• Aucun résultat trouvé

3.2 Caractéristiques de l’écoulement en zone d’étude

3.2.1 Estimation de la vitesse de frottement

Pour les simulations de CL en soufflerie et les mesures in situ, la vitesse de frottement u est tradi-tionnellement déduite du profil verticale de la contrainte moyenne de cisaillementuw

mesurée dans la SCI (que l’on note τm) où la vitesse longitudinale moyenne suit une loi logarithmique (Cheng et Castro, 2002a). Or, la vitesse de frottement est définie à partir de la contrainte de cisaillement de surface τp, estimée à partir de la force de traînée. Différentes expériences montrent que dans le cas d’une CL se développant au-dessus d’une surface fortement rugueuse, il existe une différence significative entre les valeurs de τm et τp. Par exemple, Iyengar et Farell (2001) déterminent τpm = 1, 18 et Cheng et al. (2007) obtiennent τpm = 1, 26. Donc si l’on utilise uniquement la valeur de la contrainte moyenne de cisaillement mesurée dans la SCI pour estimer la vitesse de frottement, u sera sous-estimée d’environ 10% (en se basant sur les deux exemples).

Dans le cas présent, nous ne possédons pas de dispositif expérimental permettant d’estimer la force de traînée (D). Toutefois, notre méthode pour estimer la vitesse de frottement u permet de nous en af-franchir.

En toute première approximation, nous utilisons le profil vertical de la contrainte moyenne de cisaille-mentuw

mesurée par anémométrie à fils chauds croisés bien au-dessus de la SCI, où l’intensité de la turbulence est plus faible qu’à proximité de la canopée et donc où la qualité de la mesure est bonne. Le modèle proposé par Haan et Rotach (1998), d’après Rotach (2001), défini par l’équation 3.2.1 traduit la décroissance linéaire deuw

en fonction de l’altitude à partir du sommet de la SCI. −uw

(z) = u∗2

1 −zδ (3.2.1)

Ce modèle ne prend pas en compte la SCR, mais nous savons que la valeur deuw

y croît en fonction de l’altitude (Rotach, 1993a). Elle devient maximale au sommet de la SCR (pour une canopée de type urbain) et reste théoriquement constante dans la SCI. La vitesse de frottement est donc déterminée à l’aide de la valeur maximale telle que u∗2= −uw

max= −uw

a) b) regression XHWA −uw  [m s−1]2 z/ h z/ δ 18 10 2 0.2 0.15 0.1 0.05 0 1 0.8 0.6 0.4 0.2 regression PIV 2C XZ PIV 3C XZ −uw  [m s−1]2 z/ h z/ δ 5 2 0.2 0.15 0.1 0.05 0 0.3 0.2 0.1

Figure 3.2.1 – Profils verticaux de −uw

obtenus à partir des mesures : a) par anémométrie à fils chauds croisés (XHWA) et b) par PIV 2C et 3C, dans le plan XZ.

Le profil vertical deuw

, obtenu à l’aide de la mesure par anémométrie à fils chauds croisés, présente effectivement une évolution linéaire pour 10 < z/h < 18 (fig. 3.2.1.a). D’après le modèle de Haan et Rotach (1998), la pente de la droite permet directement d’estimer la valeur de u. Ainsi, nous obtenons en première approximation u = 0, 37 m s−1. Cette méthode utilise uniquement τm, supposant que la valeur de uw

est constante dans la SCI (ce qui n’est pas le cas en soufflerie), et ne prend pas en compte le gradient longitudinal de pression qui semble être lié au gradient de la contrainte de cisaillement (Cheng et al., 2007).

Grâce aux mesures par PIV 3C, nous disposons d’une mesure de uw

bien plus précise sur toute la CS (fig. 3.2.1.b). Ce profil met en évidence une région à flux quasi-constant entre z = 2 h et z = 5 h : la SCI. Les données issues de la mesure par PIV 2C semblent confirmer l’existence de cette région bien que le profil de −uw

présente plus de dispersion. Notons que le pic de −uw

situé au sommet de la canopée tel qu’on pourrait l’observer dans le cas d’une canopée végétale (Raupach et al., 1991) n’a pas de sens ici car le calcul de la moyenne spatiale ne prend pas en compte l’information située au-dessus des obstacles (dans le plan de mesure) puisque cette région n’est pas éclairée par la nappe laser. En effectuant une régression linéaire du profil de − huwi sur toute la SCI, nous estimons que duw

/dz = 0, 047 et nous mesurons −uw

= 0, 137 m2

s−2 au somment de la SCR.

Pour poursuivre la détermination de la vitesse de frottement, nous adoptons un approche utilisée par Raupach et al. (1986) et Finnigan (2000) pour une canopée végétale, et par Coceal et al. (2006) pour une canopée urbaine. Cette approche consiste à décomposer chaque composante de la vitesse instantanée ui

(où i = 1, 2 et 3 correspondant aux trois composantes de la vitesse) en trois termes :

où huii, ˜ui et u

i représentent respectivement la vitesse moyennée dans l’espace et le temps, la variation spatiale de la moyenne temporelle et la fluctuation turbulente, avec :

˜

ui = ui− huii (3.2.3)

et

u

i = ui− huii − ˜ui. (3.2.4)

En moyennant dans l’espace et le temps l’équation de la dynamique, on obtient : ρ  ∂ huii ∂t + huji∂ hu∂xii j  = − P ∂xi + ρτij ∂xj − Di (3.2.5)

où τij, le tenseur des contraintes totales s’écrit : τij = −Du iu j E − h˜uiji + ν∂ hu∂xii j (3.2.6) et Di, la somme des traînées de forme et visqueuse appliquées à une unité de masse d’air dans un volume moyen V : Di = 1 V Z S P nidS − ν V Z S ∂ui ∂n dS. (3.2.7)

Un fois l’équation 3.2.5 projetée suivant l’axe longitudinal (i = 1), sous conditions de stationnarité (du/dt = 0) et d’homogénéité (faible variation suivant x et composantes latérale et normale de la vitesse moyenne négligeables), le membre de gauche disparaît. Pour le tenseur des contraintes et le terme de traînée, on néglige les termes visqueux (Coceal et al., 2006). De l’équation 3.2.5, il ne reste que :

0 = −dPdx + ρ

∂z −uw

− h˜u ˜wi− D1. (3.2.8)

Le comportement des termes de droite varient en fonction de l’altitude. Si l’on se place entre z = 0 et z = 2 h (c’est-à-dire entre le sol et la SCR), le gradient longitudinal de pression reste constant. A z = 2 h, la contrainte moyenne de cisaillement

uw

est connue et le flux dispersif h˜u ˜wi est négligeable. A z = 0, tous les flux sont nuls. Enfin, la composante longitudinale de la traînée de forme n’existe qu’au sein de la canopée entre z = 0 et z = h. En intégrant l’équation 3.2.8 entre z = 0 et z = 2 h, et en la simplifiant à l’aide des précédentes informations, on obtient :

0 = −2hdPdx − ρuw

z = 2h− Z h

0

D1dz. (3.2.9)

Ici, la vitesse de frottement u est associée à l’action de la composante longitudinale de la traînée de forme D1 sur l’épaisseur de la canopée. Ainsi, la vitesse de frottement est estimée à l’aide de l’équation suivante : u∗2= −2h ρ dP dx −uw z = 2h. (3.2.10)

Cette démarche a été suivie pour les trois vitesses d’écoulement. Le tableau 3.2.1 regroupe les valeurs de vitesse de frottement utilisées dans la suite de ce document. Pour les trois vitesses d’écoulement, si

Ue m s−1

2, 7 5, 8 9, 2 u m s−1

0, 20 0, 40 0, 63

Tableau 3.2.1 – Estimation des vitesses de frottement en fonction de la vitesse de l’écoulement libre. l’action du gradient longitudinal de pression n’est pas prise en compte, la vitesse de frottement est systé-matiquement sous-estimée d’environ 10% (rapport τpmcorrespondant égal à 1, 17). Ceci est cohérent avec les remarques de Cheng et Castro (2002a) et Cheng et al. (2007). Enfin, dans les trois cas nous obtenons un rapport u/ Ue = 0, 07. Ceci est cohérent avec le résultat de Cheng et al. (2007) avec leur estimation de upar la mesure de la traînée de forme pour une vitesse d’écoulement Ue = 10 m s−1.