• Aucun résultat trouvé

En savoir plus :

Dans le document La démarche MAB: la voie de l'optimisme (Page 107-110)

• www.noeconservation.org À vos guides de détermination pour savoir quel est ce papillon !

©

D

EPUIS l’adoption de la Convention sur la diversité biologique, il est apparu néces-saire d’avoir recours à des outils de suivi de la biodiversité. En 2010, en effet, chaque État signataire va devoir prouver ses avancées dans le domaine de la conservation de la biodiversité et en particulier dans la diminution de son érosion. Du fait de leur ancrage à la fois scientifi que et politique mais aussi de la distance qu’ils instau-rent avec la notion de « mesure » (voir l’encadré ci-dessous), les indicateurs de biodiversité sont rapidement apparus comme les outils les plus appropriés. De multiples organisations – agences nationales et internationales, associations envi-ronnementales, groupements professionnels... – se sont ainsi lancées dans leur développement.

U

NLARGECHOIX POSSIBLE

Les indicateurs d’interactions, qui doivent permettre de relier entre elles des dynamiques écologiques, sociales et économiques, ont, dans ce cadre, pris une importance singulière. En effet, comme le souligne l’Agenda 21 – le car-net de route international devant permettre de faire émerger un développement durable –, « les méthodes d’évaluation des interactions entre les divers paramètres de l’environnement, de la démographie, de la société et du développement ne sont pas suffi samment développées et appli-quées ».

Pendant longtemps, les organisations en char-ge de la mise en place d’indicateurs d’interac-tions se sont concentrées sur le développement des indicateurs d’ « état de la biodiversité » et de « pressions anthropiques ». Un indicateur de pression simple, par exemple, est le niveau de fragmentation d’un habitat. L’évolution de ce der-nier peut avoir un impact sur un indicateur d’état comme la richesse spécifi que.

Aux indicateurs de pression et d’état se sont ajoutés les indicateurs de réponse, formant ainsi ce que l’on appelle souvent le cadre Pression-État-Réponse (PER). Ces indicateurs de réponses correspondent aux actions humaines qui permet-tent de compenser les effets néfastes des pressions anthropiques. Ainsi, la taille des espaces protégés

représente l’un de ces indicateurs. Il est d’ailleurs très commun dans le domaine de la conservation de la biodiversité.

Les indicateurs PER ont inspiré les cadres d’évaluation de la plupart des organisations en charge de la mise en place d’indicateurs d’in-teractions, comme le Programme des Nations Unies pour l’environnement, l’Agence euro-péenne de l’environnement ou la Commission du développement durable. D’autres catégories d’indicateurs d’interactions permettent d’appré-hender de manière intégrée les pressions que les activités humaines font peser sur la biodiversité. C’est le cas de l’empreinte écologique, qui permet d’évaluer le nombre d’hectare d’« espaces natu-rels » consommés en partant de la consommation fi nale d’un individu, d’une ville ou d’un pays.

Depuis quelques années, ces indicateurs de pressions ont été complétés par de nouvelles catégories d’indicateurs qui permettent de souli-gner les interdépendances entre les dynamiques économiques, écologiques et sociales. Pour trai-ter la question de la conservation de la biodiversité, de plus en plus de praticiens et de scientifi -ques en appellent en effet à la mise en place d’une co-gestion adaptative (voir l’article de F. Bioret et R. Mathevet p. 74). Cette forme de gestion est fondée sur l’idée que, dans un contexte de

gran-Évaluer les interactions par des indicateurs

PAR HAROLD LEVREL

Un mot compliqué pour une défi nition simple Présenté à partir de tableaux comptables ou statisti-ques, l’indicateur est souvent perçu comme un outil très technique réservé aux experts. Pourtant, tout individu en utilise dans ses activités quotidiennes pour guider ses choix et ses actions. L’heure du réveil indique si l’on doit se lever, les nuages donnent une information sur la météo, les feux de circulation régulent les véhicules dans un réseau routier com-plexe, etc. Chaque signal permet de faire des choix et de se coordonner dans un environnement complexe. L’indicateur est donc un outil aidant à l’interprétation de dynamiques complexes, qu’il serait trop « coûteux » en ressources humaines, en techniques, en temps, etc. de vouloir mesurer directement. En tant que « résumé d’information », il admet des espaces d’incertitude que la mesure, elle, ne tolère pas.

de complexité et d’incertitude, il est nécessaire d’adopter une approche locale et modeste, basée sur la collaboration et l’apprentissage. Dans ces conditions, il n’est plus question de chercher à atteindre un « état » désirable de la biodiversité – diffi cile à exprimer socialement – et de con-trôler les « pressions » mais de mieux décrire et comprendre les co-évolutions des systèmes éco-logiques, sociaux et économiques pour permettre une gestion intégrée des dynamiques en jeu.

Parmi ces nouveaux indicateurs d’interactions, ceux du Millennium Ecosystem Assessment (MEA) ont bénéfi cié d’un grand succès. Ils ont en effet pour particularité de prendre en compte les services, souvent non monétarisables, que la bio-diversité offre à l’homme. Regroupés en quatre catégories, ces services permettent de souligner les interdépendances entre l’état de la biodiver-sité et les niveaux de bien-être. D’où leur utilité pédagogique. La première catégorie regroupe les services de régulation. Il s’agit par exemple des

fonctions de purifi cation de l’eau ou de contrôle des espèces envahissantes par la biodiversité. La seconde rassemble les services d’approvision-nement. On y trouve la nourriture diversifi ée, le bois de construction. Les services de support correspondent, quant à eux, à la production primaire et aux grands cycles biogéochimiques. Enfi n, les services culturels renvoient aux valeurs spirituelles – cas des forêts sacrées – et aux acti-vités récréatives comme la pêche, la chasse, l’ob-servation des oiseaux. Les indicateurs du MEA permettent par ailleurs de mieux appréhender les interdépendances entre les dynamiques situées à des échelles différentes. En particulier celles ayant cours localement de celles s’étendant sur la totalité du globe.

L’intérêt majeur de ces indicateurs est de met-tre l’accent sur l’importance des choix de société à débattre et à réaliser concernant l’ensemble de ces services vitaux. A titre d’exemple, soulignons qu’au cours des cinquante dernières années, la

Certains indicateurs permettent de souligner les interdépendances entre les dynamiques économiques, sociales et écologiques.

Ceux du Millenium Ecosystem Assessment prennent en compte les services que la biodiversité offre à l’homme. Par exemple, le rôle de l’abeille dans la pollinisation des plantes cultivées.

révolution agricole a participé à l’accroissement des services d’approvisionnement et qu’elle a permis de faire face à l’explosion démographi-que. Mais, cela a été au détriment des services de régulation et des services culturels. Aujourd’hui, la demande sociale des pays de l’OCDE s’est inversée. Elle réclame plus de respect pour ces deux catégories de services. Ce nouveau choix de société nécessite une réorientation des politiques agricoles.

Les indicateurs du MEA conduisent à s’inter-roger sur les

représenta-tions sociales des services offerts par la biodiversité. La notion de bien-être est, en effet, largement subjec-tive et relasubjec-tive à des

systè-mes symboliques particuliers. C’est pourquoi la manière dont la nature contribue à ces niveaux de bien-être nécessite une meilleure prise en compte des représentations individuelles.

La co-construction des outils d’évaluation des interactions société-nature offre à cet égard une piste intéressante (voir l’article de M. Étienne p. 98). En invitant un collectif d’acteurs locaux

et de scientifi ques à réfl échir, elle offre l’oppor-tunité de désenclaver les savoirs scientifi ques et profanes tout en produisant des indicateurs sur les dynamiques qui animent la biodiversité à un faible coût. D’autre part, avec ses vertus pédago-giques elle permet d’approfondir la démocratie en facilitant l’appropriation des questions socia-les liées au développement durable par socia-les popu-lations locales.

La co-construction des indicateurs d’interac-tions devient dès lors le pendant technique de

la co-gestion adaptative des interdépendances entre les systèmes socio-économi-ques et naturels. Les pro-cessus de co-construction ont pour intérêt de faire converger les discussions sur les problématiques clés du système société-nature, sur les services écosystémiques auxquelles renvoient ces problé-matiques et sur les dynamiques d’usages auxquels elles se rattachent. Des processus qui permettent l’émergence d’indicateurs ayant le plus de « sens » auprès des acteurs locaux et dont l’évolution sera suivi avec un intérêt certain.

©

Lisa Gar

nier

Les services culturels de la biodiversité renvoient à leurs valeurs spirituelles et récréatives. Pourtant la notion de bien-être est largement subjective. Les représentations individuelles ne doivent donc pas être sous-estimées.

Tout l’intérêt des indicateurs

Dans le document La démarche MAB: la voie de l'optimisme (Page 107-110)