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1.2 Simulation d’une couche limite urbaine en soufflerie

1.2.2 Conditionnement de l’écoulement

1.2.2.1 Augmentation de l’épaisseur de couche limite

Parmi les premiers dispositifs utilisés pour accélérer artificiellement le mélange et donc augmenter l’épaisseur de la CL, Armitt et Counihan (1967) proposent une rangée de générateurs verticaux trian-gulaires (fig. 1.2.5.a) située en sortie du convergent, en amont des éléments de rugosité. Ces générateurs sont inclinés de quelques degrés dans le plan horizontal. D’un générateur à l’autre, l’inclinaison est fixée dans un sens puis dans l’autre. Ils fonctionnent par paires de manière à ce que leur combinaison génère une vorticité longitudinale globale nulle. L’idée initiale est d’accélérer la diffusion verticale de la forte intensité turbulence produite au niveau du sol vers l’extérieur à l’aide de larges structures tourbillon-naires longitudinales générées à la fois dans la région interne mais aussi externe de la CL, conformément aux suggestions de Townsend (1957). Counihan (1969) précise que ces tourbillons contra-rotatifs sont supposés être de taille comparable à la hauteur des générateurs et possèdent un mouvement relative-ment lent. Ainsi, avant que l’écoulerelative-ment présente les propriétés attendues et que la durée de vie des longues structures longitudinales issues du sillage des générateurs n’expire, un mélange suffisant doit être assuré. La formation et la destruction des structures en proche paroi jouant un rôle majeur dans la détermination de la structure de la CL turbulente, les détails de l’écoulement de sillage en aval des générateurs n’exercent qu’un rôle secondaire (dès lors que la longueur de développement est suffisante) dans les processus existants (Barbosa et al., 2002).

Bien que les résultats de Armitt et Counihan (1967) montrent que l’écoulement simulé est représentatif d’un écoulement de CLA se développant au-dessus d’une zone rurale avec des caractéristiques et un

a) b)

Figure 1.2.5 – Schémas représentant les générateurs de Counihan de type : a) triangulaire (d’après Counihan, 1969) et b) elliptique (d’après Cermak et al., 1999).

spectre d’énergie acceptables, ils suggèrent de modifier le dispositif. En effet, contrairement aux attentes le dispositif génère une perte excessive de la quantité de mouvement dans la région interne et insuffisante dans la région externe de la CL.

Avec les générateurs elliptiques (ou elliptic wedge generator, fig. 1.2.5.b), Counihan (1969) améliore significativement l’homogénéité transversale de la distribution verticale de l’intensité turbulente. Laté-ralement, la variation de la turbulence est faible (de l’ordre de 1%) dès lors que les générateurs sont correctement espacés. Counihan (1969) combine la rangée de générateurs avec une barrière simple et une surface d’éléments de rugosité. L’écoulement généré par Counihan (1969) reste comparable à une CLA au-dessus d’une zone rurale. Afin d’obtenir une CLU, il est nécessaire de modifier la distribution des éléments de rugosité ainsi que la longueur de développement comme le montre Counihan (1971) ou modifier uniquement la hauteur de la barrière, d’après Counihan (1973).

La barrière a été développée afin de générer un déficit de quantité de mouvement supplémentaire au niveau du sol. A l’origine, celle-ci est conçue plane et disposée sur toute la largeur de la section de la soufflerie, en sortie de convergent, en amont des générateurs verticaux (Armitt et Counihan, 1967). Il existe cependant des interactions entre la barrière et les générateurs. En effet, le déficit de quantité de mouvement généré par une barrière plane est réduit à proximité des axes centraux des générateurs elliptiques (lorsque ces derniers sont placés en aval de la barrière) à cause du fort mélange turbulent existant dans ces régions (Counihan, 1969, 1973). Pour compenser cet effet, il est nécessaire d’augmenter localement la hauteur de la barrière dans l’alignement de chaque générateur. Cette correction se traduit par le développement des barrières crénelées (fig. 1.2.6) ou en dents de scie. Parallèlement, Cook (1973) améliore l’action de sa barrière plane (placée en aval de sa grille) en effectuant des perforations sur la partie supérieure de celle-ci.

Figure 1.2.6 – Exemples de barrières crénelées utilisées par Kozmar (2010) et dimensionnées pour la simulation d’une CLU suivant trois facteurs d’échelle différents.

couche limite est principalement pilotée par la hauteur de barrière. Bien que la barrière soit à l’origine d’une "turbulence de fond", les éléments de rugosité (de par leur hauteur ; à densité et arrangement fixés) sont majoritairement responsables de la turbulence dans la partie basse de la CL et influencent directement la longueur de rugosité. Donc, comme les générateurs verticaux, la barrière participe à l’ac-célération du mélange et à l’épaississement de la couche limite comme le ferait un supplément de longueur de développement.

Parallèlement aux générateurs proposés par Counihan, Standen (1972) propose d’utiliser une autre forme de générateur vertical : le générateur en flèche (ou spire, fig. 1.2.7.a). L’utilisation des spires de Standen ne nécessite pas la mise en place de barrière car la forme des générateurs est conçue de manière à ce que la partie basse participe au déficit de quantité de mouvement au niveau du sol. Il en va de même pour les spires de Irwin (1981). Une forme modifiée de spire de Standen, un simple triangle (fig. 1.2.7.b), est étudiée par Irwin (1979). Celui-ci propose une formulation relativement simple permettant de concevoir ces spires afin de simuler une CLA pour une large gamme de surface rugueuse. Concrètement, cette for-mulation fournit les dimensions des générateurs et l’espacement entre ces derniers pour une épaisseur de CL et une rugosité (représentative d’une nature spécifique de terrain) souhaitées. Les équations suivantes (eqn. 1.2.5, 1.2.6, 1.2.7 et 1.2.8) représentent la version simplifiée de la formulation de Irwin (1979). On suppose que l’écoulement en amont de la rangée de spires est homogène et circulant dans une veine de développement de section rectangulaire (ou carrée). De plus, le profil vertical de la vitesse moyenne longitudinale u de la CL en aval des générateurs est supposé suivre une loi de puissance (eqn. 1.2.4) où δ et α correspondent respectivement à l’épaisseur de la CL et l’exposant.

u (z) u (δ) =  z δ α (1.2.4)

a) b)

Figure 1.2.7 – Schémas représentant les générateurs en flèche dans sa version : a) originale (d’après Cermak et al., 1999) et b) modifiée (d’après Irwin, 1981).

De manière conventionnelle, δ = z(u = 0,99 Ue)où Uereprésente la vitesse de l’écoulement libre. La hauteur des spires H est déterminée à partir de δ et α avec la relation 1.2.5.

H = 1, 39 δ

1 + α/2 (1.2.5)

La largeur b du triangle faisant face à l’écoulement s’obtient avec la relation suivante : b H = 0, 5 (1 + α/2) [ψ (Hs/δ) / (1 + ψ)] , (1.2.6) avec ψ = β[2/ (1 + 2α)] + β − [1, 13α/ (1 + α) (1 + α/2)] (1 − β)2 (1.2.7) et β = α (δ/Hs) 1 + α (1.2.8)

où Hs correspond à la hauteur de la section de la veine.

Irwin (1981) suggère que la longueur de développement doit être égale (au minimum) à six fois la hauteur des spires (H) afin d’obtenir une CL en équilibre. Pour cela, il est nécessaire d’espacer les différentes spires d’une distance égale à H/2. Si les spires sont légèrement plus écartées, on suppose qu’une longueur de développement supérieure à 6H est nécessaire afin d’obtenir un mélange suffisant. De plus, la longueur de développement préconisée par ce modèle est dépendante des éléments de rugosité que l’on combine avec la rangée de spires. Rappelons que la dynamique de la partie basse de l’écoulement est sensible au dimensionnement et à la distribution des éléments de rugosité. Si le dimensionnement de ces derniers ne respecte pas les domaines de validité des équations empiriques de ce modèle, il devient difficile de prédire les effets sur l’écoulement. Si la longueur de développement de la CL est limitée par la longueur de la

soufflerie, il est d’autant plus indispensable d’utiliser des éléments de rugosité ayant une taille adéquate. Toutefois, si la soufflerie est longue et que les dimensions des éléments de rugosité sont inadaptées aux générateurs, on peut supposer que la partie basse de la CL a néanmoins le temps d’atteindre un état d’équilibre. Face à tant de cas de figure, seuls des essais permettent de statuer.

Irwin (1981) utilise la relation de Gartshore (1973) faisant le lien entre le coefficient de frottement pariétal Cf et l’exposant de la loi de puissance α représentatif de la nature du terrain que l’on souhaite simuler (eqn. 1.2.9). Cf = 0, 136  α 1 + α 2 (1.2.9) A l’aide des travaux de Wooding et al. (1973), il est ensuite possible de spécifier la taille des éléments de rugosité (de forme cubique) par rapport à l’épaisseur de la CL telle que :

h δ = exp " 2 3ln  e δ  − 0, 1161  2 Cf + 2, 05