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La table 2.5 pr´esente les r´esultats des estimations de l’effet de l’aide sant´e sur divers in- dicateurs de la sant´e. Je rapporte les r´esultats des r´egressions de la mortalit´e des enfants de moins de cinq ans dans les colonnes (1) et (2), de la mortalit´e maternelle dans les

colonnes (3) et (4), de l’incidence58 du VIH dans les colonnes (5) et (6). Les colonnes

(1), (3), (5) rapportent les r´esultats de l’estimateur within tandis que les colonnes (2), (4), (6) rapportent ceux de l’estimateur GMM.

Quatre r´esultats importants se d´egagent de cette table. Premi`erement, le coefficient (β1)

de l’aide sant´e par tˆete (DAHt−1) est n´egatif et significatif dans les colonnes (2) et (4)

sans l’ˆetre dans la colonne (6). Ce r´esultat sugg`ere que l’aide sant´e a un effet positif (r´eduction de la mortalit´e) sur la sant´e des enfants de moins de cinq ans et sur la sant´e maternelle. Cet effet ne passe pas par les institutions ´economiques et les d´epenses pu- bliques de sant´e, mais il passe par la nature curable ou incurable de la variable d’int´erˆet. L’effet net devrait ˆetre calcul´e en prenant en compte les effets conditionnels aux institu- tions et aux d´epenses publiques de sant´e. Ce r´esultat est conforme au m´ecanisme que j’ai identifi´e dans la section 2.2.2 (pr´ediction 4) selon lequel la nature de la variable d’int´erˆet mod`ere l’effet de l’aide sant´e. Ce r´esultat montre que l’effet positif direct de l’aide sant´e sur la pr´evalence du VIH que trouvent Yogo et Mallaye (2015) sur la base d’un mod`ele sans terme d’interaction entre l’aide et les institutions r´esulte en r´ealit´e de la conjonction des effets conditionnels. Comme Mishra et Newhouse (2009), je constate que la taille des estim´es fournis par l’estimateur GMM est ´elev´ee par rapport `a celle de l’estimateur within. Par exemple, dans les r´egressions de la mortalit´e des enfants (colonne 1 et 2), le

ratio des coefficients (β1) est de l’ordre de 1.6. Les estim´es de l’estimateur within dans

les mod`eles de panels dynamiques sont en g´en´eral biais´es par construction, raison pour 58. J’ai multipli´e l’incidence du VIH par 100 dans les colonnes (5 et 6) car son ordre de grandeur est trop faible par rapport `a ceux d’autres variables. L’incidence du VIH est dont exprim´e en o/

oo dans ces

Table 2.5

Effets de l’aide sant´e sur la sant´e

Variable d´ependante : Mortalit´e des enfants de -5 ans (o/

oo)

Ratio de Mortalit´e ma- ternelle (o/ oooo) Incidence du VIH (o/ oo) FE GMM FE GMM FE GMM Sig (1) (2) (3) (4) (5) (6)

Var d´ep retard´ee (Mt−1) :ρ + 0.6762*** 0.8081*** 0.9109*** 0.9102*** 0.8600*** 0.9167***

(0.1662) (0.0669) (0.0082) (0.0290) (0.0623) (0.0201) Aide sant´e/tˆete (DAHt−1) :β1 - -0.3703* -0.5960*** -0.2122 -2.1073** -0.1207 -0.3843 (0.2055) (0.2234) (0.3461) (0.8719) (0.1296) (0.2578) DAHt−1∗ It−1 2 + 0.0508* 0.0847** 0.0470 0.3662** 0.0165 0.0745* (0.0273) (0.0355) (0.0538) (0.1456) (0.0190) (0.0439) DAHt−1∗ GHEt−1 3 ± 0.0000 0.0000 -0.0003** -0.0006 0.0001** -0.0002* (0.0001) (0.0001) (0.0001) (0.0004) (0.0000) (0.0001) It−1∗ GHEt−1: λ3 + 0.0019 0.0049 -0.0050* -0.0250 0.0001 0.0044 (0.0014) (0.0037) (0.0027) (0.0284) (0.0006) (0.0029) Libert´es ´economiques (It−1) : λ1 - -1.3623 -2.9589 2.8139* 3.7526 -0.3323 -4.1217** (0.9362) (1.8775) (1.6915) (4.0881) (0.4423) (1.8985) D´ep gouv de sant´e (GHEt−1) :

λ2

- -0.0091 -0.0250 0.0440** 0.0388 -0.0046 -0.0259 (0.0077) (0.0188) (0.0191) (0.1676) (0.0037) (0.0211) Incidence du VIH (%) (HIVt) + 10.0725* 2.4066** 6.9208 24.9676

(5.5229) (0.9724) (10.7260) (20.3649)

Mortalit´e maternelle (MMt) + 0.0276* 0.0134** -0.0031 -0.0013

(0.0154) (0.0060) (0.0044) (0.0032)

Mortalit´e infantile (ME5t) + 0.0520 -0.1289 0.0255 -0.0107

(0.0612) (0.1599) (0.0222) (0.0243)

P IB/tetet−1 ± 0.0004* -0.0007 0.0010*** 0.0138** 0.0002 0.0000

(0.0002) (0.0006) (0.0003) (0.0067) (0.0002) (0.0002)

Autre Aide/tˆetet−1 - -0.0224* -0.0067 -0.0065 -0.0185 0.0008 -0.0055

(0.0126) (0.0087) (0.0102) (0.0274) (0.0019) (0.0101) Constante 17.5745 28.3020* -6.3803 2.9683 26.3000** (11.5727) (15.7938) (11.1863) (3.6891) (12.4914) Nombre d’observations 1195 1195 1195 1098 1195 1195 Nombre de pays 97 97 97 96 97 97 Test de sur-identification de Hansen 0.2587 0.6007 0.2467 Nombre d’ instruments 85 67 85

Arellano-Bond test AR(1) 0.2977 0.0874 0.0536

Arellano-Bond test AR(2) 0.2999 0.3115 0.9630

Notes : Toutes les estimations utilisent une sp´ecification des effets fixes individuels et temporels avec des variances robustes. Les ´ecarts-types sont indiqu´es entre parenth`eses. Significativit´e : *** p-value < 0.01, ** p-value < 0.05 et * p-value<0.10. Les erreurs standard sont corrig´ees `a l’aide de la proc´edure des ´echantillons finis de Windmeijer, 2005.

laquelle je mettrai l’accent sur les r´esultats de l’estimateur GMM dans la suite.

Deuxi`emement, le coefficient (β2) du terme d’interaction entre l’aide sant´e et les libert´es

´economiques (DAHt−1∗ It−1) est significatif et de signe positif dans toutes les estima-

tions (2), (4) et (6). Ce r´esultat est coh´erent avec ma pr´ediction 2 qui stipule une rela- tion n´egative entre le niveau des institutions formelles et l’efficacit´e de l’aide sant´e. Ces r´esultats empiriques sugg`erent que les effets positifs que l’aide sant´e pourrait avoir sur la sant´e s’effritent lorsque le niveau des institutions formelles s’accroˆıt. L’aide sant´e est par

cons´equent plus efficace dans les pays qui ont des faibles institutions. Gyimah-Brempong et al. (2015) trouvent que l’interaction entre l’aide sant´e et la bonne gouvernance n’est pas significative dans la r´egression de la mortalit´e des enfants de mois de 5 ans alors qu’elle est n´egative et significative dans la r´egression de la mortalit´e maternelle. Mon second

r´esultat sur la mortalit´e maternelle diff`ere de celui de Gyimah-Brempong et al. (2015)59.

Les autres auteurs n’ont pas pris en compte l’interaction entre l’aide et les institutions (Afridi et Ventelou, 2013 ; Mishra et Newhouse, 2009 ; C. R. Williamson, 2008 ; Wilson, 2011 ; Yogo et Mallaye, 2015). Dans des ´etudes beaucoup plus g´en´erales sur le lien entre l’aide et la croissance, Easterly et C. R. Williamson (2011) et R. G. Rajan et Subrama- nian (2008) montrent que les institutions n’affectent pas positivement la relation entre l’aide et la croissance. Mon r´esultat sur l’effet conditionnel de l’aide sant´e `a travers les institutions ´economiques ne remet pas forc´ement en question l’efficacit´e de l’aide sant´e ou le rˆole positif que les institutions ´economiques pourraient jouer dans la production des biens de sant´e. En effet, je trouve que le coefficient des institutions ´economiques dans

la r´egression de l’incidence du VIH (λ1= −0.4121) est n´egatif et significatif alors qu’il

n’est pas significatif dans les r´egressions de la mortalit´e maternelle et de la mortalit´e infantile. Ceci sugg`ere que les institutions ´economiques pourraient jouer un rˆole positif dans la maˆıtrise de l’infection `a VIH. Plusieurs r´esultats ont ´egalement rapport´e que la variable de contrˆole des institutions ´economiques ou des institutions politiques n’est pas significative dans la r´egression de la mortalit´e infantile (Ndikumana et Pickbourn, 2017 ; C. R. Williamson, 2008 ; Wilson, 2011).

Troisi`emement, le coefficient d’interaction (β3) entre l’aide sant´e et les d´epenses publiques

de sant´e (DAHt−1∗ GHEt−1) n’est pas significatif dans les colonnes (2) et (4) par contre,

il est n´egatif (β3= −0.0002 ) et significatif au seuil de 10% dans la colonne (6). Ce r´esultat

59. Dans la r´egression de Gyimah-Brempong et al. (2015), l’aide a un effet direct positif, un effet condi- tionnel positif qui passe par la gouvernance et un effet conditionnel positif qui passe par les d´epenses de sant´e. Ce r´esultat n’est point conforme aux multiples r´esultats dans la litt´erature. S’il ´etait vraisemblable alors on observerait qu’un tr`es faible niveau d’aide sant´e entraˆıne une grande diminution de la mortalit´e maternelle. La table 2.4 montre une corr´elation positive plus ´elev´ee entre l’aide sant´e et les indicateurs de maladie dans les pays `a forte institution que dans les pays `a faible institution.

sugg`ere que les effets de l’aide sant´e sur la mortalit´e infantile et sur la mortalit´e mater- nelle ne sont pas conditionnels aux d´epenses publiques de sant´e alors que c’est le cas pour l’incidence du VIH. Le niveau des d´epenses publiques de sant´e augmente l’effet de l’aide sant´e sur l’incidence du VIH. Ce r´esultat est conforme `a ma pr´ediction 3 qui stipule que la contribution des d´epenses publiques de sant´e dans l’efficacit´e de l’aide est plus importante dans la lutte contre les maladies incurables (incidence du VIH). Mon mod`ele th´eorique

n’impose aucun signe au coefficient β3. Ces r´esultats sont par cons´equent coh´erents avec

les implications de mon mod`ele th´eorique. La non significativit´e du coefficient β3 dans les

colonnes (2) et (4) peut s’interpr´eter au regard de ma pr´ediction 3 comme une ´equivalence entre l’importance accord´ee par les bailleurs de fonds `a la mise en œuvre des r´eformes institutionnelles et l’importance des d´epenses publiques de sant´e dans la probabilit´e du dictateur `a demeurer au pouvoir lorsqu’il d´ecide de mettre en œuvre les r´eformes insti- tutionnelles.

La structure de l’efficacit´e de l’aide sant´e d´epend de la nature curable ou non curable de la variable d’int´erˆet, des institutions ´economiques et des d´epenses publiques de sant´e. La mod´eration observ´ee dans la relation entre l’aide sant´e et la mortalit´e des enfants de moins de cinq ans ou la mortalit´e maternelle est due aux institutions ´economiques alors que celle observ´ee entre l’aide sant´e et l’incidence du VIH est due `a la fois aux institu- tions ´economiques et aux d´epenses publiques de sant´e. Gyimah-Brempong et al. (2015) estime que les d´epenses de sant´e mod`erent la relation entre d’une part l’aide sant´e et la mortalit´e infantile et d’autre part entre l’aide sant´e et la mortalit´e maternelle. Je ne

trouve aucune mod´eration de la part des d´epenses publiques de sant´e (β3). Mes r´esultats

sont coh´erents avec mes pr´edictions et conformes `a la litt´erature60 qui soutient que les

d´epenses publiques de sant´e n’ont aucun effet positif sur la sant´e (Filmer et Pritchett, 60. La relation qui lie les d´epenses de sant´e et la sant´e est aussi controvers´ee. Quelques travaux four- nissent des preuves que les d´epenses publiques de sant´e ont un effet positif robuste sur la sant´e (Baldacci et al., 2008 ; Bokhari, Gai et Gottret, 2007 ; Novignon, Olakojo et Nonvignon, 2012)

1999 ; Garrett, 2007), ou qu’elles ont un effet positif tr`es faible et difficilement d´etectable (Gupta, Verhoeven et Tiongson, 2002). Ces r´esultats nuancent l’id´ee selon laquelle la qua- lit´e institutionnelle est une condition n´ecessaire pour l’efficacit´e de l’aide (Boone, 1996 ; Dollar et Svensson, 2000) et pr´esentent trois particularit´es tr`es int´eressantes.

1. Consid´erons le rapport entre le coefficient l’aide sant´e par tˆete (DAHt−1) et celui du

terme d’interaction entre l’aide sant´e et les libert´es ´economiques (DAHt−1∗ It−1),

soit r1 =

β1

β2. Ce rapport vaut -5.75 pour la mortalit´e maternelle et -7,04 pour la

mortalit´e des enfants de moins de 5 ans. Puisque le coefficient (β3) du terme d’in-

teraction entre l’aide sant´e et les d´epenses publiques de sant´e n’est pas significatif, l’effet net de l’aide sur ces deux variables d’int´erˆet est estim´e par β1+ β2It−1. Si la

qualit´e des institutions est faible (I < −r1) alors l’aide sant´e aurait un effet posi-

tif pour l’indicateur de sant´e consid´er´e. De m`eme, si la qualit´e des institutions est ´elev´ee (I > −r1) alors l’aide sant´e aurait un effet n´egatif pour l’indicateur de sant´e

consid´er´e. Ainsi lorsque la valeur de la qualit´e des institutions est sup´erieure `a 5.75, l’aide a un effet n´egatif sur la sant´e maternelle et lorsque cette valeur est sup´erieure `a 7.04 l’aide sant´e a un effet n´egatif sur la sant´e infantile.

2. La valeur moyenne de la qualit´e des institutions vaut 6.40 avec un ´ecart type faible de l’ordre de 0.8 (table 2.2). Ces caract´eristiques de la distribution de la qualit´e des institutions tendent `a soutenir les positions qui estiment que l’aide sant´e n’a aucun impact sur la sant´e (Kosack et Tobin, 2006 ; C. R. Williamson, 2008 ; Wilson, 2011), et qu’elle peut mˆeme ˆetre nuisible pour la sant´e. Le figure 2.2a ci-dessous montre que les variations retard´ees de l’aide sant´e n’engendrent pas des variations de la mortalit´e infantile tandis que la figure 2.2b montre une l´eg`ere corr´elation entre les variations retard´ees de l’aide sant´e et les variations de la mortalit´e maternelle.

3. Consid´erons maintenant le rapport entre le coefficient du terme d’interaction entre l’aide sant´e et les libert´es ´economiques (DAHt−1∗ It−1) et celui de terme d’interac-

tion entre l’aide sant´e et les d´epenses publiques de sant´e (DAHt−1∗ GHEt−1), soit

r2=

β2

β3. Ce ratio vaut -372.5 dans la r´egression de l’incidence du VIH. L’effet de

l’aide sant´e sur l’incidence du VIH peut ˆetre calcul´e comme suit β2It−1+β3GHEt−1.

L’aide sant´e a un impact positif sur l’incidence du VIH si GHE

I < −r2. Le ratio

entre la valeur moyenne des d´epenses publiques de sant´e et la valeur moyenne de

l’index des libert´es ´economiques vaut 234.8

6.4 = 36.7. Cette valeur est plus faible que

le dixi`eme du seuil −r2= 372.5. Ceci sugg`ere en moyenne que l’aide sant´e aurait

un l´eger impact positif sur l’incidence du VIH (partie 2.2c de la figure 2.2).

-200

-100

0

100

200

Mortalité des enfants de -5 ans (pour 1000),

(Première difference)

-400 -200 0 200 400 600

Aide santé par tête (PPA $ constant 2017), (Première difference rétardée d'une période)

Sources : Auteurs,(à partir des données du World Development Indicators, WB)

(a) Mortalit´e des enfants -5 ans

-150

-100

-50

0

50

Mortalité maternelle (pour 100 000),

(Première difference)

-400 -200 0 200 400

Aide santé par tête (PPA $ constant 2017), (Première difference rétardée d'une période)

Sources : Auteurs,(à partir des données du World Development Indicators, WB)

(b) Mortalit´e maternelle -.6 -.4 -.2 0 .2

Incidence du VIH (%), (Première difference)

-200 -100 0 100 200 300 Aide santé par tête (PPA $ constant 2017), (Première difference rétardée d'une période)

Sources : Auteurs,(à partir des données du World Development Indicators, WB)

(c) Incidence du VIH

Quatri`emement, s’agissant du contrˆole des autres mesures de la sant´e (AMt−1), ces

r´esultats montrent que l’infection du VIH et la mortalit´e maternelle sont positivement associ´ees `a la mortalit´e des enfants de moins de cinq ans, alors que les autres mesures de sant´e n’affectent pas la mortalite maternelle et l’incidence du VIH. Le test des restric- tions de suridentification de Hansen ne rejette pas l’hypoth`ese de suridentification dans toutes mes estimations GMM et le test Arellano-Bond r´ealis´e sur les erreurs autoregres- sives d’ordre 2 rejette l’hypoth`ese de la pr´esence d’auto-corr´elation s´erielle. Le nombre

d’instruments61utilis´es dans chacune de mes estimations est inf´erieur au nombre de pays

comme le sugg`ere Roodman, 2009.