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Estime de soi sociale

Tiago 1 fait également le lien avec le pancréas qui ne fonctionne plus : « l’insuline c’est quelque chose qu’on avait dans le corps avant qui fonctionnait et maintenant qui ne

4.2.3 Estime de soi & avenir

4.2.3.1 Estime de soi sociale

Les 12 enfants, lors des entretiens, nous ont dit être parfaitement reconnus auprès de leurs pairs. Aucun d’entre eux n’a eu l’impression d’être traité différemment parce qu’il ou elle est diabétique, « non, il n’y a pas de différence », d’après Lara (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012). Ils jouent tous ensemble. La majorité des enfants interviewés font tous des sports d’équipe (football, gymnastique, agrès, judo, natation ou encore du hockey), aussi de la gymnastique à l’école.

Yvan : « ils me disent « bravo ! » quand on marque des goals » (communication personnelle

[entretien], 13 juillet 2012).

« Je fais du foot et ben quand je gagne, je suis content », résume Kevin (communication personnelle [entretien], 13 juillet 2012).

« Oui, quand on est en équipe et qu’on marque, on est fiers de nous et on le dit tous à la fin », selon Tiago (communication personnelle [entretien], 10 juillet 2012). De plus, ils occupent des places importantes dans les équipes : au football, ils sont attaquants ou au but par exemple.

Ou d’autres enfants nous racontent que leurs camarades s’inquiètent pour eux quand ils ne vont pas bien.

« Quand je me sens pas très très bien, ils s’inquiètent un peu pour moi », communique

Lucie (communication personnelle [entretien] 10 juillet 2012). Deux enfants nous ont raconté

qu’en fait leurs camarades reconnaissaient les symptômes des hyper et/ou hypoglycémies. Par exemple, Nora (communication personnelle, [entretien], 15 juillet 2012) nous raconte : « les hypers, je suis surexcitée et ça, ils [copains et copines] remarquent. Donc, ils me disent que je dois me calmer. Et puis quand je suis en hypo et ben… je fais plus rien, je bouge plus et ça, ils remarquent aussi ».

Un autre aspect de l’estime de soi sociale, développée par Foubert (2008), est la sensation d’être différent des enfants sains, traduite par une émotion de honte. « Les enfants évoquent des sentiments de honte, en lien avec la notion de différence » (Foubert, 2008, p.35). Même si pendant les entretiens, les enfants n’ont pas ressenti un sentiment de honte en lien avec leur différence, ils nous ont donné quelques exemples dans lesquels ils avaient ressentis des émotions, comme de l’énervement, par exemple, par rapport aux autres enfants.

Par exemple, le fait que leurs camarades viennent sans cesse vers eux pour leur poser des questions sur ce qu’ils sont en train de faire lorsqu’ils se font des glycémies ou des injections. « Une fois ma meilleure amie m’a dit mais pourquoi en fait tu es obligée de faire tout le temps des glycémies ? Et moi je trouvais ça un peu bizarre comme question, alors je lui ai dit : ben en fait j’ai une maladie », d’après Lara (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012). Ou alors, les enfants peuvent aussi se moquer de l’enfant quand il est différent. « Il y en a juste un, il dit tout le temps de toutes façons le diabète, t’es pas comme nous, tu n’es pas un vrai enfant, mais bon il faut pas penser à ça parce que tu as juste le diabète, c’est tout », d’après Tiago (communication personnelle [entretien], 10 juillet 2012). Malgré les moqueries de ce camarade, Tiago ne se laisse pas atteindre par les attaques de ce dernier, sans que son estime de soi en pâtisse. Nous pouvons mettre en lien la notion de différence et l’estime de soi avec le dessin de Lucie1. Durant l’entretien, elle nous a expliqué qu’elle utilise la pompe habituellement. Cependant en été, elle préfère utiliser les stylos à insuline. La pompe se voit quand elle est en maillot de bain. La pompe à insuline lui renvoie ainsi qu’aux autres sa différence et le fait qu’elle est atteinte de diabète. Dans cet exemple, nous voyons que Lucie a mis en place des facteurs de résilience et de coping (ils seront développés dans le prochain chapitre), qui lui permettent de maintenir une bonne estime d’elle-même, dans le but de diminuer la différence entre elle et ses copines.

Il arrive aussi que les enfants transforment cette différence en atout. Par exemple Auriane notifie que ses camarades lui disent : « ils disent que j’ai de la chance, parce que je peux manger plus souvent du sucre » (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012). Ou encore Lara raconte qu’elle aime bien que les autres lui posent des questions car « ça veut aussi dire qu’ils s’intéressent un peu à moi, ils veulent savoir ce que j’ai et ça m’aide » (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012).

De plus, Duclos (2004) exprime qu’en « effet, si l’enfant a besoin d’être conforme aux attentes de ses pairs pour éviter le rejet, en même temps, sa personnalité est en pleine construction, et il est nécessaire, pour lui, d’avoir sa propre identité » (Foubert, 2008, p.35).

Tiago l’a souligné dans son entretien : « tu es un enfant normal, juste le diabète en plus, c’est comme un enfant avec un cancer, c’est un enfant normal, juste avec le cancer en plus » (communication personnelle [entretien], 10 juillet 2012. D’ailleurs, tous les enfants diabétiques ont raconté à leurs camarades qu’ils ou elles avaient un diabète. Il y en a 6 qui ont expliqué leur maladie au moyen d’un exposé. Un autre qui a expliqué ce qu’il avait, car ses camarades l’ont vu en train de se faire une glycémie et étaient intrigués par ce qu’il faisait. Sinon, il n’aurait pas dit être diabétique. Concernant les 3 autres enfants, soit un médecin, une infirmière ou la maîtresse a expliqué aux enfants ce qu’avait leur camarade.

4.2.3.2 Estime de soi identitaire

Par un mécanisme inconscient, les parents décrivent leur enfant par rapport à leur gestion du diabète. « Référence à la compliance ou à la non-compliance au traitement, reviennent fréquemment dans le discours des parents » (Foubert, 2008, p.35). Geoffroy et Gonthier (2003) ajoutent qu’il « semble donc que le diabète finisse par définir l’enfant non plus comme enfant en tant que tel, mais comme un enfant diabétique, identifié par rapport à sa maladie » (Foubert, 2008, p.35).Dans la première partie de notre entretien, nous avons demandé aux enfants si leurs parents leur parlaient fréquemment du diabète et si oui ce qu’ils disaient. Sur les 12 enfants, seulement 3 ont répondu positivement. « Ma maman elle dit qu’elle aimerait bien que j’aie plus le diabète », d’après Tony (communication personnelle [entretien], 12 juillet 2012). « Ils [mes parents] auraient préféré que j’aie pas le diabète », selon Nora (communication personnelle [entretien], 15 juillet 2012).

L’attitude des parents peut avoir un impact sur le comportement et l’estime de soi de l’enfant. Du reste, quand nous lui demandons si son entourage est fière d’elle, Lara nous répond : « en particulier mes parents ils sont fiers de moi, par exemple quand je respecte les limites ou quand j’ai évité de… des fois j’oubliais mes bolus et ça les embêtait un peu et après quand j’oubliais rien, ils étaient assez fiers de moi » (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012). Ou encore elle a dit que « oui, il y a des moments où je me sens fière de moi.

Par exemple quand j’ai eu le diabète et que je commençais à calculer les biscuits et mes parents me demandaient ce que je pourrais manger et je leur répondais et j’étais assez fière de moi » selon Lara (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012).

Comme nous l’avons dit plus haut, les parents sont fiers de leur fille quand elle parvient à gérer son diabète. Lorsque Lara n’oublie pas de s’injecter les bolus ou qu’elle respecte les limites que ses parents lui ont imposé, ils sont fiers de leur fille. D’ailleurs, nous avons ressenti durant l’entretien avec Lara qu’elle était très inquiète par rapport au diabète. En plus, lorsque nous lui avons demandé comment elle se décrirait, elle nous dit : « je commencerai d’abord par les choses un peu essentielles… j’ai le diabète… » (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012). En continuant de se décrire, nous lui demandions si elle dirait qu’elle est jolie ou pas : « ben disons que ce n’est pas essentiel ça », selon Lara (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012).

D’ailleurs, elle aime bien que les gens lui posent des questions sur sa maladie, car c’est une preuve que les gens s’intéressent un peu à elle et cela l’aide de savoir que « j’ai des gens qui sont quand même attentifs, qui s’intéressent à moi et comme ça, ça c’est important pour moi » (communication personnelle [entretien], 9 juillet 2012). Cependant, il s’agit encore là, de réponses qui correspondent à ce moment en lien avec des questions particulières et qui ne répondent pas à son état de tous les jours. En effet, nous avons suivi Lara durant le camp et elle parvenait parfaitement à s’intégrer auprès de ses pairs, elle jouait, faisait du sport, riait et nous pouvons dire qu’elle avait une bonne estime d’elle-même. Nous pouvons formuler l’hypothèse que Lara a une image d’elle-même attachée à la gestion du diabète et s’identifie à sa maladie, mais ne la prive pas de sa vie d’enfant.

Sur l’ensemble de nos entretiens, plus de la moitié (7 enfants sur 12) se décriraient auprès d’une autre personne en spécifiant qu’ils sont diabétiques. Selon eux, il est important que les gens sachent qu’ils sont diabétiques, au cas où il leur arriverait quelque chose comme par exemple faire un malaise ou si quelqu’un propose une sucrerie et qu’ils la refusent, il faut que la personne sache pourquoi. Les enfants précisent en disant que « si quelqu’un veut me donner une sucette, je dois dire que je suis diabétique », selon Tony (communication personnelle [entretien], 12 juillet 2012). L’hypothèse que nous pouvons faire est que leur stratégie est la sécurité (s’il m’arrive quelque chose, il faut que quelqu’un sache pourquoi il m’arrive cela) et de ne pas devoir se justifier ou expliquer plusieurs fois pourquoi ils ne mangent pas de bonbons par exemple. Tiago nous explique : « des fois ils [les enseignants] croient que c’est juste pour jouer comme ça [en parlant de la pompe à insuline] ; des fois les profs, ils savent pas ce que c’est et ils disent : tu me donnes ta DS® ou arrête de jouer avec,

bon, tu fais pas semblant de jouer. Au prof, je lui ai dit mais je suis diabétique, ça c’est ma pompe et je dois la garder sur moi » (communication personnelle [entretien], 10 juillet 2012). Les 5 autres enfants ne disent pas tout de suite qu’ils sont diabétiques, seulement quand ils connaitront mieux la personne. Par exemple, Bruno nous dit : « non, il faudrait que je la connaisse mieux avant que je le dise » (communication personnelle [entretien], 10 juillet 2012). L’hypothèse que nous pouvons poser ici est que les 12 enfants ne désirent pas associer le diabète à leur personnalité, ils désirent être reconnus en tant que personnes, respectés dans leur singularité et dignité et pas comme des enfants diabétiques. Ils savent que leur maladie est grave et qu’elle peut avoir une influence psychique (changement d’humeur, somnolence) ou physique (tremblement) et comportemental. Cependant, ils ne voient pas l’obligation de le raconter. Deuxième hypothèse que nous pouvons identifier : peur du regard et du jugement d’autrui. De ce fait, ils préfèrent attendre de bien connaître la personne pour lui raconter, car il s’agit quand même d’une information très personnelle.