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Analyse temporelle du propagateur de diffusion II : Étude de milieux désordonnés par RMN-GCP

2. Étude par RMN d'empilements de billes de verre

2.2 Mesure du propagateur de diffusion 1 technique

2.2.2 Expérience RMN de gradient de champ pulsé (RMN-GCP)

La description faite ici de la technique de mesure de propagateur de diffusion par RMN restera très naïve. Un exposé plus complet est donné en annexe III, qui détaille l'aspect pratique de la RMN, les concepts de mécanique quantique sous-jacents, les choix techniques faits pour mener les expériences, ainsi que les étapes préalables de caractérisation des échantillons saturés.

Dans une expérience de RMN, l'échantillon est placé dans un champ magnétique r

B0 intense, de l'ordre de quelques Tesla. Ce champ a pour effet d'orienter les spins des noyaux d'hydrogène (protons) des molécules d'eau, et fait ainsi apparaître en chaque point du réseau poreux de l'échantillon une densité d'aimantation Mr0 colinéaire à Br0.

bobines de gradient en z bobines de gradient en y bobines de gradient en x bobines de gradient en x bobines de gradient en y Echantillon Antenne RF B0 x y z

Figure III-3 : Système de bobines entourant l'échantillon dans le spectromètre RMN. Les flèches sur les

bobines de gradients indiquent le sens de circulation du courant lors de leur activation.

Tout un jeu d'antennes et de bobines disposées autour de l'échantillon permet de jouer avec cette aimantation.

• L'antenne radiofréquence

Elle permet, en émettant une courte impulsion électromagnétique ad hoc (dite 'pulse RF'), d'écarter les densités d'aimantation locales M(r r ) de leur position d'équilibrer de la même manière en tous les points r de l'échantillon. Par interaction avec le champr magnétique, M(r r ) s'anime alors d'un mouvement de précession à une pulsationr ω0 =γB0, dite 'pulsation de Larmor'. γ , dit 'rapport gyromagnétique', est une constante

dépendant de l'élément chimique étudié. Pour le proton, il vaut γ =26.75 107rad T−1s−1. Dans nos expériences, le champ magnétique était de 2.35T, et la fréquence de travail associée était d'environ ω2π0 ≈100 MHz.

x z y r B0 Mr0 r MMr ∂t =γ r MBr0

Figure III-4 : Précession de Larmor de l'aimantation hors d'équilibre autour du champ magnétique.

Ce mouvement de précession peut ensuite être détecté à l'aide de cette même antenne RF. Le signal mesuré porte le nom de Free Induction Decay (FID). Après traitement, il prend la forme d'une fonction complexe du temps qui donne, dans un repère tournant à une vitesse voisine de la pulsation de Larmor, une mesure instantanée de la composante horizontale de l'aimantation totale de l'échantillon selon :

S(t)=

(

Mx(r ,t)r +iMy(r ,t)r

)

d3r

r

r

V p

(III-1)

où Vp est le volume poreux du système saturé en eau.

FID

t X

Y

S(t)=X(t)+iY(t)

Figure III-5 : Signal RMN typiquement recueilli derrière une impulsion radiofréquence ayant mis

l'aimantation hors équilibre. Dans cette figure, la fréquence de rotation des spins est légèrement différente de la fréquence de rotation du repère tournant dans lequel la mesure s'effectue, ce qui explique les oscillations observées.

Enfin, la précession des spins ne dure qu'un temps, et des phénomènes de relaxation tendent à terme à ramener M(r r ) vers r Mr0 en tout point de l'échantillon. Dans nos expériences, ces temps de relaxation étaient typiquement de l'ordre de 1 à 3s.

• Les bobines de gradient

Elles permettent à certains instants choisis de superposer au champ magnétique principal Br0 un champ inhomogène de forme contrôlée, de sorte à créer dans l'échantillon toute une distribution de pulsations de Larmor, linéaire en le vecteur position r , selon :r

ω0→ω0( r

r )B0G.r rr (III-2) G est dit 'gradient de champ'. Son intensité et sa direction peuvent être variées àr volonté en ajustant la valeur des courants dans les bobines correspondantes.

Des applications brèves de tels gradients (les 'pulses de gradient') sont utilisées pour introduire en cours de précession dans le signal RMN une information relative à la localisation spatiale des espèces qui portent l'aimantation.

• Mesure de propagateur de diffusion par PGSE

Les pulses RF, les pulses de gradient, et les acquisitions de signal peuvent être combinés en 'séquences' afin de réaliser des expériences. Il existe une grande quantité de séquences qui permettent de mesurer des propagateurs de diffusion. C'est la plus simple d'entre elles, la PGSE (Pulsed Gradient Spin Echo) de Stejskal et Tanner (1965), que nous présentons à présent. Elle nous permettra de saisir le principe de ces expériences, tout en évitant de nous perdre dans les détails techniques.

π/2 G δ1 δ ∆/2 G π δ1 δ ∆/2

Figure III-6 : Séquence de PGSE (Stejskal et Tanner, 1965). L'axe horizontal représente l'axe des temps,

les barres noires, des pulses RF, les rectangles blancs, des pulses de gradient, et le triangle en fin d'expérience, une acquisition de signal.

Détaillons en le fonctionnement. Pour simplifier, nous nous plaçons dans un repère (x©,y©,z) tournant autour de Br0 à la pulsation de Larmor ω0. Dans ce repère,

l'aimantation en précession parait fixe quand aucun pulse RF ou de gradient n'est appliqué.

Suivons au cours du temps une molécule d'eau qui 'autodiffuse dans l'échantillon'. Nous supposons -même si cela n'est pas rigoureusement vrai physiquement- qu'elle est porteuse au repos d'une aimantation verticale m0. En début d'expérience, le pulse radiofréquence bascule l'aimantation initialement au repos d'un angle π2 afin de la placer dans le plan horizontal, par exemple, selon l'axe x©. Si nous notons la composante horizontale de l'aimantation comme un nombre complexe :

m= mx©+ imy© (III-3)

celle-ci devient m(t= 0) = m0. Immédiatement, elle subit un pulse de gradient r G d'une durée δ très brève. Selon sa localisation rr1 au moment du pulse, la molécule voit la phase de son aimantation modifiée selon :

m(δ1+δ ) = m0e−i

r

q.r1r

La molécule est ensuite laissée libre de diffuser pendant une durée ∆ , pour se rendre en un autre point rr2 du réseau poreux. Le deuxième pulse RF introduit à mi- parcours pour raisons techniques, a pour unique effet de changer la phase de l'aimantation en son opposée. Ainsi :

m(δ1+δ + ∆) = m0e+i

r

q.rr1

(III-5) En fin de séquence, un deuxième pulse de gradient identique au premier change la phase de l'aimantation en fonction du point d'arrivée rr2 de la molécule. Finalement, au moment de l'acquisition :

m(δ1+δ + ∆ + δ + δ1)= m0e

iq.(r r1−r rr2 )

(III-6) Il apparaît ainsi que la phase de l'aimantation ne dépend que du vecteur déplacement rr =rr2rr1 subi pendant le temps ∆ , mais pas du point de départ rr1, ni du point d'arrivée rr2. Le signal RMN S(q,r ∆) obtenu est donc la somme des contributions élémentaires e−iq.rrr de chaques molécules, pondérées par leur densité de probabilité G(r ,r ∆) de s'être déplacées d'un vecteur r pendant le temps r ∆ -probabilité qui n'est autre que le propagateur de diffusion-. Ainsi :

S(q,r ∆) ∝ G(r ,r ∆)e−iq.rrrd3r

r

r

(III-7)

A une constante multiplicative près, le signal mesuré n'est autre que la transformée de Fourier G(ƒ q,r ∆) du propagateur de diffusion. Expérimentalement, G(ƒ q,r ∆) s'obtient ainsi par la simple renormalisation :

ƒ G(q,r ∆) = S( r q,∆) S(qr = 0, ∆) (III-8)

• Lien avec l'expérience de diffusion d'un profil sinusoïdal

En dépit de l'exposé ci-dessus qui peut en paraître très éloigné, l'expérience de gradient de champ pulsé est en fait très proche de l'expérience de diffusion d'un profil sinusoïdal. Une autre manière, plus géométrique de voir cette expérience, est en effet la suivante. 1 2 3 z 4 5 6 7 1 λ=2π/q 1 G(q,∆) G(q,∆)

Figure III-7 : Technique de gradient de champ pulsé : Évolution de l'aimantation dans l'échantillon en

Nous considérons, dans le repère tournant à la pulsation de Larmor, l'évolution de l'aimantation au cours de la séquence. A nouveau, dans cet exposé, nous ne prenons pas en compte les effets de relaxation.

1 - En début d'expérience, l'aimantation est relaxée et alignée selon l'axe z (axe imposé par le champ Br0).

2 - L'effet du premier pulse radio fréquence est de basculer cette aimantation dans le plan horizontal. Après cet étape, elle pointe en tous points de l'échantillon dans la même direction.

3 - Pendant le premier pulse de gradient, que nous supposons appliqué dans la direction z (cf. figure ci-dessus), il existe à travers l'échantillon un gradient vertical de vitesse de rotation des spins. Il en résulte après ce pulse un profil d'aimantation 'vrillé' avec une longueur d'onde λ = 2π / q inversement proportionnelle à l'intensité et à la durée du gradient appliqué, avec pour vecteur d'onde :

qr=γGrδ (III-9)

4 - 5 - 6 : Pendant le temps ∆ , ce profil en hélice, qui, ne l'oublions pas, est porté par les molécules d'eau elles-mêmes, diffuse à travers le réseau poreux selon la loi de Fick. Il se comporte ainsi comme le profil de concentration sinusoïdal d'un traceur imaginaire qui diffuserait dans les pores. Le pulse π appliqué entre 4 et 5 a pour seul effet d'inverser le sens de vrillage du profil.

6 : En vertu du théorème du début du chapitre II, au terme du temps ∆ , le profil a perdu par diffusion un facteur G(ƒ q,r ∆) en amplitude par rapport à l'étape 3.

7 : Le dernier pulse de gradient a pour effet de refocaliser l'aimantation afin de la rendre détectable et de pouvoir mesurer l'amplitude de l'hélice finale.

• Aspects pratiques (Annexe III)

1 - Dans les faits, la séquence de PGSE se révèle être extrêmement sensible à toute sortes d'artefacts, en particulier ceux relatifs aux inhomogénéités de champ Br0 systématiquement créées dans les pores par les contrastes de susceptibilité magnétique entre l'eau et la matrice solide du système. C'est ainsi une autre séquence de la littérature, plus complexe en même temps que plus robuste, que nous avons utilisée pour nos mesures. Celle-ci est décrite en Annexe III, accompagnée d'une description des aménagements et/ou modifications auxquels nous avons dû procéder pour sa mise en oeuvre.

2 - Nous n'avons pas pris en compte ci-dessus les effets de relaxation. Sous réserve que la relaxation RMN induite à l'interface solide-pore de l'échantillon par la présence d'éventuels éléments paramagnétiques ne soit pas trop forte, ces effets ne sont en fait pas aptes à remettre en cause la formule (III-8).

3 - Nous avons en revanche implicitement supposé ci-dessus que les pulses de gradient étaient infiniment courts. En pratique, la durée typique d'un pulse de gradient est de 1ms, temps pendant lequel une molécule d'eau parcourt environ 3µm . Cette diffusion pendant les pulses de gradient crée dans toute séquence "réelle" des pertes supplémentaires de signal qui dépendent de la force de gradient appliquée.

S(q,r ∆) S(qr= 0, ∆) ≡ I(

r

q,∆) = ƒG(q,r ∆) Att(q)r (III-10)

où Att(q), que nous nommons 'fonction d'atténuation', rend compte des pertesr supplémentaires de signal lors du vrillage et du 'dévrillage' de l'aimantation.