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C) T HEORIE REDUCTIONNISTE DE L ’ IDENTITE PERSONNELLE

3. Ethique appliquée

Les questions éthiques qui se posent à nous aujourd’hui sont nombreuses. L’évolution technologique, de plus en plus rapide, associée à la mutation des normes sociales, soulève un certain nombre de controverses morales qui doivent être résolues224. Parmi les plus actuels, citons la bioéthique225, l’éthique climatique226, l’éthique des robots227, l’éthique de

223 D. Parfit, On What Matters, op.cit., vol.2., pp.549-565.

224 W. Shaw, Contemporary Ethics: Taking Account of Utilitarianism, Wiley-Blackwell, Londres, 1999.

225 J. Glover, J., Questions de vie ou de mort, traduction et introduction de Benoît Basse, Labor et Fides, Genève, 2017 ; P. Singer, Practical Ethics, Cambridge: Cambridge University Press, 1993.

226 J. Broome, Climate matters. Ethics in a warming world, New York, London:W.W. Norton & Company, 2012.

227 M. Anderson et S. L. Anderson (eds), Machine Ethics, Cambridge: Cambridge University Press, 2011.

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la guerre228, l’éthique des affaires229 ou encore l’éthique de la population230. Bien que prenant des formes nouvelles, un grand nombre de ces débats se réduisent in fine à des débats éthiques plus anciens portant sur les fins de la médecine et de la technologie, la perfectibilité de l’homme ou encore le fondement du naturalisme moral. On pourrait donc arguer que les théories éthiques existantes suffisent à nourrir, sinon trancher, les débats. Il existe, cependant, au moins, une grande question éthique qu’aucune grande philosophie morale n’a su anticiper, celle du réchauffement climatique et de ses conséquences probables sur la biodiversité et le futur de l’espèce humaine. La possibilité, à plus à moins long terme de l’extinction de l’espèce humaine, ainsi que de nombreuses autres espèces animales, et la certitude, qu’à court et moyen terme, les générations futures auront à subir les conséquences dramatiques du dérèglement climatique ainsi que de la dégradation des écosystèmes, constitue sans aucun doute une question éthique de nouvel ordre, et peut-être la plus fondamentale d’entre toutes.

A)ETHIQUE APPLIQUEE ET THEORIE NORMATIVE

Le développement de l’éthique appliquée dans les années 1970, sous l’impulsion de Peter Singer et de Jonathan Glover notamment, a beaucoup contribué à son renouvellement. Je suis d’avis qu’une nouvelle vague de travaux sur le réchauffement climatique, le véganisme

228 W. Shaw, Utilitarianism and the Ethics of War, Londres: Routledge, 2016.

229 A. Gustafson, “In Defense of a Utilitarian Business Ethic”, Business and Society Review, 118 (3), 2013, pp.325-360.

230 G. Arrhenius, J. Ryberg et T. Tännsjö, "The Repugnant Conclusion", The Stanford Encyclopedia

of Philosophy, in Zalta E.N. (ed.), URL =

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ou la grande pauvreté, vont dans un futur proche nous amener à reconsidérer nos positions théoriques, notamment à l’égard de l’utilitarisme de la règle.

En tant que philosophie morale, l’utilitarisme se doit de prendre part aux débats moraux qui secouent notre société. Dans les années 1970 et 80, les philosophes ont été appelés à se prononcer sur la légitimité morale de l’avortement, de l’euthanasie ou de la guerre. Aujourd’hui, ils sont consultés sur les politiques à adopter face au réchauffement climatique, la souffrance ou l’exploitation animale ou encore la procréation assistée (GPA-PMA). Certaines de ces questions exigent parfois d’élargir ou de modifier le cadre théorique de référence, par exemple en incluant/renforçant la dimension intergénérationnelle et/ou antispéciste dans le modèle de base. L’évolution de la théorie normative peut également être le produit de débats ayant lieu en amont, au niveau de la théorie méta-éthique231

[Tännsjö, 1976].

La plupart des travaux d’éthique appliquée sont totalement déconnectés de l’éthique normative, qui devrait pourtant leur assurer un socle théorique. Cette déconnection est parfois même explicitement assumée. Ainsi, Tony Hope, dans son Medical Ethics. A Very

Short Introduction (2004), explique que « dans ce livre, je n’essaie pas d’approcher les

différents problèmes que je discute du point de vue d’une seule théorie morale. Chaque chapitre traite d’une question pour laquelle je défends une position particulière, en

utilisant les méthodes de raisonnement qui me semblent les plus appropriées »232. La limite de ce type de posture est naturellement de permettre toutes les justifications possibles. Si

231 T. Tännsjö, The Relevance of Metaethics to Ethics, Stockholm: Almqvist & Wiksell International, 1976.

232 T. Hope, Medical Ethics. A Very Short Introduction, Oxford: Oxford University Press, 2004, p.6. Ma traduction, je souligne.

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on est plutôt opposé à la Gestation pour Autrui, on a plutôt recours à la déontologie kantienne permet de justifier et si je suis favorable à l’avortement, je fais plutôt appel à l’utilitarisme. C’est, de mon point de vue, la pire des postures à adopter. Les justifications éthiques doivent être cohérentes entre elles. En pratique, cela pose néanmoins certains problèmes. Ainsi que je l’ai montré dans le cas de la Gestation pour Autrui233, les théories éthiques normatives existantes ont parfois du mal à traiter des questions nouvelles. On peut, certes, essayer de les interpréter, voire d’interpréter l’intention de l’auteur, mais les résultats sont souvent discutables. Nombreux sont ceux, par exemple, qui ont abusivement recours à Kant pour condamner une telle pratique en arguant du fait que la déontologie kantienne interdit l’instrumentalisation du corps humain. C’est oublier, cependant, que lorsqu’elle a pour objet la procréation, l’utilisation du corps humain (par exemple dans l’acte sexuel) est légitime. Kant, en revanche, ne dit rien de la procréation non sexuelle. Lui faire tenir de tels propos relève de la ventriloquie intellectuelle.

J’ai tenté dans un article sur la Gestation pour Autrui (Raison Publique, 2019), de montrer que contrairement aux idées reçues, les théories éthiques à notre disposition (conséquentialisme et déontologie) ne permettaient pas de répondre de façon satisfaisante aux demandes de la société. Les conclusions du CCNE, en plus d’être fortement variables d’années en années, sont faiblement justifiées et expriment plus souvent qu’elles ne le devraient une position dictée par la déontologie médicale et non par la morale. Les états généraux de la bioéthique, menés au premier semestre 2018, n’ont pas été davantage capables de fournir de réponses aux questions posées. Au mieux ont-elles été en mesure de mesurer l’ampleur des désaccords de nos concitoyens sur ces sujets. Il

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est nécessaire que les philosophes s’emparent de ces questions, de toutes, et si possibles de façon simultanée. Les questions d’éthique appliquée ne peuvent, à mon sens, être traitées indépendamment les unes des autres, comme c’est trop souvent le cas. Elles doivent s’inscrire dans un cadre théorique commun, lui-même fondé sur des bases méta-éthiques cohérentes et solides. Là est la vraie difficulté à laquelle les philosophes doivent faire face. Les nouveaux enjeux de l’éthique, que ce soient l’IA, l’Homme Augmenté, la bioéthique ou l’extinction des espèces vivantes, n’appellent pas uniquement des réponses politiques, ils appellent avant tout des réponses théoriques. Je n’ai naturellement pas l’ambition de produire une théorie capable de répondre à la fois à tous ces enjeux mais, au moins, de travailler dans ce sens. Ainsi que je l’ai précédemment expliqué, je crois que le travail de Parfit constitue une excellente base théorique. Je crois, notamment, que sa distinction entre raison déontique et raison non-déontique a de forts potentiels théoriques voire pratiques. Je propose donc de poursuivre une réflexion éthique, autant dans sa dimension théorique qu’appliquée, à l’aide des outils conceptuels fourni.

En matière d’éthique appliquée, mes travaux portent essentiellement sur les nouveaux enjeux de l’éthique, autrement dit sur les questions soulevées par l’actualité (la procréation assistée, l’IA, les Big Datas et le réchauffement climatique), questions que les théories traditionnelles ont parfois du mal à prendre en compte. J’ai eu l’occasion de présenter mes premières pistes de réflexion au cours d’un cycle de conférences données à l’Université du Temps Libre d’Aix-en-Provence en 2018-19, cycle que je poursuis en 2019-2020. J’attache une importance particulière à la question du réchauffement climatique, ou plus exactement des réponses morales que l’on peut lui donner.

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B)L’ETHIQUE ANIMALE

Le principe de l’impartialité nous enjoint à ne jamais prendre personnellement parti dans une délibération morale et à considérer toutes les parties affectées comme ayant un statut égal. Selon l’expression de Bentham, « chacun compte pour un et uniquement pour un ». Un certain nombre de penseurs, dont Bentham lui-même, se sont cependant posé la question de savoir si cette impartialité ne s’appliquait pas également à toutes les parties affectées, y compris les animaux234. Dans une note de son Introduction aux principes de

morale et de législation, Bentham remarque ainsi que le critère hédoniste retenu implique

que les parties affectées par une action sont logiquement celles qui sont en capacité d’en souffrir. Or la souffrance n’est pas une spécificité humaine : « Pourquoi [leurs intérêts] ne sont-ils pas, universellement, tout autant que ceux des créatures humaines, considérés en fonction des différences de degré de sensibilité ? […] Autrefois, et j'ai peine à dire qu'en de nombreux endroits cela ne fait pas encore partie du passé, la majeure partie des espèces, rangée sous la dénomination d’esclaves, étaient traitées par la loi exactement sur le même pied que, aujourd’hui encore, en Angleterre par exemple, les races inférieures d’animaux. Le jour viendra peut-être où il sera possible au reste de la création animale d’acquérir ces droits qui n'auraient jamais pu lui être refusés sinon par la main de la tyrannie.[…] La question n'est pas « peuvent-ils raisonner? », ni « peuvent-ils parler ? », mais « peuvent-ils souffrir? ». »235.

Longtemps restée secondaire, cependant, l’intégration de la souffrance animale dans le calcul de maximisation a été sérieusement prise en compte à partir des années 1970, à

234 J. Kniess, “Bentham on animal welfare”, British Journal for the History of Philosophy, vol.27, n°3, 2019, pp.556-572.

235 J. Bentham, Introduction aux principes de morale et de législation [1789], traduction par le centre Bentham, Paris : Vrin, 2011, pp.324-25.

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nouveau sous l’impulsion de Peter Singer. Parallèlement à sa lutte contre la pauvreté et les famines dans le monde, Peter Singer s’est en effet fait connaître pour son engagement précoce pour la cause animale. Son premier livre, Animal Liberation, initialement publié en 1975, a joué un rôle moteur dans la lutte contre les expérimentations, l’exploitation et la consommation des animaux. Ses travaux ont eu une influence importante et immédiate. Inspiré par Singer, l’activiste Henry Spira a ainsi réussi à mobiliser l’opinion publique américaine contre l’expérimentation sur les animaux dans l’industrie cosmétique, en menant, dans les années 1970 et 1980, des campagnes publicitaires très préjudiciables pour les marques236.

L’argument de Singer repose sur l’analogie entre la discrimination sexuelle ou raciale et la discrimination spéciste. Le spécisme (il est un des premiers à employer et diffuser cette expression) est, pour lui, tout aussi condamnable que le sexisme ou le racisme car il viole le principe d’impartialité : « Le spécisme est un préjugé ou une attitude de parti pris en faveur des intérêts de sa propre espèce et à l’encontre des intérêts des membres des autres espèces »237. En plus de l’abandon (ou de la stricte limitation) des expérimentations animales, Singer exhorte ses lecteurs à prendre conscience de leur responsabilité, en tant que consommateur, dans la maltraitance des animaux, et, par conséquent, à cesser de consommer des produits d’origine animale.

Ce type de défense de la cause animale (il est difficile de parler de droits des animaux dans une perspective utilitariste) fait généralement l’objet d’une double attaque : elle est, tout

236 P. Singer, Théorie du tube de dentifrice. Comment changer le monde selon Henry Spira, traduction par A. Pons, Paris : Editions Goutte d'Or, 2018.

237 P. Singer, La libération animale, traduit pat L. Rousselle, Paris : Petite Bibliothèque Payot, 2012, p.73.

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d’abord, remise en cause par ceux qui considèrent qu’elle va ‘trop loin’ (en exigeant des hommes qu’ils changent leurs habitudes alimentaires, par exemple), mais est aussi fortement critiquée par ceux qui considèrent qu’elle ne va pas ‘assez loin’, en refusant d’accorder aux animaux de véritables droits.

L’utilitarisme est, en effet, un instrument à double tranchant pour les militants de la cause animale. S’il permet de prendre en compte la souffrance des animaux, ou leur préférence à rester en vie, il peut également justifier ces mêmes souffrances (ou leur mise à mort) au nom de l’utilité totale. Singer a ainsi été attaqué pour ne pas systématiquement rejeter les expérimentations animales, notamment celles considérées comme nécessaires pour la mise au point de traitements médicaux pour l’homme238. L’utilitarisme permet également de justifier la consommation et l’exploitation animale lorsque les conditions d’élevage des animaux sont jugées compatibles avec le bien-être animal. Selon l’argument dit du remplacement, des millions de vies animales – et l’utilité qui leur est associée – n’existeraient simplement sans l’élevage. Lorsque ces animaux sont tués, ils sont remplacés par d’autres. Richard Hare a proposé de recourir à l’indicateur QALY (Quality-Adjusted Life

Year), généralement utilisé en médecine pour évaluer l’utilité d’une intervention, pour

juger de la légitimité du régime végétarien. Selon lui, l’objectif de la maximisation QALY est difficilement compatible avec l’abandon complet de la consommation animale239. L’adoption d’un régime ‘demi-végétarien’ semble plus adapté. Il est également plus réaliste car moins exigeant.

238 L. Gruen, “Utiliser la Philosophie pour Changer le Monde”, Klesis, n°32, 2016, pp.15-39.

239 R.M. Hare, “Why I Am Only a Demi-vegetarian”, in Jamieson, D., Singer and his Critics, Oxford: Blackwell Publishing, 1999, p.240.

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Singer refuse ‘empiriquement’ l’argument du remplacement, même si ses écrits ne permettent pas vraiment de le remettre théoriquement en cause240 [Delon, 2016]. L’utilitarisme, on l’a vu, est multiforme et peut conduire à des résultats très différents selon le modèle théorique, la métrique ou le type d’agrégation adoptés. Prendre en compte le bien-être animal ne signifie pas, a priori, de pondérer également les préférences humaines et les préférences animales241. Une version ‘modérée’ de l’utilitarisme (satisficing) pourrait également se satisfaire d’une réduction des souffrances animales sans nécessairement remettre en cause le système d’élevage intensif. Enfin, selon la théorie du code moral idéal, pour être optimifique, une règle morale doit pouvoir être internalisée relativement aisément. Plus la règle est contraignante, plus son enseignement est coûteux, moins efficace elle est.

Certains jugeront que la flexibilité de l’utilitarisme constitue l’une de ses principales limites, d’autres y verront un atout. La souffrance animale n’est, cependant, pas la seule considération à prendre en compte dans le calcul utilitariste. L’exploitation animale a de nombreuses autres conséquences sur l’utilité totale. Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), environ un quart des terres émergées est mis en pâturage et un tiers de la production agricole sert à l’alimentation animale242. Au total, plus de deux tiers des terres agricoles seraient directement ou indirectement utilisées pour la production animale. Dans le même temps, environ huit cents millions de personnes souffrent de malnutrition dans le monde et plus encore ont des difficultés à acheter des céréales, dont le cours est maintenu artificiellement élevé par la demande liée à

240 N. Delon, « Un Singer peut-il en remplacer un autre ? », Klesis, n°32, 2016, pp.150-190.

241 S. Kagan, How to Count Animals, more or less, Oxford: Oxford University Press, 2019.

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l’alimentation animale. Le recours à l’agriculture intensive et à la déforestation massive pour augmenter la production céréalière a, de son côté, d’importantes conséquences négatives sur l’environnement. Il est donc relativement aisé de démontrer, d’un point de vue utilitariste, qu’une réduction, voire l’abandon total, de la consommation animale profiterait au bien-être des animaux comme des humains. Toute la difficulté, cependant, est de savoir si cela suffit pour constituer une obligation orale.

C)LE RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE

Last but not least, les théories utilitaristes nous fournissent les outils conceptuels pour nous

interroger sur notre devoir moral face à la réalité et aux conséquences probables de nos actions sur le réchauffement climatique. Dans son rapport de 2019, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) insiste sur la nécessité de respecter les objectifs d’émission de gaz à effets de serre approuvés lors de l’Accord de Paris de 2015. Les experts mettent notamment les gouvernements en garde contre la fonte des surfaces glacées, l’élévation du niveau des océans, et le bouleversement des écosystèmes terrestres et marins anticipés. Certaines zones géographiques pourront être submergées, d’autres pourraient se désertifier, d’autres enfin feront l’objet de catastrophes climatiques (tornades, cyclones, canicules etc.) de façon plus régulière et plus intense. Toutes les populations verront leurs conditions de vie impactées, mais certaines, en général celles des pays du Sud, seront plus durement affectées que les autres.

La dimension collective de la catastrophe annoncée semble a priori constituer un facteur favorable au principe d’impartialité. Certains éléments cités ci-dessus en compromettent l’exécution. Certaines régions du monde devraient, tout d’abord, être plus affectées que

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d’autres. Les générations futures seront, ensuite, plus durement frappées que les générations présentes. Enfin, toutes les espèces animales ne seront pas menacées de la même manière. Les humains de la présente génération et vivants dans les pays industrialisés du Nord seront, en moyenne, mieux protégés que les autres. Ce sont, pourtant, les seuls en position de contrer le phénomène. Une remise en cause du principe d’impartialité peut, dès lors, avoir des effets irréversibles et dramatiques.

Au-delà de la question de l’impartialité, l’utilitarisme pose un certain nombre de questions auxquelles nous devons répondre si nous voulons nous engager dans une réflexion morale rigoureuse sur le futur de l’humanité : Devons-nous faire le maximum pour éviter le scénario avancé, au risque de sacrifier l’essentiel de notre confort de vie, ou pouvons-nous nous contenter d’un effort louable (utilitarisme modéré) ? Avons-nous réellement une obligation de maximiser le bien-être des générations futures ou pouvons-nous nous contenter de minimiser leurs souffrances à venir (utilitarisme négatif) ? Devons-nous calculer l’utilité des futurs agents en nous fondant sur nos préférences actuelles ou ce que pourraient être leurs préférences dans un lointain futur (utilitarisme des préférences) ? Devons-nous assumer une responsabilité morale individuelle face à cette sombre perspective ou pouvons-nous répartir les efforts à consentir entre tous (utilitarisme

indirect) ? Devons-nous établir un code moral, facilement assimilable, qui s’applique à tous

tout le temps, plutôt que de laisser les individus délibérer sur la légitimité de leurs actions (utilitarisme de la règle) ? Devons-nous répartir les sacrifices de façon inégale pour éviter que les plus pauvres paient un prix disproportionné pour une situation dont ils ne sont que très faiblement responsables ?

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Ces travaux constituent la première étape d’un programme de recherche plus vaste sur l’articulation des différents niveaux de l’éthique, et sur la nécessité de ne pas sous-estimer l’importance de l’éthique appliquée comme de la méta-éthique en éthique normative.

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QUATRIEME PARTIE

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