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Annexe G: Caractérisation par diffraction des rayons X émis par rayonnement synchrotron

Cette annexe est tirée du document « Introduction au rayonnement synchrotron » publié par Jean-Michel Ortega, chercheur au CLIO/LCP de l'Université Paris Sud, Orsay.

G1. Introduction et contexte

Lorsque l'on s'est aperçu que le rayonnement émis dans les accélérateurs circulaires (en particulier les anneaux de stockage) constituait une source d'une intensité et d'une brillance spectrale exceptionnelles, en particulier à courte longueur d'onde, le rayonnement synchrotron (« RS ») a pris une très grande importance pratique. Le RS est particulièrement intense dans la gamme des courtes longueurs d'onde:

- Rayons "X" (hυ ≥ 1 KeV soit λ ≤ 10 Å) - "XUV" (10Å ≤ λ ≤ 500 Å)

- "VUV" ("Vacuum Ultra-Violet" : 500 Å ≤ λ ≤ 2000 Å)

- "UV" (0.2 µm ≤ λ≤ 0.4 µm) où le rayonnement est utilisé pour sa structure temporelle.

Le RS est également utilisé dans la région de l'infrarouge (1 µm ≤ λ ≤ 1 mm) où les sources classiques ont une brillance assez faible. L'exploitation des possibilités de ces sources a donné lieu à la construction d'un grand nombre d'anneaux de stockage à travers le monde (cf. figure G1) et à l'implantation et au développement auprès de ceux-ci d'un grand nombre d'expériences de toutes sortes.

Les anneaux de stockage ont été étudiés à partir de la fin des années 1950 afin de réaliser des collisions "frontales" particule contre antiparticule. Cette technique s'est révélée extrêmement fructueuse pour l'étude de la matière, particulièrement en utilisant des électrons collisionnant avec des anti-électrons ("positrons"). Les succès obtenus avec les premières machines ont conduit à construire de nombreux anneaux de collisions jusqu'à nos jours. Ces anneaux ont été de plus en plus grands, afin d'atteindre des énergies de plus en plus élevées. Actuellement, ces machines ne sont plus utilisées pour la physique des particules. En effet, l’émission de rayonnement synchrotron devient trop important aux énergies que l’on veut atteindre (>100 GeV). Par contre, ce rayonnement

Fig. G1- Répartition des anneaux de stockage dans le monde.

synchrotron, émis tangentiellement à la trajectoire des particules, a pris une importance considérable dans d'autres domaines de la science et atteint des énergies comprises entre 1 et 10 GeV. L’intérêt des anneaux de stockage est qu’ils permettent d’obtenir un courant fort. L’émission de rayonnement se fait dans des structures magnétiques imprimant aux électrons des trajectoires particulières. On utilise principalement l’émission se produisant dans les aimants de courbure constitutifs de l’anneau de stockage ainsi que des « onduleurs », structures magnétiques faisant exécuter aux particules des oscillations autour de leur trajectoire moyenne. L’émission est confinée dans un cône étroit tel qu'on peut le voir sur la figure G2.

G2. Principe du Rayonnement Synchrotron :

Toute particule chargée se déplaçant de façon non uniforme (c'est à dire soumise à une accélération) émet un champ électromagnétique. Selon les directions respectives de l'accélération et du mouvement de la particule, il peut y avoir émission ou absorption d'ondes électromagnétiques. Lors de l'absorption il y a accélération des particules (c'est ainsi qu'on les accélère avec des cavités radiofréquence). Lors de l'émission il y a décélération des particules (d'où la nécessité d'une cavité radiofréquence sur les anneaux de stockage pour maintenir leur énergie). Ces processus, étant proportionnels à l'inverse de la masse de la particule, sont beaucoup plus efficaces pour un électron que pour un proton ou un ion (me /Mp ≈ 2 103). C'est ainsi que le rayonnement émis dans un anneau de stockage de protons (même de plusieurs dizaines de GeV) est très faible et ne contribue pratiquement pas à l'amortissement des oscillations des particules autour de leur point d'équilibre, alors que ce phénomène domine la dynamique des anneaux à électrons. Dans un "petit" système (tel un atome) les niveaux d'énergie sont très éloignés les uns des autres et le problème doit être traité quasi-exclusivement en mécanique quantique. Dans un grand système, tel un accélérateur, on peut se limiter dans la plupart des cas (mais pas toujours) à la mécanique relativiste. Usuellement, on désigne sous le nom de "rayonnement synchrotron" le rayonnement émis par des électrons tournant dans un anneau de stockage. En fait, il s'agit plutôt de tout rayonnement émis par des particules de haute énergie se propageant dans le vide. Dès que le mouvement des particules n'est pas rectiligne et uniforme du rayonnement est émis. Lorsque la particule possède une vitesse proche de la lumière la fréquence du rayonnement est déplacée vers les courtes longueur d'ondes (vers le "bleu" contrairement au rayonnement des galaxies, vers le "rouge", que l'on regarde s'éloigner), par "effet Doppler relativiste". Le déplacement relatif en fréquence atteint plusieurs ordres de grandeurs pour les particules possédant une énergie cinétique grande par rapport à leur énergie de masse. Ceci permet d'atteindre des longueurs d'onde courtes, telles que celles des rayons X, et donc de s'affranchir de la nécessité d'utiliser des émetteurs dont la taille est comparable à la longueur d'onde. On pourrait dire qu'au lieu d'utiliser des émetteurs "quantiques", donc peu maniables, on utilise des systèmes macroscopiques, facilement manipulables, dont on déplace la longueur d'onde par effet Doppler en variant l’énergie, et donc la vitesse des électrons.

L'amélioration continue des anneaux de stockage a abouti à une augmentation spectaculaire des performances, comme le montre le graphe de la figure G3. L'amélioration ne porte pas sur l'intensité du faisceau lumineux, mais sur sa pureté spectrale et sa capacité à être focalisé dans un très petit volume de l'espace (ce que l'on appelle la brillance).Le RS est au moins un milliard de fois plus brillant que les habituels générateurs de rayons X. Il s'agit donc d'une véritable révolution dans le

domaine de la spectroscopie X et XUV. Le RS est devenu un outil universel dans le domaine des sciences de la matière.

Dans le monde, des dizaines d'anneaux ont été construits pour le rayonnement synchrotron, les plus récents ayant une circonférence d'environ 1000 mètres. Des dizaines de milliers d'utilisateurs (chercheurs scientifiques, industriels) viennent y faire chaque année des expériences, mesures et caractérisations nécessitant cette technologie de pointe dans différents domaines :

- Recherche fondamentale : Atomes et molécules, Physique des surfaces, Physique des solides, Chimie, Biologie.

- Recherche appliquée : Biologie / Pharmacologie (structure des molécules biologiques : protéines, enzymes, virus), étude de la catalyse, étude de matériaux (céramiques, alliages métalliques...), microscopie en rayons X.

Fig. G3 - Évolution de la brillance de la lumière synchrotron.

- Recherche industrielle : Micromécanique (réalisation de "micromachines" aux applications très diverses en Robotisation, Médecine...), Microlithographie (gravure de masques permettant la réalisation de circuits intégrés à très grande densité pour les ordinateurs).