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Les enjeux du vicariat

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 119-127)

Les pratiques de l’autorité métropolitaine

I) Les faiblesses et les adaptations de l’administration diocésaine

2) Les enjeux du vicariat

Le constat de l’interpénétration précoce entre les structures laïques et celles de l’Église ruthène poussa souvent les historiens à y voir un facteur de l’évolution des prérogatives mêmes des archiprêtres. En particulier, l’une des questions reste de savoir si ces derniers récupérèrent progressivement des attributions judiciaires et administratives, pour la gestion du temporel ecclésiastique, qui relevaient auparavant des vicaires diocésains. L’idée

26 EM, t. 2, n° 81, p. 302-329. Pour l’archevêché de Polack seul, les Règles pour les prêtres mentionnent déjà dix-huit archiprêtrés sur l’ensemble du territoire diocésain (SJH, t. 1, p. 244).

27 Cette structure est restée relativement stable puisqu’elle se retrouve inchangée au XVIIIe siècle : EM, t. 4, n° 31, p. 294-303.

28 Д. В. Лісейчыкаў (éd.), Візіты уніяцкіх цэркваў…, p. 32-54.

29 Seul l’archiprêtre d’Ašmjany est ainsi mentionné précocement en 1628 : LMAB, F. 264, n° 82, f. 1r. En 1648, un document évoque également un archiprêtre de Lida : А. М. Кушнярэвіч, Культавае дойлідства Беларусі XIII-XVI стст., Minsk, Навука і тэхніка, 1993, p. 72-73.

30 Markava était la capitale du district princier connu depuis la fin du XVe siècle. К. Любавский, Областное деление и местное управление Литовско-Русского государства ко времени издания Первого Литовского Статута, Moscou, Университетская типография, 1892, p. 98-99. L’archiprêtre de Markava est mentionné plusieurs fois au XVIe siècle : 1509 (RIB, t. 4, p. 8), 1530 (LMAB, F. 256, n° 1896) et 1576 (VS, t. 5/1, n° 44, p. 58). Le document de 1576 amena Aleksej Sapunov, et beaucoup de ses successeurs, à rattacher l’archiprêtre de Marakawa à un faubourg homonyme de Vicebsk, où un important monastère orthodoxe fut fondé par la suite, vers 1633. Cependant tous les indices montrent que cette indentification ne peut être qu’erronée. Ainsi, un archiprêtre de Markawa participa-t-il au synode de Vilnius de 1509, où tous les clercs séculiers mentionnés étaient originaires du diocèse metropolitain. De même, la charte royale de 1576 indique explicitement que l’archiprêtre évoqué était un petit noble du district d’Ašmjany. Enfin, il paraît incongru que l’archiprêtre établi dans la région de Vicebsk portât dans sa titulature non pas le nom de cette cité mais celui d’une petite localité des environs.

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généralement énoncée dans l’historiographie consiste à affirmer que les deux institutions fusionnèrent progressivement vers la fin de la période médiévale et à proposer d’utiliser le terme d’« archiprêtres-vicaires31 ». Boris Florja parle même d’une véritable « restructuration » du vicariat diocésain et souligne que les mots « archiprêtre » et « vicaire » [намhстник]

deviennent synonymes au début du XVIIe siècle32. Un tel rapprochement est favorisé par l’homonymie fréquente entre la désignation des circonscriptions laïques [намhстничьство//волость – équivalent du bailliage] du territoire princier ou des grands domaines nobiliaires, qui accueillaient aussi les archiprêtres, et celle des vicariats ecclésiastiques [намhстничьство]. La situation est d’autant plus ambigüe que dans le contexte des XVe-XVIe siècles, les vicaires diocésains ruthènes se recrutèrent fréquemment parmi les archiprêtres.

Là encore, l’évolution se fit différemment de la situation moscovite. Avec la diffusion des décimateurs, les vicaires diocésains gagnèrent en statut, au point de rappeler celui des vicaires généraux de l’Église latine. Au XVe siècle, quand les diocèses ruthènes relevaient encore des métropolites résidants à Moscou, certains de ces auxiliaires de haut rang purent ainsi exercer leurs fonctions sur le territoire polono-lituanien33. L’étendue de leurs prérogatives apparaît dans la charte donnée en 1451 par le métropolite « moscovite » Iona à son vicaire, Mikhail, pour le diocèse métropolitain de Kiev34. Le document non seulement plaçait ce dernier à la tête du tribunal ecclésiastique, mais lui accordait également

« l’administration […] des affaires spirituelles », ainsi que le droit, au nom du métropolite, de consacrer les églises, de veiller à l’exactitude des célébrations liturgiques, d’examiner la qualité des candidats à la prêtrise ou au diaconat, et, enfin, le soin de gérer et de développer les propriétés de la métropolie. Surtout, l’autorité du vicaire était reconnue comme supérieure à celle de tout le clergé du diocèse métropolitain, y compris celle des archimandrites. Encore

31 Б. Н. Флоря, Я. Н. Щапов, « Епархиальное управление… », p. 239 ; A. Gil, Prawosławna eparchia Chełmska…, p. 135 -139 ; A. Mironowicz, Podlaskie ośrodki…, p. 70-71.

32 Б. Н. Флоря, Исследования по истории Церкви…, p. 102.

33 Voir Н. Ф. Каптерев, Светские архиерейские чиновники…, p. 108-114. Ces personnages étaient souvent issus des proches du hiérarque, comme en témoigne l’exemple de l’archimandrite Akakij, envoyé comme vicaire à Kiev, dans les années 1450, et désigné comme protosyncelle (dans le texte il est dit littéralement « avoir partagé la cellule du métropolite ») : RFA, t. 1, n° 57, p. 198.

34 RFA, t. 1, n° 44, p. 172-173. Jusqu’en 1458, les hiérarques qui résidaient à Moscou et continuaient à porter la titulature de métropolites « de Kiev et de toute la Russie », continuaient à exercer leur juridiction sur les diocèses orthodoxes polono-lituaniens. Le texte qui se présente sous la forme de formulaire a été interprété différemment par Boris Florja et par Mykhajlo Hruševs’kyj (voir М. С. Грушевський, Історія України-Руси, t. 5, L’viv, 1905, p. 475). Pour le premier, il s’agit d’une nomination pour le vicariat de Kiev, alors que le second affirme que l’archidiacre [протодиакон] Mikhail fut nommé à Vilnius. La lecture du texte montre en réalité que l’ecclésiastique obtenait le pouvoir d’intervenir dans l’ensemble de la métropolie : « à Kiev, à Vilnius, à Navahrudak, à Harodnja et dans toutes les villes et bourgades, et dans les villages, où se trouvent [les] églises métropolitaines […] ».

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au milieu du XVe siècle, le vicaire s’imposait donc comme le second personnage du diocèse, après les évêques ou le métropolite.

Bien que la rareté des sources rende difficile toute analyse chronologique précise, la documentation conservée suggère que le rapprochement entre les institutions de l’archiprêtre et du vicaire n’eut lieu qu’après la création durable d’une métropolie polono-lituanienne de Kiev en 1458. En effet, Andrzej Gil et Ihor Skočyljas constatent à travers les exemples locaux que ce n’est qu’à partir du XVIe siècle que le terme vicaire commence à apparaître de manière fréquente à côté du titre d’archiprêtre35. Les raisons supposées d’un tel changement sont faciles à saisir. Puisque le vicaire était un représentant direct du hiérarque, son choix exigeait à la fois qu’il pût s’acquitter efficacement de sa tâche et qu’en homme de confiance, il incarnât l’autorité de son mandant sur le territoire considéré. La constitution d’une nouvelle juridiction métropolitaine, réduite à l’espace polono-lituanien, favorisa donc la promotion du clergé local dans le gouvernement diocésain. Il faut toutefois prendre garde à ne pas renverser ce processus. Ce ne sont pas tant les archiprêtres qui reçurent, de droit, les attributions du vicariat mais des vicaires qui furent de plus en plus souvent recrutés parmi les archiprêtres. Le lien entre les deux dignités ne fut pas institutionnalisé et l’une ne se substitua jamais à l’autre.

Il convient d’ailleurs de se rappeler que du point de vue canonique l’un était un bénéfice alors que le second se présentait comme une charge révocable36. Ainsi, parmi les sept archiprêtres lituaniens, présents au synode de Vilnius de 1509, aucun n’était qualifié de « vicaire37 ». De même, dans l’acte rédigé à cette occasion, ils apparaissaient derrière les higoumènes, à la toute fin de la liste des clercs, signifiant que leur statut pouvait difficilement s’assimiler à celui des délégués directs du métropolite. Enfin, à plusieurs reprises des vicariats furent accordés à des moines voire à des laïcs. À la fin du XVe et au début du XVIe siècle, le vicaire installé à L’viv était souvent l’archimandrite du monastère local Saint-Georges38. De même, parmi la dizaine de délégués du métropolite à Kiev, attestés entre 1458 et la promulgation de l’Union de Brest, se retrouvaient des supérieurs de monastères, et parfois des nobles locaux, chargés de l’administration économique des biens ecclésiastiques39. Seulement trois d’entre

35 A. Gil, Prawosławna eparchia Chełmska..., p. 134 ; І. Скочиляс, Галицька (львівська) єпарія…, p. 464.

36 La preuve en est donnée par l’exemple déjà évoqué de l’archimandrite Akakij, nommé vicaire à Kiev, à la place de Davyd, sommé de rentrer à Moscou par le métropolite Iona : RFA, t. 1, n° 57, p. 198.

37 RIB, t. 4, p. 8.

38 І. Скочиляс, Галицька (львівська) єпарія…, p. 537-543.

39 Voir В. Рыбинский, Киевская митрополичья кафедра с половины XIII до конца XVI века, Kiev, Типография Г. Т. Корчак-Новицкаго, 1891, p. 38-52.

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eux, nommés dans la seconde moitié du XVIe siècle, portaient dans le même temps le titre d’archiprêtre40.

Les transformations dans le recrutement des vicaires n’étaient donc pas le fruit d’une réforme structurelle, mais davantage une réponse pratique au contexte. Devant l’étendue de leurs diocèses et la position délicate de l’Église ruthène face au pouvoir laïc catholique, les métropolites et les évêques eurent besoin d’hommes bien implantés dans les structures locales.

C’est pourquoi les archiprêtres – en particulier ceux des églises cathédrales – apparurent tout naturellement comme des candidats désignés41. Placés à la tête des associations cléricales orthodoxes des capitales épiscopales, ils étaient devenus des personnages influents grâce aux liens sociaux et pastoraux qu’ils entretenaient avec les élites locales. Leur nomination comme vicaires des hiérarques pouvait avoir également d’autres raisons : généralement mieux instruits que le reste du clergé et plus proches des instances représentatives du prince, ils avaient davantage de motivation à défendre la situation du clergé ruthène de la région, puisque leur propre bénéfice et leurs intérêts étaient en jeu. De même, il paraît plausible que les vicariats aient pris la succession des juridictions des décimateurs, dans les territoires périphériques de la métropolie kiévienne, où leur existence était attestée42. Néanmoins, ces évolutions furent accompagnées de concessions imposées aux hiérarques par les représentants du clergé local, qui était devenu désormais un acteur incontournable de l’administration diocésaine. Parmi elles, figurait l’aliénation fréquente au profit du клирос du droit de choisir le vicaire. En 1498, le clergé cathédral de Vilnius se plaignit à ce sujet au grand-prince Alexandre, pour revendiquer son bon droit face au métropolite de Kiev Makary. Il l’accusait ainsi de prélever des redevances inhabituelles, mais aussi d’avoir désigné comme vicaire l’archimandrite du monastère de la Sainte-Trinité alors que « sous les premiers métropolites, eux – les clercs cathédraux – étaient titulaires du vicariat [наместничьство]43 ». À travers

40 L’archiprêtre de la Dormition Jakob Gułkewicz (1556-1558), l’archiprêtre de Sainte-Sophie Atanazy Odonej (vers 1590) et un autre archiprêtre de Sainte-Sophie Ioan (vers 1594).

41 Parfois, dans les évêchés périphériques, des vicariats étaient attribués à des archiprêtres des bourgades qui n’étaient pas des sièges épiscopaux. Andrzej Gil mentionne ainsi le cas de Bus’k et de Szczebrzeszyn (A. Gil, Prawosławna eparchia Chełmska..., p. 134).

42 Un important dossier documentaire provient des sources issues du synode orthodoxe de Brest qui rassembla, en octobre 1596, les opposants à l’Union. Dans les actes rédigés et signés lors de cet événement, sont inscrits les noms des différents ecclésiastiques et laïcs, qui prirent part à la rencontre. À côté des vingt-et-un archiprêtres, y figurent cinq vicaires, originaires des diocèses ruthènes de L’viv et de Przemyśl. L’absence de toute autre titulature pour les vicariats, situés – à l’exception de Sambir – dans des villes secondaires du diocèse de L’viv, pourrait ainsi suggérer qu’ils possédaient des fonctions particulières, sans lien direct avec les archiprêtrés. Voir RIB, t. 19, p. 374-375 et Л. Тимошенко, « Берестейські церковні собори у жовтні 1596 р. : підготовка, склад учасників та провідники », Україна в Центрально-Східній Європі (з найдавніших часів до кінця XVIII ст.), 7 (2007), p. 141-166.

43 AZR, t. 1, n° 152, p. 174-175. En effet, sous le métropolite Makary (1495-1497), l’un des ses vicaires fut Antoni, l’un des membres du клирос et prêtre de l’église de la Résurrection : AS, t. 6, n° 4, p. 8. Ce document

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l’évocation des questions fiscales, le texte signalait d’ailleurs que le vicaire pouvait assumer également le rôle de percepteur pour les redevances dues par les clercs bénéficiers au métropolite44.

L’entrée des principaux dignitaires du clergé séculier dans les fonctions vicariales entraîna des transformations dans leur statut et les compétences qui leur étaient associées. Le vicariat se rapprocha ainsi incontestablement du clergé paroissial et acquit, à l’image des archiprêtrés, une inscription territoriale stable et mieux définie. Le qualificatif de vicaires

« diocésains » disparut ainsi au profit des vicaires désignés par le nom de la ville qui leur servait de siège. D’autre part, leur attribution essentielle devint l’exercice de la justice ecclésiastique in spiritualibus à l’intérieur de leurs circonscriptions respectives. Ils récupérèrent ainsi l’une des fonctions principales des anciens vicaires diocésains mais reprirent également le modèle des officiaux latins, apparus en Pologne au milieu du XIIIe

siècle45. Au XVIe siècle, les textes de l’administration royale, rédigées en latin, commencent en effet à traduire le terme de « vicaire » ruthène par officialis46. Cette influence s’observe également dans les titulatures utilisées, car les officiaux polonais-lituaniens étaient également appelés uicarii in spiritualibus, mêlant leurs fonctions à celles du vicaire général47. La transposition de la désignation latine apparaît ainsi, dans années 1580-1590, pour le cas de l’archiprêtre de Vilnius, Jan Parfenowicz, fréquemment mentionné comme « archiprêtre et vicaire du métropolite pour les affaires spirituelles à Vilnius [протопоп и намhстник от митрополита справ духовных виленских]48 ». Comme les officiaux de l’Église latine, les vicaires ruthènes exerçaient prioritairement une juridiction contentieuse pour les affaires qui impliquaient les clercs, les matières ecclésiastiques ou le territoire soumis à la juridiction directe du hiérarque49. Leur rôle est défini, en partie, dans la lettre du métropolite Hipacy

montre toutefois que la charge n’était pas réservée à l’archiprêtre et était souvent accordée à d’autres desservants de la ville.

44 Voir І. Скочиляс, « ‟Дар любові”, фіскальний обов’язок і єрархічна підлеглість: катедратик у системі фінансово-корпоративних відносин духовенства Київської митрополії XIIIXVIII століть », DKZ, 9 (2005), p. 431-460.

45 T. Nowicki, « Oficjał », EK, t. 14, p. 406-408.

46 Voir, l’exemple du vicaire de Kam’janec’-Podil’s’kyj dans AJuZR, P. 1, t. 10, n° 5, p. 12-13. En 1610-1611, le terme apparaît déjà en ruthène, sous sa forme translittérée (офицыял), pour le vicaire uniate de Kiev Antoni Grekowicz : Akty JuZR, t. 2, n° 36, p. 58-60 ; AJuZR, P. 1, t. 6, n° 156, p. 399-402.

47 Pour les attributions des différents officiers épiscopaux voir l’étude d’É. Fournier, L’origine du vicaire général et des autres membres de la curie diocésaine, Paris, Séminaire des Missions étrangères de Paris, 1940.

48 AS, t. 6, n° 39, p. 55 ; AZR, t. 4, n° 41, p. 59-61 ; AZR, t. 4, n° 116, p. 158.

49 Le fonctionnement du tribunal ecclésiastique de Vilnius apparaît ainsi dans RGIA, F. 823, inv. 3, n° 67, f. 4-5 ; AS, t. 6, n° 72, p. 158-160.

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Pociej, adressée au clergé de Sluck le 3 juin 1600, pour l’informer de la nomination de son vicaire50. Le métropolite écrivait ainsi :

[…] nous vous envoyons notre archiprêtre de Sluck, le père Atanazy Harasimowicz, prêtre de Saint-Sauveur et de Saint-Nicolas de Sluck, avec la mission de contrôler auprès de vous toutes les affaires et la discipline, à savoir les officiants du baptême, du mariage et de la confession, et les autres affaires spirituelles, et avec les pleins pouvoirs pour tout cela. Le recevant avec égard comme notre vicaire, […] laissez l’archiprêtre entrer dans l’église et contrôler la discipline ecclésiastique51.

Si la multiplication des vicariats permettait de fait un meilleur encadrement du territoire, elle s’accompagna également d’un rabaissement du statut des vicaires par leur rapprochement du clergé paroissial.

Les nouveaux principes de l’organisation diocésaine laissaient néanmoins en suspens les questions du temporel ecclésiastique et de l’administration des sacrements réservés à l’évêque, comme l’ordination sacerdotale. Celles-ci resurgirent avec une nouvelle acuité au moment des tentatives de réforme locale, commencées par le synode de Vilnius de 150952. Le diocèse métropolitain devint donc le lieu, où s’exprimèrent les premières initiatives destinées à renforcer l’autorité des hiérarques orthodoxes, à l’intérieur du clergé et sur leurs ouailles53. L’exemple des églises de Vilnius témoigne ainsi de la volonté du métropolite de Kiev de soustraire le contrôle des bénéfices ecclésiastiques aux mains des laïcs54. En 1511, les représentants orthodoxes de la municipalité demandaient en effet au hiérarque de leur

50 OR RNB, F. 678, n° 26, f. 9r. (publié dans AZR, t. 4, n° 153, p. 240-241). Il s’agissait en réalité de confirmer sa charge car Atanazy Harasimowicz avait déjà obtenu l’achiprêtré de Sluck du métropolite Rahoza dès 1598, mais n’avait pas pu exercer sa charge en raison de l’opposition du clergé local (AZR, t. 4, n° 133, p. 186-187). Voir également : R. Degiel, Protestanci i prawosławni : patronat wyznaniowy Radziwiłłów birzańskich nad Cerkwią prawosławną w księstwie słuckim w XVII w., Varsovie, Neriton, 2000, p. 35.

51 « посылае(м) до ва(с) протопопу нашего слу(ц)кого о(т)ца Афанасия Гарасимовича свещеника спа(с)кого нико(л)ского слу(ц)кого росказавшы ему межи вами пересмо(т)рыти вшеляки(х) справъ и пора(д)ковъ, то е(ст) служебнико(в) крещения ве(н)ча(н)я и исповеди и и(н)шых справа(х) духовны(х), давшы ему мо(ц) во все(м) то(м). Вы бы [.……..…] того протопопу слу(ц)кого яко наме(ст)ника нашого прымуючы его з у(ч)тиво(ст)ю до це(р)кви пусчали и пора(д)ковъ це(р)ковны(х) давшы ему пересмо(т)рывати ». Les registres du tribunal territorial de Harodnja, datés de 1540, montrent également que la juridiction de l’archiprêtre et vicaire local était alors compétente pour les affaires matrimoniales des fidèles de la ville : AVAK, t. 17, n° 196, p. 78.

52 М. В. Дмитриев, Между Римом и Царградом…, p. 89-90 ; Б. Н. Флоря, « Виленский собор », PE, t. 8, p. 479-480. Józef Sołtan commença par réaffirmer sa juridiction sur l’ensemble du territoire, en rétablissant la mention de l’ancien siège de Halyč dans la titulature métropolitaine. Voir І. Скочиляс, Галицька (львівська) єпарія…, p. 176. Auparavant, les métropolites ruthènes étaient désignés comme « métropolites de Kiev et de toute la Rus’ ».

53 En 1511, sur mandat du métropolite, l’évêque voisin de Chełm fut ainsi chargé d’effectuer une visite pastorale du territoire de Halyč. І. Скочиляс, Галицька (львівська) єпарія…, p. 176.

54 AS, t. 6, n° 4, p. 5-12.

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confirmer le droit – déjà ancien selon eux – de faire un inventaire des biens de l’église, à la mort du curé, pour les enregistrer dans les livres municipaux et les transmettre intacts au successeur. L’enquête menée par Józef Sołtan, en décembre de la même année, montra qu’en réalité les bourgeois de la ville n’avaient pas hésité à récupérer les clefs de certains lieux de culte, en attendant de les transmettre au nouveau prêtre55. Après avoir interrogé le clergé orthodoxe de Vilnius sur les pratiques qui avaient eu lieu sous ses prédécesseurs, le métropolite rappela explicitement dans sa réponse qu’il s’agissait d’un abus. Il consentit donc aux bourgeois le droit de lui envoyer ses candidats aux cures vacantes et d’être présents lors de la cérémonie d’installation des desservants, mais statua que l’investiture spirituelle et temporelle de ces derniers ne pouvait relever que de son vicaire seul56.

Le titulaire du vicariat, établi à Vilnius, recevait donc une délégation à la fois pour le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel des métropolites. De plus, il apparaissait dans le texte sous le nom de « vicaire métropolitain » [намhстник на митропольи], ce qui n’était pas sans rappeler les anciens vicaires diocésains. Comme l’observe Ihor Skočyljas pour le territoire L’viv, le XVIe fut une période transitoire pour le vicariat57. D’une part, cette institution médiévale était progressivement accaparée par les élites du clergé séculier, de l’autre, les métropolites – et, sans doute, une partie de l’épiscopat – réaffirmaient et élargissaient les prérogatives de certains vicariats les plus prestigieux afin d’exercer un contrôle plus étroit sur les pôles principaux de leurs diocèses respectifs. Ce processus s’observe parfaitement sur le territoire de l’ancien diocèse de Halyč. Après avoir été administré par des vicaires des différentes localités, investis par les métropolites de Kiev ou d’autres hiérarques voisins, l’ensemble fut placé, en 1522, sous la juridiction du « vicaire métropolitain » Joachim/Izaakiusz Gdaszycki, archimandrite du monastère Saint-Georges58. En 1526, le métropolite Józef (1522-1534) lui accorda le droit de prélever des revenus sur ses subordonnés et reconnut, par là, les attributions économiques, associées à sa charge59. Donc, dès le XVIe siècle, et malgré le droit de patronage laïc, les métropolites essayèrent de ramener l’administration des propriétés ecclésiastiques, du moins dans les grands centres urbains, sous la tutelle directe de leurs premiers auxiliaires locaux60.

55 Ibid., p. 7.

56 Ibid., p. 11.

57 І. Скочиляс, Галицька (львівська) єпарія…, p. 474.

58 Ibid., p. 177-178.

59 Ibid. Voir également AZR, t. 2, n° 141, p. 168-169. La lettre du métropolite précisait également les districts (Halyč, L’viv, Kam’janec’-Podil’s’kyj, Medžybiž, Snjatyn, Kolomyja et Žydačiv) qui rentraient dans la juridiction du vicaire.

60 Les détenteurs des principaux vicariats avaient parfois tendance à cumuler plusieurs fonctions. Ainsi, en 1596, le moine Joachim Morochowski apparaît avec la titulature de « vicaire et juge public de l’évêché de Volodymyr

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La distinction entre les deux types de vicariat ne s’imposa véritablement que dans la première moitié du XVIIe siècle 61 . L’événement symbolique qui incarna cette institutionnalisation fut la nomination de Józef Rutski au « vicariat principal » du métropolite [намhстництво наше преднейшое], le 21 juillet 160862. Le premier hiérarque de l’Église uniate disait lui accorder les « pleins pouvoirs, comme s’il portait sur soi la personne [du métropolite] », pour surveiller tous les désordres et punir les coupables « avec un esprit serein, à la manière qui lui semblerait la plus utile pour l’Église du Seigneur, et en particulier dans la ville de Vilnius, placée sous la protection du Seigneur […]63 ». De plus, le texte indiquait explicitement que la juridiction du nouveau dignitaire s’étendait à tout le clergé – régulier et séculier – de la « partie lituanienne » de la métropolie, depuis les archimandrites ou les archiprêtres jusqu’aux prêtres, moines et moniales des couvents. Dans les années suivantes des vicaires généraux sont mentionnés à Minsk ou à Kiev et il faut supposer qu’ils existèrent également dans les deux autres capitales métropolitaines, Navahrudak et Harodnja64. Les autres évêchés uniates suivirent de près cette tendance. En 1619, le moine Jan Dubowicz figure comme vicaire de l’archevêque de Polack, le basilien Melecjusz Kopysteński apparaît

et de Brest, archiprêtre de Kobryn’ [намhстникъ и судія посполитый Володимирской и Берестейской епископіи, протопопа Кобрынскій] » (AS, t. 6, n° 128, p. 306).

61 Ihor Skočylas estime cependant que dans les circonscriptions des vicaires généraux (appelés également

« officialités ») étaient déjà en place dans le diocèse orthodoxe de L’viv dès les années 1540. І. Скочиляс, Галицька (львівська) єпарія…, p. 547.

62 AZR, t. 4, n° 175, p. 262-263. Dans sa lettre aux magistrats de Vilnius, du 28 septembre 1608, le métropolite

62 AZR, t. 4, n° 175, p. 262-263. Dans sa lettre aux magistrats de Vilnius, du 28 septembre 1608, le métropolite

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