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L’EMT et l’EndoMT (ou EndMT) sont deux processus par lesquels des cellules de lignées non-mésenchymateuses, en l’occurrence des cellules épithéliales ou endothéliales, changent de phénotype pour acquérir des caractéristiques mésenchymateuses. Ces mécanismes jouent un rôle au cours du développement, de la régénération tissulaire, ainsi que lors de la fibrose et du cancer.

i. EMT

L’EMT et le processus opposé, la MET (Mesenchymal-to-Epithelial Transition) sont cruciaux au cours du développement, notamment lors de la gastrulation. À l’âge adulte, ce mécanisme est en particulier impliqué dans la réponse physiologique aux blessures, en assurant l’apport de nouveaux myofibroblastes lors de la formation du tissu de granulation. De la même façon, l’EMT amplifie la réponse pro-fibrosante en conditions pathologiques.

Au cours de l’EMT, les cellules perdent leurs marqueurs épithéliaux (Figure 16). La E-cadhérine est considérée comme le principal marqueur de cette première étape, étant en partie responsable du maintien de l’adhérence des cellules au tissu et entre elles (Whiteman et coll., 2008, Huang et coll., 2012). L’augmentation de l’expression de la vimentine participe à l’inhibition de la E-cadhérine (Mendez et coll., 2010). La cellule perd alors l’adhérence au tissu par dégradation de la lame basale et gagne des caractéristiques mésenchymateuses : motilité, perte de la polarité du cytosquelette, expression de FSP-1 (Fibroblast-Specific Protein-1), α-SMA et collagène I (Kalluri et Weinberg, 2009, Lin et coll., 2011).

De nombreux facteurs de croissance et cytokines, tels que FGF-2, EGF, TGF-β et IL-1β peuvent induire l’EMT au cours de la régénération physiologique et de la fibrose (Stone et coll., 2016). En particulier, TGF-β est un puissant inducteur de l’EMT, via des voies de signalisation dépendantes ou non de Smad (Stone et coll., 2016). TGF-β est en effet un inhibiteur des marqueurs épithéliaux (E-cadhérine, occludine…) et un activateur des marqueurs mésenchymateux (N-(E-cadhérine, vimentine…) (Vincent et coll., 2009).

60 Figure 16 : marqueurs spécifiques de la transition épithélium-mésenchyme (D'après Kalluri et Weinberg, 2009) (Kalluri et

Weinberg, 2009)

ii. EndoMT

L’EndoMT a été décrite comme participant à l’angiogenèse (Welch-Reardon et coll., 2014) et au développement du cœur lors de l’embryogénèse (Kovacic et coll., 2012). À l’identique de l’EMT, ce processus est également impliqué dans l’apport de fibroblastes et myofibroblastes au cours de la régénération tissulaire et de la fibrose (Lin et coll., 2012).

Au cours de l’EndoMT, sous l’influence de signaux spécifiques, tels que TGF-β2, les cellules endothéliales opèrent une réorganisation de leur cytosquelette associée à la perte de molécules d’adhésion telles que la VE-cadhérine (Vascular Endothelial-cadhérine). Ce mécanisme permet la perte d’adhérence des cellules endothéliales aux cellules voisines (Crosby et coll., 2005). La perte de l’expression d’autres marqueurs endothéliaux, facteur von Willebrand et CD31, et l’expression de nouvelles protéines (α-SMA, Smooth Muscle 22α, vimentine et N-cadhérine) sont les caractéristiques principales des cellules en transition (Goumans et coll., 2008). Les cellules acquièrent ensuite un phénotype migratoire et sécrétoire (MEC : collagènes et fibronectine) spécifiques des myofibroblastes (Good et coll., 2015).

Les facteurs de croissance de la famille β sont des inducteurs de l’EndoMT : β1, TGF-β2, BMP2 (Bone Morphogenic Protein 2), BMP4, BMP6, BMP9 et BMP10 (Medici, 2016). L’activation de l’EndoMT par TGF-β dépend de voies de signalisation Smad-dépendantes et indépendantes (Medici et coll., 2011). D’autres voies sont impliquées dans l’induction de ce mécanisme, en particulier les voies Wnt/β-caténine (Aisagbonhi et coll., 2011) et Notch (Gasperini et coll., 2012).

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4. Les acteurs moléculaires de la fibrose

a. TGF-β1

TGF-β1 fait partie de la superfamille TGF-β de facteurs de croissance pléiotropies, comprenant les BMP, les TGF-β et l’activine. Ces cytokines sont impliquées dans de nombreux processus, dont le contrôle de la prolifération, la différenciation et la mort cellulaire. Elles interviennent également dans la régulation de l’inflammation. Enfin, elles ont un rôle majeur dans la régénération tissulaire et la fibrose. Chez les mammifères, trois isoformes (TGF-β1, TGF-β2 et TGF-β3) ont été identifiées. Ces isoformes se lient au récepteur TβR2 (ou TGFβR2 : Tumor Growth Factor-β Receptor 2) qui recrute en conséquence TβR1 pour activer la voie de signalisation correspondante (Xu et coll., 2012). TGF-β est synthétisé sous forme de précurseur, lié à la LAP (Latency Associated Peptide) qui facilite la liaison à la Latent β Binding Protein (LTBP) (Robertson et coll., 2015). Sous cette forme de complexe TGF-β/LAP/LTBP, appelé LLC (Large Latent Complex) TGF-β est inactif et ne peut pas se lier à ses récepteurs. Ce complexe est retrouvé en quantité importante associé à la MEC. LTBP est capable de se lier à différentes protéines de la MEC, telles que la fibronectine, la vitronectine et la fibrilline (Annes et coll., 2003). Le complexe peut être clivé au niveau de LAP et/ou LTBP par de nombreuses protéases dont la plasmine, les MMP2 et 9, la thrombospondine, certaines intégrines et les espèces réactives de l’oxygène (Annes et coll., 2003). Le clivage de ce complexe permet la libération de TGF-β sous sa forme active. La liaison de TGF-β à ses récepteurs induit l’activation des protéines de la voie Smad, comprenant des facteurs de transcription agissant sur la production de MEC et l’activation des myofibroblastes. L’activation des récepteurs aux TGF-β induit également l’activation d’autres voies de signalisation, telles que la voie MAP kinase (Mitogen-Activated Protein kinases) et de PI3K/Akt/mTOR (Phosphatidylinositol-4,5-bisphosphate 3-kinase-Protein kinase B- mammalian Target Of Rapamycin) (Derynck et Zhang, 2003).

Le TGF-β1 est l’acteur moléculaire central dans le développement de la fibrose. Il intervient dans la régulation de la croissance cellulaire et de l’apoptose, possède des propriétés immunomodulatrices et est responsable de la production de MEC. Le TGF-β1 exerce un pouvoir antiprolifératif sur de nombreux types cellulaires dont les cellules épithéliales et endothéliales. A l’inverse, les fibroblastes mis en présence de TGF-β1 présentent une activité proliférative accrue (Martin et coll., 2000). Il supprime la prolifération des cellules B et T, la cytotoxicité des Natural Killer, la production d’immunoglobuline par les lymphocytes B (Letterio et Bottinger, 1998) et la production de NO par les macrophages (Vodovotz et coll., 1993). Il peut induire l’apoptose de cellules en cultures, dont les hépatocytes (Oberhammer et coll., 1992) et kératinocytes (Benassi et coll., 1997). Il stimule également la production de collagène par les fibroblastes (Stallmach et coll., 1992) et cellules

62 musculaires lisses de l’intestin (Graham et coll., 1990). TGF-β1 favorise la sécrétion de molécules d’adhésion, par exemple ICAM-1 (Brannigan et coll., 2002), et de facteurs pro-fibrosants, tels que VEGF (Beddy et coll., 2004) et PDGF (Kumagai et coll., 2001). Enfin, il intervient dans la différenciation classique des myofibroblastes, ainsi que dans les processus de transdifférenciation de cellules épithéliales (EMT : Epithelial-to-Mesenchymal Transistion) (Lee et Joo, 1999) et endothéliales (EndoMT : Endothelial-to-Mesenchymal Transition) (Rieder et coll., 2011).

Dans l’intestin de rats irradiés, l’expression et l’immunoréactivité de TGF-β1 sont augmentées moins de 24h après irradiation. L’augmentation est d’autant plus importante que la dose reçue est élevée (Hauer-Jensen et coll., 1998).

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