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PREMIÈRE SECTION : CONSTRUCTION DE L’OBJET DE L’ETUDE

A- Contexte et Justification de l’étude 1 État des lieux :

2- Enjeux de l’étude :

Les dynamiques de protection des réfugiés au sein des États d'accueil de l'espace sous-régional d'Afrique Centrale à l'exemple du Cameroun ont révélé des failles substantielles des dispositifs normatif - internes et internationales -, structurel ainsi qu'institutionnel dans la prise en charge des migrants forcés. L'écart du rapport de l'urgence de la situation de précarité et des conditions de vulnérabilité dans lesquelles 53Il s'agit en effet de la Convention de l'Union Africaine adoptée lors d'un sommet spécial tenu le 22 Octobre

2009 à Kampala en Ouganda ( d’où le nom de Convention de KAMPALA) relative à la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique et entrée en vigueur en 2012. La particularité de ce texte juridique novateur en matière de protection des migrants forcés est qu'il est le premier instrument contraignant au monde en matière de protection et d’aide aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays adopté à l’échelle de tout un continent, selon l'Union Africaine.Pour plus de détails

https://www.africa-eu-partnership.org/en/node/6833 , Consulté en ligne le 15 Décembre 2015

54L'expression est de Michel AGIER. Pour plus de détails, lire AGIER, Michel: Gérer les indésirables. Des

camps de réfugiés au gouvernement humanitaire, Éditions Flammarion, Paris, 2008

55BEDJAOUI, Mohamed Op.cit

56Il s'agit en premier lieu, des États-hôtes, mais également de l'instance internationale de protection des

réfugiés, le HCR

57Il est utile de préciser qu'en droit international humanitaire, les afflux importants de réfugiés font partie intégrante des préoccupations lorsque l'on parle de sécurité humaine.

vivent les réfugiés, et de la timidité des actions mobilisées par les États d'accueil et le HCR, invite dans le cas de l'Afrique Centrale, à rechercher des pistes de réflexion d'une nouvelle approche/reconfiguration du système de prise en charge des migrants forcés en vue d'améliorer les conditions de protection des réfugiés dans la sous-région. Cette démarche convoque une préoccupation binaire : Sur le plan théorique, le droit des réfugiés actuel s'est révélé en inadéquation avec les défis des migrations forcées contemporaines58 et ignore certaines spécificités du contexte africain. Une mise à jour de ce droit au plan international, régional ainsi que dans les législations nationales respectives est donc à envisager. Sur un plan pratique, bien que les États d'Afrique centrale soient engagés à promouvoir une communauté de destin par le biais des solidarités agissantes à partir d'organisations sous-régionales spécifiques intervenant sur le plan économique, politique, sécuritaire et culturel59, la gestion communautaire des réfugiés se heurte à l'indifférence des États de la sous-région60. La prégnance de l'absence d'un mécanisme concerté et durable et d'une prise en compte solidaire par ces États au moyen d'une instance sous-régionale en charge des migrations forcées interpelle la communauté étatique de cet espace géographique sur la voie d'un urgent consensus pour la gouvernance commune des susdites migrations qu'il est important d'examiner.

Au regard de ce qui précède, la présente étude s'inscrit centralement dans une approche systémique qui vise à analyser, d'une part, les mécanismes d'intervention des États d'accueil d'Afrique centrale à l'exemple du Cameroun, l'implication de l'instance de coopération sous-régionale en charge des questions de paix et sécurité, la Communauté Économique des États de l'Afrique Centrale - CEEAC-61 dans la gouvernance des 58MARGUENAUD, Jean-Pierre : “La Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés à l’épreuve du temps” , in : La protection internationale et européenne des réfugiés : Sous la

Direction d'Anne-Marie TOURNEPICHE, Pedone, Collection Droits Européens, 2014

59Voir sur ce point, les développements sur le rôle des organisations sous-régionales d'Afrique Centrale à

l'instar de la CEEAC et la CEMAC dans notre deuxième partie du travail.

60ABESSOLO NGUEMA, Jean Roger Op.cit

61Il convient de préciser que notre dévolu a été centralement engagé dans le choix de l'organisation intergouvernementale désignée CEEAC pour une raison digne d'intérêt : Initialement économique, la Communauté Économique des États d'Afrique Centrale – CEEAC - s'est vu assignée des responsabilités politiques, sécuritaires, et de diplomatie préventive à partir du «programme de relance et de

redynamisation» adopté en Juin 1999, et initié suite à l'instabilité liée aux troubles socio-politiques et conflits

armés dans la sous-région Afrique centrale. Dans ce programme qui marquait de surcroît une re- opérationnalisation des activités de l'organisation restée en inactivité pendant six années consécutives ( 1992-1998), une place prépondérante a été mis sur les questions de paix et de stabilité dans cet espace politico-territorial. C'est donc l'organisation supranationale qui, dans cet espace sous-régional, est au cœur des enjeux sécuritaires et qui peut mieux fédérer l'option de gestion commune des migrations forcées de ses États membres. Pour plus de détails, lire http://www.ceeac-eccas.org/index.php/pt/a-propos-de-la-ceeac , consulté en ligne, le 20 Février 2013.

migrations forcées en Afrique Centrale ; d'autre part, l'étude renseigne sur le mode opératoire du HCR62 et de ses partenaires divers et variés dans la prise en charge des réfugiés. Cette prospection institutionnelle et structurelle complète l'analyse du cadre juridique - mobilisée grâce à l'approche juridique - de protection des réfugiés, entendu ici lato sensu, à travers les normes du droit international général et conventionnel qui prennent en compte l'examen des instruments juridiques internationaux - dont la Convention de Genève de 1951 et le protocole de 1967 constituent les instruments juridiques de référence en droit international des réfugiés - , celles de l'Union africaine et de la CEEAC, ainsi que les dispositifs juridiques de protection des réfugiés de l' État du Cameroun, cité en référence. L'éclairage juridico-légal et institutionnel qui en découle nous permet de comprendre et de rendre compte de leurs stratégies habilitantes et inhibantes dans l’encadrement du droit d’asile en contexte camerounais, de mieux cerner les enjeux géopolitiques, sécuritaires, humanitaires, spatiaux et/ou territoriaux, afin de relever en toile de fond , les pistes de réflexion en faveur d' une mutualisation des efforts des États de la sous-région Afrique centrale pour faire face aux complexes défis de la protection des personnes «déracinées». Il s'agit donc plus succinctement dans la présente recherche, de centrer notre regard sur l'opérationnalité des moyens d’encadrement et de protection juridico-institutionnelle préventifs, efficaces, concertés et durables au profit des réfugiés dans l'espace géographique d'Afrique centrale. L'opportunité de définir l'objet de notre étude se trouve dans ce contexte , interpellée.

3- Objet de l’étude :

Notre recherche a pour principal objet, l’étude analytique et critique des dispositifs normatifs et institutionnels de protection des réfugiés des États d'Afrique Centrale. Cette démarche opérée à partir d'un contexte national - camerounais - nous permet d'une part, de mettre en perspective les failles du système de protection des réfugiés en Afrique centrale qui se déclinent aux ambiguïtés des dispositifs juridiques de protection, aux insuffisances dans la prise en charge des réfugiés par les acteurs humanitaires – notamment les États d'accueil, le HCR et leurs divers partenaires - et à l'absence d'un cadre concerté sous-régional de gestion des migrations forcées. L'étude nous permet d'autre part, de dégager les enjeux centraux et protéiformes qui sous-tendent la 62Nous tenons à rappeler que le HCR est l’organe statutaire investi dans la protection internationale des réfugiés.

complexité de la problématique de la gouvernance concertée des migrations forcées en Afrique Centrale, alimentée par l'indifférence, le souverainisme et l'égocentrisme de certains responsables politiques centre-africains63.

A cet égard, des pistes de corrections des sources de fragilité et des failles dans l'encadrement des personnes déplacées par force sont proposées. Elles ouvrent, en dehors des réformes attendues du droit international des réfugiés, une ébauche de réflexion sur l'urgence et la nécessité de création d'une instance sous-régionale concertée de gouvernance des migrations forcées en Afrique centrale.

Au delà de cette analyse, la question de protection des réfugiés en Afrique Centrale ne manque pas de susciter un vif intérêt transversal dans l'examen rapide de la gestion des politiques d'asile européennes, si tant est que les continents africain et européen sont liés, tant sur les plans géographique, historique que politique. Il est donc également question dans notre travail, de postuler pour une mutualisation d'approches afin d'établir des politiques migratoires cohérentes, harmonieuses, globales , qui placent l'humain au cœur du débat migratoire en anticipant sur des actions qui réduisent les migrations forcées d'une part, et en restituant au droit d'asile sa force juridique originelle.

Notre thèse vise à apporter par une approche intégrée et cohérente, une modeste contribution au renforcement institutionnel et structurel des instruments de protection des réfugiés au profit des États d'Afrique centrale, du HCR , des organisations investies dans la cause des «sans États» dans une perspective de gouvernance collective sous- régionale africaine des migrations forcées .

Une fois la place et l'opportunité de notre étude présentées et motivées, il convient à présent d'élucider les concepts clés de notre sujet de recherche. Ce préalable que nous empruntons à l'approche durkheimienne qui postule que «...la première démarche du sociologue doit donc être de définir les choses dont il traite , afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est question»64 , nous permet d'éviter tout malentendu dans le cadre de nos développements. Par la même occasion, nous présenterons, sans prétention à l'exhaustivité, la revue de la littérature sur la question de protection des réfugiés en général, et leur encadrement en contexte centre-africain en particulier – avec en exemple, le cadre de protection des réfugiés du Cameroun -. L'analyse de l'état des affaires nous

63CAMBREZY, Luc: Réfugiés et exilés, crise des Société, crise des territoires, Op.cit

permet de prolonger la réflexion sur les imperfections du système de prise en charge des réfugiés par les États d'accueil d'Afrique centrale, d'en interroger , à partir d'une grille de lecture systémique, les contraintes qui plombent une prise en charge efficace des réfugiés et des personnes déplacées, pour poser les jalons de la réflexion sur l'opportunité d'une approche concertée de gouvernance des migrations forcées dans la sous-région.