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1.3 Dynamique d’une couche limite sur paroi rugueuse

1.3.3 Couplage entre les écoulements de CLA et de canopée

Pour une CL sur paroi plane à nombre de Reynolds élevé, le spectre d’énergie de la région interne fait apparaître deux pics correspondant à des structures de petites et grandes échelles, en proche paroi et dans la zone logarithmique, respectivement (fig. 1.3.15). Plusieurs études montrent que les grandes échelles

Figure1.3.15 – Spectre d’énergie de la composante longitudinale de la fluctuation de vitesse à plusieurs altitudes faisant apparaître deux principaux pics, selon Hutchins et Marusic (2007b).

influencent le comportement de l’écoulement en proche paroi en fonction du nombre de Reynolds (par exemple, Hutchins et Marusic, 2007b). Il est suggéré que l’amplitude des petites échelles est modulée par les grandes échelles. De plus, Mathis et al. (2009) constatent que le pic associé aux grandes échelles (voire très grandes échelles) se situe dans la zone logarithmique. Bien qu’il n’y ait pas encore suffisamment de preuves, les VLSM sont considérés comme ayant une part active dans cette influence de l’écoulement de proche paroi dès lors qu’ils contribuent de manière significative à la contrainte de cisaillement (Guala et al., 2006). C’est aussi ce que suggèrent Inagaki et al. (2012) pour un écoulement de CL au-dessus d’un modèle de canopée urbaine avec un agencement de cubes en carré (fig. 1.3.16). Des mouvements transversaux convergents apparaissant entre les cubes, des accélérations de la vitesse le long des "rues", ainsi que des événements de type flushing motion et tourbillons de cavité semblent être liés aux structures turbulentes organisées, quasi-longitudinales, caractérisées par une faible quantité de mouvement et situées au-dessus de la canopée au niveau de la zone logarithmique (SCI). Les auteurs suggèrent qu’il existe une forme de pilotage entre les écoulements de CL et de canopée suivant un sens "haut-bas" (Hunt et Morrison, 2000 ; Marusic et al., 2010).

Pour un modèle de canopée urbaine en quinconce, Coceal et al. (2007a) montrent que l’important lâcher de structures au sommet des obstacles interagit à la fois avec les structures tourbillonnaires de la CL pouvant influencer l’écoulement de CL et sur les structures au sein de la canopée ayant donc une influence sur l’écoulement de canopée. Coceal et al. (2007a) résument les différentes dynamiques observées dans et au-dessus de la canopée avec le modèle de la figure 1.3.17. Ainsi, le battement des couches de cisaillement en aval des cubes semble jouer un rôle important dans les échanges verticaux entre la canopée et la couche limite. Toutefois, il ne semble pas exister d’éléments permettant de comprendre le pilotage de ce battement qui semble s’effectuer dans les deux sens.

Figure 1.3.16 – Superpositions des distributions horizontales des fluctuations de vitesse de la compo-sante transversale (en couleur) dans la canopée (z = 0, 125 h) et longitudinale (en gris), dans la région de faible quantité de mouvement située au-dessus de la canopée (z = 2 h), selon Inagaki et al. (2012).

Figure1.3.17 – Modèle conceptuel résumant la dynamique de l’écoulement instationnaire de canopée, de l’interface et de la partie basse de la CL, selon Coceal et al. (2007a).

Certains éléments tendent à lier cette dynamique aux dimensions des obstacles présents dans la canopée. En effet, malgré de nombreuses similitudes avec une CL se développant au-dessus d’une canopée végétale (Poggi et al., 2004), le comportement de l’écoulement au sein de la canopée urbaine (et dans la SCR) est significativement différent. La dynamique au niveau de la canopée végétale peut être comparée à celle d’une couche de mélange avec d’un coté l’atmosphère et de l’autre une région poreuse avec une vitesse d’écoulement ralentie. Le modèle phénoménologique de Poggi et al. (2004) montre l’existence des différentes échelles de structures tourbillonnaires en fonction de l’altitude (fig. 1.3.18). Or, pour une canopée urbaine dense, il semble n’y avoir qu’une seule échelle de structure (Coceal et al., 2007a).

Figure 1.3.18 – Modèle phénoménologique pour une CL se développant au-dessus d’un modèle de canopée végétale d’après Poggi et al. (2004). Région I : présence de tourbillons de petite taille associés avec les rues de von Kármán dans la partie inférieure de la canopée. Région II : superposition de structures tourbillonnaires de la canopée inférieure, de CL et de type Kelvin-Helmholtz, au sommet de la canopée. Région III : dominance de tourbillons de CL classique proportionnels à (z − d).

Dispositif expérimental et procédures

de mesure

Le premier objectif de cette étude est de générer en soufflerie un écoulement que l’on peut assimi-ler à une CLU. En se basant sur les différentes méthodes de simulation existantes (présentées dans le précédent chapitre), le dispositif expérimental et les choix en matière de métrologie sont présentés dans ce chapitre. La soufflerie ainsi que la technique de modélisation de la CLU sont d’abord décrites. Puis, les caractéristiques et le paramétrage de l’instrumentation anémométrique sont abordés. L’utilisation de l’anémométrie à fils chauds croisés a pour objectif la caractérisation de la CL générée. La Vélocimétrie par Images de Particules (PIV) permet, quant à elle, une analyse statistique spatiale de l’écoulement à l’interface entre la canopée urbaine et l’atmosphère. La présentation de ces deux métrologies ne se veut en aucun cas exhaustive et le lecteur pourra trouver dans les références bibliographiques les compléments nécessaires. Enfin, les différents outils d’analyse statistique utilisés au cours de cette étude sont présentés.

2.1 Soufflerie atmosphérique

La simulation de la CLA est réalisée à l’aide de la soufflerie atmosphérique du LHEEA (ex-LMF) de l’ECN (fig. 2.1.1) constituant une des plateformes expérimentales de l’IRSTV. Cette soufflerie de type Eiffel est un circuit ouvert en aspiration spécialement dédiée à la simulation des écoulements de type CLA. Elle est installée dans un hall d’expériences d’un volume d’environ 12 000 m3. Cette soufflerie est principalement constituée d’une chambre de tranquillisation, d’un convergent, d’une veine de dévelop-pement et d’un groupe moto-ventilateur. Elle présente une longueur totale de 35, 7 m et une hauteur maximale de 4, 5 m.

La chambre de tranquillisation possède une section rectangulaire de 5 m de large sur 4 m de haut. Elle est composée d’un filtre à son entrée, d’un nid d’abeille et d’un grillage. Le rôle du filtre est de limiter la présence, au sein de l’écoulement, de particules de gros diamètre provenant du hall d’expériences. Le nid

Figure2.1.1 – Photographie de la soufflerie atmosphérique du LHEEA.

d’abeille permet de canaliser l’écoulement et de limiter la taille des tourbillons à grande échelle à l’entrée du convergent. Enfin, la grille comporte de fines mailles dont la fonction est d’homogénéiser l’écoulement. L’écoulement passant par le convergent est accéléré. Le convergent permet aussi d’atténuer la turbulence résiduelle. A l’exception des régions où des couches limites se développent naturellement sur les parois, l’écoulement pénétrant dans la veine de développement est considéré comme homogène.

La veine de développement représente un assemblage de 8 tronçons sur pilotis permettant un libre accès sous toute la longueur de la veine. La longueur totale de cette veine est de 24 m avec une section carrée de 2 m × 2 m. L’ensemble des parois latérales ainsi que le plafond sont transparents facilitant l’accès optique pour une mesure PIV. Comme le montre la figure 2.1.1, les vitres non-utilisées sont recouvertes de rideaux noirs, hermétiques à la lumière. La technique de mesure PIV utilisée au cours de cette étude comprend un laser de classe 4. Les rideaux ont pour rôle de sécuriser le hall de toutes fuites de lumière du laser. Du point de vue des expérimentations, ces rideaux évitent aussi que la lumière provenant de l’extérieur de la veine ne vienne parasiter les mesures par PIV. Suivant le sens de l’écoulement (de droite vers la gauche sur la figure 2.1.1), le centre de l’avant dernier tronçon de cette veine correspond à la zone d’étude. Celle-ci possède un plancher amovible et un plafond motorisé ajustable jusqu’à 0, 30 m pour pallier un blocage aérodynamique de l’écoulement dû à une maquette trop volumineuse. Afin de faciliter les mesures de PIV, des modules étanches à la lumière ont été fabriqués et greffés latéralement ainsi qu’au-dessous de la zone d’étude, facilitant l’installation du système optique et sa manipulation. Enfin, l’installation d’équipements à l’intérieur de la veine est facilitée par la présence de portes en sortie de convergent ainsi qu’en amont et en aval de la section d’étude.

Au niveau du groupe moto-ventilateur, le ventilateur centrifuge est entraîné par un moteur électrique d’une puissance de 45 kW , permettant d’atteindre une vitesse d’écoulement de plus de 10 m s−1. Le mo-teur est piloté par un variamo-teur de vitesse qui assure l’asservissement de la vitesse de l’écoulement. Ce

système peut être sensible aux conditions thermique et hygrométrique du hall. Toutefois, les différentes expériences menées au cours de cette étude ont montrés une bonne répétitivité de la simulation. Cette installation ne possède pas de régulation de la température que ce soit à l’intérieur de la veine de développement ou dans le hall. Toutefois, afin de limiter une possible stratification thermique, l’air du hall est systématiquement brassé pendant plusieurs dizaines de minutes à l’aide de la soufflerie. Un contrôle par sonde de température est effectué et aucune expérience n’est amorcée avant stabilisation de la température. De plus, dans le cadre de la campagne de mesures par anémométrie à fils chauds croisés, la dérive en température (de l’écoulement) est prise en compte dans l’estimation des composantes de vitesse. La perte de charge due au frottement de l’air sur les parois de la veine et le déficit de débit dû aux différentes couches limites se développant au-dessus des parois génère un gradient de pression constant après quelques mètres. Ce sujet sera plus largement abordé dans la section 3.1.1.

Générateurs verticaux

Barrière

0 0,75 1 19,5

Modèle de canopée urbaine Vent x (m) Zone d'étude -mesures PIV Tube de Pitot de référence 17,25 15 Section mesures fils chauds Convergent x z Filtres Nid d'abeilles Grillage

Figure2.2.1 – Schéma de l’installation à l’intérieur de la veine de développement (vue de profil).