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Expression des composantes de la voie

Chapitre 1 : Introduction

1.2 Régulation de la voie Ras-MAP Kinase

1.2.1 Expression des composantes de la voie

Les protéines ERK1/2 sont exprimées de manière ubiquitaire et constitutive dans notre organisme. Une écrasante majorité des rôles connus pour ces kinases dépendent de leur activité catalytique suivant l’activation de la voie. Ainsi, compte tenu que ces protéines sont stables et fortement exprimées de manière générale, peu d’études s’intéressent à la régulation transcriptionnelle d’ERK1/2 en opposition à son état d’activation et de ses substrats.

L’expression de ces kinases peut varier en fonction du type cellulaire, notamment dans le cœur, le cerveau, le muscle squelettique et le thymus où l’expression la plus forte est détectée (5). ERK2 s’exprime à des niveaux plus élevés que ERK1 dans la majorité des types

de cellules chez les mammifères (156). Cependant, cette différence d’expression ne semble pas liée à une différence de fonction entre les kinases ERK1 et ERK2, qui partagent à ce jour les mêmes substrats et propriétés biochimiques. Cette question sur la redondance est intéressante puisque suivant la délétion des gènes Mapk3-/- ou Mapk1-/-, les animaux déficients en ERK1 sont viables et fertiles, alors que les animaux déficients en ERK2 meurent tôt dans le développement au stade embryonnaire (157, 158). Curieusement, chez le lézard, l’expression d’ERK2 n’est pas détectée dans plusieurs tissus, compensée par une forte expression d’ERK1 (156). Ceci suggère qu’un seuil minimal des niveaux totaux d’expression de l’une de ces kinases, ou la combinaison des deux, suffit pour assurer le développement normal de l’organisme. Cette hypothèse a pu être validée par une étude récente de notre laboratoire où l’expression transgénique de hauts niveaux de ERK1 dans un modèle déficient en ERK2 est suffisant pour assurer le sauvetage du phénotype de léthalité embryonnaire (159). L’hypothèse à ce jour veut donc que les souris Mapk3-/- (ERK1) sont ainsi viable en raison d’un seuil élevé de ERK2 présent de manière naturelle chez l’animal.

Un mécanisme influençant les niveaux d’expression de MAPK, l’homologue de ERK1/2 chez D. melanogaster, fut révélé dans les cellules S2 (160). À la suite d’un criblage d’ARNi afin d’identifier des régulateurs de la voie, il fut démontré que l’inhibition des protéines du complexe exon-jonction (EJC) induit une diminution importante de l’expression de MAPK suite à des défauts dans l’épissage de l’ARNm du gène Mapk. Ce mécanisme serait particulièrement critique pour les transcrits d’ARNm possédant de longues séquences introniques flanquant les exons, tel que dans le cas du transcrit du gène Mapk. Considérant que les homologues du gène chez le mammifère possèdent aussi ces longues séquences, il n’est pas exclu que ce mécanisme s’applique similairement pour ces espèces.

ERK1/2 sont des kinases stables de manière générale, mais la demi-vie observée varie de façon importante en fonction de l’organisme. D’une part, des études protéomiques dans une lignée murine de fibroblastes suggère des demi-vies pour ERK1 et ERK2 de 68h et 53h, respectivement (161). Dans une autre étude du groupe de Marc Therrien chez la drosophile, la

demi-vie de la protéine MAPK semble plutôt de l’ordre d’environ 13h (162). Ce même groupe a d’ailleurs démontré que la déubiquitinase USP47 joue un rôle stabilisateur auprès de MAPK chez la mouche (162). Un crible à l’ARN interférant a permis de lier des composantes de la machinerie de la règle N-terminale comme régulateur de la stabilité de MAPK en opposant l’action de USP47. Le mécanisme d’action de ces enzymes sur la stabilité de MAPK reste toutefois à être déterminé. Le groupe de Tony Hunter a cependant démontré dans une lignée murine de fibroblastes que suivant un choc osmotique, la MAPKKK MEKK1 pouvait exercer une activité ubiquitine-ligase auprès de ERK1/2 via son domaine PHD, ciblant ces dernières pour dégradation par le système ubiquitine-protéasome (163). Ces données restent toutefois à valider, puisqu’aucun effet sur les niveaux d’ERK1/2 n’ont été observés par un autre groupe en réponse à un choc hyperosmotique (164). De plus, l’expression d’une forme sauvage ou mutante pour le domaine ubiquitine-ligase de MEKK1 chez la souris n’induit pas de différence significative dans la stabilité de ERK1/2 (165).

Localisation subcellulaire des MAP Kinases ERK1/2

Les composantes de la cascade MAP Kinase se situent, en l’absence d’une stimulation, dans le cytoplasme de la cellule. Effectivement, celles-ci doivent être en mesure de répondre rapidement à un stimulus en provenance de l’extérieur de la cellule, notamment via la liaison d’un facteur de croissance à son récepteur transmembranaire. Une telle stimulation entraîne le recrutement des composantes de la voie à la membrane plasmique où la cascade de phosphorylation a lieu.

Jusqu’à très récemment, la localisation intracellulaire de Raf était reconnue comme purement cytosolique même suite à une stimulation de la voie. Cependant, une étude a démontré qu’après l’endocytose de plusieurs types de récepteurs activés, ceux-ci pouvaient transloquer vers l’espace endosomal périnucléaire et induire une faible proportion de Raf à se retrouver au noyau (166). L’existence d’un signal d’export nucléaire (NES) dans la séquence de Raf n’a pas encore été identifié à ce jour, mais considérant sa propension à se déplacer

rapidement vers le cytoplasme, il n’est pas exclu que son association avec MEK1/2 puisse induire sa sortie du noyau dans un mécanisme similaire à celui de ERK1/2.

MEK1/2 possède en effet une puissante séquence NES qui cause l’export de la protéine du noyau à des taux dix fois supérieur à son import suivant l’activation de la voie (167-169). Cependant, MEK1/2 possède aussi une séquence signal de translocation nucléaire (NTS) à son extrémité C-terminale qui peut être phosphorylée par ERK1/2. La phosphorylation de ce motif est nécessaire pour induire sa translocation vers le noyau et, en dépit d’un signal NES beaucoup plus puissant que le NTS, permettre à MEK1/2 de faire la navette entre les deux compartiments subcellulaires (170). Puisque MEK1/2 phosphoryle ERK1/2 dans le cytoplasme, les rôles de ce mécanisme ne sont pas clairement définis à ce jour mais l’hypothèse que MEK1/2 induise l’export de protéines ne possédant pas de séquence NES, tels que ERK1/2 ou le récepteur nucléaire PPARγ, est la plus plausible (169, 171).

Similairement à MEK1/2, ERK1/2 possède une séquence NTS pouvant être phosphorylée à son extrémité C-terminale et qui lui permet de transloquer vers le noyau. Ce mécanisme est dépendant de la liaison de ce domaine à l’importine 7 et à l’importine β, qui facilite l’entrée nucléaire d’un dimère de ERK1/2 de manière active (172). Un second mécanisme de transport passif a aussi été décrit, où ERK1/2 activé sous forme monomérique peut simplement migrer à travers les pores nucléaires (173). La phosphorylation de ERK1/2 est cependant nécessaire pour induire sa translocation au noyau, sans quoi la protéine reste au cytoplasme. L’absence d’un NES dans la séquence de ERK1/2 lui permet cependant de s’accumuler au noyau suivant stimulation de la voie MAP Kinase afin d’effectuer ses fonctions nucléaires. Suivant la stimulation, une certaine proportion demeure dans le cytoplasme, où de nombreux substrats de ces kinases existent.