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II. DETERMINANTS GENETIQUES DES COMPLICATIONS DU DIABETE

3. Identifier la région du génome impliquée

3.1. Etudes de liaison (linkage analysis studies)

Les études de liaison visent à identifier, grâce à un criblage du génome, une liaison entre une large région de celui-ci (région chromosomique jusqu’à 50 cM) et la maladie ou le trait d’intérêt.

Elles s’appuient sur le fait que 2 loci sont liés et dits en déséquilibre de liaison (LD pour linkage desequilibrium) si pendant la méiose, une recombinaison génétique intervient avec une probabilité de moins de 50%. Deux allèles situés à 2 loci sont donc en LD lorsqu’ils ne sont pas transmis de manière indépendante.

Des recombinaisons génétiques ont lieu naturellement en début de méiose et déterminent des blocs de taille variable coségrégés. Plus les loci sont éloignés, plus le risque de recombinaison méiotique diminue.

Les polymorphismes utilisés pour marquer le génome peuvent être :

• SNP : pour single nucleotide polymorphism ou polymorphisme mono- nucléotidique,

• CNV : pour copy number variant ou variation du nombre de copies d'un même gène ou d'un segment chromosomique dans le génome,

• Satellite ou VNTR pour variable number tandem repeats :

- Micro satellite : de 10 à 50 répétitions de 1 à 6 paires de bases

- Mini satellite : motif unitaire entre 10 à 100 nucléotides

• Ins/Del en cas d’insertion ou de délétion d’une séquence de n nucléotides au sein du gène,

• RFLP : variations individuelles de la séquence d’ADN révélées par des modifications de la carte de restriction. Les polymorphismes de longueur des fragments de restriction (RFLP pour Restriction Fragment Lenght

Polymorphism) sont générés après traitement par une enzyme de

restriction.

Deux types d’analyses de liaison peuvent être utilisés selon que le mode héréditaire de transmission est :

• connu et fixé a priori : modèle PARAMETRIQUE

Le niveau de liaison est alors évalué par le LOD score (LOD pour logarithm of

odds) qui est la probabilité de partage d’allèles entre germains discordants ou

concordants pour le phénotype, les germains étant les frères et sœurs du propositus (ou proband)).

On considère un score de LOD ≥3 (correspondant à p≤0,0001) comme significatif pour une liaison/coségrégation entre 2 zones.

• inconnu ou n’est pas clairement établi : modèle NON PARAMETRIQUE Son principe repose sur l'analyse, pour un marqueur génétique donné, du nombre d'allèles d'origine parentale partagés entre germains atteints, comparé au nombre théorique attendu lorsque la ségrégation se fait au hasard. Pour définir le nombre d'allèles partagés pour un marqueur donné, un score d'identité par descendance (IBD pour identity by descent) est attribué pour chaque paire de germains. Les fréquences attendues pour 0, 1 et 2 allèles IBD (marqueurs

biallèliques) sont 25%, 50% et 25% respectivement. Cette méthode d'analyse implique l'étude d'un grand nombre de paires de germains présentant le phénotype.

Ce principe peut être appliqué sur les paires de germains atteints de la même maladie (analyse de paires de germains concordantes ou méthode ASP pour

Affected Sibling Pairs analysis) ou sur des paires de germains discordantes

(DSP pou discordant sib-pair analysis).

Les méthodes non paramétriques ont également été développées118-120 pour des analyses de liaison pour un trait quantitatif (QTL pour Quantitative Trait Loci) comme par exemple dans la ND avec l’ACR ou l’EUA85,121.

Il a également été développé une méthode basée sur le statut IBS (pour

identical by state) qui permet d'étudier tous les sujets atteints appartenant à des

généalogies, y compris de parents éloignés (méthode APM pour affected

pedigree member122).

Des travaux ont permis de démontrer, en fonction des cas de figure, la supériorité d’une de ces méthodes d’exploration de liaison sur les autres. Ainsi Rogus et al. ont montré que la méthode des paires de germains discordantes pouvaient donner de meilleur résultats en ce qui concerne la ND123.

Le Système Rénine-Angiotensine (SRA) a été, quant à lui, largement exploré et sert ici d’exemple.

Moczulski et al. ont montré en 1998 chez des patients caucasiens diabétiques de type 1 avec la méthode des paires de germains discordants le lien entre ND et une région proche en 3q (20cM) du gène AGTR1 du récepteur de type II de l’angiotensine (AT1R). Dans cette étude il n’avait pas été possible de mettre en

évidence de lien avec les régions chromosomiques d’autres effecteurs du SRA et pas de la région 1q proche des gènes AGT de l’angiotensinogène (AGT) ni de la région 17q qui contient le gène ACE de l’enzyme de conversion de l’angiotensinogène (ACE)124.

Des données contradictoires avaient cependant été produites par cette même équipe en 1996 qui n’avait pas pu mettre en évidence, dans une étude de germains concordant pour l’IRCT et menée chez des afro-américains, le lien entre les marqueurs (microsatellites) génétiques de l’ACE, l’AGT, l’AT1R (mais également REN et KLK1 qui codent pour les gènes de la rénine et la kalikréine 1) et l’IRCT125.

Imperatore et al. ont mis en évidence que des loci pouvaient influencer la susceptibilité aux complications microvasculaires (sur les chromosomes 3, 7 et 20 pour la ND et sur les chromosomes 3 et 9 pour la RD [Figure 16]). Les gènes suspectés par les auteurs au niveau de la région chromosomique la plus fortement en liaison sont TCRBC (T cell receptor beta locus) en position 7q34,

NOS3 (nitric oxide synthase 3) en position 7q36 et ALDR1 (aldo-keto reductase

Figure 16 Résultats d’étude de liaison dans une population de sujets diabétiques de type 2. Les pics des graphes identifient les régions des chromosomes 3, 7, 9 et 20 associées en haut avec la néphropathie diabétique et bas avec la rétinopathie diabétique (source : Imperatore G. Diabetes 1998)

Des études de liaison (non paramétriques) de trait quantitatif sur la susceptibilité de l’IRCT et l’HTA, dans des modèles murins, ont mis en évidence un signal de liaison proche du gène Rf-1127. Les travaux complémentaires dans des populations humaines afro-américaine et caucasienne128,129 ont confirmé ce signal de liaison entre IRCT et une région du chromosome 10, tout particulièrement une zone adjacente au gène RF1 (analogue humain du gène

Rf-1 qui avait déjà été mis en évidence chez la souris).

Le métabolisme des lipides a été exploré notamment par Elbein et al. dans une étude de liaison génome entier dans des familles caucasiennes de patients DT2. Il a été mis en évidence une association entre les concentrations de triglycérides et la région chromosomique 19q13, elle-même très proche d’un groupe de gènes impliqués dans la lipidogénèse et appartenant à la famille des apolipoprotéines (dont APOC2, APOE, APOC1 et APOC4)130.

Le développement et l’amélioration des techniques et des méthodes de séquençage et de génotypage ont permis aux études de liaison d’explorer simultanément plusieurs milliers de variants. Ainsi l’étude FIND (pour Family Investigation of Nephropathy and Diabetes) qui correspond à une étude de liaison « génome entier » a exploré, aux USA dans plus de 2600 patients de 4 ethnies distinctes différentes (caucasiens, afro-américains, américains d’origine mexicaine et indiens natifs), plus de 5 500 marqueurs sur les complications rénales du diabète et particulièrement l’albuminurie131. Des régions chromosomiques déjà décrites n’ont pas été retrouvées (notamment en 18q autour du CNDP1), d’autres ont été confirmées comme 7p22, chez les américains d’origine mexicaine, qui est proche des gènes MYH9 et APOL1 (codant pour la non muscle myosin heavy chain 9 et l’apolipoprotéine L1, respectivement) tandis que de nouvelles régions ont été identifiées en 3p chez les afro-américains (proche du gène de la ghréline (GHRL) et en 6p chez les caucasiens.

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