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Le programme a été mis en route en janvier 2011. Depuis sa création 15 familles ont été incluses avec un total de 39 membres qui répondaient aux critères d’inclusion.

Dans 13 familles, l’inclusion était suite à la présentation par l’un de leurs membres d’un des symptômes de suspicion de la maladie, avec un total de 34 enfants. Dans deux familles, l’inclusion était suite à la présentation par l’un de leurs enfants d’une insuffisance surrénalienne. Dans aucune famille l’inclusion était suite à l’appartenance à une famille avec un historique d’X –ALD.

En suivant le schéma du protocole, et après l’étape de vérification et de confirmation, 8 familles ont été retenues et confirmées familles à X-ALD, avec un total de 16 patient dont 4 femmes hétérozygotes et 12 garçons (Tableau 3).

Les cas exclus après vérification ont été adressés aux services spécialisés adaptés à leur état. Les femmes étaient entre 26 et 42 ans d’âge et étaient toutes asymptomatiques. Les garçons étaient entre 4 et 12 ans, 4 asymptomatiques et 8 présentant la forme cérébrale démyélinisante confirmée par IRM et par les taux élevés des AGTLC. L’insuffisance surrénalienne était stable chez tous les enfants étudiés. Tous les cas asymptomatiques ont été découverts lors du conseil génétique.

Chez les enfants recrutés, le motif de consultation était principalement l’apparition de symptômes neurologiques, les troubles de comportement viennent en deuxième position, et en troisième position les symptômes de l’insuffisance surrénalienne.

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Au cours de cette étude nous avons perdu 4 enfants qui sont morts dans un état grabataire, le tableau 4 décrit les principaux symptômes chez les patients recrutés.

Tableau 3 : Récapitulatif des cas étudiés.

Familles incluses à l’étude Nombre de familles 15

Nombre de patients 39

Familles retenues Nombre de familles 8

Nombre total des patients 16

Nombre de garçons 12

Nombre de femmes hétérozygotes 4

Sur le plan paraclinique, l’IRM cérébrale montre une anomalie de signal de la substance blanche pariéto-occipitale bilatérale Chez sept garçons, une atrophie cérébelleuse chez un garçon, et une Atrophie vermineuse des deux hémisphères cérébraux chez un garçon.

L’atteinte par l’adrénoleucodystrophie liée à l’X est confirmée par le dosage des AGTLC, les rapports des acides gras C24/C22 et C26/C22 des cas étudiés sont représentés dans le tableau5. Le dosage du cortisol et de l’ACTH sont effectués afin de confirmer l’atteinte de la fonction surrénalienne et d’instaurer un traitement substitutif par hydrocortisone. La cortisolémie était inférieure aux normes chez 67% des cas et dans les normes dans 33% des cas. Ces enfants présentent des valeurs très élevées de l’ACTH ce qui confirme l’atteinte périphérique.

Nous avons constaté que l’âge moyen d’apparition du premier symptôme est de 6 ans, alors que la première consultation au niveau de nos services se fait vers un âge moyen de 8 ans, ce qui représente un intervalle de temps de deux ans entre l’apparition du premier symptôme et la consultation. Ce qui nous a menés à effectuer des actions de sensibilisation.

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Tableau 4 : Résumé des caractéristiques cliniques des cas étudiés.

FAMILLE Membres 1er symptôme Forme clinique

Troubles cognitifs et du comportement Neuropathie périphériques Insuffisance surrénalienne progression 1 FH1 - asymptomatique - - - - G1 diminution des performances

scolaires CCALD + + + rapide

FH2 - asymptomatique - - - -

G2

diminution des

performances

scolaires CCALD + + + lente

G3

diminution des

performances

scolaires CCALD + + + très rapide

2 G4

troubles de

comportement CCALD + + + rapide

3

FH3 - asymptomatique - - - -

G5

troubles de

comportement CCALD + + + lente

FH4 - asymptomatique - - - -

4 G6 Céphalées CCALD + + + très rapide

5 G7

neuropathie

périphérique CCALD + + + lente

6 G8

insuffisance

surrénalienne CCALD - - + lente

7

G9

neuropathie

périphérique CCALD - + + très rapide

G10 - asymptomatique - - - -

8

G11

neuropathie

périphérique CCALD + + + rapide

G12

neuropathie

périphérique CCALD + + + rapide

FH : femme hétérozygotes, G : garçon, CCALD : Children Cerebral ALD / forme cérébrale de l’enfant

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Tableau 5 : Résultats des dosages des AGTLC chez les patients étudiés

FAMILLE Membres C22:0 umol/l N30-130 C24:0 umol/l N20-110 C26:0 umol/l N0.3-1.2 C26:1 umol/l C19 umol/l N0.02-1 C20 umol/l N0.2-10 C24/C22 umol/l N0.5-1.08 C26/C22 umol/l N0.005-0.025 1 FH1 34 46 2,06 0,55 0,084 0,57 1,35 0,061 G1 - - - - FH2 38 37 1,92 0,72 0,036 0,47 0,97 0,051 G2 46 86 3,74 0,69 0,083 0,48 1,87 0,081 G3 41 82 4,2 0,84 0,146 0,82 2 0,102 2 G4 18,3 16,9 - - - - 1,025 - 3 FH3 30,2 42,7 - 0,75 - - 1,41 0,024 G5 15,3 17,5 1,2 - - - 1,14 0,078 FH4 28,1 54,6 0,9 - - - 1,94 0,032 4 G6 26,6 33,8 3,2 - - - 1,377 0,144 5 G7 27,7 59 4 - - - 2,309 0,144 6 G8 30 39 4,2 - - - 1,3 0,14 7 G9 25,2 23,8 2,1 - - - 0,94 0,08 G10 32 41 2,09 - - - 1,281 0,0653 8 G11 18,8 17,8 0,1 - - - 1,028 - G12 16,6 18,5 - - - - 1,11445783 -

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Discussions

L’étude que nous avons menée, est une étude prospective sur sept ans, ayant inclus huit familles, avec douze garçons et quatre femmes hétérozygotes.

En consultant le registre de l’hôpital d’enfants de Rabat, on s’est aperçu que durant 5 ans avant l’installation de notre programme, il n’y avait que 5 cas étiquetés suspects d’Adrénoleucodystrophie, deux enfants seulement ont été confirmés et diagnostiqués par dosage des AGTLC. Après la mise en place de notre programme, nous avons diagnostiqué 16 cas confirmés au bout de 7 ans. Ce qui montre l’importance et l’apport significatif de notre projet.

Le diagnostic de ces cas confirmés atteints d’adrénoleucodystrophie, a permis d’offrir un traitement symptomatique palliatif des atteintes neurologiques qui sont présentes chez tous les enfants malades. Toutes ces actions instaurées avaient comme conséquences le soulagement des douleurs des patients et l’amélioration de leur état de santé et leur bien-être. Aussi le diagnostic a permis d’offrir un suivi et un accompagnement au cours de la phase finale pour les enfants qui sont morts au cours de cette étude.

Le suivi trimestriel, permet de suivre l’évolution de la maladie, de détecter à temps les nouveaux symptômes sur le plan neurologique et d’offrir le traitement palliatif et l’ajuster à chaque étape de l’évolution, du fait que le malade peut passer d’un phénotype à un autre dans un temps très court [15].

L’identification de femmes hétérozygotes offre une opportunité de prévention de la maladie via le conseil génétique. Les résultats négatifs du dosage des AGTLC chez les femmes hétérozygotes sont combinés à la recherche de mutations du gène ABCD1 pour avoir une confirmation et une assurance du statut sain de la femme à risque, car les femmes hétérozygotes peuvent avoir des résultats faussement négatifs au dosage des AGTLC. Une telle information apporte un grand soulagement pour les femmes recensées à risque suite à l’étude de l’arbre généalogique. Cependant, dans le cas de l’annonce d’une femme hétérozygote, plusieurs questions se posent par la femme et son mari, et qui sont toujours en relation avec la transmission de la maladie à la progéniture et les moyens de prévention.

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Le statut asymptomatique retrouvé chez toutes les femmes hétérozygotes de notre série s’explique par leur âge. Il est à signaler qu’elles sont candidates à développer la forme médullaire, l’AMN, dans le futur, vers l’âge de 50ans [1][16]. La forme cérébrale est très rare chez elles [17].

Un intérêt spécial doit être porté aux patients de sexe masculin asymptomatiques découverts lors du conseil génétique, car ils peuvent progresser vers différents phénotypes entre l’âge de 3 et 50 ans [18]. De plus, les études ont montré que approximativement 80% des cas asymptomatiques développent une insuffisance surrénalienne [19]. De ce fait, tous ces patients doivent avoir un monitoring pour la fonction surrénalienne. En cas de déficience, une thérapie hormonale de remplacement s’avère obligatoire. L’établissement d’un suivi à long terme pour les cas asymptomatiques est obligatoire, du fait que la fenêtre thérapeutique pour la greffe allogénique des cellules souches est très étroite et les changements à l’échelle cérébrale est non prévisible [18].

Le conseil génétique est très productif et la communication est toujours fructueuse. En effet, les membres des familles adhèrent pleinement au programme du fait qu’il s’agit d’une maladie rare et difficile à vivre tout seul. L’adrénoleucodystrophie, en plus de son impact sanitaire, a d’autres impacts psychologiques et sociaux [9]. Nous avons constaté suite à ce programme que l’Adrénoleucodystrophie à un impact dévastateur sur la famille dans laquelle on diagnostique un ou plusieurs garçons atteints. En effet, dès la déclaration d’un cas index dans la famille, toute l’attention, le temps et les ressources financières, sont dirigés vers le management du nouveau problème, qui nécessite du temps et de la patience pour suivre les différentes étapes du programme allant de la confirmation de la maladie chez le cas index, le conseil génétique, le suivi des nouveaux cas diagnostiqués, jusqu’à l’installation des traitement adaptés. L’expérience a montré que c’est pendant ce moment qu’il faut bien maitriser la communication avec les membres de la famille et les parents en premier, et particulièrement la maman de l’enfant atteint.

L’impact financier constitue une limitation pour suivre les investigations. Toutefois, notre collaboration avec les équipes de recherches à l’étranger était d’une grande aide ce qui a permis à tous les patients d’avoir accès à tous les essais nécessaires gratuitement.

L’intervalle de temps entre la première consultation dans nos services et l’apparition du premier symptôme qui est de deux ans, est un intervalle important pendant lequel les parents des enfants

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malades affirment qu’ils ont consulté chez plusieurs médecins et équipes médicales sans aboutir au bon diagnostic, ce qui renforce la nécessité d’effectuer la sensibilisation vis-à-vis de la maladie à une plus grande échelle chez les professionnels de la santé et les structures médicales. Ceci s’intègre dans la nécessité d’effectuer un diagnostic précoce afin d’augmenter l’accessibilité aux thérapies adaptées [13].

Malgré tous ces patients retrouvés, nous estimons que l’X-ALD est une maladie sous diagnostiquée au Maroc, cet état est général dans plusieurs pays à travers le monde. En effet, les patients peuvent attendre une décennie avant d’avoir un diagnostic de confirmation d’X-ALD, et la moitié restent sans diagnostic de confirmation [20].

Conclusion :

Le programme de diagnostic et de suivi de l’adrénoleucodystrophie mis en place par notre équipe multidisciplinaire à Rabat représente le premier programme qui s’intéresse à cette maladie au Maroc. Sa valeur ajoutée est démontrée par le nombre de cas diagnostiqués et par le soulagement des souffrances des familles atteintes en offrant un suivi régulier et des traitements adaptés, ainsi que par l’accompagnement et la communication continue en répondant à toutes les questions et les besoins spécifiques à tout moment.

Ce programme a donné naissance à une équipe de recherche sur l’adrénoleucodystrophie qui travaille sur les aspects biochimiques et moléculaires de la maladie, et qui a commencé à faire sortir les premiers résultats de mise au point de techniques biochimiques et moléculaire de diagnostic de la maladie

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[3] I. Singh et A. Pujol, « Pathomechanisms underlying X-adrenoleukodystrophy: a three-hit hypothesis », Brain Pathol. Zurich Switz., vol. 20, no 4, p. 838‑844, juill. 2010.

[4] H. W. Moser, A. Mahmood, et G. V. Raymond, « X-linked adrenoleukodystrophy », Nat.

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[5] H. W. Moser et al., « Adrenoleukodystrophy: increased plasma content of saturated very long chain fatty acids », Neurology, vol. 31, no 10, p. 1241‑1249, oct. 1981. [6] J. Berger, S. Forss-Petter, et F. S. Eichler, « Pathophysiology of X-linked

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[7] S. Kemp, J. Berger, et P. Aubourg, « X-linked adrenoleukodystrophy: Clinical, metabolic, genetic and pathophysiological aspects », Biochim. Biophys. Acta BBA - Mol. Basis Dis., vol. 1822, no 9, p. 1465‑1474, sept. 2012.

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[11] E. R. Melhem, P. B. Barker, G. V. Raymond, et H. W. Moser, « X-linked

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[13] M. Engelen et al., « X-linked adrenoleukodystrophy (X-ALD): clinical presentation and guidelines for diagnosis, follow-up and management », Orphanet J. Rare Dis., vol. 7, p. 51, 2012.

[14] Y. Takemoto, Y. Suzuki, R. Horibe, N. Shimozawa, R. J. A. Wanders, et N. Kondo, « Gas chromatography/mass spectrometry analysis of very long chain fatty acids,

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[15] S. Patel et N. Gutowski, « The difficulty in diagnosing X linked adrenoleucodystrophy and the importance of identifying cerebral involvement », BMJ Case Rep., vol. 2015, mai 2015.

[16] D. Restuccia et al., « Neurophysiological abnormalities in adrenoleukodystrophy

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[17] A. Fatemi et al., « MRI and proton MRSI in women heterozygous for X-linked adrenoleukodystrophy », Neurology, vol. 60, no 8, p. 1301‑1307, avr. 2003.

[18] N. Shimozawa et al., « X-linked adrenoleukodystrophy: diagnostic and follow-up system in Japan », J. Hum. Genet., vol. 56, no 2, p. 106‑109, févr. 2011.

[19] P. Dubey, G. V. Raymond, A. B. Moser, S. Kharkar, L. Bezman, et H. W. Moser, « Adrenal insufficiency in asymptomatic adrenoleukodystrophy patients identified by very long-chain fatty acid screening », J. Pediatr., vol. 146, no 4, p. 528‑532, avr. 2005.

[20] S. Parikh et al., « A clinical approach to the diagnosis of patients with leukodystrophies and genetic leukoencephelopathies », Mol. Genet. Metab., vol. 114, no 4, p. 501‑515, avr. 2015.

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Chapitre 2 : Etude moléculaire du gène ABCD1 et la

distribution des phénotypes dans la population

marocaine : 2 nouvelles mutations.

Résumé :

Introduction :

L’adrénoleucodystrophie (X-ALD) est une maladie neurodégénérative liée à des mutations du gène ABCD1. Cette maladie métabolique est caractérisée par l’accumulation d’acides gras à très longues chaines (AGTLC > C22:0), due à l’altération de la capacité de la β-oxydation au niveau du peroxysome. Le diagnostic se base sur le dosage des AGTLC plasmatiques, qui constituent les biomarqueurs de la maladie. La confirmation se fait par biologie moléculaire en cherchant les mutations du gène ABCD1, qui est localisé au niveau du chromosome Xq28, et qui présente 10 exons codants pour une protéine transmembranaire de 745 acides aminés.

Méthodes :

Nous avons conduit une première large étude moléculaire de l’X-ALD au Maroc. L’objectif de cette étude est d’identifier les variants génétiques présents au niveau de la population marocaine, et de caractériser les mutations du gène ABCD1 dans une cohorte marocaine de 12 patients.

Résultats :

Trois mutations causatives ont été découvertes incluant deux nouvelles mutations, une mutation faux sens c.652C>G (p.Pro218Ala), et une large délétion de l’exon 3 à l’exon 8. En plus de la mutation c.1661G>A (p.Arg554His) déjà citée au niveau de l’X-ALD database.

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Conclusion :

En terme de conclusion, la découverte de ces mutation permettra d’aider dans le conseil génétique et dans le diagnostic prénatal ainsi qu’en diagnostic précoce ce qui augmente la chance de bénéficier du traitement par greffe de moelle osseuse chez les patients diagnostiqués à l’état asymptomatique.

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