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Partie III : Définition d’une stratégie de régularisation foncière

1. Hiérarchisation des procédures et des situations

1.4. Les enjeux

Dans cette sous partie, nous allons étudier les enjeux et leur importance dans les différentes situations (parcellisation du domaine public, la non-parcellisation du domaine privé et l’occupation illégale du domaine public). Pour ce faire, nous allons définir les enjeux en quatre catégories : les enjeux financiers, fonciers, juridiques et sécuritaires.

Les enjeux financiers découlent de la procédure de régularisation et de l’éventuel manque à gagner pour le Département face à ces situations. Lorsque la procédure est mise en place, le Département peut recevoir ou donner de l’argent à une tierce personne en guise d’indemnité.

Le domaine public routier n’est pas parcellisé, puisqu’il est exonéré d’impôt foncier. La parcellisation du domaine routier ou la situation inverse constitue des incohérences foncières qui ont des impacts plus ou moins importants sur les pouvoirs publics et sur les particuliers. Cela constitue les enjeux fonciers.

Les enjeux juridiques se basent sur la probabilité d’action judiciaire contre le Département en cas de responsabilité avérée et des risques encourus par la collectivité. Les enjeux juridiques sont proportionnels à la sévérité des sanctions encourues.

Les enjeux sécuritaires sont les enjeux les plus importants. Ces enjeux découlent des possibles occupations illégales du domaine routier. Ces occupations peuvent réduire la sécurité de la voie (présence d’eau, manque de visibilité,…) et augmenter le risque d’accident. Cet enjeu est le plus important et doit être réglé en priorité.

Après avoir défini les différents enjeux, nous allons les mettre en relation avec les différentes situations irrégulières présentes sur le domaine routier.

1.4.1. La parcellisation du domaine public.

La parcellisation du domaine public routier départemental est fortement présente dans le Département de l’Oise. Les enjeux de ces incohérences foncières sont divers et variés.

L’enjeu financier de cette situation n’est pas très important. En effet, le Département n’a pas de manque à gagner face à ces situations. Les parcelles présentent sous l’emprise sont du domaine public de fait et n’ont pas d’impact sur la voirie ni sur l’entretien du domaine. Toutefois, le Département peut verser des indemnités en cas d’acquisition du bien (soit par prescription acquisitives soit par voie amiable). Le Département n’aura donc pas dépense à réaliser en cas d’absence de régularisation.

De cet aspect financier découle l’aspect foncier. Il est principalement généré par les incohérences cadastrales. Le domaine public routier ne doit pas être cadastré, puisqu’il est exonéré d’impôt foncier. Ces incohérences sont sources de confusions et l’emprise du domaine public routier n’est pas clairement établie. Même si ces incohérences foncières doivent être régularisées, elles ne constituent pas d’enjeux majeurs pour le domaine foncier.

En ce qui concerne les enjeux juridiques, nous devons d’abord rappeler que dans la majorité des cas, ces situations sont de la responsabilité de l’administration. Elle peut donc être mise en cause. De plus, la jurisprudence ne reconnaît pas l’expropriation indirecte (Ass. Plén., du 6 juin 1994, Bull 2004, Ass. Plén., n°1, pourvoi n°89-17.049), c’est-à-dire que seul un accord amiable ou l’ordonnance d’expropriation permet le transfert de propriété. Le Département peut donc être condamné au paiement de l’indemnisation de l’occupation. Cependant, ces actions juridiques sont rares en raison du type de propriétaires présents sous l’emprise de la voie.

Le dernier enjeu à considérer est la sécurité. Dans cette situation, la sécurité est très peu affectée. En effet, malgré la présence de parcelles appartenant à des personnes qui ne sont pas des gestionnaires de la voie, ces terrains font partie du domaine public et sont traités comme tels par les services départementaux. Ainsi, ces situations n’ont aucun effet sur la sécurité des usagers.

Pour résumer, ces situations n’ont pas d’enjeu majeur pour le Département. En cas de régularisation, la collectivité devra indemniser les propriétaires pour la valeur du bien et pour le temps de possession son titre sauf si l’acquisition a déjà eu lieu (prix payé ou consigné). Ainsi, le Département n’a pas d’intérêt à régulariser cette situation.

1.4.2. La non-parcellisation de zones ne correspondant pas aux critères du

domaine public.

La non-parcellisation de zone ne répondant pas aux critères du domaine public fait partie des incohérences foncières à régulariser. Nous allons analyser l’impact de ces incohérences sur le Département au travers du prisme des enjeux.

Dans un premier temps, nous allons examiner les enjeux financiers liés à la régularisation de ces situations. Ces enjeux sont plutôt positifs, puisque la régularisation nécessite soit la mise à disposition, soit la cession des biens qui dans les deux cas permettra une rentrée d’argent pour le Département. Toutefois, le transfert du domaine public vers le domaine privé des biens concernés fera naitre l’imposition foncière (faible), avec la parcellisation des biens. Ce constat est à nuancer puisque ces mêmes biens sont destinés à la vente ou à la location. L’enjeu financier de cette situation est positif. Le Département a donc des intérêts à réaliser le processus de régularisation d’un point de vue financier.

Nous allons maintenant nous intéresser à l’aspect foncier de ces situations. C’est sur ce domaine que ces situations ont l’impact le plus négatif. En effet, le domaine public routier n’est pas parcellisé, car il est exonéré des impôts fonciers. Ainsi, pour la plupart des personnes, les zones n’étant pas cadastrées font partie du domaine public. Or cette affirmation est erronée et entraine des confusions entre les différents propriétaires. De plus, les zones concernées appartiennent au Département qui n’en a pas l’utilité et gèrent donc des biens inutiles. Dans le but de mieux gérer son patrimoine, le Département doit se séparer de ses biens. L’enjeu foncier est donc présent, mais il ne constitue pas un enjeu majeur dans l’élaboration de la stratégie.

Les deux autres aspects ne constituent pas d’enjeu majeur pour le Département. L’impact juridique est moindre puisqu’il ne peut être tenu pour responsable de l’absence de parcellisation. Ainsi, il ne paie pas d’impôts sur ces biens, mais sa responsabilité n’est pas engagée.

Les enjeux sécuritaires sont plus présents, mais ils restent faibles. En effet, ces terrains ne font pas partie du domaine public et ne sont donc pas mis à l’usage direct du public. Cependant, si ces terrains ne sont pas entretenus par les services du Département et entrainent une réduction de visibilité, le Département peut être tenu pour responsable en cas d’accident.

Ces situations ont impact sur le domaine financier, surtout en cas de régularisation. De plus, elles ont un impact néfaste sur le domaine foncier en créant des confusions.

1.4.3. L’occupation illégale du domaine public routier

L’occupation sans titre du patrimoine routier est une activité illégale qui peut être punie par une contravention de cinquième ordre. Le gestionnaire de ce domaine peut demander des comptes aux occupants illégaux. En effet, ces occupations illégales peuvent entrainer de graves dysfonctionnements du réseau routier et altérer la sécurité des usagers. Nous allons maintenant décrire les différents enjeux liés à ces situations.

Incohérences foncières à régulariser : le cas du patrimoine routier départemental de l’Oise

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Le premier enjeu à étudier est l’enjeu financier lié à ces situations. Cet enjeu est très peu impacté par l’occupation illégale du domaine public. Le Département, qui a son domaine public exonéré d’impôt, est victime de cet empiètement, mais cette occupation n’entraine pas de préjudice financier. De plus, si le domaine public est dégradé, le Département peut mettre en demeure l’occupant afin de réhabiliter le domaine routier à ces frais.

Le deuxième enjeu étudié est l’enjeu foncier. Cet enjeu n’est pas touché par la situation ni par sa régularisation. En effet, lors de son occupation, le domaine public routier concerné n’est pas remis en question. Il reste du domaine public et, de ce fait, n’est pas parcellisé. Dans le cas où la collectivité veut céder le bien occupé, elle réalise un déclassement et transfert l’immeuble dans son domaine privé avant de le céder. Cette procédure modifie donc le domaine public routier mais ne crée pas d’incohérences foncières, puisque le domaine routier n’est pas parcellisé et l’immeuble transféré dans le domaine privé le devient.

Nous allons maintenant étudier, les enjeux juridiques émanant de ces situations et de ces régularisations. Il nous semble judicieux de rappeler que le gestionnaire peut voir sa responsabilité engagée en cas d’accident de la route sur une départementale, a fortiori si l’accident est dû au mauvaise état de la route. Or, lors de l’occupation illégale du domaine public, les dépendances (fossés, talus, signalisations,…) peuvent être dégradées et altérer la sécurité des usagers. Le Département risque donc une condamnation et voir sa responsabilité engagée, si une personne se blesse (ou décède) en raison de l’état de la chaussé. Cette responsabilité vaut également, lorsque l’état de la route est dégradé par une occupation sans titre, puisque c’est au gestionnaire et à la police de conservation de faire respecter la législation et le domaine public routier du Département.

Le dernier enjeu étudié est l’enjeu sécuritaire. Comme nous l’avons vu dans le dernier paragraphe, l’occupation sans titre du domaine routier peut dégrader les voies et altérer la sécurité des usagers. Ces altérations résident, en général, dans la dégradation des dépendances du domaine routier. En effet, les dépendances peuvent être dégradées, notamment avec le passage d’engins agricoles qui au fil des années détruisent les talus et bouche les fossés. Or ces éléments sont indispensables à la sécurité de la route, en l’absence de ces éléments, la sureté du domaine public n’est pas optimale, puisque les eaux lors des précipitations ne sont pas évacuées. Si les fossés et les talus ne remplissent plus leurs fonctions, l’eau peut s’accumuler sur la chaussée et le risque d’aquaplaning augmente.

L’occupation sans titre du domaine public peut aussi réduire la visibilité des usagers. Dans le cas où un exploitant cultive du domaine public, il peut arriver que ses cultures (maïs, tournesol,…) soit d’une hauteur importante et gênent la visibilité des usagers, notamment dans les virages. De plus, ces végétations importantes peuvent aussi réduire la visibilité des panneaux de signalisation, qui sont important pour établir des priorités entre les usagers ou prévenir d’un danger. Par conséquent, ce manque de visibilité peut diminuer la sécurité des usagers.

L’enjeu sécuritaire prend dans cette situation une place très importante, puisque celle-ci augmente le risque d’accident et l’intégrité physique des usagers de la route est mise en jeu.

Dans cette situation, nous avons vu que les enjeux financiers et fonciers n’étaient pas importants, au contraire des enjeux juridique et sécuritaire qui ont un réel impact. Ces situations constituent un danger pour le Département et pour les usagers. La collectivité doit donc être extrêmement vigilante à ces situations qui peuvent compromettre la sécurité du public.

Situations Enjeux

Financier Foncier Juridique Sécuritaire Total Parcellisation du domaine public - - + -- -- Non parcellisation du domaine privé + + - - / Occupation illégale du domaine public - - + ++ +

Figure 14 : Tableau récapitulatif de l’évaluation des situations en fonction des enjeux

++ Enjeu à fort intérêt + Enjeu intéressante - Enjeu à faible intérêt -- Enjeu à très faible intérêt

Dans cette sous-partie, nous avons étudié les différents enjeux de chaque situation afin d’élaborer au mieux une stratégie de régularisation. Pour ce faire, nous allons, dans la prochaine sous- partie, croiser les critères de chaque procédure avec les enjeux liés aux situations. Cette étape va nous permettre de définir les procédures à régulariser en priorité et celles à ne réaliser qu’en cas de nécessité.