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Dans le second cas, celui où l'entreprise pratique des prix inférieurs à la concurrence sans disposer d'un avantage compétitif réel, la stratégie de domination par les coûts ne repose sur

aucun fondement. C'est donc une fausse stratégie de domination par les coûts, et l'analyste

ne devra pas se faire piéger par les apparences, qui sont ici trompeuses. Une stratégie de

domination par les coûts nécessite , en effet, que l'on ait bien discerné de quelle manière l'on

va pouvoir parvenir à des prix de revient inférieurs à ceux des concurrents. Cela peut se

faire par les effets de volumes, pour autant que l'entreprise s'acharne à tirer, en permanence,

de ses volumes de production tous les effets de productivité possibles. Cela peut se faire,

aussi, d'autres manières :

exploitation d'un avantage compétitif particulier (prix

particulièrement bas de l'un des facteurs de production) ou technologie de production

inédite conduisant à des coûts de production inférieurs à ceux de la concurrence. Aussi,

s'engager dans des stratégies de domination par les coûts sans qu'un facteur clé

d'abaissement des prix de revient n'existe, n'a guère de sens.

N.B. : Pour ce qui est de l'abaissement des prix de revient sous l'effet des volumes, l'enjeu

consiste à prendre l'avantage sur ses concurrents, en matière de volume : il faut

donc, pour réussir dans ce type de stratégie, pratiquer bien souvent une politique de

prix en avance sur l'abaissement des prix de revient. C'est bien d'ailleurs, ce que

beaucoup de kaisha japonaises ont su faire pour battre leur rivales occidentales, ces

vingt dernières années. La figure n° 14 illustre ce type de stratégie :

Prix de revient PA A A' Prix pratiqué PA' ... VA VA' Volumes

Figure n° 15 : Stratégie de prix en avance sur les volumes

La firme A, qui a un prix de revient PA, fixe son prix de vente à un niveau A' qui correspond au prix de revient qu'elle obtiendra lorsque son volume de production aura été porté en VA'. Entre temps, bien sûr, elle accusera des pertes dans cette activité ; mais lorsque le volume VA sera atteint, les concurrents auront disparu du marché. Alors, la firme aura la possibilité de rehausser, éventuellement, ses prix de vente.

Un tel type de stratégie marketing, qui est la traduction d'une stratégie de domination par les coûts correctement menée, est tout à fait en opposition avec les principes de bonne gestion que les comptables appliquent scrupuleusement. En ce sens, une gestion fondée sur les prix de revient tels qu'on les établit traditionnellement encore, aujourd'hui, dans beaucoup d'entreprises se trouve être tout à fait antinomique par rapport à une gestion stratégique. Pour ce qui est des autres facteurs susceptibles de conduire à des coûts de production inférieurs à ceux des concurrents, l'identification des causes explicatives est généralement plus aisée.

Indiquons qu'en pratique les stratégies de domination par les coûts se trouvent souvent affaiblies par le désir d'adjoindre trop vite des ingrédients qui relèvent de stratégies de différenciation. Procéder de la sorte amène à des stratégies floues, dont on ne sait plus ce qu'elles sont. Michael Porter a montré qu'il faut choisir d'une manière non ambigüe la stratégie que l'on souhaite mener : on doit s'y tenir, avec rigueur, jusqu'à ce que l'on soit parvenu à acquérir une position véritablement forte. Alors, il deviendra possible, effectivement, de doubler une stratégie de domination par les coûts par une stratégie de différenciation.

Une firme qui est parvenue, grâce à une stratégie de domination par les coûts, à devenir leader peut se permettre, grâce aux volumes dont elle dispose, et qui sont très supérieurs à ceux de ses concurrents, d'intégrer des éléments de différenciation dans son offre (et en particulier dans sa gamme de produits). Le coût de ces éléments se trouvera être souvent relativement faible, en raison des volumes en jeu.

De même, une entreprise qui sera parvenue à acquérir une part de marché importante, sur un DAS donné, grâce à une stratégie de différenciation, pourra profiter des volumes de production qui sont les siens pour abaisser ses coûts de production, et donc, si elle le souhaite, ses prix de vente. Elle combinera, alors, elle aussi, les deux stratégies génériques de M.Porter : différenciation, et domination par les coûts.

Dans les deux cas, l'on aura affaire à une combinaison des deux grandes stratégies génériques de Porter, mais ce mixage ne doit se faire qu'une fois acquises de très fortes positions sur le marché. On doit l'exclure, dans les autres cas, car combiner trop tôt les deux stratégies nécessite des moyens considérables qui sont hors de portée des entreprises, dans la plupart des cas ; de plus, cela ne permet pas d'acquérir une image claire, au niveau des consommateurs ou des utilisateurs.

b) stratégies de différenciation

Le premier élément d'identification de toute stratégie de différenciation se trouve tout naturellement être celui des prix de vente pratiqués. Dans toute stratégie de différenciation, les prix sont, en effet, supérieurs à ceux des firmes qui développent des stratégies de domination par les coûts. Mais des prix de vente élevés ne sont pas toujours pleinement justifiés. Il faut qu'ils s'expliquent par des caractéristiques particulières données aux

produits, (et à l'ensemble des éléments associés à l'offre), qui puissent justifier la politique de prix adoptée. En quoi l'offre de l'entreprise étudiée est-elle différente de celle des autres firmes? Ces différences se situent-elles au niveau de la qualité des produits, et quelles sont- elles alors? Se situent-elles, si les produits sont sensiblement identiques, au niveau des services qui accompagnent cette offre, et quelles sont alors.ces spécificités, etc... On cherchera donc à analyser s'il existe des raisons sérieuses justifiant un écart de prix par rapport aux firmes qui ont opté pour des stratégies de domination par les coûts. Et encore faudrait-il que les types d'avantages concurrentiels choisis puissent être considérés comme étant susceptibles d'avoir un caractère permanent.

Pour bien clarifier le type d'offre auquel on a affaire, quand il s'agit de stratégies susceptibles d'être du type "différenciation", il faut nécessairement s'en référer à l'offre qui est celle des firmes qui pratiquent des stratégies de domination par les coûts. C'est bien ainsi, d'ailleurs, qu'opèrent les acheteurs : en quoi l'écart de prix qui est demandé par telle firme est-il justifié?

Les paramètres de différenciation auxquels une entreprise est susceptible de recourir sont innombrables. Ils peuvent se situer au niveau de la conception même des produits : produits rendant de meilleurs services au consommateur, ou conçus pour une durabilité plus grande, produits nécessitant moins d'après-vente que ceux de la concurrence, ou ayant, s'il s'agit de biens d'équipement, une meilleure valeur de revente, etc. Ils peuvent se trouver aussi au niveau des services qui sont proposés et, là, l'éventail des possibilités de différenciation est extrêmement large : conseils associés à la vente des produits, qualité du service après-vente, rapidité d'intervention en après-vente, coût de celle-ci, crédits accordés au moment de l'achat, image flatteuse donnée à l'acheteur, etc...

La liste des services associés à une offre de produits s'allonge tous les jours, sous l'effet de la concurrence et grâce à la créativité des spécialistes du marketing. Dans le cadre d'un audit de stratégie, on devra donc s'attacher à parfaitement identifier le ou les avantages compétitifs que l'entreprise est supposée avoir développés, avantages qui constituent, normalement, le fondement même de sa stratégie de différenciation, et justifient la politique de prix qui est pratiquée.

Second point important du diagnostic : l'étendue de la cible visée. S'agit-il d'une focalisation, et quel est alors le segment de marché visé ? Ou s'agit-il d'une stratégie ayant l'ambition d'embrasser d'emblée, tout le DAS? Pour répondre à cette question on devra s'interroger sur la manière dont il est possible de segmenter le DAS. Il s'agira, ici, du type de segmentation qu'effectuent les spécialistes du marketing, c'est-à-dire d'une « segmentation marketing ». Les possibilités de segmentation marketing sont, on le sait, extrêmement nombreuses : catégories socio-professionnelles, âge des consommateurs (ou des utilisateurs), distinction : hommes - femmes, habitudes de consommation liées à des critères sociaux professionnels, ou ethniques, nature des activités des utilisateurs, etc. A tout moment, d'ailleurs, une vision créative nouvelle, en matière de segmentation marketing, peut bousculer l'équilibre d'un marché. Il faudra donc bien identifier si l'offre d'une entreprise qui

segments du DAS, ou bien si elle a été conçue pour n'intéresser véritablement qu'un seul