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La famille De la Croix de Chevrières est originaire du Dauphiné. Les fondateurs du lignage étaient installés à Voreppe et connus sous le nom de Guerre. Une branche de la famille partie vivre à Romans prend le nom de «la Croix de Chevrières», suite à la donation de la terre du même nom.

La lignée des Chevrières s’est ensuite scindée en trois branches distinctes : Chevrières de Pizançon, de Saint-Vallier et d’Ornacieux. Les de la Croix de Chevrières et en particulier, les seigneurs de Pizançon sont des familles prestigieuses du Dauphiné et s’insèrent dans les différentes noblesses de l’époque moderne.

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52 A / Une famille de parlementaires.

La famille De la Croix de Chevrières est d’origine marchande102 et fut anoblie vers le début du XVIème siècle. Au siècle suivant, la société nobiliaire est marquée par la résurgence des valeurs incarnées par la « noblesse d’épée »103 qui caractérisait les élites médiévales. Poussées également par la multiplication des contrôles et vérifications sur l’origine de leur noblesse, certaines familles utilisent la généalogie pour s’approprier un passé militaire glorieux et ainsi justifier de leur statut.104 Si Guy Allard, généalogiste dauphinois, commandé par la famille de la Croix de Chevrières, attribut à cette famille des faits d’armes importants, c’est d’avantage par la robe que cette dernière se distingue. La famille De la Croix de Chevrières fait tout d’abord partie de la noblesse parlementaire de la province du Dauphiné. Dès la deuxième génération de la branche de Pizançon, Félix Ier devient avocat général au parlement de Grenoble. Dès lors, la famille comptera plusieurs avocats, conseillers et présidents au parlement de Grenoble, mais également des conseillers du Roi. La fonction judiciaire n’est pas la seule fonction exercée par la famille : certains de ses membres ont suivi une carrière militaire. Jean III exerce la fonction de mestre de camp105 et Jean-François est capitaine de cavalerie. Comme dans la plupart des familles nobles de l’ancien régime, les attributions religieuses tiennent également une place importante et plusieurs membres de la famille ont des charges ecclésiastiques qui restent au demeurant peu importantes. La plus importante est la gestion de l’évêché de Grenoble.

B/ Transmission des terres et droits seigneuriaux.

Dans son ouvrage sur la noblesse française, Laurent Bourquin106 rappelle que la possession de terres constitue un élément majeur de l’identité nobiliaire. La transmission du fief et des droits qui en dépendent, permettent d’affirmer le pouvoir et la richesse des

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Voir le tableau généalogique présent dans le volume d’annexe pages 120-122 : Jean Guerre, fondateur de la lignée des Croix de Chevrières.

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La noblesse d’épée désigne l’ensemble des lignées qui ont effectivement et régulièrement fourni des membres à l’armée, de génération en génération. (Lucien Bély, Dictionnaire de l’ancien régime, Paris, PUF, 2006). Précisons encore que cette désignation de la noblesse répond à la structuration sociale médiévale théorisée par l’abbé Adalbéron de Laon au XIe siècle qui divise la société en trois ordres.

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Clarisse Coulomb « La publicité des archives de la noblesse sous l'Ancien Régime », in Archives familiales et

noblesse provinciale : hommage à Yves Soulingeas, Grenoble, Collection La pierre et l’écrit, PUG, 2006, p. 95.

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Fonction équivalent au commandement d’un régiment royal. 106

53 propriétaires. Les péages, qui font partis des différents droits seigneuriaux, sont ainsi cités dans les testaments de la famille de la Croix de Chevrières. Ces actes précisent également l’héritier qui en obtiendra la possession :

« …donne et legue ledit seigneur testataire […] de laissé à noble Jean de la Croix son fils et

de ladite demoiselle d’Arzac107 sçavoir tous les biens que ledit seigneur testataire a donna le mandement de chateaudouble108 item les grangeages de chatuzanges et la royaniere […] et son péages de Charmagnieu. »109

Dans l’est du royaume, les successions des biens familiaux s’effectuaient de père à fils. L’héritier universel, l’ainé des fils, reçoit ainsi la majorité des biens fonciers de la famille mais également la plupart des biens mobiliers.110 Les différents propriétaires des péages qui vont se succéder sont Jean Ier de la croix, évêque et prince de Grenoble qui, rappelons le, a fait l’acquisition du droit du péage de Charmagnieu et de la partie patrimoniale de celui de Pizançon ; à sa mort le péage revient à son fils Jean II de la Croix ; puis de façon successive, à Gabriel, Jean Bernard et enfin Louis de la Croix de Chevrières.

Le fait que les péages dépendent de la part successoral du fils ainé montre également la volonté de transmission de ce privilège. Les péages de Charmagnieu et Pizançon offrent l’avantage économique à ces propriétaires de prendre un pourcentage sur l’ensemble des marchandises « […] qui passent er repassent sur la rivière de l’Izere… ».111 Ainsi, un pourcentage de l’activité commerciale de la province revient de fait aux propriétaires détenteurs des péages.

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Barbe d’Arzac est l’épouse de Jean I de la Croix de Chevrières. 108

ADI, Cote 29 J 9. 109

ADI, Cote 29 J 9, Testament de Jean I de la Croix de Chevrières. 110

Laurent Bourquin, op. cit. p. 14. 111

ADI, Cote 29 J150, Enquête de 1568 sur le péage de Charmagnieu, appartenant à cette époque à Diane de Poitier.

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CHAPITRE 4 - Une source pour l’histoire économique.

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