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Fonction informative et civique des débats télévisés

II. Le débat télévisé

2. Fonction informative et civique des débats télévisés

La fonction informative des débats télévisés se révèle, entre autres, à travers le thème et sous-thèmes à débattre et l’identité des invités.

Un bon choix du sujet principal et des points à aborder, permet d’intéresser le public et « d’ancrer le discours dans une réalité sociale controversée pour lancer la polémique » (Burger dans Vincent, 2005 : 63). Quant à celui des participants et de leur nombre, il est supposé garantir un apport informationnel riche et captivant ; grâce à la confrontation de leurs opinions.

A ce propos, si des personnes sont conviées, en particulier, à un débat télévisé, c’est « pour des raisons précises d’identité en rapport avec le thème traité » (Charaudeau, 1997 : 214). Elles sont alors bien placées pour engager là-dessus un débat d’idées (basé sur le principe du ‘pour/contre’) et fournir un discours, à visée de conviction/persuasion, qui répond aux attentes du public : « Soutenir qu’un débat médiatique relève à la fois de la persuasion et de l’argumentation, c’est poser que le détail du discours des débattants constitue un élément essentiel » (Burger dans Vincent, 2005 : 63).

Aussi, dans certains débats télévisés, il peut y avoir une diffusion de quelque(s) reportage(s), à grande valeur informative ; puisqu’ils appuient l’ancrage dans l’actualité (en montrant des aspects de la réalité, bien choisis), ont couramment fonction de preuve et visent à orienter l’échange vers des points clés, servant par là la confrontation des avis divergents.

Cette dernière rappelle l’aspect ‘compétitif’ souvent dominant dans ce type d’interactions et prioritairement décrit par plusieurs spécialistes dont M. Burger :

« Dans le cas qui nous occupe, un débat médiatique considéré comme une activité de communication se caractérise par la mise en évidence d’un but commun à tous les participants : convaincre un auditoire du bien-fondé de l’opinion défendue et, corrélativement, de la vacuité d’une opinion adverse battue en brèche. […] S’opposer pour mieux imposer une opinion consiste alors à se définir comme un « débattant », c’est-à-dire comme souscrivant à un contrat de communication fondant le genre « débat » » (Burger dans Vincent, 2005 : 53).

80 Les auteurs rendent comptent de cet aspect de diverses façons ; R. Vion, par exemple, compare le débat à une épreuve sportive (Quemada & Rastier, 2000 : 139) : les deux impliquent une confrontation entre des adversaires, de la stratégie et un arbitre. De plus, l’enjeu s’y exprime en termes « de gains et de pertes » (Quemada & Rastier, 2000 : 127) et devient plus important quand l’épreuve se déroule devant un public ; justement comme dans le cas du débat télévisé.

2.2. La valeur civique

La compétitivité présente dans tout débat lui confère de l’intérêt. Cependant, elle peut s’accentuer et devenir inquiétante, surtout sous la pression du contexte des médias, lorsque le débat est télévisé. Ce qui risque de porter atteinte à ‘l’image’ (‘la face’) des invités et de perturber la bonne réalisation des finalités médiatiques.

E. Goffman appelle ‘face’, l’image valorisante que chaque individu souhaite donner de lui-même (Goffman dans Quemada & Rastier, 2000 : 39). Or, celle-ci ne peut être garantie ou préservée indéfiniment car, tel que l’indique R. Vion, les interactions agissent constamment sur les individus et les sociétés et vice-versa. Selon lui,« l’interaction est partiellement déterminée par l’existence de sujets déjà socialisés et d’un social déjà structuré. Mais, dans la mesure où sujet et social résultent de l’interaction, ces catégories pré-formées se réactualisent et se modifient dans et par son fonctionnement. L’interaction est donc le lieu où se construisent et se reconstruisent indéfiniment les sujets et le social » (Quemada & Rastier, 2000 : 93).

La face de quelqu’un peut alors être influencée positivement ou négativement par une interaction et le risque est encouru par tous les partenaires de la communication. Ce qui amène couramment chaque locuteur à entreprendre un « travail de figuration » (Goffman, cité par Traverso, 2004 : 50) visant à préserver sa face et celle des autres : « Aucun sujet ne pouvant, à coup sûr, être maître du ‘jeu’, le moyen d’éviter de mettre sa face en danger consiste à ménager celle de l’autre » (Quemada & Rastier, 2000 : 40). En fait, au ‘travail de figuration’, s’ajoute ‘un travail de construction conjointe du sens’

81 (par les reformulations, les explications, les sollicitations,...) (Quemada & Rastier, 2000 : 94), auquel contribuent tous les participants à l’échange.

Aussi, la communication sociale permet d’établir des relations et de bénéficier de l’apport gratifiant des diverses occasions de contact avec autrui ; d’où les efforts d’entente et d’intercompréhension généralement fournis par les interlocuteurs, la considération et l’écoute mutuelles, etc.

Ainsi, en dépit de la compétitivité présente dans le genre ‘débat’, différentes marques de ‘coopération’ y sont manifestes et rendent compte de sa fonction civique ; d’autant plus s’il est télévisé, vu que la composante médiatique accentue l’importance des enjeux interactifs.

D’après M. Burger, le débat serait apparu dans une ambition de progrès et de civilisation ; c’est pourquoi il était très valorisé à l’Antiquité. En effet, il rend possible d’aborder les sujets les plus polémiques et de résoudre les désaccords, par les confrontations d’opinions et l’argumentation, qui se substituent à la violence physique et verbale : « En étant fondé sur la négociation d’opinions opposées débouchant souvent sur une opinion consensuelle, le débat symbolise l’idée même de démocratie et de citoyenneté, et c’est pour cette raison qu’il permet de réaliser la fonction citoyenne de l’information médiatique » (Burger dans Vincent, 2005 : 59).

Enfin, l’aspect informatif et civique des débats télévisés, s’offre également comme source de captation du public.

La finalité attractive et commerciale de ce type d’interactions apparait aussi, de manière essentielle, à travers le rôle joué par le présentateur. Celui-ci doit répondre, à la fois, aux contraintes interactives et médiatiques imposées par l’échange. Détails que nous allons expliciter dans ce qui suit.

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3. Le débat télévisé : entre contraintes médiatiques et interactives