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Chapitre 3 : Les essais cliniques et le dossier du médicament expérimental

I. Les essais cliniques

A.

Description

1. Structure d’un essai clinique

Un essai clinique est une recherche biomédicale organisée et pratiquée sur l’Homme en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales.

Un essai peut se faire chez le volontaire malade ou le volontaire sain. Selon la définition de l’ANSM (81), l’objectif des essais cliniques portant sur les médicaments est, selon le cas, « d'établir ou de vérifier certaines données pharmacocinétiques (modalités de l'absorption, de la distribution, du métabolisme et de l'excrétion du médicament), pharmacodynamiques (mécanisme d'action du médicament notamment) et thérapeutiques (efficacité et tolérance) d'un nouveau médicament ou d'une nouvelle façon d'utiliser un traitement connu ».

L’organisation d’un essai clinique dans le cadre d’un médicament visant à être administré chez l’Homme se découpe en plusieurs phases comme suit :

- Une phase d’essai pré-clinique - Quatre phases cliniques

Phase préclinique

Cette étape permet l’évaluation de l’intérêt de nouvelles molécules dans une pathologie. Durant cette phase sont réalisés des tests in vitro sur des modèles cellulaires ainsi que des tests in vivo chez l’animal. La plupart du temps, les tests sont réalisés chez le rongeur (souris, rat, gerbille) mais il arrive qu’on utilise le modèle porcin du fait de sa proximité biologique relative avec l’homme. Les administrations chez le primate ne sont réalisées que pour les molécules ayant montré leur intérêt. Lors de ces expérimentations animales, plusieurs types d’études sont réalisés : pharmacologiques, pharmacocinétiques et toxicologiques notamment. Ces études vont pouvoir donner des informations aux chercheurs sur :

- Le mécanisme d’action et l’activité de la molécule candidate - Le comportement de la molécule dans un organisme

- Les organes cibles et doses toxiques de la molécule

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Ces études permettent de déterminer les doses à administrer chez l’homme lors de l’essai clinique et donnent un premier aperçu des effets indésirables potentiels de la molécule d’intérêt.

Phase 1

Il s’agit de la première phase où la molécule testée est administrée à l’homme. A l’exception de médicaments anti-cancéreux, l’administration de la substance active à tester se fait chez des volontaires sains dans des locaux agréés par l’ANSM tels que des centres d’investigations cliniques. Les objectifs d’une étude phase 1 sont :

- L’élaboration primaire d’une relation exposition-effet de la molécule testée.

- Evaluation de la toxicité chez l’homme et définissant la dose maximale tolérée. Celle- ci se fait en respectant une procédure d’escalade de doses.

En résumé, la phase 1 d’un essai clinique sert à évaluer à court terme la sécurité d’emploi de la molécule et à établir un premier profil pharmacocinétique/pharmacodynamique.

Par ailleurs, au cours de la phase 1, il est possible de réaliser une étude exploratoire. Celle-ci vise à déterminer précocement les effets pharmacocinétiques et pharmacodynamiques de la molécule d’intérêt. Ces tests s’effectuent avant l’escalade de dose et l’étude de la tolérance du médicament. Ils incluent un nombre limité de patients ou de sujets sains, qui seront exposés à la nouvelle substance à dose réduite et pendant une courte période. Cette étape permet d’éliminer rapidement une molécule candidate ayant un mauvais profil pharmacocinétique ou pharmacodynamique. Compte-tenu des prérequis moins exigeants que pour une étude phase 1, une étude exploratoire ne peut pas se substituer à une étude phase 1 (82).

Phase 2

Lors de cette phase, la molécule évaluée est administrée à des patients ou à des volontaires sains (selon la pathologie cible). La population sélectionnée (nombre de sujets limité) est homogène selon les critères définis par l’étude. Une ou plusieurs doses de la molécule candidate sont administrées, en une fois ou en doses répétées. L’objectif principal de la phase 2 est d’évaluer plus précisément le profil pharmacocinétique et pharmacodynamique de la molécule afin de déterminer la posologie optimale en substance active. L’efficacité et la tolérance de la molécule est évaluée et comparée à un placebo. Les effets indésirables les plus fréquents sont mis en évidence à ce moment-là. Lors de cette phase, il est également possible d’identifier certaines interactions médicamenteuses et pharmacocinétiques de la nouvelle molécule.

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Phase 3

La phase 3 consiste à évaluer la nouvelle molécule chez une population de patients atteints de la maladie contre laquelle elle est destinée ; la phase 3 permet de démontrer l’intérêt de la molécule chez le malade. Afin de récolter un maximum de données et pour que l’étude soit la plus fiable possible, un grand échantillon de patients est sélectionné (plusieurs milliers). L’évaluation du rapport bénéfice/risque du nouveau traitement est effectué en comparant l’efficacité du traitement par rapport au placebo et/ou au(x) traitement(s) de référence s’il(s) en existe(nt). L’étude de phase 3 permet l’évaluation à moyen terme de la pharmacodynamie de la molécule, elle permet également d’ajuster la posologie et le mode d’administration du médicament si besoin. Enfin, elle permet de confirmer les données de sécurité d’emploi du nouveau traitement, établies lors des phases précédentes. A l’issue d’une phase 3 concluante, le laboratoire développant la molécule candidate peut faire une demande de dossier d’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM).

Phase 4 :

Les études de phase 4 sont réalisées après la commercialisation du médicament. Elles font suite à l’utilisation du médicament par un très grand nombre de patients et dans ses conditions réelles d’utilisation. Les études de phases 4 permettent d’affiner l’utilisation du médicament, principalement dans des populations particulières de patients (sujets âgés, pédiatrie, insuffisants rénaux,…), d’adapter la posologie du médicament si nécessaire ou bien de compléter les connaissances sur son mécanisme d’action. La phase 4 d’une étude clinique permet également de détecter des effets indésirables rares du médicament (du fait de sa large utilisation) ; les professionnels de santé au contact des patients et les Centres de Pharmacovigilance jouent un rôle important dans la mise en évidence de ces effets indésirables.

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2. Législation des essais cliniques

Afin d’éviter les dérives et de sécuriser au maximum la prise en charge du patient lors d’un essai clinique, le droit Français a évolué dans le but de pouvoir suivre l’évolution des protocoles mis en place durant les études. De fait, plusieurs textes de lois encadrent les essais cliniques et la recherche biomédicale :

- La loi Huriet-Sérusclat (n°88-138 du 20 décembre 1988) relative à la protection des personnes se prêtant à des recherches biomédicales. C’est la première loi en France qui cadre la protection des personnes, permet l’appréciation du rapport bénéfice/risque encouru en participant à l’essai. Elle décrit également l’importance du consentement éclairé des participants à l’essai clinique. C’est dans cette loi que l’on parle de la création d’un comité consultatif évaluant les protocoles de recherche avant leur mise en place (CCPPRB : Comité consultatif de protection des personnes dans la recherche biomédicale).

- La directive Européenne n°2001/20/CE. Parue en 2001, elle modifie la loi relative aux essais cliniques de médicaments. Elle cherche à harmoniser les dispositions législatives, réglementaires et administratives des états membres de l’Union Européenne. Les essais cliniques doivent respecter les Bonnes Pratiques Cliniques (BPC). Les CCPPRB deviennent des CPP (Comité de Protection des Personnes) et sont obligatoires.

- Cette directive est appliquée en France via la Loi Santé Publique n°2004-806 (relative à la politique de santé fixant les conditions des recherches biomédicales en vue du développement des connaissances biologiques et médicales). Les premiers décrets et arrêtés ont été promulgués en 2006. Cette loi pose les bases de la recherche biomédicale et de ses conditions de réalisation. Elle décrit notamment la responsabilité et le rôle du promoteur de l’étude. Les règles de protection des personnes participant à l’étude sont clarifiées (informations et recueil du consentement, indemnisation des contraintes subies). Par ailleurs, la mise en place d’un répertoire public des recherches biomédicales thérapeutiques est faite (EUDRACT et EUDRAVIGILANCE). De plus, cette loi annonce que le démarrage d’un essai clinique n’est possible que si ANSM et le CPP ont rendu un avis favorable. De ce fait, le rôle du CPP n’est plus consultatif mais obligatoire. Le rôle de l’ANSM et du CPP concernant un essai clinique est précisé :

o L’ANSM est responsable de la qualité et de la sécurité des produits et techniques utilisées lors de l’essai. Elle est également responsable de la mise en œuvre du système de vigilance des essais cliniques et prend des mesures pour assurer la protection des patients volontaires. Elle a le pouvoir de stopper les recherches. Elle assure également le suivi et l’évaluation de la sécurité pendant et après la fin de l’essai.

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o Le CPP (dont le rôle est décrit dans le CSP (83)) s'assure de la pertinence générale des projets, de l'adéquation entre les objectifs poursuivis et les moyens mis en œuvre, ainsi que de la qualification du ou des investigateurs. Il doit veiller à ce que le participant à la recherche reçoive une information adaptée sur les risques et bénéfices de la recherche, et doit veiller aux modalités de recueil du consentement.

Par ailleurs, la directive européenne 2013/59/EURATOM fixe les bases relatives à la protection sanitaire contre les dangers résultant de l’exposition aux rayonnements ionisants. Sa retranscription n’a pas encore été faite au niveau du droit Français, c’est donc le décret 2003-462 qui est en vigueur actuellement.

B.

Quelle réglementation pour un essai clinique avec