• Aucun résultat trouvé

Fondements théoriques de la franchise internationale : trois perspectives

1. L A FRANCHISE COMME MODE DE PRESENCE POUR LES DISTRIBUTEURS SUR LES MARCHES

1.2 Fondements théoriques de la franchise internationale : trois perspectives

Se développer à l’étranger en franchise a d’abord été justifié par une logique de minimisation du risque. Puis, suite à des travaux menés sur la franchise dans un cadre domestique, deux autres principales lectures de la franchise internationale ont été proposées : l’une analyse ce mode d’entrée comme un dispositif d’acquisition de ressources, l’autre comme un moyen de contrôle du comportement des acteurs franchisés. Des recherches récentes ont visé à intégrer dans cette approche les spécificités du processus d’internationalisation d’une entreprise de distribution (Doherty & Quinn, 1999 ; Sanghavi, 2002 ; Quinn & Alexander, 2002).

La franchise internationale comme forme de management du risque

Les études théoriques sur la franchise internationale se sont d’abord appuyées sur les recherches en économie et commerce international, dans lesquelles la décision de choix d’un mode d’entrée obéit à une logique de réduction du risque financier. La distance d’affaire entre marché domestique et marché étranger conduit l’entreprise à moduler son degré d’engagement financier dans l’aventure internationale : une distance d’affaire réduite permet d’envisager un investissement direct à l’étranger. A l’inverse, la franchise, qui fait porter le risque financier sur les franchisés, entrepreneurs indépendants, propriétaires des unités, apparaît comme un mode de présence adapté à des environnements réglementaire, économique et financier instables, de nature à brouiller la prévisibilité des performances du projet international (Hacket, 1976) : l’internationalisation en franchise peut permettre d’exploiter des marchés instables à court terme, mais avec un potentiel à moyen et long terme.

Cette analyse associe la propriété du capital au contrôle de l’opération. La contrepartie envisagée à cette réduction de l’engagement financier de l’entreprise sur le marché étranger consiste en une perte du contrôle de l’opération (Eroglu, 1992). La distance et l’absence de relations hiérarchiques rendent le contrôle difficile et le franchiseur s’expose à un risque de

non respect du contrat par les franchisés. Dans cette optique, se développer en franchise est un choix transitoire, tant que les conditions ne sont pas réunies pour se développer en propre.

Une approche par les ressources

Une autre lecture de la franchise internationale suggère que la valeur stratégique de la relation de franchise repose sur le transfert de ressources qu’elle permet d’organiser. Les entreprises s’internationalisent en franchisant leur activité pour obtenir des ressources externes nécessaires à leur développement sur le marché étranger, et ne pas dépendre des seuls moyens internes (Huszagh & al., 1992 ; Alon, 1999 ; Teegen, 2000). Si le franchiseur transmet des signes de ralliement à la clientèle, un savoir-faire et une assistance, les franchisés, directement ou via la master franchisé, apportent :

- des capitaux financiers : ils sont propriétaires des unités, et versent un droit d’entrée et des redevances, assurant ainsi un flux de revenus au franchiseur ;

- des compétences managériales : ils possèdent une expertise du marché local et sont en mesure de proposer des adaptations nécessaires aux succès du concept en fonction des spécificités marketing et managériales du pays d’accueil ;

- une motivation et une implication personnelles : ils engagent leur patrimoine dans les points de vente, ce qui est une forte incitation à la performance ; cet argument rejoint la lecture agentielle de la franchise internationale exposée un peu plus loin.

Par ce prisme des ressources, la franchise internationale est vue comme une forme intéressante et pérenne d’organisation de l’internationalisation car elle permet de structurer un processus cumulatif d’acquisition de ressources et de compétences dans l’entreprise (Faldmoe-Lindquist, 1996). En fonction du degré de maîtrise de ces ressources et compétences par le groupe franchiseur, et de ses capacités à réaliser des apprentissages des précédentes expériences internationales, une typologie des franchiseurs internationaux a été proposée (Fladmoe-Lindquist, 1996).

Pour une lecture agentielle de la franchise internationale

Un développement international en franchise peut également s’analyser dans une optique d’efficience administrative, en utilisant principalement la théorie de l’agence comme cadre de compréhension du comportement des organisations (Fladmoe-Lindquist & Jacque, 1995 ; Contractor & Kundu, 1998). Une relation d’agence désigne une situation où une entité, appelée agent, se voit confier un pouvoir de décision pour la réalisation d’actions au nom d’un individu, le principal. Ce dernier peut être confronté à des situations où l’accès à l’information, voire sa compréhension, est délicat, et le comportement de l’agent difficilement observable, ce qui pose problème en cas de divergence d’intérêt entre les parties. Dans le processus de développement international, les distances géographique et culturelle entre marché domestique et pays d’accueil constituent des sources potentielles importantes d’asymétries informationnelles. Les spécificités de l’environnement commercial et du cadre juridique, économique, social et culturel peuvent compliquer la compréhension de l’environnement pour le distributeur. La nature du processus de transfert d’information entre marché cible et marché domestique peut être vue comme le facteur déterminant du choix d’un mode d’entrée d’une enseigne de distribution sur un marché étranger. (Quinn, 1998 ; Doherty, 1999 ; Quinn & Alexander, 2002). Le principal va s’employer à mettre en place des dispositifs pour s’assurer du respect des objectifs par l’agent et des efforts qu’il a pu déployer.

Cette approche s’intéresse au système d’incitation sous-jacent à la forme organisationnelle de la franchise internationale, et fournit un éclairage intéressant à ce mode d’entrée. Si le manager salarié d’un point de vente dispose d’une rémunération fixe, le franchisé est un créancier résiduel et bénéficie d’une rétribution comme apporteur de fonds : son revenu dépend directement de ses efforts dans la bonne gestion de son point de vente. L’incitation à une optimisation des résultats de son activité est donc intrinsèquement très forte : le distributeur franchiseur, en dépit d’une observabilité limitée des actions et de la difficulté à

mettre en œuvre des dispositifs de contrôle, dispose d’une autre forme de maîtrise des comportements de ses partenaires. La franchise internationale s’avère un mode d’internationalisation d’autant plus intéressant quand les coûts de contrôle des conduites des acteurs étrangers sont élevés, situation rencontrée fréquemment dans les pays à environnement instable, ou distants géographiquement et culturellement.

Dans cette optique, la situation actuelle de transition économique, sociale et politique que connaissent les pays d’Europe Centrale et Orientale rend a priori d’autant plus attractif ce mode d’entrée.

2. FRANCHISE DANS LES PAYS EN TRANSITION EST-EUROPEENS : ENTRE EMERGENCE ET