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état de l’art

respectivement 77 et 78 via un réarrangement π‒σ, qui donne l’allylborane disubstitué et régénère le catalyseur actif 73, après élimination réductrice

III.3.3.1. Etudes chimiques

Dans notre réaction, deux produits majoritaires sont observés : le produit de couplage et le produit d’homocouplage de l’halogénure d’aryle. Il est à noter que ce dernier n’a jamais été observé dans les études de Lei,146 Charette147 ou Shi.148 Ce résultat est assez inattendu car la réaction a lieu dans 100 équivalents de benzène et la probabilité de favoriser l’homocouplage par rapport au couplage avec le benzène est donc très faible. Par conséquent, ces observations suggèrent un mécanisme différent. Tout d’abord, des inhibiteurs de radicaux, TEMPO (1 éq.) ou Galvivnoxyl (1 éq.) ont été utilisés et ont totalement inhibé la réaction (Schéma 94, Tableau 9). Ces observations indiquent donc la présence de radicaux dans le milieu. Cependant, il est nécessaire de rappeler que les ligands utilisés sont redox non-innocents et qu’ils ont potentiellement des radicaux sur leurs structures. Ainsi, deux types de radicaux sont à distinguer, ceux centrés sur le substrat et ceux centrés sur le ligand et il est donc difficile de tirer davantage d’informations de ces expériences.

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Tableau 9. Effets des inhibiteurs de radicaux sur les rendements

Entrée Additif Rendement GC(%)[a]

1 Sans additif 53

2 TEMPO 0

3 Galvinoxyl 0

[a]Rendement déterminé en GC à l’aide du triméthylbenzène comme étalon interne.

Schéma 94. Inhibiteurs de radicaux

Lorsque le toluène est utilisé à la place du benzène dans les conditions optimisées, trois produits de couplage sont obtenus avec un rendement global de 46% et avec un ratio o/m/p de 2,2 :1,95 :1 (Schéma 95). Comparés aux ratios rapportés par Charette (3,1 :1,9 :1) et Lei (2,47 :1,9 :1) pour la même réaction, la distribution observée pour notre réaction est proche de la distribution statistique alors que celles de Charette et Lei favorisent la substitution en position ortho, ce que les auteurs attribuent à la présence de radicaux aryles sur le substrat. Par conséquent, la différence de régiosélectivité suggère que le mécanisme mis en jeu dans notre cas est différent de ces dernières,156 et pourrait ne pas faire intervenir des radicaux aryles.

Schéma 95. Distribution o/m/p lors de l’arylation du toluène par le bromoanisole

Lors de la réaction d’arylation du benzène par l’iodoanisole, Charette montre que la base KOt-Bu est très efficace et permet d’obtenir le produit de couplage avec un très bon rendement de 93%. Pour cette même réaction, dans les conditions développées par son équipe, Lei met en évidence de façon similaire l’efficacité de Bu. Une meilleure réactivité est observée lorsque

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Bu (rendement 80%) est utilisé à la place de LiHMDS (rendement 62%). Lors de leur étude, Studer et Curran mettent d’ailleurs l’accent sur l’implication de KOt-Bu dans les réactions de type HAS ou HAS assistées par une base. Un rapport de Lei montre même que l’association DMEDA et KOt-Bu permettait de réaliser l’arylation du benzène par différents iodures d’aryles.157 Nous observons, quant à nous, une faible réactivité en présence de KOt-Bu (10%) et une bien meilleure réactivité en présence de KHMDS. Nous avons décidé de corréler ces résultats aux mesures d’effet isotopique cinétique (Schéma 96).158 Un ratio de 1,23 a été déterminé expérimentalement pour l’effet cinétique isotopique, et a été corroboré par la valeur obtenue lors de calculs théoriques DFT (vide infra) de 1,37. Ceci suggère que la rupture de la liaison C‒H n’est pas l’étape cinétiquement déterminante du système.

Schéma 96. Effet cinétique isotopique

Afin d’écarter un mécanisme impliquant des radicaux aryles, une expérience caractéristique a été réalisée (Schéma 97). Cette expérience, décrite par Bunnett et Creary, utilise une sonde dihalogénée, qui permet un diagnostic spécifique des substitutions aromatiques radicalaires (HAS).159

Schéma 97. Sonde dihalogénée spécifique des réactions de HAS

Le mécanisme proposé dans le cas de la HAS est le suivant (Schéma 98). Après rupture homolytique de la liaison C‒Br, l’espèce 158 réagit sur le benzène avec une abstraction concomitante d’hydrogène pour générer le radical anion (159). Deux voies conduisant à la formation de deux produits différents, sont alors possibles. Dans un premier cas, le transfert d’électrons se fait de manière intermoléculaire

via l’activation d’une deuxième molécule de sonde dihalogénée. Le produit formé est alors le

4-chlorobiphényle 163. Dans le deuxième cas, le transfert se fait de façon intramoléculaire pour générer le radical biphényle 160, qui après réaction avec une deuxième molécule de benzène et réaromatisation donne le p-terphényle 161. Généralement, lors de réactions impliquant un mécanisme HAS, le produit 161 est le produit majoritairement obtenu et seulement des traces de 4-chlorobiphényle 162 sont détectées.

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Schéma 98. Mécanisme intramoléculaire vs. mécanisme intermoléculaire

De plus, en réalisant une réaction dans des conditions strictement radicalaires, Lei a montré que le transfert d’électrons se faisait de manière intramoléculaire et qu’il obtenait seulement le p-terphényle (161) avec un rendement de 72%.157 Dans nos conditions réactionnelles, l’utilisation du 1-bromo-4-chlorobenzène a permis d’obtenir un mélange de 4-chlorobiphényle (162, 15%), provenant de la rupture homolytique de la liaison C‒Br, accompagné de p-terphényle (161, 15%) qui provient, quant à lui, de la rupture homolytique des deux liaisons C‒Br et C‒Cl. Des traces du dichlorobiphényle 163, produit d’homocouplage, sont mises également en évidence. La réactivité observée dans nos conditions est donc différente de celle des mécanismes radicalaires de type HAS.

Afin de confirmer nos résultats, nous avons décidé d’utiliser des substrats de cyclisation intramoléculaire (164a-b). En effet, ce type de substrat génère des espèces radicalaires qui peuvent conduire à un produit de cyclisation intramoléculaire via un processus 6-endo-trig (165). Dans les conditions radicalaires décrites par Charette,160 les substrats iodé et bromé (164a-b) ont permis d’obtenir le produit de cyclisation correspondant, avec des rendements respectifs de 79% et 75%, en présence de deux équivalents de KOt-Bu et de 10 mol% de phénanthroline, à 160 °C dans la pyridine (Schéma 99).

Schéma 99. Sondes intramoléculaires décrites par Charette lors de sa réaction d'arylation

Pour notre système, nous avons testé différents types de substrats de cyclisation, à lien O-benzyle (164a-b), O-allyle (168), NH-allyle (172) et NTs-allyle (175). Cependant, seuls les substrats 164a-b nous ont permis de mieux comprendre le mécanisme de cette réaction (Schéma 100, Tableau 10). Dans le cas du substrat iodé (164a), seul le produit réduit (166) est obtenu avec un faible rendement de 28% (entrée 1). Dans le cas du substrat bromé (164b), le produit de réduction (166) est également

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généré avec un rendement de 10%, accompagné d’une faible quantité de produit de cyclisation (165, 27%). La différence de réactivité entre notre système et les systèmes radicalaires (Schéma 99) est notable : soit aucune réactivité n’est constatée, soit les rendements obtenus dans nos conditions sont significativement inférieurs à ceux obtenus via un mécanisme radicalaire. En outre, nos observations d’une réactivité distincte entre les substrats iodé et bromé suggèrent qu’il n’y a pas formation de radicaux aryles dans notre système.

Tableau 10. Substrats de cyclisation intramoléculaire

Entrée Halogénure Conversion (%) 165 (%) 166 (%)

1 I, 164a 100 0 28

2 Br, 164b 97 27 10

Alors qu’aucune conversion n’est observable pour le substrat N-tosylé 175, le substrat possédant l’amine libre 172 fournit uniquement le produit de réduction 173 et nous n’observons pas de produit de cyclisation intramoléculaire. Pour le substrat possédant un lien O-allyle 168, le seul produit obtenu est le produit réduit ayant subi une isomérisation 1,2 au niveau de la double liaison 169 (Schéma 100). Nous pourrions envisager que le mécanisme impliqué pourrait faire intervenir une espèce hydrure Fe‒(π-allyle) et en l’absence de source d’hydrogène (H2 ou hydrure) dans le milieu réactionnel, un mécanisme d’addition-élimination est peu probable.161,162 La conversion étant totale et les rendements étant très faibles, nous nous sommes questionnés sur le devenir des produits de départ. Une activation de la liaison C‒X par le complexe au fer 4-FeBr2 serait-elle possible ? Afin de répondre à cette question, nous avons préparé les composés 167, 171 et 174 possédant un phényle à la place de l’halogène. Les signaux RMN 1H caractéristiques de ces produits n’apparaissent pas sur les spectres RMN 1H des bruts réactionnels et cette piste a été abandonnée.

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Schéma 100. Expériences avec différentes sondes intramoléculaires

Les résultats obtenus via l’utilisation de substrats, tels que 164a-b, 168, 172 ou 175 nécessiteraient une étude plus approfondie afin lever le voile sur cette réactivité qui semble être substrat-dépendante.

En conclusion, l’étude d’optimisation nous a permis de mettre en évidence que l’espèce KHMDS jouait un rôle essentiel et les résultats obtenus lors d’étude mécanistique semblent suggérer que notre réaction ne suit pas un mécanisme de type substitution aromatique radicalaire (HAS).