• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 1 PROBLEMATIQUE ET OBJET DE RECHERCHE

1.1. Le contexte de recherche

1.1.3. Evolution des pratiques de conception

Des ressources aux activités

L’évolution des environnements et des rôles des acteurs s’accompagne aussi d’une

évolution de la place donnée aux contenus et aux ressources pédagogiques dans la

construction des dispositifs de formation à distance. Au début de la décennie, l’intérêt pour la

création de ressources numériques de qualité a alimenté les travaux sur l’expression d’objets

pédagogiques (David, 2002), et sur leur indexation grâce à des descripteurs tels que le

LOM-Learning Object Metadata

2

. L’intérêt s’est ensuite porté sur l’enchaînement des Objets

Pédagogiques et les différents rôles impliqués dans le processus d’apprentissage. Ainsi, les

travaux se sont efforcés, dans un premier temps, de répondre aux besoins de production de

ressources pédagogiques de qualité avant de s’intéresser aux activités elles-mêmes et à leur

enchaînement (Koper, 2001). Les notions d’activités et de rôles sont alors devenues centrales,

notamment sous l’influence de l’émergence de langages de modélisation tels que le langage

EML (Educational Modelling Language).

Ce langage a été repris par le consortium IMS afin de produire notamment un autre

langage de modélisation pédagogique, IMS-LD qui vise à devenir un standard en conception

pédagogique sous la forme d’un langage de notation. Nous revenons plus en détail sur les

différents langages de notation. L’émergence de ces derniers est concomitante à l’émergence

du paradigme de l’industrialisation dans le champ de l’éducation. Cette problématique de

l’industrialisation touche tous les acteurs du monde éducatif : le tuteur (Guillemet et Pelletier,

2004, Moeglin, 2005) et l’enseignant (Villiot-Leclercq, 2005). Elle induit de nouveaux

enjeux : la réutilisabilité, la reproductibilité et la formalisation (Koper, 2001) qui sont pris en

2

compte par exemple dans le langage EML. Ces enjeux sont néanmoins abordés pour l’instant

principalement d’un point de vue technique et technologique. L’évolution des pratiques de

conception a été aussi marquée par une évolution d’un point de vue pédagogique.

Des approches magistrales aux approches pédagogiques actives

Schneider (2003) note un intérêt croissant pour les pédagogies actives chez les praticiens,

notamment ceux qui s’intéressent aux TICE. Cet intérêt vient de la préoccupation de rendre

les situations d’apprentissage plus authentiques, mais aussi d’un intérêt pour la dimension

sociale de l’apprentissage et du désir de construire des situations d’apprentissage propices à

l’intégration des TICE (Raby 2004). Chaptal (2003) souligne le positionnement des théories

constructiviste et socioconstructiviste dans les courants pédagogiques actuels. Ces théories

sont perçues, selon l’auteur, comme le modèle pédagogique du changement. Pour l’auteur, il

s’agit de courants essentiellement nord-américains. En France, on parle plutôt de pédagogie

active. Lebrun (2002) définit trois grandes pédagogies actives : l’apprentissage collaboratif,

l’apprentissage par problème et l’apprentissage par projet. Ertmer et Newby (1993) soulignent

l’importance pour chaque praticien de disposer d’un répertoire d’approches pédagogiques et

surtout de savoir à quel moment et pour quel type d’apprentissage et de public les employer.

Schneider (03) montre que des différents problèmes de mise en pratique demeurent :

ƒ l’orchestration, c'est-à-dire l’enchaînement des tâches,

ƒ le suivi et la difficulté des enseignants à mettre en place des situations

d’apprentissage par projet. La difficulté vient à la fois d’un certain manque de

connaissances sur les approches pédagogiques, les enseignants étant la plupart du

temps des experts de contenu,

ƒ l’existence des outils de support à la mise en place de ce type de pédagogie.

Nous revenons en détail sur ces aspects dans l’état de l’art.

De l’individualisme au partage

Dans la perspective d’industrialisation de la formation en ligne, la préoccupation n’est plus

de concevoir « à nouveau », mais de partager ce qui existe déjà, d’identifier les pratiques

gagnantes, les facteurs de réussite, de réutiliser l’expertise existante et de partager des objets

pédagogiques (Villiot-Leclercq, 2005).

Cependant, partager nécessite un réceptacle commun et un langage commun. L’explosion

d’Internet, les bases de données et les intranets ont joué ce rôle de réceptacle tandis que de

nouvelles normes et standards émergeaient. Pernin (2004) identifie notamment deux

initiatives de description des ressources. La première norme, LOM (Learning Object

Metadata), vise à décrire et classer de manière normalisée les différentes composantes d’une

situation d’apprentissage (La Passardière et Grandbastien, 2003, Grandbastien et al. 2004)

afin de pouvoir facilement l’indexer, la classer et la retrouver. Les composantes ont été

regroupées en neuf catégories : généralités, cycle de vie, métadonnées, informations

techniques, informations pédagogiques, droits, relations, commentaires, classification. La

seconde norme, SCORM (Sharable Content Object Reference Model), vise à « garantir la

qualité des contenus en termes de réutilisabilité, accessibilité, pérennité, interopérabilité »

(Pernin 2004, p. 2). Elle vise à assurer l’interopérabilité entre les objets pédagogiques et les

différents environnements. Cette norme propose un guide pour identifier les différentes

ressources et s’assurer de la qualité de la structuration de ce contenu dans un parcours de

formation (Content Agregation Model) et un guide pour « l'exécution des contenus, la

communication et le suivi des activités dans un environnement web » (Pernin 2004, p. 2).

Toute cette dynamique a permis d’obtenir les moyens technologiques de mise en commun

des ressources pour soutenir une conception pédagogique basée sur la réutilisation des

ressources. On peut citer différents viviers d’objets pédagogiques dans lesquels les acteurs du

monde éducatif peuvent trouver des ressources (Figure 1-1) : Edusource, réseau canadien de

banques d’objets d’apprentissage, MERLOT (Multimedia Educational Resource for Learning

and Online Teaching), ARIADNE

3

qui se présente comme un vivier de connaissances à la

disposition des concepteurs pédagogiques et des enseignants. Ainsi, la fondation ARIADNE

offre à ses membres la possibilité de partager les ressources pédagogiques existantes dans un

vivier commun et de les réutiliser (Vidal et al, 2004).

3

Figure 1-1. Représentation des réseaux des banques d’objets d’apprentissage (extrait de Paquette, 2006)

Le développement de l'Internet et des TICE dans le monde de l'éducation et de la formation

a donné naissance à : la constitution de réseaux sur ou autour des TICE, l'intégration des

TICE dans les disciplines et les programmes, la gestion des TICE au sein de groupe classe, la

création de ressources numériques, l'élaboration des projets inter-classes ou inter-pays, la

recherche de nouvelles formes de pédagogie.

Ces préoccupations ont rassemblé dans des sites ou des forums, des réseaux d'enseignants,

de concepteurs et d'ingénieurs pédagogiques. Ces réseaux peuvent prendre différentes

formes : réseaux d'intérêts, réseaux de pratique, réseaux de collaboration, réseaux sociaux en

fonction de la nature des liens regroupant les acteurs de ces réseaux. Les membres de ces

réseaux ont leur propre contexte de conception, contexte lié au type de public, aux objectifs, à

la diversité des situations d’apprentissage.

Vers la scénarisation des activités d’apprentissage

L’apparition des supports numériques et des situations d’apprentissage instrumentées a

déplacé dans de nombreux contextes d’apprentissage, les notions d’espace, de temps, de rôles,

de ressources et d’activités. Elle a incité les enseignants, à partager mais aussi à structurer et à

planifier de façon plus détaillée leurs cours afin de gérer une complexité nouvelle et

d’anticiper le processus d’apprentissage.

Pernin et Lejeune (2004c) montrent, en s’appuyant sur une approche historique des

approches prescriptives issues à la fois de l’émergence d’outils, de méthodes et de standards,

que le rôle de l’enseignant est perçu différemment, notamment en raison de l’approche

actuelle centrée sur l’activité d’apprentissage et sur la dimension instrumentée par les TICE

des situations d’apprentissage. Cette focalisation sur l’activité d’apprentissage nous mène à

percevoir l’enseignant comme un scénariste. De fait, une attention nouvelle est portée par un

ensemble d’acteurs du monde éducatif, chercheurs, formateurs, ingénieurs pédagogues,

enseignants, sur les conditions et les modalités de l’organisation des activités d’apprentissage.