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Chapitre 3 : Les essais cliniques et le dossier du médicament expérimental

C. Contrôle qualité du produit fini

 Identification : Dans le cas de notre marquage, le 68Ga-DOTA-Raft-RGD a un temps de

rétention de 19,5 ± 0,1 minutes. Le 68Ga libre passe directement dans la colonne sans être

retenu et on observe son pic de radioactivité à 1,30 ± 0,1 minutes. Ces résultats sont cohérents avec les spectres de référence que nous avons obtenus par l’équipe de AAA. A 14,10 minutes et sur le spectre UV, nous observons un pic de grande amplitude qui absorbe plus que le 68Ga-DOTA-Raft-RGD à la longueur d’onde utilisée. Après analyse, nous avons

conclu qu’il s’agissait de l’acide gentisique.

 Le contrôle du pH du produit fini est exigé à la fin de la fabrication. Les recommandations données par AAA sont d’obtenir un pH compris entre 3,2 et 3,8. La méthode utilisée lors de nos marquages est le papier pH. Ce dernier a pour avantage d’être pratique et facile d’utilisation et il reste efficace dans une utilisation pour les contrôles quotidiens de routine. Cependant, le papier pH ne dispose évidemment pas de la sensibilité nécessaire pour s’assurer que le pH de la solution est compris dans les limites fixées par AAA. L’acquisition d’un pH mètre par le service permettrait de se conformer aux exigences du laboratoire et ainsi de pouvoir produire le médicament selon les normes BPP.

Il est recommandé d’injecter le produit, dont le pH est plutôt acide, lentement et avec un volume faible pour améliorer la tolérance chez le sujet. C’est le cas de notre médicament

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radiopharmaceutique dont le volume de la solution finale est d’environ 1,6 mL. L’entreprise AAA nous a informée qu’elle avait réalisé des tests de tolérance au niveau du site d’injection, en suivant les Bonnes Pratiques de Laboratoire, et qu’aucun effet indésirable n’avait été noté. Les autres tests réalisés sur les souris ont montré les mêmes résultats et montrent que le sang agit en tant que tampon physiologique. Pour l’administration chez l’Homme, le pH d’injection optimal est situé entre 4,5 et 8. Il sera envisageable de diluer notre médicament avec du sérum physiologique ou un autre composé efficace pour augmenter le pH et ainsi améliorer la tolérance à l’injection.

 Activité : l’activité obtenue après radiomarquage est de 370 ± 25 MBq à l’heure de fabrication. L’activité éluée est de 420 ± 10 MBq, ce qui correspond à un rendement d’élution inférieur au rendement annoncé du générateur qui est d’environ 70%. Le Gallium- 68 ayant une demi-vie très courte (67,7 minutes), l’activité obtenue décroit rapidement. L’activité du générateur étant faible, la perte d’activité représente une proportion non négligeable.

 Activité volumique : L’activité mesurée après la phase de chauffage de l’échantillon est de 370 MBq en moyenne, pour une activité volumique de 231 MBq/mL. En se basant sur plusieurs études réalisées précédemment chez l’humain, avec des molécules marquées au

68Ga, on peut constater que l’activité injectée au patient est très souvent comprise entre 100

et 250 MBq (97–103) et pour les études sur l’animal cette activité est plus faible, de l’ordre de quelques dizaines de MBq(74). Dans le cadre d’études cliniques, à moins de ne traiter qu’un seul patient par session de marquage, il sera probablement nécessaire d’augmenter l’activité volumique. Une des options qui se présente est de changer de générateur et d’en choisir un fournissant une activité dans l’éluat plus importante. Ceci entrainera également l’ajustement du protocole de marquage en augmentant les quantités des différents réactifs pour maintenir un bon rendement.

 Activité spécifique : Elle représente l’activité du 68Ga-DOTA-Raft-RGD par quantité de

peptide présent. Dans notre cas, la quantité maximum de peptide disponible est de 150 µg. Cependant, il est très peu probable que la totalité du peptide soit recueillie à la fin du marquage à cause des différentes manipulations auxquelles est soumis l’échantillon (perte au niveau de l’embout de la micropipette ou sur les parois des flacons utilisés…). De plus le rendement de marquage n’est pas de 100% : la totalité du 68Ga injecté dans la solution de

marquage ne se fixe pas sur le peptide. Afin d’estimer cette grandeur, nous utilisons la CLHP couplée au détecteur à UV. Après avoir réalisé une gamme d’absorbance du DOTA-Raft-RGD, il est possible de déduire la quantité de peptide présent dans l’échantillon analysé.

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Cependant, l’absorbance en UV du peptide étant trop faible, il n’a pas été possible calculer cette activité spécifique.

 Pureté radionucléidique : Ce contrôle permet de confirmer si le radioélément présent dans l’échantillon est bien du 68Ga. Les principales sources d’impuretés et de contamination

apparaissent lors de production du Gallium-68. Le générateur Galli Eo™ est certifié conforme aux GMP. Le fabricant assure que le pourcentage de 68Ga présent dans l’éluat est au moins

égal à 99,9% et que la proportion de 68Ge est au maximum égale à 0,001%, qui est la

quantité maximale exigée par la Pharmacopée Européenne. Les tests sont donc à effectuer sur la préparation finale. Pour ce faire, la méthode de référence utilisée est la spectrométrie gamma. Selon les recommandations de la Pharmacopée Européenne, pour identifier le Gallium-68, le spectromètre doit mettre en évidence les raies gamma d’énergie de 511 keV et de 1077 keV. Les résultats obtenus sont conformes aux normes de la Pharmacopée.

 Pureté radiochimique : il s’agit de la mesure de l’activité du 68Ga-DOTA-Raft-RGD par

rapport à l’activité du 68Ga libre et celle des autres impuretés. Cette analyse est effectuée

par CCM ou par CLHP (Annexes 4 et 5), cette dernière étant la technique de référence. Nos résultats montrent que la pureté radiochimique de notre solution de marquage est de 90,69% selon la méthode de la CLHP et des 92,12% selon la méthode de la CCM.

La chromatographie sur couche mince permet d’estimer la pureté radiochimique de l’échantillon mais pas de manière aussi précise que la CLHP car moins résolutive. Dans le cas de notre radiomarquage, le Gallium-68 libre reste au niveau du dépôt tandis que le 68Ga fixé

au DOTA-Raft-RGD migre au front de solvant. C’est ce que nous observons lors de notre test (Annexe 2). En routine, c’est la technique le plus souvent mis en œuvre pour le contrôle du marquage car beaucoup plus simple et rapide à mettre en œuvre que la CLHP, elle nécessite en plus de faibles quantités de produit donc moins de déchets et aussi expose à de faibles doses d’irradiation.

Le contrôle par CLHP de ce paramètre permet de mettre en évidence les différentes impuretés radioactives qui peuvent se former au cours de la réaction. Ces impuretés peuvent être des produits de dégradation qui se forment lors des variations de pH, de température, d’exposition à la lumière ou bien suite à leur oxydation. Ainsi, il est possible d’identifier les pics d’intérêts et d’estimer la qualité du marquage. Le premier pic observé à 1,30 min est le Gallium-68 libre. Il représente une proportion de 3,35% ± 1,2% de la radioactivité totale de l’échantillon. Lors de notre radiomarquage, nous observons un pic de radioactivité juste avant celui du 68Ga-DOTA-Raft-RGD et qui représente 4,85% ± 0,1% de la

radioactivité totale. Nous pensons qu’il s’agit d’un produit de dégradation fixant le Gallium68 et qui apparait au cours du processus de fabrication (cf annexe 5). De plus, cette

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impureté n’absorbe pas en UV car nous ne constatons aucune modification sur le spectre UV à ce temps de rétention. Cette impureté est également retrouvée sur le spectre de référence fourni par AAA. Des études complémentaires devront être réalisées pour identifier de façon précise ce composé. Dans la mesure où la pureté radiochimique de la solution de marquage reste supérieure à 90% et qu’aucune des impuretés ne dépasse un taux de plus de 5%, nous avons estimé que les radiomarquages avaient respecté les exigences que nous nous étions fixées.

 Pureté chimique : les différents matériels utilisés (micropipettes, flacons, …) lors du processus de marquage sont les principales sources de contamination chimique. Afin de minimiser les risques de contamination métallique, il est conseillé d’utiliser du matériel traité dans le but de ne contenir aucune impureté. Par ailleurs, les impuretés métalliques recherchées (Fer, Cuivre, autres isotopes du Gallium, Nickel, Plomb et Zinc) dans l’éluat de gallium68 du générateur choisi sont certifiées inférieures à 10 µg/GBq, ce qui est conforme également à la Pharmacopée Européenne(94). La Radiopharmacie ne dispose pas du matériel nécessaire pour réaliser ces tests d’identification d’impuretés et pour s’assurer de la non contamination de l’échantillon durant le marquage. C’est pourquoi nous avons choisi d’utiliser du matériel traité pour ne pas relarguer d’impuretés métalliques (seringues, flacons, aiguilles, …).

Les variations de l’absorbance observées entre 1,5 et 2 minutes ainsi que entre 28 et 33 minutes sont attribuées aux solvants. Dans le spectre UV obtenu nous observons également 2 pics de plus faible amplitude que celui du 68Ga-DOTA-Raft-RGD et qui apparaissent juste

après celui-ci. Or nous n’observons pas ces pics lors de l’analyse du DOTA-Raft-RGD non marqué. De plus, ces impuretés ne fixent pas le 68Ga car nous n’observons aucune

augmentation de radioactivité à ce moment-là. Cependant, le pic UV de l’acide gentisique écrase les autres pics du spectre, ce qui rend difficilement interprétable les pics de faible intensité et notamment celui du 68Ga-DOTA-Raft-RGD. Nous n’avons pas encore trouvé les

conditions opératoires permettant de nous affranchir du pic de l’acide gentisique. Une fois ce pic éliminé, nous pourrons analyser plus finement le spectre UV et quantifier les pics obtenus également. Il sera alors également possible de calculer l’activité spécifique en établissant une courbe d’étalonnage avec le DOTA-Raft-RGD.

 Stérilité et apyrogénicité. En vue d’une administration chez l’homme, le médicament radiopharmaceutique doit démontrer qu’il est stérile et qu’il ne contient pas de substances pyrogènes. Les substances pyrogènes constituent un groupe hétérogène de substances entrainant une augmentation de la température de l’individu et qui inclut des substances microbiennes et non microbiennes. Les plus largement connues sont les endotoxines ou

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lipopolysaccharides qui sont des composants de la paroi cellulaire des bactéries Gram négatif. Les tests effectués pour le contrôle de la stérilité du produit fini sont décrits dans la Pharmacopée. Des encensements dans différents milieux de cultures sont exigés mais le contrôle du procédé de fabrication peut être également évalué (maitrise du transfert aseptique, intégrité des membranes de filtration stérilisante le cas échéant, contrôle microbiologiques sur les enceintes blindées…). Dans le cas de notre radiomarquage, le laboratoire de bactériologie n’est pas agréé pour effectuer des tests sur des substances radioactives. De ce fait, il faudra attendre que l’échantillon ne soit plus considéré comme radioactif pour effectuer ces tests. Il faut attendre la décroissance radioactive complète de l’échantillon avant de l’envoyer au laboratoire pour contrôle. En ce qui concerne le contrôle des substances pyrogènes, il existe actuellement trois méthodes disponibles : l’injection au lapin, le test LAL (Lysat d'Amoebocytes de Limule) et le test d’activation des monocytes. Ces tests seront réalisés par une société prestataire avec le test LAL.

 Stabilité du produit fini : L’objectif est de vérifier que la qualité du médicament radioactif reste conforme à un seuil donné, au cours d’un intervalle de temps donné. La CLHP couplée au spectromètre UV et à une sonde gamma permet d’identifier la présence d’impuretés et de produits de dégradation qui peuvent se former. La période radioactive du Gallium-68 étant plutôt courte, les études de stabilité du médicament radiopharmaceutique seront donc adaptées à celle-ci. Dans l’étude de Vélikyan et al (104), l’étude de stabilité est réalisée sur la préparation après trois heures de décroissance de la solution. En effet, du fait de la demi-vie très courte du 68Ga le produit fini devra être injecté très rapidement voire

immédiatement après sa fabrication afin de conserver une activité suffisante pour pouvoir interpréter l’examen correctement. En nous basant sur ces données, nous avons décidé de réaliser l’étude de la stabilité de la préparation sur 2 heures. Cette étude est effectuée avec la CLHP sur 3 lots de préparation comme recommandé par la norme ICH Q1A R2 (105). Le produit était conservé à température ambiante, à l’abri de la lumière, dans un flacon traité pour ne pas relarguer des impuretés métalliques. D’après les recommandations émises quant à la teneur en substance active et la stabilité des produits finis, l’intervalle d’acceptation le plus souvent sélectionné est de plus ou moins 10 %. Nous avons donc décidé de définir la pureté radiochimique minimum à conserver à 90%. Toutes les mesures effectuées respectent cette limite et le pourcentage de variation maximal en pureté radiochimique obtenu reste inférieur à 1%. Ces éléments nous permettent d’affirmer que le MRP est stable sur au moins 2 heures.

La synthèse des résultats obtenus lors de ces radiomarquages est réalisée dans le tableau 19. Il reste donc à effectuer les contrôles suivants : activité spécifique, stérilité et apyrogénicité de la solution de marquage.

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Paramètres à contrôler Méthode de contrôle Résultats obtenus

identification Spectrométrie gamma pics à 511 keV et 1,077 MeV Activité activimètre 370 ± 25 MBq à l’heure de

fabrication

Activité volumique Activimètre Entre 100 et 300 MBq/mL Caractères

organoleptiques Examen visuel Solution incolore et limpide pH pH mètre ou papier

pH Entre 3 et 4

Pureté radionucléidique Spectrométrie gamma > 99,9% en 68Ga

Pureté radiochimique CCM et HPLC > 90% Stabilité CLHP Stable sur 2 heures

Tableau 19: Résumé des résultats obtenus lors des radiomarquages ; spécifications du traceur utilisé en pré-clinique