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IV. Système à un extractant

IV.1. COMPOSES AZOTES

IV.1.2. EXTRACTION PAR DES OXIMES

Tout comme les hydroxyoximes, les oximes (aldoximes et cétoximes), composés de type R(H)C=NOH, peuvent exister sous deux formes : les isomère syn et anti (figure I-7).

Figure I-7 : Isomères Syn et Anti de l’oxime.

A l’état solide, l’aldoxime est généralement sous forme anti [20]. Après dissolution dans un solvant organique, elle subit une syn-isomérisation. Or seul l’isomère anti est actif lors de l’extraction de métaux non ferreux [21]. En effet, pour des raisons d’encombrement stérique entre le groupement hydroxyle et alkyl, l’isomère syn est inactif. Toutefois, il faut remarquer que Preston [22] a tout de même obtenu un effet de synergisme lors de l’extraction du nickel par un mélange de syn-benzaldoxime et d’acide carboxylique. L’affirmation par certains auteurs que seule la forme anti est susceptible d’extraire, est donc à mesurer en fonction de chaque oxime considérée.

Afin d'obtenir des informations sur l'isomère responsable de l'extraction des métaux, Bezrukova et coll. [23] ont utilisé l'analyse par RMN. Cependant, cette étude est impossible lors de l’extraction du nickel(II), du cuivre(II) et du cobalt(II) par une aldoxime. En effet, ces métaux sont paramagnétiques lorsqu’ils sont complexés par ce composé en milieu chlorhydrique. Pour contourner ce problème, ces mêmes auteurs ont utilisé un système d’extractant composé d’heptanaloxime et de nitrate d’argent (AgNO3). En effet, AgNO3 est diamagnétique. La 1H-RMN permet alors d’obtenir la constante de syn-anti-isomérisation KS—A, qui a pour expression :

N OH H R N OH R H Isomère Syn Isomère Anti

Partie I : Bibliographie S A A -S b b K =

avec bS : Syn aldoxime et bA : Anti aldoxime.

Bezrukova et coll. [23] ont alors déterminé la demi-période (T½) de transformation de l’isomère anti en isomère syn de l’aldoxime en fonction des propriétés solvatantes du solvant (ET) et de la concentration initiale de l'oxime (tableau I-3). Ils ont ainsi montré que moins le solvant utilisé est solvatant et plus la concentration d’aldoxime est faible, plus la syn-anti-isomérisation devient négligeable. En effet dans ce cas, T½ devient très grand (tableau I-3).

Tableau I-3 : Temps de demi-période de la syn-anti-isomérisation de l’aldoxime (heptanaloxime) en fonction du solvant et de la concentration de l'oxime.

* Valeur de ET issu de Reichardt Ch. [24]

Concentration de

HOx (mol.L-1) Solvant ET (kcal/M)

0,1 n-decane* 30,9 72 heures

0,1 CCl4 32,5 23 ± 1 heures

0,5 CCl4 32,5 15 heures

0,1 Acide caprylique* 51,2 30 minutes

1,5 Acide caprylique* 51,2 10 minutes

L'extraction des métaux de transition par les oximes est essentiellement réalisée en milieu chlorure. Les ions chlorure jouent le rôle de ligands et permettent alors de former un complexe neutre extractible en milieu acide.

Inoue et coll. [25] ont étudié l'extraction de différents métaux et particulièrement du cuivre(II) en milieu chlorure ou bromure par la 2-éthylhexanal oxime (EHO). Cette dernière permet d'extraire ce métal d'un milieu acide ([HCl]>0,2 mol.L-1). Cependant la cinétique de cette extraction est relativement lente puisqu'il faut entre 2 et 6 heures pour atteindre l'équilibre.

HOx 2

CuX2+ Cu(HOx)2X2 (X=Cl ou Br)

où HOx représente l’oxime.

Ce milieu fortement acide permet aussi d'extraire le nickel, mais dans des proportions moindres. De plus, il est nécessaire que la concentration de l'acide soit supérieure à 1,5 mol.L -1

. Une séparation cuivre(II)-nickel(II) est alors envisageable puisque, pour une concentration de 1,5 mol.L-1 d'acide, on extrait 50 % du cuivre et 0 % de nickel(II).

L'augmentation de l'acidité implique une augmentation de la concentration des ions halogénés et favorise ainsi l'extraction. Toutefois pour de très fortes concentrations d'acide, le pourcentage d'extraction chute fortement et cela, quel que soit le métal. Les auteurs attribuent ce phénomène à l'apparition de complexes non extractibles du type : CuCl3- et CuCl42-. Cependant, une décroissance aussi forte laisse supposer qu'il s'agit plutôt d'une destruction de l'extractant dû à une trop forte acidité ([H+] > 8 mol.L-1). Ce phénomène a d’ailleurs été constaté par Redden et coll. [26] avec la 2-éthylhexanal oxime. Cette dernière se dégrade en milieu extrêmement acide pour former l'aldéhyde correspondant : RHC=O. Cependant, en présence d'une solution de sel d'hydroxylamine (NH2OH.HCl-Na2CO3), l'aldéhyde réagit suivant la réaction ci-dessous et il est possible de reformer l'oxime dégradée :

Partie I : Bibliographie

2RCH=O + 2NH2OH.HCl + Na2CO3 2RHC=N-OH + 2NaCl + 3H2O + CO2 Pour leur part, Bezrukova et coll. [27,23], ainsi que Redden et coll. [26] ont montré qu'en milieu chlorhydrique les complexes NiCl2, CuCl2 et CoCl2 étaient extraits par l'heptanal oxime, la nonal oxime, la 2-méthyldecaloxime et la décyl oxime dans le toluène, suivant la réaction : HOx 4 Cl 2 M2++ + MCl2HOx4

La cinétique de cette réaction est relativement lente, puisque le temps nécessaire pour atteindre l'équilibre est supérieur à une heure.

Cote et coll. [28] confirment ce mécanisme réactionnel général. Ils ont montré que l'extraction du nickel(II) en milieu chlorure par la décanal oxime s'effectuait suivant la réaction :

(

H O

)

Cl 4HOX

Ni 2 4 2+ Ni

(

HOX

)

4Cl2 + 4H2O

La différence des résultats concernant la stœchiométrie du complexe extrait entre Inoue [25] (Cu(Hoxime)2X2) et Bezrukova (MCl2HOx4) [27] provient sûrement du fait qu’Inoue n'a pas tenu compte de la possibilité d’agrégation de l’oxime et en particulier de la formation de dimères et trimères.

Bezrukova et coll. [27] se sont aussi intéressés aux solvants pouvant améliorer l'extraction. Ils ont ainsi conclu que lorsque les propriétés solvatantes (ET) du solvant augmentaient lorsque la constante apparente d'extraction du métal diminuait, (tableau I-4). En effet, lors de l'extraction de CuCl2 et CoCl2 par l'heptanaloxime, les auteurs constatent une inversion de la valeur de la constante de formation des complexes K en passant du m

chloroforme au toluène. Ce phénomène n’a pas été expliqué.

Tableau I-4 : Constante apparente de formation des complexes chlorés du nickel, du cuivre et du cobalt en fonction des propriétés solvatantes des différents solvants utilisés.

( )

Log Km

Solvant ET

(kcal.mol-1)

NiCl2 CuCl2 CoCl2

CCl4 32,5 7,39 ± 0,20 8,63 ± 0,06 5,57 ± 0,07 Toluène 33,9 5,06 ± 0,08 6,76 ± 0,05 3,55 ± 0,11 Chloroforme 39,1 4,74 ± 0,06 7,06 ± 0,05 3,61 ± 0,06 1,2-dichloroethane 41,9 4,13 ± 0,02 6,06 ± 0,10 1,99 ± 0,06

Il est intéressant de noter que les auteurs ont trouvé une relation linéaire entre le paramètre de solvatation (ET) et le logarithme de la constante d'extraction Km dans le cas de solvants hydrochlorés :

Pour NiCl2 => Log K

( )

m =17 5 0 32, − , ET r =−0,992 Pour CuCl2 => Log K

( )

m =18 3 0 29, − , ET r =−0,995 Pour NiCl2 => Log K

( )

m =19 8, −0 22, ET r=−0,985

Partie I : Bibliographie

Ainsi, cette dernière équation permet d'estimer la constante d'extraction Km du nickel par l'heptanaloxime.

IV.1.2.1. CONCLUSION

Nous venons de voir que contrairement aux hydroxyoximes, les oximes permettent l’extraction du nickel en milieu fortement acide (< 8 mol.L-1). Le mécanisme général de cette extraction fait intervenir un ion halogéné (chlorure ou bromure) permettant de former un complexe neutre susceptible d’être solvaté et extrait par l’oxime. Cependant, la cinétique d’extraction avec les oximes est relativement lente puisque le temps nécessaire pour atteindre l'équilibre est de l’ordre de plusieurs heures.