sources de connaissance des acteurs communautaires, policiers et judiciaires

3.1.1 La formation portant sur la question des violences homophobes acquise par les

Dans un premier temps, les intervenants rencontrés dans le cadre de cette étude ont été invités à élaborer sur la formation qu’ils ont reçue et les connaissances acquises en regard des violences homophobes. Connaissant les formations suivies par les intervenants, il devient plus

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facile de comprendre la dynamique s’opérant entre eux et les victimes de violence homophobe. Il s’agissait donc de vérifier premièrement la disponibilité de telles formations et de vérifier ensuite si les acteurs appelés à intervenir sont, ou se sentent, suffisamment outillés pour agir dans les cas présumés de violence homophobe. Les formations reçues, le cas échéant, contribuent-elles à une meilleure compréhension des intervenants des impacts particuliers vécus par les victimes de violence homophobe. En connaissant mieux les formations suivies, il devient ultimement possible de formuler des recommandations en vue de les améliorer, si nécessaire, objectif visé par cette présente étude.

D’abord, un consensus est remarqué à l’effet qu’aucune formation spécifique à la violence homophobe n’aurait été suivie par les intervenants, ou même n’aurait été offerte par ou dans les milieux d’intervention. Les participants détenaient bien une formation relative à l’emploi occupé, mais cette formation ne ciblait en aucun temps les particularités de la violence homophobe. Les intervenants du milieu communautaire peuvent être sensibilisés à la question dans le cadre de leur parcours académique, sans toutefois être outillés spécifiquement pour intervenir dans le cas d’un acte de violence homophobe, indique Karl en ciblant notamment la formation des intervenants en milieu scolaire :

Ce qui est ressorti tu vois […] c’était le manque de formation initiale. Je pense autour de 80% des gens qui n’étaient pas formés pour contrer l’intimidation (Karl, formateur en milieu scolaire)

Du côté des milieux policier et judiciaire, il semble que les intervenants ne reçoivent aucune notion spécifique en ce qui a trait aux violences homophobes dans leur formation initiale :

La formation d’avocat ne prépare pas les gens pour ça, mais vraiment pas (Paul, avocat LGBT et immigration)

ou même concernant les violences conjugales homosexuelles, précise Max :

À l’école, tsé, ça nous est pas enseigné (la réalité des violences homophobes). On a des cours de droit, des cours de loi, oui on a des cours de communication, mais tsé, gérer une violence conjugale de tous et chacun c’est entre un homme et une femme […] On a pas de formation, au niveau du service pour des violences conjugales homosexuelles (Max, policier, SPVM)

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Des acteurs du milieu communautaire convergent avec les deux policiers rencontrés en soutenant que l’expérience du professionnel s’acquière essentiellement dans sa pratique et tient avant tout dans les capacités personnelles à interagir avec une victime de violence homophobe.

En effet, des participants des deux milieux affirment que la formation qu’ils acquièrent concernant les violences homophobes est essentiellement basée sur leur fréquence d’exposition à des incidents de cette nature ainsi que sur leurs capacités à mettre leurs caractéristiques personnelles à profit lorsqu’il s’agit d’intervenir devant une telle situation ; plus ils y sont confrontés, plus ils se sentent compétents en la matière, confient-ils :

Plus tu es présent à l’écoute dans un groupe comme le nôtre (Gai- Écoute), plus tu as une expérience pertinente des comportements éprouvés qui vont te permettre d’avoir une meilleure écoute […] En ce qui me concerne, c’est sûr que plus de fois je vais travailler, le plus de fois je vais faire des quarts d’écoute, plus je vais avoir les informations pertinentes à donner aux appelants qui vont me venir à l’esprit (Luc, Gai-Écoute)

Côté homophobe, je pense que c’est l’expérience de chacun, le vécu de chacun et ce qu’il connaît (qui est déterminant). Au fur et à mesure qu’on voit, nos expériences dans le métier […] mais comme je te dis, c’est chacun son expérience, son vécu, sa personne elle-même… parce qu’il y en a qui sont bons pour parler avec des personnes et il y en a qui ne le sont pas (Fred, policier SPVM)

Une nuance est toutefois à apporter en regard du manque de formation. Certains intervenants soulignent que leur milieu procède d’abord à un processus d’embauche très sélectif et ne conserve ainsi que de bons atouts pour leurs équipes. Ensuite, une formation continue est offerte selon les problématiques récurrentes observées. Chez Gai-Écoute, par exemple, la raison d’être de l’organisme étant centrée sur l’écoute active, les intervenants sont sensibilisés à différentes réalités vécues par les homosexuels, mais pas spécialement l’homophobie :

Ils (les recruteurs de Gai-Écoute) essaient de mesurer si ces gens-là peuvent avoir une qualité d’écoute […] ils ont des critères assez sévères […] On s’adresse à des gens, à des acceptations d’orientation, à des problèmes de solitude, mais on est pas spécialisés vraiment en homophobie […] On a la formation de base, mais nous on a des rencontres une fois par mois et le but de ces rencontres, c’est avant

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tout d’améliorer notre écoute en nous sensibilisant à des sujets donnés, comme l’homophobie –Luc, Gai-Écoute

Ceci tient en partie au fait qu’il n’y a pas tant d’appels qui concernent des cas d’intimidation qui pourraient avoir pour motif l’homophobie, estime Louis :

On a des formations continues mensuellement […] Ça dépend des bassins de personnes qui appellent et on axe les formations en fonction de ce qu’on observe le plus fréquemment, mais il n’y a pas tant d’appels d’intimidation (Louis, REZO et Gai-Écoute)

Dans le même esprit, Fred considère que la formation ponctuelle ou continue offerte en milieu policier doit répondre à une problématique présente dans le cadre de leur pratique. Concernant l’homophobie, il estime qu’une formation s’y rapportant ne s’impose pas, considérant que les policiers ne seront qu’exceptionnellement confrontés à un incident s’y rapportant.

Les formations qu’on a, on va l’avoir peut-être une fois et that’s it, on l’aura pas à chaque année ou six mois […] Dépendant où tu es et le type d’interventions le plus fréquent, ben tu vas avoir un cas (d’homophobie) ou zéro par an (Fred, policier SPVM)

Il ressort, en fait, que lorsqu’une formation est donnée aux policiers, elle s’adresse à tous, sans égard à la clientèle spécifique ou aux problématiques rencontrées dans leur pratique en fonction du territoire desservi. Ainsi, aucune formation adaptée aux réalités spécifiques n’est donnée au PDQ 22, desservant le village gai, où 75% de la clientèle est homosexuelle.

3.1.2 La détermination des violences homophobes dans la pratique des acteurs