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L'émergence d'un dispositif juridique international consacrant la protection des droits des réfugiés : La Convention de Genève de

LE DROIT D’ASILE, UN DROIT AUX CONTENUS SOCIO HISTORIQUES ET JURIDIQUES PARTICULIERS

I – DROIT DES REFUGIES, UN CONSTRUIT POLITICO-JURIDIQUE ET HISTORIQUE

B) L'émergence d'un dispositif juridique international consacrant la protection des droits des réfugiés : La Convention de Genève de

Le premier conflit international qui se déroule dans la première moitié du XXe siècle(1914-1918), ainsi que d'autres événements survenus pendant la même période tel le génocide arménien (Avril 1915-Juillet 1916), la première bataille de l’Atlantique, la Révolution russe (1917 à 1923), la persécution des juifs dans les années 1930273, ont entraîné non seulement des déplacements massifs des populations, mais causé des millions de morts en bouleversant les espaces géographiques occupés par ces populations. La nécessité d’une intervention et d’une protection des populations civiles en temps de guerre, ainsi que l'institutionnalisation d'un cadre juridique de l'asile se sont révélées de plus en plus urgentes et prégnantes après les atrocités connues par les millions de personnes déplacées. C'est ce sursaut de conscience qui va engendrer une montée du droit international humanitaire avec en perspective des acquis juridiques non négligeables274.

Au lendemain de la deuxième guerre mondiale qui a entraîné elle aussi des conséquences particulièrement graves pour l'humanité, avec des millions de personnes cherchant refuge dans d'autres pays, notamment en Europe où des régions et des villes ont quasiment été ravagées275, des mesures notamment institutionnelles et juridiques ont été engagées en faveur de ces personnes contraintes de fuir la guerre. Au regard de ces éléments factuels, la première Assemblée Générale des Nations Unies consacra comme priorité dès 1946, le sort des réfugiés issus de cette guerre. Il est constant de relever que le droit des réfugiés part donc, in fine, de la claire et manifeste volonté de reconstruction de l’Europe après ces deux conflits mondiaux276. Cette volonté de prendre en compte le sort de cette catégorie de personnes s'est matérialisée par la création en 1947 de l'Organisation

272IVème Convention de Genève relative à la protection des civils en temps de guerre (1949).

273Association française de soutien à l'UNHCR : «UNHCR Historique », (Page consultée le 26 Août 2014), (En ligne), Adresse URL : http://www.action-refugies.org/faitschiffres/MissionUNHCR.htm

274Association française de soutien à l'UNHCR, ibid 275Nous avons en France, l'exemple de la Normandie

Internationale pour les Réfugiés (OIR). L'institution ainsi crée avait pour objectif principal d'accueillir les réfugiés provenant du Bloc de l'Est en leur accordant une protection juridique et physique277. Toutefois, l'OIR fut incapable de prendre en charge les millions de déplacés sur le continent européen au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. Son échec conduira à la création, en 1951, du Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés (HCR)278 dont l’objectif principal se décline au contrôle de l'application d'un instrument juridique à vocation universelle de protection des réfugiés279, et à l'édification d'un référent institutionnel du droit international d’asile. Cette Convention qui entrera en vigueur le 22 Avril 1954, marque un tournant majeur dans la consécration du statut juridique du réfugié, car elle définit les procédures d'admission ainsi que leur champ de protection. Fort de ces paramètres, l'article 1 alinéa 2 de la Convention de 1951 définit le réfugié comme :

« Toute personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette

crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays »280.

Complétée plus tard par d'autres instruments internationaux à l'instar du protocole de 1967 dont la vocation s'inscrit dans l'élargissement des effets de la Convention de Genève, notamment le cadre spatio-temporel de la définition du réfugié, le nouveau cadre juridique de protection des «sans États» pose un véritable droit du réfugié qui sera réglementé dans plusieurs domaines. Toutefois, même si sur le plan international, la DUDH de 1948 l'énonce dans ses articles 13 et 14281, c'est bien la Convention de Genève sur les réfugiés qui est l'instrument juridique de référence en matière de droit 277L'Agence des Nations-Unies pour les Réfugiés : Statut du HCR de 1950, (Page consultée le 14 octobre 2014), (En ligne), Adresse URL : http://www.unhcr.fr/cgi-bin/texis/vtx/basics/opendoc.pdf? tbl=BASICS&id=41a3052f4

278Le HCR est en effet de nos jours, incontournable en matière de protection des réfugiés, autant par son intervention dans la procédure de reconnaissance que dans la mission de protection pour ces derniers.Pour plus de détails, lire THIBAULT COUTURE, Joanie : « Haut-Commissariat pour les réfugiés », Perspective monde ( Outil pédagogique des grandes tendances mondiales), École de politique appliquée de la faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Université de Sherbrooke, Québec, Canada ( Page consultée le 20 Octobre 2014),(En ligne), Adresse URL: http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMDictionnaire? iddictionnaire=1415

279Il s'agit bien entendu de la Convention du 28 Juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ou Convention de Genève)

280Article 1 Alinéa 2 Convention du 28 Juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ou Convention de Genève) , Op cit.

281Article 13 et 14 de la DUDH : « Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de

international d'asile. A ce titre, le Comité Exécutif – COMEX - fait observer que « ...la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967 restent la pierre angulaire du régime international des réfugiés »282

Dans le cadre de la mise en œuvre de la protection des réfugiés, une étape administrative préalable importante est mobilisée : la procédure conduisant à la reconnaissance du statut du réfugié appelée détermination du statut du réfugié (DSR). Régie par la Convention de 1951, elle fait intervenir les États d'accueil, et inéluctablement, le HCR dans sa responsabilité statutaire d'organe onusien de protection des réfugiés. Pendant cette étape que nous aurons l'occasion de développer plus loin, la personne en déplacement forcé ayant franchi les frontières de son pays d'origine pour chercher protection dans un pays autre que le sien ( demandeur d'asile) bénéficie du principe protecteur de non-refoulement283 qui lui confère une présomption au statut de réfugié(réfugié de facto284). En cas d'admission définitive au statut de réfugié, le demandeur d'asile, réfugié de facto, devient un réfugié statutaire ou réfugié de jure et bénéficie des avantages dû à son nouveau statut tels que prévus par la Convention de Genève de 1951 ainsi que des textes additionnels en vigueur réglementant la protection internationale des réfugiés.

Par ailleurs, il est important de préciser que si la Convention de Genève en 1951 apportait une définition internationale du réfugié en y proclamant le principe de non-refoulement et l'immunité juridictionnelle des réfugiés285, elle était plus consacrée à la situation qui prévalait à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. L'instrument de reconnaissance et de protection des réfugiés de 1951 répondait surtout à des besoins humanitaires urgents avec les millions de personnes persécutées. Il apportait en l'occurrence une réponse de protection aux besoins des réfugiés européens déplacés par la guerre , ce qui faisait de ce

282Conclusion N° 81(k), du Comité Exécutif du HCR – COMEX- , 1997 cité par le HCR, in Protection

des réfugiés : Guide sur le droit international relatif aux réfugiés, 2001. Rappelons par ailleurs que le Comité Exécutif (COMEX) du HCR conseille le Haut Commissaire dans l'exercice de ses fonctions. Ses Conclusions annuelles s'inscrivent dans le cadre du régime international de protection des réfugiés. Elles sont fondées sur les principes énoncés dans la Convention de 1951, et sont élaborées et adoptées par consensus en réponse à des problèmes de protection particuliers. Les Conclusions du Comité exécutif sont le fruit d'un accord entre plus de 50 pays qui portent un intérêt manifeste à la protection des réfugiés et ont une grande expérience en la matière. Il est fréquent que ces pays et d'autres fassent référence aux Conclu- sions du COMEX lorsqu'ils élaborent leurs propres lois et politiques.

283Le principe de non-refoulement est consacré à l'Article 33(1) de la Convention de Genève de 1951

relative au statut des réfugiés.

284LASSAILLY-JACOB, Véronique, citée par TRATNJEK, Bénédicte : « France : un droit d’asile à géographie variable » , Les cafés géographiques, Février 2012, Op.cit

dernier un texte européo-centré qui limitait géographiquement son application à l'Europe286.

La Convention de 1951, nous venons de le découvrir, est un point d'ancrage essentiel du droit international relatif aux réfugiés. Consacré à l’article 33(1) de la susdite Convention, le principe de non refoulement, qui interdit de renvoyer de quelque manière que ce soit , des réfugiés vers des pays ou des territoires où leur vie ou leur liberté serait menacée en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur

appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques, constitue ainsi

la pierre angulaire de la protection internationale . Les seules exceptions autorisées à ce principe sont définies à l’article 33(2) de la Convention, et ne peuvent s’appliquer que si le réfugié représente un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou si un réfugié ayant été condamné pour un crime particulièrement grave qui constituerait une menace pour la communauté de ce pays. L’article 33 s’applique aussi au demandeur d’asile se trouvant à la frontière ou dans le pays d’asile jusqu’à ce que leur statut ait été déterminé comme nous l'avons relevé précédemment.

Élaborée pour répondre aux problèmes de réfugiés qui se posaient dans l’Europe de l’après-guerre comme rappelé plus haut, la Convention de Genève s'est très vite révélée lacunaire pour deux principales raisons :

– La première tient de ce que la définition du réfugié est restée fondée sur les causes

historiques de l'adoption d'un statut du réfugié. En d'autres termes, n'était concerné jusqu'ici comme réfugié que les personnes qui avaient fui leurs pays d’origine à la suite d’événements survenus avant 1951.

– A côté de ceci, les États devenant parties à la Convention pouvaient en limiter

l’application aux réfugiés en Europe.

L'adjonction d'un protocole additionnel en 1967 s'est donc posée comme une urgente nécessité pour permettre la reconnaissance universelle de l’applicabilité de la Convention de 1951 aux mouvements contemporains des réfugiés. Il convient de préciser ici que le protocole adopté dans ce contexte recèle la particularité d'un instrument normatif indépendant qui vient non seulement élargir l'approche définitionnelle du concept de «Réfugié» tel que prescrit dans la Convention au regard de nouvelles catégories

de migrants forcés observés par la suite, mais permet également aux États d'adhérer à la Convention de 1951 sans pour autant devenir parties à cette dernière287. En effet, les États parties au protocole acceptent d’appliquer les dispositions de la Convention aux réfugiés couverts par la définition de 1951, sans tenir compte des limitations temporelles et géographiques. En devenant parties à la Convention et/ou au protocole, les États peuvent expressément mentionner qu’ils n’appliqueront pas ou appliqueront sous certaines réserves quelques-uns des articles de la Convention. Cependant, ces réserves ne peuvent pas s’étendre aux principales dispositions, notamment l’article 1 (la définition du réfugié), l’article 2 (la non-discrimination quant à la race, la religion et le pays d’origine), l’article 33 (le non refoulement).288 En Août 2008, précisons que 144 États (sur les 192 États Membres de l'ONU d'alors) avaient ratifié la Convention de Genève ou le Protocole de 1967 (soit les deux à la fois)289. Concernant la place de ces instruments juridiques internationaux290 qui consacrent le droit des réfugiés , il convient de noter qu’ils ont, selon la pratique du droit international, une force supérieure aux lois nationales.

La responsabilité de protection internationale des personnes contraintes de fuir leur pays d’origine ou de résidence incombe, statutairement, reprécisons le, au HCR. Mais le droit d'asile à travers les droits reconnus aux réfugiés trouvent également leur fondement dans divers instruments juridiques régionaux et nationaux.

C) Les Conventions et traités à caractère régional d'application en contexte africain