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Conclusion du chapitre 3

Chapitre 4. Caractérisations structurales par nano-diffraction des rayons X

4.6 Espace réciproque et mesure de la contrainte résiduelle selon l'axe c

Le dispositif expérimental utilisé à l'Advance Photon Source permet comme nous l'avons vu de récolter l'intensité diffractée provenant d'un point précis de l'échantillon. Cette intensité, pour un angle d'incidence ( ou ω) donné est représentée par un signal image à deux dimension récupéréƟ par un capteur CCD. A ces deux dimensions correspondent les axes 2 et χ du capteur CCD et àƟ chaque pixel du capteur correspond une valeur de l'intensité et deux valeurs 2 et χ. Si l'onƟ considère la valeur de l'angle d'incidence ω comme variable (ω est balayé autour de l'angle de Bragg lors de la mesure), on obtient donc une cartographie "4D" de l'intensité diffractée, fonction de ω, 2 et χ. Dès lors l'intensité diffractée mesurée en un lieu précis de l'échantillon dépend desƟ trois grandeurs de l'espace direct: ω,2 etƟ χ. Ces trois angles définissent un système de coordonnées dans l'espace réel dans lequel on peut représenter l'intensité diffractée (qui est alors une représentation quadri-dimensionnelle). Il est ensuite possible d'obtenir la représentation de ce système de coordonnées dans l'espace réciproque définit par les axe q<10.0>, q<01.0> et q<00.1> en utilisant des transformations standards [Bowe98], dans lesquelles λ est la longueur d'onde en angströms :

q<10.0> = (2/λ) * sin(2Ɵ /2) * cos(ω-2Ɵ/2) * sin(χ) q<01.0> = (2/λ) * sin(2Ɵ /2) * sin(ω-2Ɵ/2)

q<00.1> = (2/λ) * sin(2Ɵ /2) * cos(ω-2Ɵ/2) * cos(χ)

L'intensité diffractée autour d'un point de l'espace réciproque donné peut dès lors être représentée en fonction des axes définis ci-dessus. On voit que la représentation de l'intensité diffractée nécessite en théorie une représentation quadri-dimensionnelle car elle dépend de trois variables dans l'espace réel comme dans l'espace réciproque. Afin de simplifier cette représentation, on trace des isosurfaces qui correspondent à des surfaces d'intensité constante du signal diffracté autour du point de mesure. Ces isosurfaces sont créées en appliquant un seuil sur le signal brut de l'intensité diffractée. Nous ne rentrerons pas dans les détails techniques du traitement des données brutes qui permet d'engendrer ces isosurfaces. Ces dernières renferment alors un volume dans l'espace réciproque dont les coordonnées du centre de masse vont définir la position à prendre en compte pour le calcul de la contrainte résiduelle. La contrainte est calculée en prenant pour référence les

valeurs des paramètres de maille du GaN bulk non contraint, soit cGaN = 0.5185 nm (q bulk <00.1> = 1/0.5185 nm-1) [Dara04]. La contrainte relative selon q<00.1> (direction selon l'axe c dans l'espace réel) est calculée comme suit dans l'espace réciproque:

S = (q

bulk,00.4

– q

nano

) / q

nano

_ q bulk,00.4 correspond à la valeur du signal de diffraction idéal des plans (0004) selon l'axe q<00.1> du GaN bulk, dont la valeur est définie plus haut. Ce signal correspond idéalement à un point dans l'espace réciproque dont les coordonnées selon les axes q<10.0> et q<01.0> sont nulles.

_ q nano correspond à la position selon l'axe q<00.1> dans l'espace réciproque du centre de masse de l'isosurface correspondant au signal de diffraction mesuré à l'intérieur des nanostructures.

Sur la figure 4.16(a) on peut voir une reconstruction dans l'espace réciproque des isosurfaces de l'intensité diffractée autour du point (0004) mesurée sur les échantillons 1 et 2 (GaN nanostructuré sur SiC à 450 et 100 Torr respectivement) pour les deux types de nanostructures: nanodot (isosurface verte) et nanoridge (isosurface bleue, la mesure est prise au milieu du nanoridge). Il s'agit des nanostructures épitaxiées à 100 Torr. Seul le signal provenant des plans (0001) non inclinés est considéré pour le nanoridge. La différence de position du centre de masse des isosurfaces selon l'axe q<00.1> traduit un écart du paramètre de maille selon l'axe c et la contrainte relative au GaN bulk peut alors être calculée selon la formule définie juste avant. Nous allons y revenir dans quelques instants. La forme des isosurfaces est quant à elle très complexe et dépend en grande partie de la forme du faisceau de rayons X incident. Nous ne détaillerons pas ce point et la forme des isosurfaces n'est pas discutée dans ce travail. La figure 4.16(b) correspond à une reconstruction dans l'espace réciproque des isosurfaces à partir de l'intensité diffractée autour du point (0004) provenant d'un nanoridge de GaN épitaxié à 100 Torr (visible sur la figure 4.16(c)). Les deux signaux annotés (i) et (ii) proviennent respectivement du signal principal (plans (0001) non inclinés) et du signal secondaire (plans (0001) inclinés). On voit que les centres de masse des deux isosurfaces n'ont pas les mêmes coordonnées selon l'axe q<00.1>, ce qui montre que l'état de contrainte est différent dans la partie du nanoridge contenant les plans (0001) inclinés et la partie " bulk " composée des plans (0001) parallèles à la surface du substrat. Ce point est abordé dans ce qui suit. La reconstruction des isosurfaces dans l'espace réciproque a également été faite à partir des mesures effectuées sur l'échantillon de GaN épitaxié à 450 Torr (non présentée dans ce manuscrit). Pour chaque échantillon trois lieux d e mesure sont considérés: sur un nanodot, au milieu d'un

Fig. 4.16 - (a) Isosurfaces provenant des signaux diffractés mesurés sur un nanodot (vert) et un nanoridge (bleu) épitaxiés à 100 (sample #2) et 450 Torr (sample #1). Seul les signaux des plans non tiltés sont considérés. Le seuil est de 99.9% de l'intensité maximale. Ces données sont une moyenne des signaux provenant des nanostructures concernées (dot ou ridge). Les valeurs de Δq sont calculées relativement à la valeur (0004) du GaN bulk. (b) Isosurfaces correspondant à un seuil de 50% de l'intensité maximalediffractée provenant du flanc d'un nanoridge de l'échantillon numéro 2 (épitaxié à 100 Torr): (i) signal principal (q<10.0> = 0) provenant des plans (0001) alignés et (ii) signal secondaire provenant des plans (0001) tiltés. (q<10.0>0) (c) Positions sur le nanoridge où le signal est collecté.

Pression de croissance S (±0.0003)

NanoDots NanoRidges Field 450 Torr (Nano-ELO, nanostructures

étendues latéralement) -0.0004 -0.0005 -0.0006

100 Torr (nanostructures isolés, pas de croissance latérale)

-0.0011 -0.0012 -0.0015

Tab. 4.2 - Différents échantillons et mesure de la contrainte résiduelle S (relativement à GaN bulk). Seul le signal des plans non inclinés est considéré pour les nanoridges

d'un nanoridge et enfin sur la couche extérieure épitaxiée loin des masques, notée " field ". Le tableau 4.2 résume les différentes valeurs des contraintes mesurées pour chaque échantillon à partir des reconstructions des isosurfaces dans l'espace réciproque présentées sur la figure 4.16. On remarque tout d'abord que la valeur mesurée de la contrainte S est négative, quelque soit le lieu de mesure. Ceci traduit une diminution de la valeur du paramètre de maille c du GaN épitaxié sur SiC (par rapport à la valeur nominal bulk du matériau non contraint), traduisant une contrainte résiduelle en tension venant corroborer les résultats obtenus dans le chapitre 3. On remarque que les valeurs de la contrainte résiduelle mesurée dans les nanodots, les nanoridges et dans la couche field sont proches pour un échantillon considéré, suggérant un état de contrainte à peu près constant. Les écarts entre la valeur de la contrainte S dans les nanostructures et la couche field sont très faibles et restent pratiquement dans l'incertitude de mesure. Cependant une légère tendance à une diminution de S dans les nanostructures est observée. On note aussi une différence de l'état de contrainte entre les nanostructures épitaxiées sur SiC à 100 et 450 Torr: celles épitaxiées à 100 Torr sont plus contraintes, venant confirmer les mesures Raman du chapitre 3: le régime de NanoSAG (structures étendues latéralement) a pour conséquence une diminution de l'état de contrainte résiduelle dans les nanostructures. Il est intéressant de remarquer que cette différence de l'état de contrainte résiduelle entre les deux échantillons n'influence pas les valeurs de l'inclinaison des plans cristallographiques (0001) à l'intérieur des nanoridges. La valeur de Δχ/ΔX = 0.6 deg.μm-1 est la même dans tous les cas, que les nanostructures soient épitaxiées à 100 ou 450 Torr, et quelque soient leurs dimensions (qui sont bien plus grandes lorsque l'épitaxie est faite à 450 Torr). Finalement la figure 4.16(b) nous donne un autre renseignement très important: le signal provenant des plans inclinés révèle une contrainte résiduelle moindre (plus de relaxation) que le signal provenant des plans (0001) qui ne sont pas inclinés. Ceci est déduit du décalage (visible sur la figure 4.16(b)) mesuré entre les positions des centres de masse des deux isosurfaces selon l'axe q<00.1> correspondant aux deux signaux (plans inclinés et non inclinés). Cette différence est évaluée à ΔS=0.005 d'après le graphique de la figure 4.16(b). Cette valeur est presque dans la limite de résolution du dispositif mais cependant l'effet a été observé sur toutes les parties du nanoridge et sur d'autres échantillons. On peut dès lors suggérer que le χ-effect est un moyen par lequel la contrainte est relaxée dans ce type de nanostructures " 3D " possédant des facettes latérales " libres " telles que les nanoridges. Cette interprétation est corroborée par l'étude mentionnée avant concernant l'épitaxie sélective de microridges [Bona08] dans laquelle ce phénomène est aussi observé. Ainsi ces mesures permettent de proposer que la relaxation des contraintes dans les nanostructures font entrer en jeu (au moins partiellement) le χ-effect, phénomène d'inclinaison des plans cristallographiques (0001) que nous avons décrit dans ce chapitre.