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- Présidence de M. Christian Cambon, président - La réunion est ouverte à 9 h 35.

Audition de S.E. M. Ismaïl Hakki Musa, ambassadeur de Turquie en France M. Christian Cambon, président. – Monsieur l’Ambassadeur, cher Ismaïl Hakki Musa, nous sommes heureux de vous accueillir ce matin car, lorsque des crises et des tensions surviennent entre amis, la moindre des choses est de s’en expliquer avec franchise, sans naïveté, afin que l’on puisse agir utilement à la diminution de la tension qui agite actuellement la relation entre la France et la Turquie. Je veux rappeler les liens traditionnels, historiques, amicaux, que nous avons avec ce pays, ainsi que les liens économiques très nombreux. Nous avons eu de nombreuses occasions, par le passé, de partager des analyses communes.

Depuis un certain temps, toutefois, tant à-vis de nos alliés de l’OTAN que vis-à-vis de la France elle-même, un certain nombre de points de divergence se font jour, avec pour point culminant l’incident naval qui a eu lieu au large des côtes de Libye. Cet incident fait suite à une série de questions. Le fait que la Turquie se lance dans l’acquisition de missiles russes S400, qui risquent de menacer l’interopérabilité entre alliés, avait été diversement apprécié au sein de l’OTAN. Il y a eu l’offensive turque en Syrie et en Irak contre les milices kurdes, nos alliées dans la lutte contre Daesh. Il y a eu les forages gaziers illégaux dans les eaux chypriotes. Vous aviez été invité à vous expliquer sur le sujet, en présentant un certain nombre d’éléments. L’analyse internationale qui est faite de ce problème démontre notamment que le droit de la mer ne semble pas avoir été respecté. D’autres incidents se sont produits.

Ces différents évènements nous ont inquiétés. Plus récemment, nous avons pris connaissance de ce très grave incident survenu entre les forces navales turques et la frégate française Courbet, laquelle était en service commandé dans le cadre d’une mission de l’OTAN. Je rappelle qu’elle protégeait l’embargo sur les armes au large de la Libye, le 10 juin. Cette mission de la frégate Courbet s’inscrivait dans l’opération OTAN Sea Guardian, qui vise à contrôler cet embargo. Elle a voulu procéder au contrôle d’un navire sous pavillon tanzanien, qui était suspecté de transporter des armes à destination du théâtre libyen. Or ce bâtiment tanzanien, censé transporter des denrées humanitaires, était entouré de trois bâtiments de la marine turque qui escortaient ce bâtiment de commerce. Comment expliquer cette présence très militarisée autour de ce bateau « humanitaire » ? Comment par ailleurs expliquer l’utilisation abusive de l’indicatif OTAN par les navires turcs, alors qu’eux-mêmes n’étaient pas en mission pour l’Alliance ?

Lors de la prise de contact avec le cargo suspect, un navire militaire turc qui l’escortait a, à trois reprises, illuminé la frégate française, c'est-à-dire qu’il a fait usage de son radar de conduite de tir, ce qui est tout à fait inhabituel et constitue, je le rappelle, la manœuvre ultime avant l’ouverture du feu, ce qui est tout de même assez étrange entre alliés de l’OTAN. Des membres de l’équipage se sont également postés en casque lourd et armés sur le pont du navire turc. Ce n’est que grâce au professionnalisme et au sang-froid de l’équipage du Courbet que le niveau de violence a pu baisser.

Vous savez que la France a protesté. La ministre des Armées, Florence Parly, a immédiatement saisi les instances de l’OTAN, la semaine dernière. Deux jours avant l’incident, vous vous réjouissiez vous-mêmes, par un tweet, d’un exercice de formation entre une frégate turque, deux frégates italiennes et la frégate Courbet au sein du groupe maritime permanent OTAN-2. La marine turque ravitaille un jour la frégate Courbet dans un exercice conjoint, la menace d’un tir de missile le lendemain : c’est assez troublant ! Vous comprenez donc l’émotion qu’a suscité cet incident et notre incompréhension, ce qui appelle des explications. Comme vous le savez, la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat s’efforce d’être la plus objective possible. Nous souhaitons comprendre ce qu’il s’est passé et entendre votre interprétation de cet incident.

Je rappelle que la Turquie a souscrit un certain nombre de principes lors de la conférence de Berlin en janvier dernier. Elle s’était engagée à respecter l’embargo des Nations unies sur les armes à destination de la Libye ainsi que le principe de non-ingérence dans le conflit qui sévit dans le pays. Or les évènements contredisent cette prise de position, puisqu’il est manifeste que la Turquie cherche à disposer de nouveaux points d’appui en Libye. Je pense notamment aux bases militaires de Misrata et Al-Watiya. Vous nous direz quelles sont les ambitions de la Turquie en Libye (qui se trouve à une quarantaine de kilomètres des côtes européennes) et si la Turquie a l’intention d’appliquer l’accord de Berlin ?

Comme vous le savez, l’OTAN a déclenché, à la demande de la France et sous l’impulsion de son secrétaire général, une enquête afin de faire toute lumière sur l’incident maritime. D'une façon générale, la France a demandé que soit réexaminée la situation de la Turquie par rapport à ses alliés au sein de l’OTAN, car c'est toute l’alliance atlantique qui risque d’être fragilisée si les incidents de ce type se multiplient.

Ce contexte ne cesse de se détériorer puisque les dépêches d’hier faisaient état de déclarations de votre ministre des Affaires étrangères particulièrement agressives vis-à-vis de la France, estimant que la France cherchait à installer la Russie en Libye. Nous conduisons certes un dialogue avec la Russie mais sommes en contradiction totale avec les Russes à propos de l’Ukraine et de la Crimée. Je ne vois pas pourquoi nous aurions intérêt à faciliter leur implantation en Libye ! La France a toujours la même politique : elle parle à tous les acteurs. Reconnaissant le gouvernement de Tripoli, il n’est guère étonnant qu’elle ait eu des contacts avec le maréchal Haftar puisque ce sont deux entités qui cherchent, l’une et l’autre, à s’imposer en Libye. La France a tenté d’organiser des conférences internationales, dont l’une a eu lieu à Paris, sous l’égide du président Macron. Nous considérons que les attaques répétées du ministre des Affaires étrangères turc sont disproportionnées par rapport aux efforts que la France tente d’accomplir pour amener la paix dans une région du monde qui en a bien besoin : la Libye est devenue le champ de manœuvre et d’affrontement nombreux intérêts, avec pour conséquence d’alimenter les trafics de toutes sortes en direction du Sahel, où la France assume, là aussi, des responsabilités complexes.

Si la Turquie cherche à faire valoir ses intérêts dans cette partie du monde, la manière dont elle procède nous paraît inamicale. C’est la raison pour laquelle j’avais souhaité que vous soyez entendu, afin que nous en débattions. Je vous laisse la parole, Monsieur l’Ambassadeur.

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa, ambassadeur de Turquie en France.- Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie pour votre accueil. Je dois dire que j’ai toujours reçu un accueil chaleureux sous ce toit. Vous avez évoqué certains

éléments de l’actualité mais je suis plus sensible à votre propos de départ, lorsque vous qualifiez le contexte en prenant l’image des tensions et querelles qui peuvent survenir dans une famille. Je me situe dans le même état d’esprit. Il nous incombe à nous tous, personnes responsables, de voir et revoir tout ce qui nous préoccupe, avec beaucoup de responsabilité, en ayant à l’esprit le fait que la France et la Turquie entretiennent des relations qui s’étendent dans de nombreux domaines. Près de 2 000 entreprises françaises opèrent en Turquie. Nous avons des relations économiques, commerciales, politiques, scientifiques, historiques. Il faut gérer les tensions susceptibles de se faire jour en ayant tout cela à l’esprit.

Je suis l’actualité en France et la presse est préoccupée par ce qu’il se passe en Libye, en Syrie et ce qu’il s’est passé en Méditerranée entre les bâtiments maritimes français et turcs. J’ai voulu préparer un propos qui réponde à ces préoccupations de l’opinion publique française. Il couvre les éléments que vous avez eu l’amabilité de partager avec nous dans votre propos introductif.

De nombreuses questions tournaient manifestement autour de la compréhension des motivations de la présence de la Turquie en Libye. Nous connaissons la situation sur le terrain : depuis 2011, il n’existe quasiment plus d’autorité centrale. Le pays est engagé dans une guerre interne qui a des imbrications externes, rendant la situation douloureuse. En 2015 est intervenu un accord politique, à Skhirat au Maroc. Nous l’avons tous endossé (Turquie, France, Nations unies et tous les pays concernés).

En dépit de cela, des tensions internes sont apparues en Libye. Une personnalité qui se désigne comme général, Monsieur Haftar, a tout fait pour déconnecter cet accord politique de son contexte. Monsieur Haftar s’est lancé dans une attaque militaire dont le tournant est survenu en avril 2019. Il y a encore deux ou trois mois de cela, si nous n’avions rien fait, Tripoli serait tombée dans les mains de Monsieur Haftar. Y sommes-nous prêts ? Nous reconnaîtrions l’autorité politique d’un gouvernement tout en restant dans l’expectative alors qu’il est attaqué de toutes parts. C’est bien cela qui explique la présence de la Turquie en Libye. La Turquie n’était d'ailleurs pas le seul pays invité par le gouvernement légitime de Tripoli. L’OTAN y a été invitée, ainsi que quatre autres pays, dont la France, pour aider ce gouvernement. Il ne faut pas être ambivalent : soit nous assumons nos responsabilités en soutenant ce gouvernement légitime, soit on le laisse se démener seul. La Turquie a répondu par l’affirmative en soutenant ce gouvernement légitime que nous avons tous reconnu, dans la communauté internationale. Elle se situe ainsi dans la stricte légalité, en répondant à une invitation qui émanait du gouvernement légitime à Tripoli.

Sans cette intervention turque, ce gouvernement légitime ne serait pas présent actuellement à Tripoli. Pourrions-nous le tolérer ?

Que veut le gouvernement légitime de Tripoli ? Il veut – et nous le comprenons – que les forces de Monsieur Haftar se retirent aux frontières, à la ligne de démarcation de 2015, au moment où l’accord de Skhirat, au Maroc, a été signé. Cette ligne de démarcation passerait quelque part à l’Est de Sirte et au Sud de Jufra, qui sont encore contrôlées par les éléments d’Haftar. Le gouvernement central libyen demande le retrait des forces d’Haftar de ces deux localités. Il demande aussi qu’une véritable feuille de route soit établie et mise en œuvre. De surcroît, alors le pays s’appauvrit et ne peut vendre de pétrole, Monsieur Haftar applique un embargo qui empêche la société nationale libyenne d’exporter du pétrole vers l’étranger pour subvenir aux besoins de la population. Les demandes de ce gouvernement, que nous avons tous reconnu, sont donc légitimes.

Je voudrais revenir au point qui semble le plus sensible, pour vous, monsieur le président et mesdames et messieurs les sénateurs, à savoir cet incident entre les navires français et turcs. J’ai essayé d’établir la séquence des évènements. Elle apparaît à l’écran.

Comme le savent les marins, ainsi que les forces armées d'une façon générale, les usages maritimes ne prévoient pas que l’on interroge un navire trois fois dans la même journée. Le navire turc a été interrogé à quatre reprises en 24 heures. C'est du jamais vu. C’est comme si l’on doutait des intentions de la partie turque.

Dans un premier temps, le navire turc est interrogé par un navire grec qui opère dans le cadre de l’opération Irini, HS Spetsai, à 3 heures 43 Zulu. Quelques heures plus tard, le navire italien ITS Carabinieri interroge également, dans le cadre d’une mission de l’OTAN, le navire turc. Dans les deux cas, tout se déroule normalement. La troisième fois que le navire est interrogé, à 16 heures 48, les pratiques employées ne sont pas habituelles au regard des usages maritimes. On observe une vitesse extrêmement élevée de 20 nœuds, avec un grand angle de gouvernail. J’attire votre attention, mesdames et messieurs les sénateurs, sur la carte projetée, qui a été diffusée à l’OTAN. Au début, la frégate Courbet a une vitesse de 15 nœuds.

Le navire français suit le tracé rouge, passe entre deux navires, puis contourne le Goko.

Lorsque, sur la route, on vous fait une queue de poisson, vous êtes énervé et cela risque de provoquer un incident. La manœuvre de la frégate Courbet s’apparente à une queue de poisson, une manœuvre très rapide pour se positionner devant le navire turc, Oruçreis. Celui-ci n’éclaire pas la frégate Courbet, qu’il a ravitaillée le même jour. Il a seulement désigné le Courbet pour surveiller les manœuvres, car il ne sait pas ce qu’il se passe. Voyant manœuvrer le Courbet à une vitesse accélérée, il faut qu’il l’observe et tourne la caméra vers la frégate.

Dans le système embarqué sur ce navire, le radar et la caméra sont incorporés et changent d’orientation en même temps. Il n’y a toujours pas d’illumination. Il n’active pas le radar de contrôle du tir. Nous avons remis ces éléments à l’OTAN. Je vous invite, mesdames et messieurs les sénateurs, à observer cela de près. Toute l’appréciation de la situation repose sur ces données techniques.

Vous voyez sur la partie gauche de l’écran les éléments qui caractérisent une situation de désignation. À droite sont listés les éléments qui caractérisent une situation d’illumination. En cas de désignation, seules la date et l’heure apparaissent sur l’écran.

Aucune donnée relative à la distance entre l’objet observé et vous-même n’apparaît sur l’écran. Lorsqu’il s’agit d’une illumination, le mot tracking apparaît sur l’écran. La distance apparaît également, ainsi qu’un cadran, au milieu, qui vous oriente pour viser. Ces éléments ne sont pas présents sur l’écran du navire turc.

Dans ce contexte, deux versions se sont opposées. Le secrétaire général de l’OTAN a ordonné une investigation dont les conclusions viennent d’être rendues. Selon les informations dont je dispose, cette enquête n’est pas concluante. Il semble que les experts de l’OTAN ne parviennent pas à la même conclusion que nos amis français. Peut-être avez-vous cette information, monsieur le président. Elle m’est parvenue hier. Il semble qu’en attendant, le Courbet se retire de l’opération de l’OTAN.

Un autre motif d’incompréhension, par vos amis turcs, doit être mentionné. Il existe une cellule de communication entre les forces armées turques et françaises, entre nos états-majors. Nos amis français n’ont pas daigné passer par ce canal. Le commandant de la frégate Courbet n’a pas souhaité entrer en communication avec le commandant de l’Oruçreis ni passer par les instances de communication nationales, préférant s’en référer directement à l’OTAN, sans procéder à des vérifications préalables. Notre état-major ne l’a pas compris et notre attaché militaire a fait part de cette incompréhension à ses interlocuteurs institutionnels

à Paris lorsqu’il a eu l’occasion d’échanger avec eux. Je crois que ce dialogue s’est d'ailleurs très bien déroulé : de part et d’autre, on a compris qu’il existait un besoin de communiquer davantage. Cet incident ne constitue pas un acte inamical ni a fortiori hostile et nous n’avons pas compris pourquoi cette tournure lui avait été donnée, en particulier dans les médias. Les experts de l’OTAN ne parviennent pas non plus à cette conclusion.

J’ajoute qu’il y a des éléments turcs qui sont armés sur le navire, comme sur tout navire. Néanmoins, leurs fusils, de même que les mitrailleuses du navire, n’étaient pas orientés vers la frégate Courbet, comme le montre la photo projetée actuellement à l’écran, qui a d'ailleurs été prise par nos amis français. Les canons sont orientés vers le ciel. La caméra électro-optique est en mode désignation, sans activation du radar de contrôle de tir et sans illumination. En cas d’illumination, les radars ne peuvent être observés de cette manière.

Je me suis quelque peu attardé sur cette séquence mais je crois qu’elle le méritait.

D’autres photos montrent le ravitaillement. Il semble qu’il y ait un problème technique.

M. Christian Cambon, président. – La question de fond est la suivante : si la cargaison est inoffensive, pourquoi trois bâtiments de guerre turcs entourent-ils ce navire tanzanien ? Qu’y avait-il dans ce navire tanzanien, monsieur l’ambassadeur ?

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa.- Selon les informations dont je dispose, il s’agissait d’une cargaison d’aide humanitaire. Le navire a été interrogé trois fois en 24 heures. Il a considéré cela comme une anomalie et a fait appel aux forces maritimes. Le navire a été interrogé par un navire grec, le matin, à 3 heures 43, sans que cela ne pose de difficultés.

Trois ou quatre heures plus tard, un navire de l’OTAN interroge. Cela se passe sans difficulté.

Puis vient le tour de la frégate Courbet.

M. Christian Cambon, président. – Peut-être y avait-il un doute quant à la cargaison du bateau.

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa.- Pourquoi, dès lors, le premier n’a-t-il pas poursuivi le contrôle?

M. Christian Cambon, président. – Selon les informations qui m’ont été communiquées, le bateau français tente de s’approcher du cargo tanzanien pour prendre un certain nombre de photos, car il y a manifestement un doute. Le doute naît du fait que ce navire censé transporter une cargaison humanitaire est entouré de trois frégates turques assez lourdement armées, ce qui soulève des interrogations. Encore une fois, les opérations dont nous parlons visent à faire respecter un embargo dont la Turquie est solidaire depuis les accords de Berlin. Pour le reste, la Marine nationale conteste le fait que le Courbet soit arrivé à grande vitesse. D’après ce qui m’a été dit, il accélère pour éviter la collision au moment où l’on voit que les opérations se tendent un peu. Il n’y a pas eu de volonté de faire une queue de poisson. Il y avait manifestement la volonté d’en savoir un peu plus. Le fait que trois contrôles aient été effectués montre sans doute qu’il y avait un doute.

Quant à l’illumination, la Marine nationale maintient que le radar de conduite de tir a été allumé à trois reprises, une fois 30 secondes, une fois 40 secondes, une fois 30 secondes, vers la frégate Courbet. Ni vous ni moi n’y étions mais vous comprendrez que nous nous référions aux informations fournies par la Marine nationale. Dans toutes les marines nationales, le fait d’allumer le radar de conduite de tir est considéré comme une manœuvre inamicale. Il y a meilleure manière de se saluer en mer !

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa.- Il faut que nous échangions en effet à ce sujet, en toute franchise. Vous conviendrez avec moi que le fait de contrôler un navire trois fois en moins de 24 heures constitue tout de même une anomalie.

M. Christian Cambon, président. – Non ! L’on contrôle un embargo. On voit un navire dont on nous dit qu’il est chargé d’une cargaison humanitaire, entouré par une armada ! S.E. M. Ismaïl Hakki Musa. – Ces trois navires turcs sont présents dans le cadre de cette opération de l’OTAN pour lui apporter leur soutien. Ils ne sont pas là par hasard et ne sont pas partis d’un port quelconque de Turquie pour accompagner ce navire. La marine française doit savoir que ces frégates turques sont présentes en soutien de cette opération de l’OTAN. Vous savez qu’il y a différents niveaux dans toute opération de ce type. Certains bâtiments interviennent en première ligne, d’autres en soutien. C’est la raison pour laquelle ils ont ravitaillé Courbet dans la même zone. Leur présence sur place n’a pas d’autre but.

M. Christian Cambon, président. – Si, dans le cadre d’une opération visant à faire respecter un embargo, s’il y a trois ou quatre interrogations successives, c’est qu’il y a un doute. Le plus simple est de lever le doute et d’autoriser une inspection. C’est très facile, d’un bateau à l’autre.

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa.- Personne ne l’a évoqué. Le capitaine de la frégate Courbet n’a pas voulu prendre contact avec son homologue turc. Il a fait cette manœuvre dangereuse, cette queue de poisson, et s’est éloigné. Nos autorités n’ont pas été contactées.

Nous avons immédiatement transmis l’information à l’OTAN.

M. Christian Cambon, président. – Les navires turcs n’étaient pas en mission pour l’OTAN. C’est absolument certain. Nous avons ces renseignements qui nous sont fournis par le commandement de l’OTAN. Ils n’avaient pas le droit d’utiliser le code d’identification de l’OTAN.

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa. – C’est l’information dont je dispose.

M. Christian Cambon, président. – Je livre ces informations à la réflexion de la commission. Nous disposons d’informations formelles sur ce point.

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa. – S’ils ne faisaient pas partie d’une mission de l’OTAN, comment se fait-il que le navire turc ait ravitaillé, le même jour, le navire français Courbet ? Cela ne se produit pas par hasard.

M. Christian Cambon, président. – Je pense qu’il s’agissait d’une autre opération.

S.E. M. Ismaïl Hakki Musa.- C’est une opération de type « associated support ».

Elle s’inscrit dans le cadre d’une mission continue de protection maritime au titre de l’OTAN.

C’est pour cette raison que le navire a ravitaillé le bâtiment Courbet.

Vous avez évoqué d’autres éléments, monsieur le président. Le ministère de la Défense a transmis ces informations à l’OTAN, lequel a établi un rapport, lequel, si j’ai bien compris, n’est pas concluant. Je crois qu’il faut en tenir compte.

S'agissant des embargos, vos amis turcs ne comprennent pas pourquoi, en Europe, et a fortiori en France, on s’intéresse seulement au contrôle de l’embargo maritime alors que