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Chapitre 6 : Revêtements d’alliages intermétalliques Al-Cu élaborés par MOCVD

2. Résultats et discussion

2.1 Films tels que déposés

Les films déposés sont systématiquement composés d’Al et de Cu purs suivant les analyses par EPMA. Les profils en profondeur montrent que la diffusion réactive à l'interface Al-Cu est initiée pendant le dépôt de Cu (dépôt à 513K), mais la quantité de phases intermétalliques produites est insuffisante pour distinguer en DRX des pics

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correspondants. La teneur des hétéroatomes dues aux ligands des précurseurs ou à l'atmosphère résiduelle du réacteur (oxygène, azote, carbone) est systématiquement en dessous de la limite de détection de EMPA (<1 % at.).

La figure 6.2 présente une micrographie MEB d’un film d'Al déposé sur de la silice thermique après un prétraitement plasma in situ du substrat ; ce dernier a permis de produire des films d’Al de surface relativement lisse. En effet, la valeur de Ra de ce film est de 0,024 µm, à comparer avec 0,105 µm pour ceux déposés sur substrats non prétraités au plasma.

Figure 6.2. Micrographie MEB d’une surface d'un film d'Al déposé sur silice thermique dans les conditions adoptées avec prétraitement in situ plasma

Le dépôt de Cu sur Al conduit à la formation de bicouches dont les caractéristiques de surface dépendent de la quantité par unité de surface du Cu déposé. Des faibles quantités de Cu, correspondant à un rapport Al/Cu élevé ne modifient pas significativement la morphologie de la surface par rapport à celle présentée dans la figure 6.2. La figure 6.3a présente une section transverse observée au MEB d’une telle bicouche avec une composition globale de 11 % at. Cu. La morphologie de ce film est similaire à celle d’Al déposé à partir de DMEAA [98]. La rugosité moyenne Ra du film est de 0,087 µm et la microstructure de la surface est organisée en deux niveaux: une couche d'Al d'environ. 1 µm, et une mince couche de Cu de 0,1 µm.

Des informations complémentaires sur l’organisation de cette bicouche sont obtenues par une analyse des profils de RF.GD-OES. La figure 6.3b présente le profil de la composition élémentaire en fonction de la profondeur du film. Quatre souscouches y sont identifiées. La première à partir de la surface est une souscouche de Cu d’épaisseur 0,08 µm qui contient du carbone et de l’oxygène. Celle-ci se situe au-dessus d’une couche d’Al d’épaisseur 0,75 µm qui contient également les deux contaminants. Il est intéressant de noter que le Cu diffuse bien en dessous de la surface, approximativement jusqu’à une

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profondeur de 0,8 µm. Un petit pic de Cu entre 0,65 µm et 0,80 µm peut être attribué à la diffusion rapide de Cu par des chemins de diffusion préférentiels conduisant à la formation

a

b

Figure 6.3. Bicouche Al / Cu riche en Al avec composition globale 11 % at Cu. (a) micrographie MEB de surface (en bas) et de la section (en haut), et (b) profil RF GD-OES en profondeur.

de siliciures de Cu, ou à un changement abrupte de la vitesse de décapage à l’interface Al/silice.

Les pics de carbone et d’oxygène à l’interface Al/Cu peuvent correspondre à une légère oxydation de la surface d’Al avant l’initiation du dépôt de Cu. La troisième souscouche entre 0,8 µm et 1,0 µm de profondeur, correspond à la silice thermique suivie par le substrat de Si pur (profondeur supérieure à 1,4 µm).

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La topographie des échantillons doit être prise en compte pour ces analyses, parce que le décapage a lieu sur une large surface (diamètre de l’anode 2 mm) [189]. Tout d’abord, les échantillons présentent une morphologie rugueuse avec des régions plus ou moins denses ou poreuses. Ceci peut conduire à un décapage simultané de la surface et d’endroits situés plus en profondeur, tels que les pores. Il est donc important d’évaluer attentivement la teneur des contaminants et la composition des interfaces abruptes. En utilisant des échantillons plans, denses et lisses, RF GD-OES crée un cratère dont le fond est plan, ce qui correspond à une pulvérisation qui peut être assumée comme étant couche par couche. Par contre, l’analyse d’échantillons géométriquement imparfaits peut résulter en un décapage de niveaux profonds avant que celui des niveaux supérieurs soit terminé. Dans le profil tracé, ceci correspondrait à la visualisation de deux (ou plusieurs) éléments venant des différentes couches en même temps, malgré le fait que l’interface est abrupte perpendiculairement à la surface. Un autre point à tenir compte dans l’exploitation de ces résultats est l’absence d’ultravide qui peut conduire à la surestimation des compositions des hétéroéléments O, H, C. Des mesures par EPMA après dépôt des deux souscouches indiquent des niveaux de contamination inférieurs aux limites de détection de l’appareil (<1 % at.). De plus, il est connu que l’hydrogène influence fortement les intensités des spectres d’émission optique [190]. Cet effet a été ignoré et l’hydrogène n’a pas été présenté dans les profils quantitatifs malgré le fait que son signal a été acquis. Puisque les signaux ont été normalisés à 100 % en négligeant l’hydrogène, une incertitude supplémentaire a été ajoutée dans la détermination de la composition globale.

Des quantités significatives de Cu, correspondant à des revêtements Al-Cu à forte teneur de Cu produisent des bicouches avec des surfaces rugueuses. La composition élémentaire de tels échantillons est 90-92 % at de Cu, en fonction de leur position radiale sur le plateau chauffant. La figure 6.4a présente des micrographies MEB d’une section transverse et de la surface d’une couche telle que déposée sur de la silice thermique. La section transverse révèle une microstructure poreuse qui a été développée sur une fine souscouche d’Al. Ceci est également illustré dans la micrographie de surface de l’échantillon, qui présente une microstructure avec une valeur de Ra égale à 0,161 µm,

typique de celle d’un film de Cu élaboré par CVD [60]. Des calculs de fonctionnelle de densité (density functional theory, DFT), révèlent que les premiers stades de nucléation de Cu sur une surface d’Al atomiquement lisse ne sont pas énergétiquement favorables. Les adatomes de Cu adsorbés préfèrent soit ségréguer sous la surface d’Al, ou de former des germes sur des sites d’énergie élevée, tels que de défauts ou d’autres adatomes [191]. Quand la nucléation du Cu a eu lieu, il est attendu que des adatomes supplémentaires de Cu diffusent sur la surface pour contribuer à la croissance des grains de Cu existants. Ce modèle de croissance ne tient compte ni du schéma de réaction propre du procédé MOCVD mis en jeu ni de l’état de surface initial. Cependant, il est au moins partiellement responsable de la microstructure finale rugueuse de la couche, par l’intermédiaire de la formation d’un film discontinu avec une porosité ouverte importante.

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Figure 6.4. Bicouche Al / Cu riche en Cu avec composition globale 90 % at Cu. (a) micrographie MEB de surface (en bas) et de la section (en haut), et (b) profil RF GD-OES en profondeur.

Le profil élémentaire RF GD-OES d’une bicouche Al/Cu déposée sur de l’acier inoxydable est présenté dans la figure 6.4b. Plusieurs souscouches y sont identifiées. La couche en extrême surface d’épaisseur approximative 20 nm correspond aux espèces adsorbées le carbone et l’oxygène. Ensuite, une souscouche de Cu s’étend sur 0,25 µm ; elle semble contenir 10 % at d’oxygène. En tenant compte qu’il n’y a pas d’oxygène détecté en EPMA, on conclut que la teneur effective en oxygène est plus faible. Cette souscouche est suivie par une interface Al/Cu légèrement oxydée comme il est révélé par le pic d’oxygène à 0,25 µm. La souscouche suivante d’Al a une épaisseur de 0,1 µm ; elle présente une teneur élevée de Cu qui confirme sa diffusion rapide à la température de

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dépôt (513K). Les sites et le mode de cette diffusion restent actuellement inconnus. Les analyse DRX montrent la présence d’Al cfc à faible température ce qui semble indiquer qu’une solution solide d’Al est formée au plus, mais apparemment pas à une teneur en Cu de 59 % at comme c’est le cas à une profondeur de 0,3 µm. De nouveau, des atomes excités Cu* et Al* coexistent dans le plasma GD parce qu’ils sont pulvérisés en même temps, mais pas nécessairement parce qu’ils coexistent dans la souscouche d’Al. Finalement, l’interface avec l’acier inoxydable est complexe, avec une interdiffusion d’Al et de Cu vers le substrat et de Fe et des éléments d’alliage vers le revêtement.